Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Ministres, Monsieur le Président de la Banque interaméricaine de développement, Monsieur le Secrétaire général de l'Organisation de coopération et de développement économiques,
Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs,
Je veux, d'abord, vous souhaiter la bienvenue au cinquième forum économique international consacré à l'Amérique latine et aux Caraïbes, organisé conjointement par mon Ministère, le Ministère de l'Economie et des Finances, la BID et l'OCDE.
Ce Forum est devenu une enceinte de réflexion et de débat sur les grands enjeux économiques de l'Amérique Latine et des Caraïbes.
Son organisation ici, à Paris, témoigne de la volonté du gouvernement français de relever les défis actuels, je veux parler de la crise économique internationale, avec ses partenaires, au premier rang desquels figurent l'ensemble de vos pays et les institutions phares de la région.
Il s'inscrit ainsi parfaitement dans la continuité de la participation de la France au dernier Sommet UE-Amérique latine, à Santiago du Chili en janvier dernier. Le Premier ministre français, Jean-Marc Ayrault, avait tenu à y être présent, afin de rappeler notre volonté d'une relation plus dense avec les pays sud-américains.
Il témoigne aussi de notre souhait d'une meilleure intégration économique régionale des pays d'Amérique latine et des Caraïbes avec les départements français d'Amérique. N'oublions pas, que grâce à eux notamment, la France dispose de l'un des plus grands espaces maritimes.
Pour ouvrir ce forum, je veux rappeler le potentiel économique du continent latino-américain.
L'Amérique latine et les Caraïbes disposent d'un patrimoine de ressources naturelles, minières ou pétrolières parmi les plus importants au monde. Le continent est par ailleurs le 1er producteur de sucre, café, soja, orange, viande bovine et porcine. Surtout, il est riche de ses peuples, 600 millions de femmes et d'hommes au sein desquels la pauvreté recule tandis qu'émergent et se développent des couches moyennes aux besoins nouveaux, qui aspirent globalement, comme le dirait l'OCDE, à une « meilleure vie ».
L'Amérique latine et les Caraïbes sont devenues un pôle de stabilité économique et politique.
La crise financière internationale de 2008-2009, est venue ralentir une décennie d'expansion continue. Ralentir car l'Amérique latine en ressort renforcée, comme l'a montré le rebond de 2010, se caractérisant par une croissance moyenne de l'ordre de 6%.
Cette résilience est le signe que le continent est engagé sur la voie des réformes et que les politiques contra-cycliques qui ont été menées par la plupart de vos gouvernements portent leurs fruits. Vous le savez, c'est aussi la voie sur laquelle le Président de la République, François Hollande et l'ensemble du gouvernement français sommes engagés, résolument.
Vous avez su exploiter les marges de manœuvres budgétaires que vous aviez construites dans le passé et vos banques centrales ont pu baisser leurs taux sans que l'inflation ne s'envole.
La crise financière s'est éloignée. Je crois d'ailleurs que l'action de l'Union Européenne, rappelons-le, mais aussi des enceintes multilatérales, je pense au G20, a été déterminante, rappelons-le.
En tant qu'Européens, nous avons réagi à la crise financière de 2008-2009 en mettant en place des politiques économiques pour soutenir la demande. Nous avons instauré des plans de relance et les conditions monétaires ont été facilitées.
En revanche, la crise économique n'est pas encore dépassée.
Même si la prévision est un art difficile, celles qui ont été rendues publiques par l'OCDE il y 2 jours nous alertent à nouveau sur le ralentissement de la croissance mondiale.
Dans ce contexte difficile, la région latino-américaine, disons-le, s'en sort mieux. Les dernières projections font valoir 3,4% pour 2013, 3,9% pour 2014.
Il est remarquable que cette reprise soit tirée par des économies dont le dynamisme n'est pas lié à la taille de leur marché : la croissance attendue est effectivement forte au Chili (5%), au Pérou (6,3%), au Panama 9%.
Au sein de l'Union Européenne, des progrès demeurent à faire, en matière d'intégration de nos politiques publiques et de consolidation budgétaire, dans la perspective du redémarrage de l'activité économique.
Depuis quelques années, nous sommes engagés dans un processus de consolidation budgétaire. Ce processus est nécessaire pour inscrire nos finances publiques dans une trajectoire soutenable.
Mais la crise est désormais une crise économique, avec une activité toujours trop faible et un chômage important. Aussi veillons-nous, en France, à :
- faire en sorte que les conditions d'emprunt continuent à être assouplies.
- mettre en œuvre une consolidation budgétaire qui ne pénalise pas les perspectives de croissance.
L'emploi, encore l'emploi, toujours l'emploi. Voici notre objectif primordial et la détermination que nous avons, en France, de stabiliser la courbe du chômage d'ici fin 2013. Les initiatives que nous prenons avec l'Allemagne l'illustrent encore tout récemment.
La recherche de la compétitivité aussi, qui ne doit pas être vue comme antagoniste de celle de la priorité accordée à l'emploi, bien au contraire. Les réformes qui ont été menées depuis près d'un an en France sont fondamentales.
Vous connaissez notre tradition « gauloise » consistant à préférer l'affrontement à la négociation, à la discussion. L'accord national interprofessionnel sur le travail en janvier dernier qui a fait l'objet de longs échanges fructueux avec les organisations syndicales. Les deux conférences sociales organisées, la dernière en date s'achèvera le 21 juin, illustrent aussi cette nouvelle méthode.
Je crois pouvoir dire qu'il s'agit d'un autre rapprochement que l'on peut faire entre la France et les pays d'Amérique latine.
