Interview de M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances, à "RTL" le 17 mai 2013, sur le bilan de l'action gouvernementale depuis un an, sur la mobilisation du gouvernement pour l'emploi.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

JEAN-MICHEL APHATIE
On a entendu un ton volontaire hier, mais en écoutant bien le président de la République on cherche quand même l’élément qui inversera la courbe du chômage. Les emplois d’avenir, on se dit c’est quand même un peu court pour casser la hausse du chômage qui dure depuis 24 mois en France.
PIERRE MOSCOVICI
Ecoutez ! D’abord il y a tout ce que nous avons mis en place depuis 1 an, c’est les fondations qui ont été posées et c’est faire en sorte que l’investissement puisse être le pilier de la reconstruction économique, de la compétitivité, d’une économie qui soit plus réactive, plus créative, plus innovante. Quand nous avons créé une Banque publique d’investissement, c’est pour aider les petites et moyennes entreprises ; quand nous avons mis en place le crédit d’impôt compétitivité emploi qui fonctionne, c’est pour faire en sorte qu’elles puissent embaucher, qu’elles puissent investir, qu’elles puissent aussi reconstituer leur trésorerie ; quand nous avons fait en sorte d’orienter mieux l’épargne vers l’investissement, de donner 20 milliards d’euros pour les collectivités locales pour leur financement à long terme, de mettre en place un financement de 20 milliards d’euros pour le numérique, c’est l’économie qu’on conforte. Et puis il y a l’emploi, les emplois d’avenir en effet, le contrat de génération qui permet de garder un senior dans l’entreprise en contrepartie de l’embauche d’un plus jeune, ces emplois aidés…
JEAN-MICHEL APHATIE
Ça démarre très doucement ça.
PIERRE MOSCOVICI
Non, ça démarre… maintenant ça monte en puissance. Et le président de la République a dit qu’hier qu’en plus, cela serait étendu au secteur privé. Au fond qu’est-ce qu’il a dit hier ? Mobilisation, offensive, mouvement. Et je le redis ici après lui, que si en effet tous ces instruments économiques sont mobilisés et portés à plein, et si toute la politique de l’emploi est mobilisée, oui ! L’inversion du chômage à la fin 2013 est possible et elle se fera. C’est cette construction-là…
JEAN-MICHEL APHATIE
La production…
PIERRE MOSCOVICI
Cette musculation de l’appareil productif et des politiques de l’emploi à laquelle le président de la République nous a appelés hier et a appelé les Français, avec aussi un plan stratégique d’investissement que le Premier ministre présentera dans le mois de juin.
JEAN-MICHEL APHATIE
La production automobile en France a chuté de 30 % au 1er trimestre, la production automobile, on se dit que face à cette bérézina, le discours présidentiel n’est peut-être pas à la hauteur.
PIERRE MOSCOVICI
Jean-Michel APHATIE, j’en sais quelque chose, je suis l’élu moi de la région automobile…
JEAN-MICHEL APHATIE
Bien sûr.
PIERRE MOSCOVICI
Par excellence…
JEAN-MICHEL APHATIE
On parle peut-être d’un 2ème plan social chez PEUGEOT CITROEN…
PIERRE MOSCOVICI
C’est évidemment une industrie que nous suivons de très près, que je suis très près comme ministre de l’Economie et des Finances, avec des entretiens réguliers avec Philippe VARIN, mais on en reparlera le moment venu. Moi j’ai confiance en l’industrie automobile française, je pense qu’il y a une place pour elle, je sais aussi qu’il y a une stratégie à redéfinir. Mais vous savez, ne parlons pas comme si nous étions un isolat, comme si la France n’était pas dans un environnement… oui le président de la République l’a dit hier, nous sommes en récession, moins que d’autres, pas plus que l’Allemagne, c’est la zone euro toute entière qui est aujourd’hui touchée. Et c’est la raison pour laquelle, le président de la République a voulu prendre cette initiative européenne, initiative européenne qui est en vérité tout sauf classique, parce que c’est vrai qu’il y a des éléments qui sont déjà exploitables…
JEAN-MICHEL APHATIE
Ça a déjà été dit tout ça.
