Interview de Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du gouvernement à Canal Plus le 29 mars 2013, sur l'image de François Hollande et la crise économique.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : Canal Plus

Texte intégral


NATHALIE IANNETTA
Elle est porte-parole d’un gouvernement dont on n’a pas entendu parler hier soir, pas un mot du président de la République, qui lui a tenté de recadrer son action entre boîte à outils et choc de simplification, quel service après-vente va être assuré ce matin ? On en parle avec vous Najat VALLAUD-BELKACEM bonjour.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Bonjour.
APOLLINE DE MALHERBE
Alors on imagine vous attendiez l’émission d’hier soir avec une certaine anxiété comme tout le monde ! Et c’était plutôt réussi, non ? Vous avez le sentiment qu’il était combattif ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Avec une forme d’impatience plutôt que d’anxiété. Ecoutez, oui, moi, il faut se souvenir quels objectifs on avait fixé à cette émission ? D’abord il s’agissait de rassurer les Français sur une chose simple : oui, il est possible de se dépêtrer de cette crise qui n’en finit plus.
APOLLINE DE MALHERBE
Et ça, vous avez le sentiment que c’est mission accomplie ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ca je crois que c’est mission accomplie, et en plus on les a rassurés non seulement sur le fait qu’on savait comment se dépêtrer de cette crise, notamment en soutenant les entreprises. Et on y reviendra, parce que je pense que c’est le gros message d’hier soir. Mais en plus, en ne demandant pas plus d’efforts que nécessaire aux Français, dont on sait que le pouvoir d’achat de plus en plus affecté. Et puis surtout, deuxième chose, se dépêtrer de la crise pour quoi faire ? Pour des perspectives que le président de la République a tracé hier, et donc il y a aussi l’après, ce qu’il a appelé le dépassement…
APOLLINE DE MALHERBE
Il demande du temps ? Il demande beaucoup de temps ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Deux ans, deux ans. Mais vous savez la crise dure depuis 2008 et il me semble qu’on a rarement pris autant de mesures et de réformes que ces 10 derniers mois.
APOLLINE DE MALHERBE
Alors on va rentrer dans les détails. On ne va pas rester dans le commentaire. Mais d’abord, vraiment, il y a un certain nombre de précisions qui manquent et qu’il va falloir apporter, notamment par exemple, choc de simplification. Si on comprend bien, il va falloir enlever de la paperasse, grosso modo, moins d’emmerdes comme certains l’ont dit ces derniers temps. Mais le président…
NATHALIE IANNETTA
Jean-François COPE en l’occurrence.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais le président a aussi, en l’occurrence, POMPIDOU en l’occurrence, mais répéter par d’autres. Finalement, ce mot est assez juste ! Moins d’emmerdes, moins de paperasses. Mais il a aussi dit, moins de normes et moins de contrôle. Si elles existaient ces normes et ces contrôles, c’est sans doute qu’il y avait une raison. On vient de vivre par exemple, le scandale de la viande, est-ce que moins de contrôle, ce n’est pas aussi plus de SPANGHERO par exemple ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Bien sûr, c’est pour cela qu’il faudra évidemment comme toutes choses, mesures gardées, et il ne s’agit pas de faire disparaître tous les contrôles et tous les principes de précaution. J’entendais votre intervenant précédent, il faudra en revanche mettre fin, à ces démarches administratives tatillonnent, complexes qui font que les délais par exemple de construction dans le bâtiment sont beaucoup plus longues qu’ils ne pourraient l’être. Ce qui est préjudiciable d’ailleurs aussi bien aux entreprises elles-mêmes qu’aux collectivités locales, qui à bien des égards voudraient mener leur projet plus rapidement. Des démarches administratives et des formalités qui pèsent autant sur les entreprises que sur les associations. Savez-vous ce que c’est que d’être une association et de demander par exemple des financements publics, de vouloir mener à bien des projets…
APOLLINE DE MALHERBE
C’est un parcours du combattant.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
C’est un parcours du combattant. C’est tout cela que le président de la République a annoncé vouloir réduire.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous parlez justement, des collectivités territoriales, ça, c’est une des autres questions qui a été posée à François HOLLANDE hier, sauf qu’on a l’impression quand même, que là, ce n’est pas vraiment simplification, parce qu’on a déjà les régions, les départements, les communautés de communes, les communes, et maintenant, on va rajouter les métropoles ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Non, je crois qu’il y a un malentendu sur ce sujet. Prenez par exemple ce qui se passe dans l’agglomération lyonnaise. C’est formidable ! Nous sommes en train…
APOLLINE DE MALHERBE
Chez vous !
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Chez moi ! Nous sommes en train de fusionner en réalité deux collectivités, le Grand Lyon donc la communauté urbaine de Lyon et puis le département du Rhône. Donc les deux…
APOLLINE DE MALHERBE
Donc les départements vont disparaitre ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Donc deux collectivités ne vont plus devenir qu’une, ne vont plus devenir qu’une, avec la mutualisation des moyens, la rationalisation des moyens qui va avec, donc des économies pour les contribuables, mais plus d’efficacité dans les services publics qui leur sont offerts. Et je crois que c’est la voie de l’avenir, il se teste un peu partout en France, comme ça, des nouvelles méthodes qui auront vocation à être généralisées.
