Texte intégral
ERSIN LEIBOWITCH
Un mot dabord sur la prise dotages dhier au Cameroun, il y a beaucoup dexpatriés dans lEducation nationale, avez-vous adressé des consignes particulières, des consignes de sécurité à ceux qui sont en poste dans cette région ?
VINCENT PEILLON
Il ne mappartient pas de le faire, mais il faut aujourdhui faire très attention, on le voit, et donc je recommande aux expatriés de lEducation nationale, mais à lensemble de ceux qui sont là on voit ce qui arrive à cette famille, on en est tous affectés et inquiets la plus grande prudence.
ERSIN LEIBOWITCH
Est-ce que vous pensez, Vincent PEILLON, que lintervention française au Mali a fait de notre pays une cible pour les djihadistes, les terroristes islamistes ?
VINCENT PEILLON
Il y a longtemps que la France parce quelle défend un certain nombre de valeurs, elle a été présente en Afghanistan, elle a dit un certain nombre de choses dans différents conflits elle ne se laisse pas impressionner par le terrorisme, est souvent désignée par certains, mais je ne crois pas que ce que nous avons fait au Mali qui est dailleurs couvert par lordre international et qui est à lhonneur des valeurs qui sont les nôtres, qui était demandé par les Maliens, peuple qui veut disposer de lui-même et pas être sous la férule de gens qui sont à la fois des terroristes et des gens dune extrême violence, on la vu, à légard des populations, non, je crois quil faut continuer.
ERSIN LEIBOWITCH
Enlever des Français est devenu un sport national pour les djihadistes, cest ce que disait tout à lheure, sur FRANCE INFO, le député UMP Alain MARSAUD, vous le pensez aussi, est-ce que ce danger a été accentué ces dernières semaines ?
VINCENT PEILLON
Il y a des dangers pour les ressortissants français, cest clair, et donc cest pour ça quon donne depuis déjà longtemps des consignes de prudence, il ny a quand même pas que des Français dans ces affaires dotages, vous le savez, en Somalie ou ailleurs, mais il faut aujourdhui faire extrêmement attention, parce quil y a, dune part, ce qui est de lordre de la revendication, et puis, il y a dautre part, tout simplement, un trafic sur les personnes, qui est un trafic financier. On la vu dans un certain nombre dendroits.
ERSIN LEIBOWITCH
Vincent PEILLON, on en vient maintenant à la réforme des rythmes scolaires, le passage à la semaine de quatre jours et demi. Aujourdhui, les animateurs des centres de loisirs à Paris sont en grève, après les protestations des instituteurs, aussi des parents délèves, pourquoi cette contestation très forte, selon vous ?
VINCENT PEILLON
Vous savez, cest la mauvaise pente dans laquelle la France sest engagée depuis quelques années qui explique parce que les gens ne le savent peut-être pas que les résultats de nos élèves sont très mauvais, et de plus en plus mauvais. Et puis, dans une certaine indifférence. Et on a encore empiré les choses ces dernières années, 80.000 suppressions de postes, plus de formation pour les enseignants, la semaine de quatre jours, unique au monde, ça na que quatre ans ! Et ça, ça pèse très fortement sur nos élèves et nos enfants. Alors, il faut faire un effort, il faut se reprendre, il y a un effort qui est leffort national, créer 60.000 postes, remettre en place une formation des enseignants, un service public du numérique, changer notre système de formation, aller chercher nos décrocheurs, cest ce que nous faisons, nous
ERSIN LEIBOWITCH
Quand vous dites : se reprendre, cest remettre les écoliers au travail en quelque sorte ?
VINCENT PEILLON
Mais leur donner ce quon a eu nous-mêmes ! Du temps pour apprendre. Aucun dentre nous, les adultes daujourdhui, na eu des professeurs pas formés ou seulement huit demi-journées, aucun autre enfant du monde, et on est en train de faire ça à nos enfants. Donc on leur fait dabord du mal, et ça se voit dans les enquêtes internationales, notre niveau régresse, nous accroissons les inégalités sur notre territoire, et nous ne préparons pas lavenir de notre pays. Donc oui, il faut un effort. Alors, cette réforme, parmi toutes les réformes qui ont conduit la refondation, cest un aspect les rythmes scolaires, mais là encore, cest celui qui mobilise le plus, pourquoi, parce que cest un endroit où on demande un effort à chacun, cest difficile, ça change les habitudes des parents, cest difficile pour les professeurs, il faut revenir le mercredi matin, cest difficile
ERSIN LEIBOWITCH
On na plus lhabitude de faire des efforts
VINCENT PEILLON
Pour les élèves, cest ça le but de cette réforme et de mon action. LEducation nationale doit faire réussir les élèves. Mon problème nest pas celui des ministres, des collectivités locales, des jentends tout, mais tous, nous devons nous rassembler, collectivités locales, professeurs, animateurs, parents, autour de lintérêt des élèves. Et là, personne ne le conteste dailleurs, il faut bien revenir aux quatre jours et demi.
ERSIN LEIBOWITCH
Alors, est-ce quil faut expliquer davantage ce que vous venez nous dire là pour justement calmer un peu cette contestation ou passer en force, quoi quil arrive ?