PIERRE MOSCOVICI
Mais écoutez ! Regardez ce qui a été fait en Europe depuis 1 an, il y a un an on nous disait « la zone euro n’existera plus dans un an », nous avons sauvé la zone euro, nous avons stabilisé la zone euro. Nous avons mis en place ce qu’on appelle « l’union bancaire » qui doit permettre, in fine, que la diffusion des taux d’intérêt bas se fasse vers les petites et moyennes entreprises, ça n’est pas le cas encore aujourd’hui. Et puis nous avons réussi à faire en sorte que la croissance redevienne au coeur des politiques européennes avec ce délai obtenu, qui n’est pas pour nous un relâchement mais qui est une souplesse, une marge de manoeuvre pour faire en sorte de soutenir la croissance française. A nous de nous saisir de tout ça, de faire aussi que les instruments européens, la Banque européenne d’investissement – nous en avons parlé mardi lors du Conseil des ministres de l’Economie et des Finances – puisse sur le terrain relayer les choses. Donc mobilisation européenne aussi, parce que c’est de l’Europe, de notre environnement proche que viendra aussi cette croissance. Moi je pense qu’elle reviendra dans le courant du 2ème semestre 2013, déjà lors du prochain trimestre ; et puis que nous pouvons faire en sorte qu’elle se développe en 2014.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous espérez que le prochain trimestre sera positif ?
PIERRE MOSCOVICI
Oui, je l’espère, je le crois, c’est ce que dit la BANQUE DE FRANCE aujourd’hui…
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous avez des éléments qui vous permettent de le penser ?
PIERRE MOSCOVICI
Le consensus des prévisions sur le 2ème trimestre est un peu meilleur, mais attention – comme l’a dit le président de la République hier – ne nous attendons pas à une année de forte croissance en 2013 mais le redémarrage, mais la mobilisation, mais le mouvement en effet, mais l’offensive doivent faire en sorte d’améliorer la situation.
JEAN-MICHEL APHATIE
Pouvez-vous nous dire ce matin Pierre MOSCOVICI combien d’actifs dans les entreprises publiques, l’Etat rendra pour les plans d’investissement ?
PIERRE MOSCOVICI
Non, je ne vais pas le dire, d’abord pour des…
JEAN-MICHEL APHATIE
On dit 20 milliards d’euros, crédible, pas crédible ?
PIERRE MOSCOVICI
Ce sont probablement des entreprises cotées, je ne veux pas faire d’annonce ici. Ce que je veux dire simplement, c’est que le plan d’investissement, en effet il aura des ressources européennes, en effet il aura aussi des ressources qui viennent de ce qu’on appelle « le rechargement du plan d’investissement d’avenir », il y aura des cessions d’actifs, cela a déjà été annoncé par le Premier ministre, mais pour quoi faire ? Non pas pour faire en sorte que l’Etat perde son rôle de stratège ou de pilote ou qui perde le contrôle, mais pour financer des investissements parce qu’investissements, investissements, investissements. Et puisque je parle de l’investissement, je veux ajouter deux choses qui ont été dites hier, d’abord la création d’un plan d’épargne pour les petites et moyennes entreprises en actions ; et deuxièmement, faire en sorte que l’Assurance maladie – 1.400 milliards d’euros – soit mieux orientée vers le financement des entreprises, et notamment vers le financement en actions.
JEAN-MICHEL APHATIE
On sait qu’il y a deux lignes politiques à Bercy, la vôtre et celle d’Arnaud MONTEBOURG, et hier le président de la République a dit « maintenant il n’y a qu’une ligne », alors c’est laquelle, la vôtre ?
PIERRE MOSCOVICI
C’est surtout il n’y a qu’une ligne, c’est la ligne du président de la République…
JEAN-MICHEL APHATIE
On en a souvent entendu deux à Bercy.
PIERRE MOSCOVICI
Ecoutez ! Il n’y en a qu’une, c’est ce que le président de la République…
JEAN-MICHEL APHATIE
Florange et DAILYMOTION, il y en avait deux.
PIERRE MOSCOVICI
Hier, le président de la République a dit ce qu’il fallait faire pour l’an 2, et c’est ça, c’est de faire en sorte…
JEAN-MICHEL APHATIE
Il n’y a qu’une seule ligne, c’est la vôtre ?