APOLLINE DE MALHERBE
Une autre précision, sur les 75 %, finalement on comprend que ce sera les entreprises qui devront payer. Alors ça veut dire d’abord, que finalement, ceux qui gagnent 1 million, eux, ils sont tranquilles, ils ne paient pas d’impôts supplémentaires ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ils sont tranquilles, oui et non. En fait, si vous voulez la vertu de cette nouvelle mouture…
APOLLINE DE MALHERBE
C’est leur boîte qui paie quoi !
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, mais la vertu de cette nouvelle mouture du 75 %, c’est qu’elle va impacter les comportements de l’entreprise. L’entreprise…
NATHALIE IANNETTA
C’est que le chef d’entreprise va proposer 999 999 euros à son salarié ?
APOLLINE DE MALHERBE
C’est un hypocrite.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
S’il veut contourner la règle, il fera cela. Mais en tout état de cause, le signal qui est envoyé me semble important. Ce n’est pas qu’une question de signal, mais le signal est important. A période exceptionnelle, contribution exceptionnelle, en particulier des revenus exceptionnels. Deuxièmement, est-ce que les rémunérations extravagantes ne sont pas indécentes en ce moment, dans la crise que nous traversons ? Et si certains continuent à considérer qu’elles sont dues et légitimes, est-ce qu’on ne peut pas décemment pour le coup, demander une taxation sur ces rémunérations.
APOLLINE DE MALHERBE
Ceux qui gagnent un million par exemple, voilà, les artistes, les sportifs, eux, ce n’est pas des salariés à proprement parlé ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Si, a bien des égards, les sportifs sont des salariés.
APOLLINE DE MALHERBE
Et les acteurs ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Les modalités seront évidemment fixées, moi, je n’ai pas tous les arbitrages en main, mais en tout cas, le principe a été rappelé hier, et je crois que ce qu’on a vu hier soir, c’est que le président a quand même de la suite dans les idées. Puisqu’il voulait…
NATHALIE IANNETTA
C’est une manière de ne pas perdre la face, Najat VALLAUD-BELKACEM, soyons sincères ?
APOLLINE DE MALHERBE
On garde le chiffre, mais enfin globalement, ça n’a plus rien à voir ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Je ne crois vraiment pas, que ce qui obsède le président, ce soit de perdre ou ne pas perdre la face. Je crois que ce qui l’obsède, c’est la justice, la justice sociale, l’équité fiscale en l’occurrence…
APOLLINE DE MALHERBE
Justement, ceux qui gagnent un million, ils gagneront un million.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
A partir du moment où on a demandé des efforts à tous…
APOLLINE DE MALHERBE
Ils ne reverseront pas ! C’est leurs entreprises qui paieront, mais eux, ils gagneront toujours cet argent-là ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Mais leurs entreprises payeront, on est bien d’accord. Donc par définition, on aura bien d’abord ces recettes que nous attendions pour le budget de l’Etat qui seront utiles…
APOLLINE DE MALHERBE
Vous dites qu’il a un cap, qu’il a gardé ça. Il l’a gardé seul, vous n’êtes pas quand même vexée, il n’a pas parlé de vous, il n’a parlé d’aucun des ministres et il n’a même pas cité Jean-Marc AYRAULT ! Pas un mot !
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ecoutez, vous savez, c’est le président de la République, qui était hier soir par les Français. Je vous rappelle que même constitutionnellement parlant, c’est le président de la République qui fixe les orientations de la politique gouvernementale.
NATHALIE IANNETTA
Mais bien sûr ! Mais quand même ! Il n’a rien dit, la seule, le seul qu’il ait cité, c’est Jérôme CAHUZAC pour dire, en gros, il avait bien fait de partir et surtout pour le reste, vous êtes tous prévenus, le prochain qui bouge et qui moufte, c’est dehors ! C’est comme ça ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, mais j’ai trouvé ça très bien. Si vous me demandez mon avis personnel, j’ai trouvé ça formidable. Je trouve qu’il s’est dégagé du président de la République hier soir, une forme d’autorité tranquille, mais je crois vraiment que c’est ce que les Français attendaient, c’est ce dont les Français avaient besoin. Et c’est pour ça que j’ai employé le mot « rassurer. » Je crois que les Français ont été rassurés à la fois sur le fait que le cap était là, qu’il n’avait pas bougé ce cap, c’est toujours la même trajectoire, que le président est totalement déterminé à lutter contre le chômage en particulier, qu’il est à la tête d’une équipe et une équipe ça se maîtrise.
APOLLINE DE MALHERBE
C’est le capitaine, voilà, autorité tranquille.
NATHALIE IANNETTA
Ça c’était la porte-parole du gouvernement. Vous êtes aussi ministre du Droit des femmes, alors c’est normal, pas normal, spécial femmes.
APOLLINE DE MALHERBE
Spécial dédicace.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 2 avril 2013