Texte intégral
Léducation populaire est-elle soluble dans notre monde moderne ? Ou plutôt, est-elle compatible, avec les injonctions de la modernité ?
Question provocatrice, peut-être, mais question, néanmoins, qui ma souvent été posée depuis que je me suis vu confier les responsabilités qui sont les miennes au gouvernement.
« Archaïque », « utopiste », « folklorique », « exotique », « dépassée » que nai-je pas entendu depuis que jai pris la tête dune maison où les mots « Education populaire » peuvent à nouveau, enfin, fièrement, sécrire au fronton ?
Sans parler, bien sûr, du fameux : « non mais, CONCRETEMENT, cest quoi léducation populaire ? »
« Concrètement » : voilà limpératif suprême lâché. Etre concret.
Concrètement, ai-je envie de répondre, léducation populaire, cest tout ce que le simplisme de notre époque médiatique naime pas.
Elle aime les définitions figées et réductrices. Léducation populaire est mouvante, en perpétuelle évolution. Elle se réinvente sans cesse.
Elle aime que les cibles soient clairement définies et que les limites soient fixées, intangibles. Léducation populaire sadresse à tous et existe partout. Elle infuse notre société toute entière.
Notre époque aime les visions utilitaristes, où lon vous explique doctement à quoi « sert » quelque chose. Léducation populaire ne vise rien de moins quà lémancipation individuelle, au progrès collectif, et à faire justement sortir lhomme de laliénation du « service » à une cause.
Elle aime aussi les calendriers, avec une finitude bien nette. Léducation populaire est un mouvement qui ne cessera jamais. Car jamais nous ne pourrons nous retourner et dire « voilà, objectif atteint. La mobilisation et la participation citoyennes sont acquises. Chaque individu est désormais acteur de son projet de vie. La transformation sociale est achevée. »
Notre époque aime les choses simples. Et bien, raté, léducation populaire, cest un corps vivant. Et comme tout corps vivant, léducation populaire est complexe.
Bref, à tous ceux qui me demandent « ce quest léducation populaire », je réponds quelle est comme lart : la définir, cest lenfermer. Et lenfermer, cest nier son essence. Cest nier ce qui fait sa puissance. Et cest nier ce qui fait son incontestable modernité.
Jai envie de dire que léducation populaire a germé et grandi en même temps que se propageait cette idée folle que les hommes naissaient libres et égaux en droits
Car, nous le savons, proclamer un droit, fut-il inaliénable, ne suffit pas pour atteindre cet idéal indépassable dune société juste, solidaire, égalitaire, pleinement démocratique. Une société où chaque homme et chaque femme peut saffranchir des déterminismes et des carcans, peut sémanciper et peut sépanouir. Peut être acteur de sa vie. Peut préparer un avenir meilleur pour tous.
Cest ce combat que mène inlassablement léducation populaire, aux côtés de lécole républicaine.
A vous tous, qui êtes des militants de la Ligue de lEnseignement, je souhaite donc rendre hommage aujourdhui. Vous êtes les héritiers dun mouvement qui depuis 150 ans a éveillé les consciences, formé des citoyens, lutté contre toutes les formes doppression, combattu les poncifs et les préjugés, nourri les aspirations démocratiques.
Mon parcours, comme celui de nombreux responsables associatifs, politiques ou syndicaux, est un parcours façonné par léducation populaire et par les mouvements de jeunesse. Cest dans le guidisme que jai goûté pour la première fois à lexpérience de laction collective.
Il y a des choses quon sait, intellectuellement, instinctivement. On sait quelles existent, quelles sont là. Et puis, un jour, on les expérimente, on se les approprie. Elles deviennent une réalité personnelle. Et là, on les comprend.
Cest cela que léducation populaire ma apporté : cest grâce à léducation populaire que jai compris le monde qui mentourait, que jy ai trouvé ma place, que jai eu envie dagir pour le transformer et de militer pour laméliorer. Que jai trouvé aussi les outils pour le faire.
Aujourdhui, cest donc avec une immense fierté mais aussi avec beaucoup dhumilité que jai envie de rendre à léducation populaire ce quelle ma donné.
