Déclaration de Mme Hélène Conway-Mouret, ministre des français de l'étranger, sur les réformes concernant les Français résidant à l'étranger, à Paris le 31 août 2013.

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Circonstance : Assemblée générale de l’association Français du Monde, à Paris le 31 août 2013

Texte intégral

Monsieur le Ministre,
Madame la Présidente, Chère Monique,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Chers ami(e)s.
La vie ministérielle est une vie passionnante, riche, souvent trépidante. Les rencontres y sont incessantes : avec pour contrepartie, parfois, la frustration de ne pas pouvoir faire plus ample connaissance, de ne pas échanger plus longuement, de manière un peu moins formelle.
C’est pourquoi notre rencontre du jour a une saveur toute particulière pour moi : elle est de ces rendez-vous où l’appréhension de la découverte fait place au plaisir des retrouvailles.
Je suis ainsi particulièrement heureuse d’être à vos côtés, comme l’an passé, pour ouvrir les travaux de votre assemblée générale. Merci pour votre invitation, et merci à tous d’être présents ce matin.
Ici, les Français du monde sont dignement représentés. Ici, celles et ceux qui sont la France et font la France à l’étranger, réfléchissent et proposent concrètement, agissent et s’investissent utilement pour conforter l’influence de notre pays dans un monde en mouvement.
Cette année est passée à une vitesse folle !
- ce fut d’abord une année de réformes politiques, éducatives et sociales importantes et attendues par nos compatriotes : je pense en premier lieu à la réforme du mode de représentation des Français de l’étranger, qui introduira plus de démocratie ;
- ce fut aussi une année consacrée à la prévention des crises et à la sécurité de nos communautés ;
- ce fut par ailleurs une année riche en déplacements, pour défendre nos intérêts à travers le monde et vous rencontrer. Vous savez l’importance que j’attache à nos échanges, qui sont toujours libres, francs, directs. Ils m’aident à saisir (concrètement) les nouveaux enjeux de l’expatriation, des défis que nous devons relever ensemble ;
- ce fut, enfin, une année au cours de laquelle notre jeune ministère s’est affirmé et a pu, à maintes reprises, démontrer sa nécessité. Notre ministère est devenu légitime, reconnu et écouté.
Nous pouvons donc être collectivement fiers du travail accompli et des réformes engagées, qui bien souvent ont bénéficié du concours de mes collègues du gouvernement.
Désormais, la réalité de l’expatriation est de mieux en mieux prise en compte – et je serais tentée de dire de mieux en mieux soutenue et respectée – dans l’action gouvernementale.
Aujourd’hui, lorsqu’un membre du gouvernement initie un projet, il a le réflexe - même si quelques citadelles restent à conquérir - de prendre en compte les Français de l’étranger, au même titre que nos concitoyens vivant en France.
Je pense à la caution logement pour les étudiants qui offrira une garantie de solvabilité pour les propriétaires.
Quelques exemples concrets en attestent :
- Je pense à la réforme des bourses scolaires ou aux premières mesures portant réforme de l’avenir de l’enseignement français ;
- Je pense aussi à l’évolution du réseau consulaire et aux missions qui lui sont assignées ;
- Je pense enfin à la prévention, mais aussi la lutte contre des mariages forcés ; une action que je mène avec Najat Vallaud-Belkacem.
Rendre ces évidences effectives était un objectif. C’est en partie devenu une réalité. Nous progressons, mais beaucoup reste à faire. Vous savez pouvoir compter sur ma ténacité et ma détermination pour défendre et faire progresser vos droits.
La politique mise en oeuvre par mon ministère a pour premier objectif d’accompagner l’expatriation de nos compatriotes qui font le choix - de manière temporaire ou définitive – de s’installer à l’étranger dont les motivations restent méconnues ou mal interprétées.
J’initierai, dès cette année, une réflexion sur l’accompagnement de l’expatriation, s’intéressant tant aux conditions de départ qu’aux modalités de retour.
L’expatriation dépend d’abord du contexte politique et social du pays d’installation. La sécurité est donc une condition et un préalable. Plus encore à l’heure où de nouveaux foyers de tension émergent en Afrique, au Proche et au Moyen Orient, qui nous mobilisent quotidiennement.
