Texte intégral
CHRISTOPHE BARBIER
La première question sur le sondage du NOUVEL OBS, la première question est posée par Bruce TOUSSAINT, le sondage qui fait la Une de LOBS sur Marine LE PEN.
BRUCE TOUSSAINT
24% effectivement dintentions de vote pour le Front national aux élections européennes. Quel est votre sentiment ? Est-ce que la cote dalerte est dépassée ?
VINCENT PEILLON
Il y a longtemps quelle est dépassée, on est un pays qui a connu vous vous en souvenez le 21 avril 2002, et puis, on la vu, et donc on est et on continue dêtre sur une pente qui nest pas la bonne, parce que Marine LE PEN nest en aucun cas une solution, la sortie de leuro, elle pèserait dabord sur son électorat, et par ailleurs, on voit quil y a à la fois cette question sociale, mais une question de valeurs, très profonde, qui est posée au pays, elle la eu à dautres moments de son histoire. Et donc ça nest pas une bonne nouvelle.
CHRISTOPHE BARBIER
Est-ce que vous serez candidat aux élections européennes ? On vous prête lenvie dêtre à nouveau, vous lavez été, candidat dans le grand sud-est ?
VINCENT PEILLON
Oui, je suis député européen, et cest dailleurs une éducation à la démocratie que vous me permettez de faire, cest un vrai mandat, je me suis toujours appliqué, je suis le seul dailleurs responsable français depuis 97, à sêtre appliqué le non-cumul des mandats. Mon actuel mandat est celui de député européen, donc
CHRISTOPHE BARBIER
Et vous serez candidat ?
VINCENT PEILLON
Oui, bien entendu, je vais continuer
CHRISTOPHE BARBIER
Vous menez cette bataille.
VINCENT PEILLON
Car je ne crois pas que les hommes politiques ou les femmes doivent être de la société civile, je fais de la politique depuis quinze ans, et donc je continuerai davoir un mandat, ça me donne une légitimité. Par ailleurs, vous venez de le dire, jétais la tête de liste face à Jean-Marie LE PEN, jai un engagement très profond, chacun le sait, sur une certaine idée de la France et de la République, je ne me déroberai pas à ce combat. Et je crois tout à fait déterminant en plus aujourdhui de dire aux Français : cessez de croire que la fermeture des frontières, le repli sur soi, la stigmatisation de lautre, cest ce qui va nous permettre de réussir. La France doit se relever, elle se relèvera comme à toutes les périodes de son histoire, quand elle sera forte, généreuse, ouverte sur le monde.
CHRISTOPHE BARBIER
Et vous devrez choisir à ce moment-là, donc à aller siéger à Strasbourg après avoir été élu, et démissionner du gouvernement alors ?
VINCENT PEILLON
Mais comme toujours, comme tous les députés, quand on a fait la campagne législative
CHRISTOPHE BARBIER
VINCENT PEILLON
Non, mais, vous êtes nommé au gouvernement, vous faites votre campagne pour lAssemblée nationale, et vous avez à faire le choix quand on vous renomme ministre de savoir, il faudrait quand même, et cest très utile finalement, parce que ça va me permettre de faire de linstruction civique pendant six mois, ce nest pas parce que les élections européennes ne coïncident pas avec linstauration du gouvernement, que ce nest pas le même mandat que député. Et cest les mêmes procédures.
CHRISTOPHE BARBIER
Aujourdhui, vous installez le Conseil supérieur des programmes, alors, les programmes sont trop lourds ou simplement mal agencés ?
VINCENT PEILLON
Les deux. Les deux, ils sont trop lourds parce quils ont fonctionné sur un empilement de disciplines, avec une forme danxiété, qui fait que, aujourdhui, les uns et les autres dailleurs, cest le résultat à dix ans, on ne peut pas faire les programmes, ce nest pas une bonne chose, et en même temps, ils sont mal organisés, cest-à-dire mal conçus, sur des choses tout à fait fondamentales, qui montrent léchec français, la difficulté des réformes, dabord, ils ne sont pas suffisamment organisés en cycles, on le demande depuis 1989. Deuxièmement, ils ne sont pas coordonnés avec le fameux socle commun de compétences de culture et de connaissance
CHRISTOPHE BARBIER
Quon va réviser, quon va revoir
VINCENT PEILLON
Eh bien, pour lorganisation quon va revoir, bien entendu, mais aussi, on va larticuler à cette question des programmes, articuler les programmes à la question des cycles, articuler les programmes à la question des cycles, du socle, mais aussi à lévaluation des élèves. Nos enfants, les élèves, passent un DNB, le Brevet des collèges, qui na rien à voir avec le livret de compétences, donc il faut mettre tout ça en cohérence. Et enfin, il faut quand même former les professeurs à enseigner leurs programmes, ce qui nest jamais le cas. Et on va lier tout ça aux écoles supérieures du professorat et de léducation ; cohérence
CHRISTOPHE BARBIER
Est-ce que ça sera loccasion aussi de faire reculer un petit peu la dictature des mathématiques ?