Je le fais en ayant pleinement conscience de limportance des enjeux auxquels vous êtes confrontés et de la difficulté des questions que vous devez résoudre.
Ces questions sont presque tout entières résumées dans le slogan dont vous vous êtes doté : « Un avenir PAR léducation populaire ».
« PAR » léducation populaire et pas « POUR » léducation populaire.
Nen déplaise aux esprits chagrins que je citais en préambule, il y a en effet longtemps que le débat sur la modernité de léducation populaire a été tranché.
Oui, léducation populaire est moderne, résolument moderne, foncièrement moderne.
Pourquoi ? Simplement parce quelle demeure une réponse valide et pertinente, par bien des aspects unique, aux grandes interrogations qui traversent notre temps.
Des interrogations dailleurs que vous néludez pas et que vous regardez en face, comme en attestent le rapport sur la question du congrès 2013 et le programme des interventions qui rythmeront ces 3 jours déchanges et de débats.
Pour ma part, mon opinion est faite : léducation populaire est essentielle en 2013. Elle na peut-être même jamais été aussi vitale pour notre lien social menacé de délitement.
* Les défis éducatifs et culturels de notre société interrogent nos modes traditionnels de création du lien social et daccès à la citoyenneté. Face à la surabondance de linformation, à la perte de grands repères collectifs, face à ce sentiment angoissant de dessaisissement que lon décèle en creux dans certains phénomènes sociaux, nous avons besoin de cultiver la convivialité, léchange citoyen, le débat critique et la solidarité.
* Les inégalités sociales et économiques qui se creusent, lindividualisme et le mercantilisme croissants, la défiance vis-à-vis des institutions républicaines, le sentiment grandissant de précarisation nous dictent de réaffirmer sans relâche, farouchement notre attachement aux valeurs démocratiques. Ils nous imposent de ne jamais considérer comme acquis ce qui est essentiel : le partage, lintérêt général, la justice sociale.
* La paupérisation de certains territoires populaires, dans nos banlieues, dans les espaces périurbains, doit nous interpeller enfin et nous rappeler sans cesse à notre devoir de fabriquer et dentretenir la cohésion, la fraternité, légalité. De refuser cette idée quil peut exister des zones de non-droit, de non accès à la citoyenneté. La laïcité est, à ce titre, un des fondements qui doit inspirer notre action.
Nous devons être à la hauteur de ces défis. Il y a urgence.
Et si je sais que ce constat est sévère, peut-être même alarmiste, je nen ai pas moins conscience que des solutions existent et que léducation populaire participe de ces solutions.
La présence de léducation populaire sur tous ces terrains est un enjeu majeur de la reconquête.
Il faut savoir le reconnaître : cest dans léducation populaire, dans sa liberté, que nous trouverons quelques unes des réponses que les institutions et les acteurs publics ne peuvent pas apporter.
Je pense au devoir dimpertinence de léducation populaire, à son pouvoir dindignation, à son rejet du formatage et du fatalisme. A sa générosité aussi.
Jévoquais à linstant les idéaux dégalité, de fraternité, de justice sociale, de citoyenneté. Entre les murs de lécole, tous les enfants peuvent apprendre la signification de ces mots, appréhender pourquoi ces notions sont essentielles.
Mais entre les mains de léducation populaire, ces idées prennent chair. Elles sont palpables. Elles sont incarnées. On les goûte, on les expérimente, on les triture. On sy engage. Et ce faisant, on les rend vivantes.
Alors oui, en 2013, léducation populaire est moderne. Elle est plus que cela : elle est garante de notre vitalité démocratique présente et future.
Ancrer léducation populaire dans cette modernité appelle également que lon réinterroge les relations qui unissent les mouvements déducation populaire et les pouvoirs publics.
Sur ce sujet, je veux être très claire.
Cest la 1ère fois sous la Vème République que léducation populaire est visible dans lintitulé dun ministère. Et cest même la 1ère fois de lhistoire de la République quelle apparaît dans lintitulé dun ministère de plein exercice.
Cette reconnaissance institutionnelle de la part du gouvernement de Jean-Marc AYRAULT redit lattachement du peuple de gauche à léducation populaire. Je le dis avec force ici, à Nantes.