Je suis régulièrement intervenue, auprès de nos compatriotes, de nos représentants ou dans les médias, pour rappeler les consignes de sécurité, mais aussi pour réaffirmer, selon les circonstances, la position de la France.
La situation en Egypte, en Libye ou en Syrie commande aujourd’hui la plus grande vigilance afin de protéger nos communautés présentes dans ces pays.
La mobilité des Français reste et restera une chance pour la France. Pour avoir été moi-même expatriée pendant plus de vingt ans, cette affirmation ne me semble pas souffrir discussion. Cette conviction guide le combat que je mène depuis plusieurs mois pour changer les points de vue de certains Cassandre ou responsables politiques en mal de publicité.
La mobilité n’est pas une fuite - sauf pour quelques exilés fiscaux -, un reniement ou un mouvement migratoire résultant de la crise économique que notre pays traverse. Elle est une composante de la compétitivité et de l’attractivité de la France.
N’en déplaisent à ceux qui entonnent la ritournelle du déclin et de l’absence de perspective - surtout quand ils n’ont plus la perspective du pouvoir ! - les jeunes qui goûtent à l’expatriation le font d’abord par curiosité culturelle, par goût de l’aventure, par volonté d’acquérir de nouvelles compétences professionnelles et linguistiques.
Dès mon arrivée, j’ai tenu à ce qu’une réflexion et une évaluation des missions de notre réseau consulaire soient posées.
Nous devons garantir le meilleur service public à nos compatriotes installés de longue date mais nous devons aussi accompagner au mieux nos concitoyens qui s’installent notamment dans les pays émergents.
L’enjeu est de nous adapter pour accompagner les mouvements et les migrations à l’oeuvre. Au prix de quelques sacrifices, je le sais...
Mais à l’heure où le gouvernement, courageusement, mène une action sans précédent de réduction des déficits publics, nous ne pouvions être en reste.
Cela ne signifie pas pour autant que nous soyons réduits à agir en comptables.
Pour preuve : à mon arrivée, 15 consulats devaient fermer. Au terme d’une âpre négociation, un seul fermera et deux sont transformés en consulats honoraires renforcés.
D’autres grands projets nous mobiliserons dans les prochains mois.
Je pense tout d’abord à l’enseignement français à l’étranger. Dès ma prise de fonction, j’ai proposé à Laurent Fabius de conduire une réflexion globale sur l’avenir de notre réseau.
Un constat d’abord, que vous partagerez car vous êtes aux premières loges pour observer l’évolution de nos communautés à l’étranger. Nous savons à quel point il est difficile de maintenir « hors sol » un lien fort avec une langue, une culture et un pays éloigné. Il est donc de notre devoir de proposer des solutions qui permettent d’intégrer pleinement nos enfants dans la communauté nationale.
C’est pour répondre à cette demande d’enseignement et de lieux d’enseignement supplémentaire - qu’elle résulte de nos compatriotes ou de ressortissants étrangers - que nous avons initié une réflexion qui prendra corps à travers des mesures qui , pour certaines, seront mises en oeuvre dès cette rentrée.
J’ai présenté au dernier Conseil des ministres, les nouvelles orientations de la politique de l’enseignement à l’étranger :
- D’abord, nous encouragerons l’ouverture de nouveaux établissements, autofinancés, qui seront homologués pour pouvoir dispenser les programmes de l’Education nationale. Parallèlement, nous développerons des offres dans les systèmes d’enseignement nationaux ; en particulier les programmes labellisés FrancEducation, mais aussi les nouvelles offres du CNED ou les dispositifs FLAM ;
- ensuite, pour améliorer le pilotage de notre politique de l’enseignement français à l’étranger et ainsi mettre fin à une gestion souvent qualifiée « au fil de l’eau », une concertation interministérielle, autour du Ministre des Affaires étrangères, fixera annuellement le cap et décidera des grandes orientations ;
- Enfin, nous resserrons durablement les liens entre l’Education nationale et l’AEFE, bras séculier de notre diplomatie éducative. Une coopération d’autant plus naturelle et nécessaire que le ministère de l’Education nationale détache chaque année près de 9 000 enseignants dans le réseau. Cette coopération emblématique entre nos ministères est la garantie d’un enseignement reconnu, au plan national comme international.