Le rebond de croissance mondiale sera d'autant plus rapide que nous réussirons à unir nos efforts pour renforcer des liens interrégionaux déjà étroits.
Certains pays, en Europe comme en Amérique latine, sont tentés par le renforcement des préférences nationales. Je le dis partout où je passe et je visite de nombreux pays, nous devons lutter contre le protectionnisme. Dans le contexte de crise économique actuelle, au moment où la direction générale de l'OMC sera occupée par un Sud-Américain, M. Azevedo, que j'ai eu le plaisir de rencontrer hier, il est important de maintenir, de renforcer, de fluidifier les échanges commerciaux.
Dans le même temps, il est important qu'il y ait réciprocité et je rappelle également souvent, à cet égard, la force de marché de l'Union Européenne, le premier au niveau mondial.
L'Amérique latine s'organise comme nous le faisons ici en Europe, chaque région avec ses spécificités.
A ce titre, je veux saluer les Ministres des pays de l'Alliance du Pacifique qui nous font l'amitié de leur présence : ceux qui la compose actuellement, Chili, Pérou, Mexique, Colombie ou ceux qui comme le Costa Rica ou le Panama pourraient bientôt la rejoindre.
Messieurs les Ministres, vous nous avez fait l'honneur la semaine dernière de donner à la France un statut d'observateur au sein de votre Alliance. La France y est sensible.
Laissez-moi, aussi, remercier les autorités du Panama et son Ministre des Finances. Nous mesurons l'honneur que nous fait le Président Martinelli en clôturant ce Forum, avant d'être reçu par le Président de la République. Nous y voyons un geste de renforcement de notre relation bilatérale.
Les importantes avancées accomplies ces dernières années sur le plan des négociations commerciales doivent être soulignées.
Je me félicite de la signature d'accords de libre-échange entre l'UE et le Cariforum et entre l'UE et la Colombie et le Pérou, tous les deux ratifiés en 2012, tout comme je salue les discussions amplifiées concernant le libre-échange UE-Mexique. Je souhaite une relance effective des discussions entre l'Union européenne et le Mercosur.
L'objectif de ces accords est d'accroître les échanges commerciaux afin de prendre en compte les avantages comparatifs des deux zones et de créer de nouvelles richesses. L'Europe dans son ensemble est le second partenaire commercial et le premier investisseur en Amérique latine.
Il nous appartient de mettre en œuvre les synergies possibles pour que ces accords de partenariats se traduisent le plus rapidement possible par des décisions concrètes dans les domaines économiques et de développement. Je me réjouis en particulier que vos gouvernements soient de plus en plus sensibles aux questions de propriété intellectuelle. Il s'agit d'un vrai progrès, pour protéger et informer le consommateur avant tout.
Les liens économiques bilatéraux entre la France et l'Amérique latine se sont accrus, mais vous n'entendrez aucun satisfecit de ma part. Au contraire, cette région est, pour mon action, prioritaire parce que nous y sommes encore trop absents (la part de l'Amérique latine et Caraïbes dans nos échanges commerciaux demeure modeste (3% de nos exportations et 2% de nos imports).
J'ai tenu à me rendre, dès décembre dernier, en Colombie et en Equateur. La séquence de déplacements que j'ouvrirai au 2nd semestre, après une première séquence consacrée à l'Asie du Sud-Est, sera en grande partie consacrée à l'Amérique du Sud et les Caraïbes.
Les exportations françaises vers cette région ont plus que doublé ces dix dernières années, passant de 6 Mds € en 2002 à plus de 12 Mds€ en 2012. Ces exportations se composent majoritairement de biens d'équipement et, en net accroissement ces dernières années, de biens de consommation. Par comparaison, les importations de la région vers la France sont majoritairement composées de produits agricoles et de matières premières.
En termes d'investissements, la présence française a plus que doublé dans cette région entre 2005 et 2011, passant de 14 à 37 Mds €. Nos entreprises font également partie des premiers employeurs étrangers dans la région : 800 000 personnes dans la région, soit 14% des effectifs employés par des entreprises françaises à l'étranger. (elles sont ainsi les premiers employeurs étrangers au Brésil et en Colombie).
Quelques pistes de travail que je souhaite donc indiquer pour renforcer ces liens :
- L'amélioration du cadre des affaires : de vraies progrès ont été accomplis, mais nous pouvons encore faire mieux.
- La priorité accordé aux PME : puisque cette session est consacrée à l'entreprenariat, il me semble fondamental d'insister sur la nécessité d'une plus plus grande interconnexion entre nos réseaux de PME, qui créent de l'emploi sur vos territoires, sans en détruire en France. Le travail sur les chaînes de valeurs réalisé par l'OCDE est précieux à cet égard.
- L'amélioration du financement : nous faisons notre travail en France avec le lancement de BPI France export, mais je souhaite également renforcer la coopération entre les grandes institutions financières de la région, la BID bien sûr, mais aussi les autres, pour créer des facilités permettant de financer des études en amont des projets d'infrastructures, favoriser le développement du secteur privé, avec pour objectif la croissance inclusive.
Un programme de travail ambitieux, à la hauteur de celui qui a été fixé dans le cadre de ce Forum. Je vous souhaite une excellente session de travail et ne manquerez pas de me tenir informée de vos conclusions.
Et je vous donne rendez-vous, très rapidement, dans chacun de vos pays.
Je vous remercie.
Source http://www.commerce-exterieur.gouv.fr, le 5 juin 2013