Cette reconnaissance, elle était nécessaire. Mais elle nest pas suffisante.
Et il est de ma responsabilité dinventer désormais avec vous de nouveaux modes dinteraction, de nouveaux lieux de dialogue, de nouveaux outils pour élaborer et mettre en oeuvre ensemble une nouvelle politique de jeunesse.
Je détaillerai dans un instant les propositions que je souhaite vous soumettre en ce sens.
Mais dores et déjà, permettez-moi de dessiner le principe central de ce partenariat que jappelle de mes voeux.
Le ministère que jai lhonneur de diriger sera à vos côtés, aux côtés de tous les acteurs de léducation populaire, pour vous accompagner dans cette période délicate de mutation. Mais il le sera dans le respect de votre indépendance et de cet « idéal protestataire » qui fait la richesse et la diversité de votre mouvement.
Je serai toujours attachée à respecter la pluralité des expérimentations et des idées ; attachée à préserver ce foisonnement, ce bouillonnement qui nourrit le corps social ; attachée à ce quil ny ait pas de « récupération » politique ni dinterventionnisme.
Léducation populaire se fonde avant tout sur le militantisme et la volonté de transformer. Vous êtes un contre-pouvoir, un aiguillon, une respiration démocratique. Préserver cette liberté est une responsabilité collective et vous pouvez compter sur moi pour prendre toute ma part dans ce combat.
Ce principe étant posé, jaimerais à présent aborder la question du futur et de la manière dont nous allons pouvoir travailler ensemble dans les mois et les années à venir.
Je vous lai dit : je suis attachée à ce que le ministère que jai lhonneur de diriger aujourdhui soit aux côtés des mouvements et associations déducation populaire pour les accompagner dans ce tournant périlleux du renouveau, où il faut se réinventer.
Depuis un peu plus dun an, nous nous sommes donc rencontrés à de multiples reprises, la semaine dernière encore cher Jean-Marc, cher Nicolas. Nous avons échangé, jai suivi avec intérêt les travaux préparatoires à ce congrès et les propositions qui en émergeaient.
Cest à partir de cette matière riche que jai travaillé pour élaborer 5 engagements, 5 engagements que je suis venue vous présenter aujourdhui.
Le 1er engagement, cest bien sûr la question du financement des associations et des mouvements de jeunesse et déducation populaire.
Dans un contexte contraint, où chaque ministère, y compris le mien, contribue à leffort national de redressement des comptes publics, je tiens et je le dis avec force à ce que les financements qui vous sont alloués ne soient pas considérés comme une variable dajustement pour le bouclage dun budget ou pour le financement de dispositifs gouvernementaux.
Vous le savez, le gouvernement a choisi de réduire les dépenses de lEtat. Ces économies sont indispensables pour redresser nos finances publiques et limiter leffort fiscal demandé aux Français.
Tous les ministères contribuent. Cest une question de solidarité nationale.
Mais le sérieux nest pas la rigueur : le ministère que je dirige conserve des moyens pour agir et pour financer ses priorités.
Pour porter la politique de la Priorité Jeunesse du Président de la République et du gouvernement, jai besoin de votre soutien et de votre mobilisation. Vous êtes au coeur du projet que je porte à la tête de ce ministère.
Certes, notre budget est contraint mais je mattacherai à ce que les crédits nationaux que nous apporterons en 2014 aux acteurs associatifs et déducation populaire, soient globalement préservés après des années dhémorragies. Cest déjà ce que jai fait en 2013. Je souhaite le poursuivre en 2014.
Jai bien conscience que vous attendez plus et je vous demande dêtre patients. Le gouvernement est 100% mobilisé pour inverser la courbe du chômage et retrouver le chemin de la croissance. Quand ce temps arrivera et il arrivera -, les fruits de cette croissance retrouvée bénéficieront à tous.
Dans le champ jeunesse et éducation populaire, jaurai à coeur que les mouvements et associations que vous représentez retrouvent des moyens dagir à la hauteur de leurs ambitions.
Mon deuxième engagement à votre égard, cest de vous épauler dans ce processus de renouveau que vous avez entamé et de vous donner des moyens supplémentaires pour enclencher cette dynamique.