VINCENT PEILLON
Vous le verrez quand les résultats PISA arriveront. Ça nest pas bien
CHRISTOPHE BARBIER
PISA, évaluation internationale
VINCENT PEILLON
Oui, et qui va dailleurs, dune certaine façon, justifier tout ce que nous faisons, cest-à-dire la nécessité de refonder lécole dans ce pays pour permettre la réussite des élèves.
CHRISTOPHE BARBIER
La France nest pas bien classée.
VINCENT PEILLON
Accroissement des inégalités, difficulté sur la compréhension de lécrit, difficulté maintenant sur les mathématiques, alors que vous le savez, nous avons une des meilleures écoles mathématiques du monde, mais lenseignement des sciences, plus globalement des sciences, à lécole ne va pas. Et dailleurs, nous avons une crise terrible, vous le savez, de recrutement des professeurs de sciences, voire des ingénieurs dans notre pays. Cette question est centrale, et jai dailleurs demandé à ce que des scientifiques et des femmes scientifiques aussi soient présents dans ce Conseil supérieur des programmes, il sera vice-présidé par madame Annie CAZENAVE, de lInstitut, qui est une grande spécialiste de ces questions, et ils seront accompagnés par un professeur de mathématiques de luniversité, mais spécialiste aussi de ce que lon peut enseigner dans les collèges et les lycées, Xavier BUFF.
CHRISTOPHE BARBIER
Nest-ce pas une erreur que dencombrer les emplois du temps avec la morale laïque ou la découverte des parcours professionnels ? Tout ça, cest sympathique, mais ça na pas sa place peut-être dans les programmes déjà chargés ?
VINCENT PEILLON
Linstruction civique et morale a sa place, elle y est déjà, elle est mal coordonnée du début à la fin, elle est à mon avis enseignée de façon insuffisante, mais elle est tout à fait essentielle, parce que nous devons avoir trois objectifs, les apprentissages fondamentaux, qui permettent lémancipation personnelle, la production dun vivre en commun et donc la citoyenneté, cest une des missions de lécole, ça a toujours été. Et puis, troisièmement, quand même, linsertion professionnelle, parce quelle va assez bien pour 75%, surtout quand les parents sen occupent, mais nous laissons 25% des enfants au bord du chemin. Il y a des pays, pensez à lAllemagne, quon donne toujours en modèle, dans lequel, au coeur de la relation pédagogique, entre le professeur et lélève, la question de lorientation est posée, elle nest pas sous-traitée, savoir ce quun enfant veut faire, lui permettre davoir des désirs, lui faire connaître les possibilités offertes à lui, cest notre responsabilité
CHRISTOPHE BARBIER
Et sauver la filière de lapprentissage par exemple, ça viendra par-là ?
VINCENT PEILLON
Cest nous qui
CHRISTOPHE BARBIER
Plus dapprentis ?
VINCENT PEILLON
Mais cest nous qui le faisons, dabord, il faut quand même parler des réalités, je me souviens que Xavier BERTRAND ou Nicolas SARKOZY disant : il faut 800.000 apprentis, en cinq ans, ils en ont fait 10.000 de plus, voilà le résultat. Donc on est toujours dans les 450
CHRISTOPHE BARBIER
Et vous, votre objectif ?
VINCENT PEILLON
Cest 20.000 sous statut scolaire, dès cette année, et de la même façon que nous avons déjà réussi sur les décrocheurs, nous réussirons sur lapprentissage. Mais je veux développer vous savez, lenseignement professionnel en France, cest la gauche, les lycées professionnels, cest la gauche. Antoine PROST vient de sortir un livre, le grand historien, il dit : il y a deux grandes réformes, la réforme Gaullienne du collège, et la réforme de 1985, JOSPIN (sic) pardon, FABIUS/CHEVENEMENT, sur les lycées professionnels. Les licences professionnelles, les BTS. Donc nous aimons la voie professionnelle.
CHRISTOPHE BARBIER
Est-ce quavec cette réforme des programmes, les cartables seront moins lourds ?
VINCENT PEILLON
Oui, et avec le service public du numérique éducatif.