J’aurai l’occasion de préciser ces mesures le 9 septembre prochain, devant l’Assemblée des Français de l’étranger.
Avant de conclure, je souhaiterais revenir sur la réforme de la représentation politique des Français de l’étranger, qui sera mise en oeuvre dans les mois à venir. Une réforme qui marque, nul ne peut le contester, un véritable progrès démocratique.
La loi promulguée le 22 juillet dernier a suscité des interrogations, des incompréhensions, des doutes et même des réserves.
Je les ai entendus. Mais une seule exigence m’animait : faire progresser la démocratie et améliorer la représentation des Français de l’étranger, 30 ans après la loi votée sous le gouvernement Mauroy qui instituait l’élection au suffrage universel direct des conseillers et réformait le mode d’élection de sénateurs.
Mes objectifs n’ont jamais varié.
J’ai voulu que cette réforme soit une formidable opportunité de vous rendre la parole et de permettre à chacun de s’investir dans le débat citoyen.
Je fais le pari que l’élection au niveau local de conseillers élus au suffrage universel direct permettra aux Français de l’étranger de redécouvrir les vertus de la citoyenneté, et le goût des urnes.
La démocratie de proximité devient une réalité. Elle n’est plus une simple formule ou une incantation sans lendemain. Les nouveaux conseillers seront consultés sur les politiques publiques conduites pour les Français de l’étranger, car c’est au niveau local qu’elles se décident et s’appliquent. Le champ de compétence des conseils consulaires sera bien plus vaste que celui des actuels comités. Il appartiendra aux futurs élus d’en faire de réels lieux de débats et d’influence.
A chacun de mes déplacements, j’ai rencontré un grand nombre d’entre vous et j’ai pu constater que nos choix étaient en phase avec les attentes profondes du plus grand nombre.
Je suis fière et heureuse, au nom des valeurs que je défends d’avoir mené à son terme cette grande réforme, qui constitue un indéniable progrès politique et démocratique.
L’enjeu, à présent - j’y prendrai toute ma part -, est d’aller promouvoir le nouveau mode de scrutin et de représentation. Il est essentiel de faire oeuvre de pédagogie afin que nos compatriotes se sentent concernés et votent en nombre.
Pour soutenir cette action, une large communication sur la réforme sera publiée sur les sites des consulats et des ambassades. Nous prendrons également des initiatives destinées à informer, sensibiliser et convaincre nos concitoyens.
La promotion de la réforme fera d’autant plus sens que 2014 sera une grande année électorale, avec l’élection des conseillers consulaires, des parlementaires européens, et des sénateurs.
Aussi, j’en appelle à votre soutien et à votre engagement.
Je suis bien placée pour savoir que Français du monde constitue une vraie force militante capable de mobiliser au-delà de ses seuls rangs. Présente partout dans le monde, elle est nécessaire et incontournable. Elle est surtout légitime et écoutée.
Je serai bien évidemment à vos côtés. Soyez assurés que je continuerai à rencontrer militants et sympathisants partout où je me rendrai. Ceux qui me connaissent savent l’importance que j’accorde à ces rencontres qui réunissent nos compatriotes investis dans le monde associatif ou politique, rassemblés autour des valeurs de gauche.
L’année 2013 fut une année de conquête de nouveaux droits et d’affirmation du ministère des Français de l’étranger : il en sera de même en 2014 ; et en 2015 ; et au-delà ! C’est le sens des différents chantiers que nous lançons.
Comme elle l’a toujours fait depuis sa création, Français du monde doit inspirer autant que promouvoir les réformes visant à améliorer les conditions de vie des Français de l’étranger, et permettant d’en relever les nouveaux défis.
Ces défis, le Président de la République et le gouvernement de Jean-Marc Ayrault en ont pleinement pris la mesure. Vous y êtes pour beaucoup. C’est la raison pour laquelle nous espérons vous trouver encore plus présents à nos côtés dans les mois à venir : de votre soutien, de vos propositions, de votre exigence, nous tirons l’inspiration et la résolution nécessaires pour conduire les réformes permettant à chaque Français de l’étranger de s’épanouir dans la vie qu’il a choisie.
Je vous remercie.
Source http://www.helene-conway.com, le 3 septembre 2013