Plus précisément, jai entendu vos propositions :
- Favoriser lapprentissage critique des outils numériques ;
- Oeuvrer pour préparer les citoyens à la participation ;
- Mieux prendre en considération la parole des jeunes dans vos organisations associatives.
En un mot : donner aux jeunes des porte-voix, des outils pour sexprimer et accéder à la citoyenneté. Des outils qui leur conviennent, qui répondent à leurs codes, à leurs usages, afin quils puissent en retirer tous les bénéfices culturels, sociaux et économiques.
Sur ces enjeux essentiels, laissez-moi vous dire que vos préoccupations rejoignent celles du gouvernement et quelles recoupent les mesures prises lors du Comité Interministériel de la Jeunesse, présidé par le Premier ministre, en février dernier.
Cest pour cette raison que, dès cet été, nous allons lancer un appel à projets pour susciter des actions innovantes dans 3 domaines : le numérique, les lieux innovants, les médias jeunes.
3 millions deuros seront consacrés au financement de ces projets par le fond dexpérimentation pour la jeunesse, ce bel outil qui a trop longtemps ignoré léducation populaire. Un appel à projet sera lancé en janvier 2014.
Nous comptons sur vous pour relayer activement cette opportunité dans vos réseaux de la Ligue.
Lenjeu nest pas mince : il sagit de laisser libre-cours à la créativité de léducation populaire pour quelle se dote elle-même de nouveaux espaces dexpression et danimation pour la jeunesse.
3 millions donc pour impulser cette démarche.
Troisième engagement, celui de répondre à la question cruciale du financement des associations déducation populaire, et au-delà, des associations en générale, par les collectivités.
Hier encore, une conférence organisée par le ministère sur le sujet de lévolution des relations entre collectivités et associations pointait du doigt le constat, que vous avez fait de manière empirique : les associations ont le sentiment dêtre progressivement passées dun statut de partenaires à celui de prestataires ou dauxiliaires des collectivités publiques.
La faute à un recours croissant à la logique marchande de mise en concurrence et dappel doffres, qui a remplacé progressivement le recours à la subvention.
Je sais que cest un vrai sujet dinquiétude pour vous puisque cette évolution remet en cause votre capacité dinitiative sur les territoires et votre rôle dans la co-construction des politiques publiques.
Les faits vous donnent dailleurs raison. Entre 2005 et 2011, les subventions publiques ont baissé de 8%, tandis que les commandes publiques triplaient. Résultat : les subventions publiques qui représentaient 34% du budget des associations en 2005 ne représentent plus aujourdhui que 24%... et la tendance saccélère.
Face à cette situation préoccupante, jai décidé de recréer les conditions dun partenariat fructueux entre associations et collectivités. Un partenariat qui soit garant de votre capacité à expérimenter et à innover sur les territoires, et qui sécurise les collectivités.
Jai souhaité que nous arrivions à une définition légale de la subvention. Cette disposition, qui a fait lobjet dun travail avec mon collègue Benoit Hamon, ministre délégué à lEconomie Sociale et Solidaire, figurera dans le projet de loi relatif à lESS, dont la présentation en première lecture sest achevée cette nuit à lAssemblée nationale.
La subvention bénéficiera ainsi dune assise juridique solide, précise et encadrée, qui confortera les collectivités dans leur droit dy recourir.
Ce chantier, certes technique mais nécessaire, saccompagne dune dimension politique visant à mieux reconnaître la fonction associative dans son rôle démocratique et citoyen.
Pour cela, à la fin de lannée, le Premier ministre signera une nouvelle charte dengagements réciproques liant lEtat, les collectivités territoriales et les associations. Cette charte, 13 ans après la première, reconnaîtra pleinement le rôle essentiel joué par la société civile, et en particulier par vous, sa composante associative, dans la construction de lintérêt général.
Cétait un geste attendu, je le sais. Je souhaite quil inscrive dans le marbre les termes dun partenariat durable, équilibré et régénéré entre les pouvoirs publics, les collectivités et les associations, au service de lintérêt général et de nos valeurs communes.
Quatrième engagement : celui de la lisibilité, de la valorisation et de la reconnaissance de lapport de léducation populaire à notre société.