CHRISTOPHE BARBIER
On aura une tablette avec tous les programmes, tous les manuels dedans ?
VINCENT PEILLON
Je sais que vous êtes un humaniste et un homme de culture, je veux des têtes mieux faites et pas des têtes où on encombre à linfini, et on croit quon connaît comme ça, développer lesprit critique, donner les outils de la connaissance, apprendre à lire, prendre du sens, écrire, être capable de vivre dans le monde de demain, la langue étrangère, dès le CP, on est les derniers dEurope en langues étrangères, et le numérique, qui est un outil formidable démancipation et de réussite pédagogique.
CHRISTOPHE BARBIER
Le Premier ministre a confirmé hier les aides financières de lEtat en 2014 pour les communes qui adoptent les nouveaux rythmes scolaires. Elles demandent aussi du temps, pour certains cas difficiles, est-ce quon pourra reporter à septembre 2015 ladoption de ces rythmes ?
VINCENT PEILLON
Ce nest pas la question, ce qui était demandé, là, vous savez, notre pays a fait dix rapports, vous vous en plaignez assez souvent, les rapports, est-ce quils sont pour être mis dans un tiroir et on ne bouge pas !
CHRISTOPHE BARBIER
La réforme est bonne, certes, pour les enfants, mais un maire élu en mars 2014, en trois mois, il va devoir faire cette réforme, donnez-lui un an de plus !
VINCENT PEILLON
Non, il doit la faire avant. Il doit la faire avant, même
CHRISTOPHE BARBIER
Et sil nest pas élu
VINCENT PEILLON
Même quand on détend le temps, et il pouvait la faire lannée dernière. Et ça fait des années quon aurait dû le faire.
CHRISTOPHE BARBIER
Donc il ny aura pas de sursis
VINCENT PEILLON
Je vois une droite très courageuse qui ne sait faire autre chose que dappeler au boycott, se contredirait même par rapport à ses déclarations précédentes, elle avait déjà peu de crédibilité sur lécole, à un moment, quand on pense vous lavez dit vous-même, il faut redresser le pays, est-ce quon va laisser ce déclin scolaire français continuer ? Par contre, je dis aux élus : nous vous accompagnons, nous mettons des moyens, ne mettons pas la pression, y compris sur les enfants, si on veut reprendre les enfants le mercredi matin, raccourcir la journée, cest pour quils soient moins fatigués et quils apprennent mieux. Ne bourrons pas dactivités tout le temps !
CHRISTOPHE BARBIER
A Janvry, dans lEssonne, où le maire veut faire du boycott en septembre 2014, il y aura des sanctions ?
VINCENT PEILLON
Cest de linsurrection, ça appartient lorsquil y a des règles pour tous, qui sont les règles de la République, un décret, dire : je ne respecterai pas la loi, ce nest pas un bon exemple y compris pour les enfants de son école.
CHRISTOPHE BARBIER
Donc le préfet ou le Conseil des ministres peut sen saisir et sanctionner le maire ?
VINCENT PEILLON
Franchement, cest marginal. 4.000 villes viennent de passer, ça se passe très bien dans la plupart des villes, il y a deux, trois villes où il y a des très grosses difficultés, il y en a sans doute quelques centaines dans lesquelles il faut améliorer les dispositifs, et nous le ferons, nous ne sommes pas là pour dire que tout ce que nous faisons est bien, cest une très grande réforme, il faut dailleurs que la France apprenne à faire de très grandes réformes, quelle se donne le temps de les réussir, quelle soit capable de sévaluer et de modifier au fur et à mesure, cest ce que nous ferons.
CHRISTOPHE BARBIER
Est-ce quil y aura à un moment donné un chantier PEILLON sur le collège unique pour en finir ?
VINCENT PEILLON
Ah, mais je ne mexprimerais pas comme ça, mais le chantier est ouvert, il est au programme de cette année, cette année, nous allons vous lavez vu voir les programmes, je les installe aujourdhui. Nous allons traiter cette question des métiers de lEducation nationale, treize groupes de travail, sur tous les métiers : professeur, conseiller pédagogique
CHRISTOPHE BARBIER
Et ce bloc du collège
VINCENT PEILLON
Et, jy viens, et les deux grandes réformes, cest celle du collège et cest celle de léducation prioritaire, qui doivent aller ensemble. Mais je ne dirais pas la même chose que vous, la question nest pas de casser le bloc du collège, on est un pays où on ne veut jamais faire du commun, il faut mettre en commun, mais le collège unique, ce nest pas le collège uniforme, et donc je donnerai de la liberté pour permettre la réussite des élèves dans le collège, mais surtout, je nen rabattrai jamais sur le fait que je veux pour tous les élèves de France un niveau de culture le plus élevé possible.