VINCENT PEILLON
Jamais passer en force, nous expliquons et nous nous concertons depuis des mois, contrairement à ce que jentends. Vous savez que lAcadémie de médecine sest prononcée. Le gouvernement précédent avait fait une consultation de plusieurs mois sur les rythmes scolaires qui était arrivée à lunanimité, gauche/droite confondues, maintenant, on voit bien linstrumentalisation politique. Et nous avons repris nous-mêmes la concertation pendant plusieurs mois. Je nai écrit quune lettre aux enseignants depuis que je suis ministre, cest pour leur dire : entrez dans cette concertation sur cette réforme. Et maintenant, la concertation, qui a été dabord nationale pendant plusieurs mois, et cest comme ça que nous avons rédigé ce décret, elle arrive sur le terrain, laissons-lui du temps, et puis, ceux qui ne peuvent pas passer en 2013, que le maximum passe en 2013, cest lintérêt des enfants, ils passeront en 2014
ERSIN LEIBOWITCH
Vous avez une idée de la proportion de ceux qui vont y arriver à passer en 2013 ?
VINCENT PEILLON
Moi, je veux quon respecte les rythmes pour les enfants, donc aussi pour les adultes, ça fait simplement quinze jours que la concertation commence, tout le monde dit : on manquait de concertation, eh bien, ça y est, on y est ! Et on a plusieurs mois pour la mener. Donc il y a en ce moment partout en France, et dailleurs, cest déjà une vertu de cette réforme, on parle de lécole, on parle des enfants, on parle de leur intérêt dans chaque ville, dans chaque village, et ça doit se poursuivre jusquà fin mars.
ERSIN LEIBOWITCH
Vous parliez dinstrumentalisation politique de la part de la droite, on sent quand même des hésitations dans certaines grandes mairies socialistes, à Lyon, ce sera en 2014, et pas en 2013, hésitation à Lille, hésitation à Paris aussi, où la contestation est très virulente.
VINCENT PEILLON
Il ny a aucune hésitation, cest sur 2013 ou 2014, Gérard COLLOMB a bien dit quil pensait que cette réforme était essentielle, et dailleurs, vous savez, son adjoint à lEducation était celui qui a entraîné les autres maires pour la semaine des quatre jours et demi, Yves FOURNEL. Donc il ny a pas de contradiction
ERSIN LEIBOWITCH
Mais si cest essentiel, pourquoi ne pas le faire le plus vite possible dans ce cas ?
VINCENT PEILLON
Parce quil dit : pour bien le faire et cest aussi mon souci il nous faut quelques mois de plus. Et moi, je préfère et cest lintérêt des élèves quon le fasse bien. On verra ce que fait Martine AUBRY, il y en a qui passent en 2013, parce quils savent construire déjà ce quil y a de meilleur pour nos enfants. Dautres disent : il nous faut un peu plus de temps. Mais il y a une certitude, puisque vous me demandez cest quen 2014, tous les enfants de France sont aux quatre jours et demi. Donc il faut se calmer, il faut trouver de la sérénité, il ne faut pas vouloir en faire un objet de polémique, parce que cest encore sur le dos des enfants. Il faut faire le mieux possible, si on le peut en 2013, sinon, en 2014.
ERSIN LEIBOWITCH
Encore un mot, Vincent PEILLON, quatre jours et demi avec en contrepartie des journées qui sont censées être moins longues pour les enfants, le seront-elles vraiment, on évoque parfois une pause déjeuner rallongée, dans ce cas-là, ça veut dire que les enfants passeront le même nombre dheures à lécole.
VINCENT PEILLON
Mais la question nest pas de passer plus ou moins dheures à lécole, cest du temps scolaire, il y aura cinq heures et demie et quart de cours au lieu de six heures, cest trois quarts dheure de moins. Et vous savez, pour apprendre des mathématiques, du français, de la grammaire, la cinquième heure et demie, elle nest pas bonne. Or, quand vous revenez le mercredi matin, à 10h du matin, cest mieux quà 16h15, après cinq heures de cours. Donc moi, je redonne trois heures de cerveau disponibles, non pas pour COCA-COLA, mais pour apprendre aux écoliers de France, le reste, si vous vous reposez, vous allez au coin lecture, vous allez au centre aéré, ça nest pas la même chose, vous voyez où on en est, à confondre un temps qui est un temps dactivité, avec un temps scolaire. Cette réforme, portée par lEducation nationale, elle vise à faire que nos enfants réussissent mieux à quoi ? Lire, écrire, compter, puisque 25% dentre eux ny arrivent pas aujourdhui, quand ils sont au collège, 40 dans les zones denseignement sensibles déducation prioritaire. Et donc quand même, voilà lessentiel, et nous, de ce point de vue-là, nous distinguons très nettement entre les deux temps, et puis, la volonté, cest de faire aussi que tous les enfants de France, parce que ce nest pas le cas aujourdhui, les inégalités vont de 1 à 10 dans les collectivités locales sur les activités périscolaires, que tous les enfants puissent avoir accès, en dehors du temps scolaire, à de nouvelles activités. Et cest ça qui bloque aussi, parce quil faut les créer, les inventer
source : Service d'information du Gouvernement, le 22 février 2013