La politique de jeunesse « nouvelle génération » mise en place par le gouvernement repose sur plusieurs piliers. Lun dentre eux est léducation populaire. Oui, nous souhaitons renforcer votre contribution dans lélaboration et la mise en oeuvre de la politique jeunesse.
Pour cela, il était essentiel de nous doter des bons outils et de faire évoluer les structures de lEtat. Cest ce qui a été décidé lors du CIJ avec la création dun (ou une) délégué interministériel à la jeunesse.
Son rôle sera essentiellement dimpulser la mise en oeuvre des mesures interministérielles décidées et de veiller à la cohérence des actions des différents ministères.
Mais sa mission sera aussi de vous associer dans les processus de co-construction des politiques publiques, avec également les collectivités locales et les organisations de jeunes.
Une fois cette ambition affirmée, il faut être en mesure de lappliquer. Cest pour cela que nous avons entrepris une réforme des opérateurs et des entités de lEtat associées à la jeunesse et à léducation populaire.
Certains ont pu sinquiéter de cette réforme. Je les comprends. Après tout, les fantômes de la RGPP hantent encore les esprits !
Mais je tiens ici à les rassurer sans ambigüité : notre volonté est de décloisonner les dispositifs, dorganiser davantage de transversalité, de mutualiser les ressources pour élargir notre rayon daction et de gagner en efficacité, sans perte dautonomie pour les opérateurs.
Sagissant de lInstitut National de la Jeunesse et de lÉducation populaire (lINJEP) auquel je sais que vous êtes très attachés, tout comme moi, je tiens à rassurer ceux qui craignent quil soit menacé et que nous nen fassions un outil bêtement statistique « à la botte » de lEtat, comme on dit.
Je le dis : lInjep verra au contraire son rôle élargi, notamment à la vie associative, et renforcé sur les volets évaluation des politiques publiques et statistiques. Il verra ses ressources humaines accrues et ses missions étendues.
LInjep est une pièce maitresse de notre politique publique en faveur de la jeunesse dont le rôle a été renforcé par le CIJ. Je mengage à ce quil puisse le remplir avec toute lobjectivité nécessaire. La stricte impartialité de sa recherche sera garantie, notamment par le maintien de son conseil scientifique, dans le nouveau statut qui sera le sien et qui est en cours de discussion.
Je souhaite enfin que lInjep garde, quelle que soit la formule choisie, la capacité de contractualiser. Lidée est quil conserve ses liens avec tous les acteurs du champ : les associations, les collectivités, les chercheurs.
Avec cette évolution de lensemble des outils de mon ministère, je souhaite que lEtat se dote des moyens datteindre les objectifs ambitieux que je me suis donné sur le champ de la jeunesse, de léducation populaire et de la vie associative. Lobjectif est également de valoriser davantage votre apport dans la réflexion collective, dêtre une caisse de résonnance pour entrer dans la co-construction effective des politiques publiques en matière notamment déducation populaire.
En un mot : inventer ensemble le visage de léducation populaire au XXIème siècle.
Enfin, 5ème engagement qui résume peut-être à lui seul mon message - : mon adhésion pleine et entière à cette notion de « capacitation » des jeunes que vous portez.
Poursuivons cet objectif commun d « empowerment » de la jeunesse, cette envie qui nous réunit de valoriser son pouvoir dagir, de lui permettre de semparer des clés de son avenir.
La clé de voûte de la Priorité Jeunesse du gouvernement, cest de faire le pari de lengagement des jeunes. De dire stop aux clichés misérabilistes sur la jeunesse passive, désabusée, égoïste, assistée, ces idées préconçues malsaines qui alimentent une vision angoissée de notre avenir. Je dis « stop ! »
Cest vrai, les jeunes sont la catégorie dâge qui souffrent le plus de la crise, la plus impactée par le chômage. Et nous travaillons sans relâche pour changer la donne. Mais ne résumons pas la jeunesse à cela : les jeunes sont aussi généreux, investis, pleins didées et denvies. Ils sont optimistes et ils font confiance à la vie associative pour faire évoluer la société dans le sens quils souhaitent.