CHRISTOPHE BARBIER
Beaucoup de question des réseaux sociaux ce matin pour vous
BRUCE TOUSSAINT
Beaucoup de questions pour vous, Vincent PEILLON, questions posées par les téléspectateurs dI-TELE ce matin, via Tweeter, alors, regardez, la première question concerne les rythmes, évidemment : « en quoi votre réforme des rythmes scolaires va-t-elle aider nos enfants à mieux lire, écrire ou compter, demande Hélène.
VINCENT PEILLON
Eh bien, cest extrêmement simple, et cest la question essentielle, si vous voulez, cest pareil pour vous, mais cest plus encore pour nos enfants, si vous voulez apprendre à lire, écrire, compter, il faut être, un moment, attentif, vigilant, en forme, essayez 09h30 du matin, vous verrez, ce nest pas mal, parce que vous avez derrière vous quune heure, bon. Et vous avez eu jespère un bon sommeil. Si vous le faites à 16h, cest moins bon, quand vous avez eu une longue journée, on est les seuls dailleurs en France. Si vous prenez le CP, je marrête un instant, les gens ne le savent pas, CP, lire, écrire, compter, cest précisément au programme, 15h, avec la réforme qui na que quatre ans dailleurs, il fallait en faire trois heures dans laprès-midi, tous les maîtres, jétais encore dailleurs à Grenoble lundi, y compris des maîtresses de maternelles, ne contestent pas que ça soit meilleur, cest lorganisation des activités péri-éducatives qui pose problème. Donc ça, cest très important.
BRUCE TOUSSAINT
Alors, écoutez lautre regardez plutôt lautre question importante aussi : si ça ne marche pas, voilà, si : « faire marche arrière nest pas toujours signe de faiblesse, le ferez-vous si le retour dexpérience nest pas bon », Vincent PEILLON ?
VINCENT PEILLON
Evidemment, mais nous savons tous que cest lintérêt de lenfant. Nous avons des retours dexpérience, pour vous dire la vérité, et ce qui était tonnant, cest de vouloir faire un bilan au bout de quinze jours. Pour linstant, je fais analyser 1.000 projets éducatifs de territoire, et en décembre, je rendrai public, il y a des difficultés, dailleurs, qui commencent à être assez bien identifiées, sur la transition professeurs/animateurs, sur la maternelle, je vais donner des instructions assez vite, nous avons quatre, cinq points, mais globalement, une des difficultés de cette réforme, cest précisément son succès, les maires me disent : il y a beaucoup plus denfants inscrits, y compris à Paris, que nous ne lavions prévu.
BRUCE TOUSSAINT
Merci beaucoup Vincent PEILLON. Vous nous avez confirmé ce matin que vous étiez candidat aux européennes, mais vous navez pas répondu complètement à la question de Christophe BARBIER, mais vous ferez
VINCENT PEILLON
Laquelle ?
CHRISTOPHE BARBIER
Il faudra choisir entre Strasbourg ou le ministère !
BRUCE TOUSSAINT
Vous ferez quel choix Vincent PEILLON ?
CHRISTOPHE BARBIER
Est-ce que vous démissionnerez ?
VINCENT PEILLON
Bien entendu, comme tous les députés le font
CHRISTOPHE BARBIER
Et votre coeur ira de quel côté, continuer votre action au ministère ou aller représenter vos électeurs à Strasbourg ?
VINCENT PEILLON
Mais vous savez, dabord, la vie est longue, mais cest de mener ce combat politique, et de penser quun homme politique français doit avoir des mandats.
CHRISTOPHE BARBIER
Et Jean-Marc AYRAULT, lui, il naime pas ça, il voudrait que vous décidiez avant pour dire : voilà, je me présente, cest pour être élu, pour aller à Strasbourg
VINCENT PEILLON
Pas du tout
CHRISTOPHE BARBIER
Non ?
VINCENT PEILLON
Pas du tout, non, non, il y a une parfaite coordination entre nous tous, et je fais un travail de pédagogie qui me semble être utile, car, à ce moment-là, vous navez pas le problème lorsque vous êtes parlementaire français, cest bien vous montrer lidée de lEurope, ça ne larrange pas, moi, je suis député européen depuis dix ans, jai fait ce choix, cest un mandat, de la même façon quand on est député français, on est nommé ministre, eh bien, on ne siège pas, cest la même chose. Voilà.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 octobre 2013