PIERRE MOSCOVICI
C’est faire en sorte de sortir la France de la crise, c’est faire en sorte de donner un avenir à l’Europe. Et vous savez quand je regarde cette première année, je me dis qu’il y a une action qui a été conduite où j’ai pris ma part, avec les autres ministres de Bercy. On a parlé de la réduction des déficits, peu mais passez important parce que c’est en cours, il est important que la France se désendette. La rénovation de l’économie, il y a aussi un cap qui a été fixé par le président de la République…
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous vous êtes senti conforté hier par le président de la République ?
PIERRE MOSCOVICI
Moi je me sens à l’aise avec ce qu’il a dit simplement, et je vais vous dire monsieur…
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous vous êtes senti conforté ou pas ?
PIERRE MOSCOVICI
Je me suis senti à l’aise, je n’ai pas à être dans cette logique de quelqu’un qui l’emporte sur un autre. Et je vais vous dire, nous devons tirer les leçons de la première année, nous avons un devoir, tous les ministres de Bercy, c’est en effet d’aller ensemble dans le sens que souhaite le président de la République pour faire en sorte que la France soit plus forte. Et moi je prends ma part…
JEAN-MICHEL APHATIE
Un message à Arnaud MONTEBOURG ?
PIERRE MOSCOVICI
Non, un message pour tout le monde. Et vous parlez d’Arnaud MONTEBOURG, nous ne sommes identiques, nous ne sommes pas des clones, nous sommes complémentaires. Mais faisons en sorte que…
JEAN-MICHEL APHATIE
Complémentaires et divergents.
PIERRE MOSCOVICI
Faisons en sorte que cette complémentarité, elle soit fertile. Toute opposition serait stérile, le président de la République a dit ce que nous devions faire, moi je m’y conformerai et je le ferai dans le rôle qui est le mien, qu’il a bien voulu saluer hier avec des résultats qui sont… des résultats qui permettent aussi à l’Europe d’avancer.
JEAN-MICHEL APHATIE
Je vais vous faire écouter une peau de banane Pierre MOSCOVICI, elle est signée Laurent FABIUS, c’était ici mardi matin.
LAURENT FABIUS, MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES
J’ai dirigé Bercy et c’est vrai que Bercy a besoin d’un patron, là vous avez plusieurs patrons…
JEAN-MICHEL APHATIE
Ce n’est pas sympa ça.
PIERRE MOSCOVICI
Le président de la République a dit hier ce qu’il fallait en dire, il nous a appelés à nous mobiliser autour de sa propre ligne économique. Moi, ça me va complètement parce que l’action qu’il mène, je m’y reconnais à 100 %, ce qui est d’ailleurs logique puisque…
JEAN-MICHEL APHATIE
Il n’est pas confraternel quand même Laurent FABIUS quand il disait ça !
PIERRE MOSCOVICI
Non, je m’en suis expliqué avec lui, je pense qu’il n’y avait aucune intention maligne.
JEAN-MICHEL APHATIE
Ah ah ! Il vous l’a dit ?
PIERRE MOSCOVICI
Nous en avons parlé.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et vous l’avez cru ?
PIERRE MOSCOVICI
Je l’ai cru.
JEAN-MICHEL APHATIE
Ah ah. Vous pouvez confirmer que Jérôme CAHUZAC perçoit toujours ses indemnités de ministre, puisqu’on les perçoit 6 mois après sa démission ? Vous confirmez Pierre MOSCOVICI ?
PIERRE MOSCOVICI
Le Premier ministre lui a demandé de ne pas le faire, nous n’avons pas les moyens d’interrompre cela, c’est légal et il a choisi de les toucher.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc il les touche malgré ce qu’a demandé le Premier ministre ?
PIERRE MOSCOVICI
Malgré ce qu’a demandé le Premier ministre. Mais vous savez, on est toujours dans la même logique, c’est celle d’un homme qui n’en fait un peu qu’à sa tête et qui malheureusement est dans un certain nombre de comportements qu’honnêtement, il n’aurait pas dû continuer à épouser.
JEAN-MICHEL APHATIE
Pierre MOSCOVICI qui croit les gens quand ils leurs disent qu’ils ne veulent pas du mal, était l’invité de RTL ce matin…
PIERRE MOSCOVICI
Je suis un optimiste, moi je crois… j’ai confiance dans la nature humaine en effet.
LAURENT BAZIN
On va voir si…
PIERRE MOSCOVICI
C’est ce qui permet d’être volontaire et d’être dans le mouvement, d’être offensif et, au final, de réussir je crois.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 21 mai 2013