La dernière étude de France Bénévolat montre que la progression de lengagement bénévole dans la tranche dâge des 15-35 ans a été de +32% depuis 2010 (contre seulement +10% chez les 35-65 ans) !!
Alors oui, osons faire confiance à la jeunesse et à sa formidable envie de transformer la société ! Donnons-lui les moyens de sengager et daccéder à la citoyenneté.
Vous le ferez à votre niveau, avec les outils qui sont propres à la Ligue de lEnseignement.
Je le ferai au mien, en soutenant et en valorisant la participation des jeunes dans la société et dans ses institutions. En les encourageant inlassablement à sinvestir dans les mouvements politiques, associatifs et syndicaux. Une cellule daccompagnement a dailleurs été créée au sein du ministère pour appuyer la création dassociations de jeunes dirigées par des jeunes, avec des moyens financiers, et pour les aider à se structurer.
Et je souhaite oui, que les jeunes dès quils soient en âge de voter dans une élection, quelle quelle soit, puissent aussi être élus. Je veux encourager toutes les instances concernées à abaisser les seuils dâge pour les personnes éligibles. Nous avons commencé à limposer dans les CESER. Si on peut voter, on doit pouvoir être élu !
Le non-cumul des mandats doit également aller dans ce sens : place aux jeunes !
La capacitation, jy travaillerai avec ardeur, avec constance, et je suis heureuse que nous partagions cet objectif commun pour bousculer les habitudes, vaincre les résistances, transformer la société !
Voilà pour mes engagements.
Avant de conclure, je veux saluer la manière dont vous vous êtes emparés de ce sujet majeur quest la réforme des rythmes éducatifs, et la manière dont vous vous y êtes investis, comme Vincent PEILLON et moi nous y sommes investis.
Au coeur de cette réforme, il y a la question de lacte éducatif et de sa pertinence ; il y a la question des ressources que nous devons mobiliser pour assurer la réussite de chaque enfant.
Vous faites évidemment partie de ces ressources, car léducation ne se construit pas quà lécole. Elle se construit aussi en-dehors, avec les parents, les enseignants, les collectivités locales, les éducateurs, les habitants, les bénévoles
Tout lenjeu est dassurer la cohérence des savoirs dispensés à lécole et en-dehors de lécole, en décloisonnant les ressources, quelles soient publiques ou privées.
Cest là le sens des projets éducatifs de territoire. Leur réussite passe par lanimation de partenariats, laccompagnement des ressources locales et le dialogue. Autant de choses que vous savez faire. Jai envie de dire : qui sont dans votre ADN !
Les mouvements déducation populaire doivent donc être moteurs, à léchelle des territoires, pour soutenir cette ambition.
Elle natteindra son objectif ultime la réussite de chaque enfant que si vous nous y aidez, en y apportant cette indispensable mixité géographique, sociale, économique, culturelle, cultuelle, que vous portez depuis 150 ans.
Depuis la prise de fonctions du gouvernement, il y a un peu plus dun an, la Ligue de lEnseignement a répondu présente pour accompagner les politiques publiques prioritaires du gouvernement, quil sagisse des emplois davenir, de la montée en charge du service civique, du sport pour tous
Demain, la réforme des rythmes éducatifs.
Devant autant de preuves éclatantes de votre investissement pour lintérêt général, osera-t-on encore poser la question de votre modernité ?
Nous ne sommes quau début du chemin que je veux parcourir avec vous pour remettre léducation populaire au coeur du vouloir-vivre ensemble, au coeur dune société plus solidaire, au coeur de cet idéal qui nous guide.
150 ans . On pourrait dire que la Ligue est une institution, avec ses codes, ses certitudes, son âge dor. Je ne vous ferai pas cette insulte. A 150 ans, on est jeune, on est curieux, on se projette dans le futur, on na peur de rien. A 150 ans, on est audacieux.
Et cest donc par un éloge à laudace, signé de René Char, que je conclurai mes propos, car cet éloge vous va bien :
« Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. A te regarder, ils shabitueront. »
Je vous souhaite à toutes et à tous un excellent congrès et je vous remercie de votre attention.
Source http://www.jeunes.gouv.fr, le 17 juillet 2013