Déclaration de M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, sur la sécurisation des parcours professionnels, Limoges le 9 octobre 2013.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Signature de l'accord cadre Etat-ARF Partenaires sociaux à Paris le 9 octobre 2013

Texte intégral


Le 12 février dernier, nous avons signé ensemble la convention triennale Etat – FPSPP, sous le signe d’une confiance retrouvée et de l’engagement dans l’action au service de la qualification des actifs les plus fragiles. Cette convention-cadre a permis deux choses importantes :
- d’une part, justifier plus fortement encore l’objectif de sécurisation que le FPSPP porte dans son titre, au bénéfice des publics les plus fragiles. En cela nous avons anticipé dans le sens même de la réforme de la formation professionnelle désormais engagée.
- d’autre part, que le FPSPP intègre pleinement les grands enjeux des prochaines années : l’avenir de notre jeunesse, la transmission intergénérationnelle et l’accompagnement des mutations économiques. Aujourd’hui, notre cercle s’élargit et je m’en réjouis.
Nous franchissons une étape supplémentaire en signant un accord cadre à trois cette fois, entre l’Etat, l’Association des Régions de France et les Partenaires sociaux. Il va nous donner les moyens de construire ensemble, sur les territoires, des dispositifs de sécurisation des parcours. Je veux vous dire pourquoi, à mes yeux, cet accord est si important.
1. La méthode et la dimension tripartite de la convention
D’abord parce qu’en social-démocrate convaincu et assumé, je considère que l’on progresse par les accords, que l’on doit être capable de sortir de son pré carré et de se rassembler, avec les autres acteurs, nos cultures et nos méthodes de travail.
Au fond, nous portons ensemble l’intérêt général ; les uns par le service public, au niveau national ou local, les autres par la représentation des forces économiques et sociales de la Nation.
Bien sur, il y a des divergences et des frottements entre nous. Mais leur dépassement est nécessaire lorsqu’il s’agit d’offrir aux salariés et aux demandeurs d’emploi les moyens de se former, d’acquérir de nouvelles compétences et en cela de nouvelles raisons d’avoir confiance en l’avenir, dans un contexte morose en matière d’emploi depuis trop d’années.
Nous y réussissons, je crois, de manière inédite et prometteuse depuis le lancement cet été du plan 30 000 formations prioritaires pour l’emploi qui articule nos interventions respectives en faveur des demandeurs d’emploi. Derrière nos périmètres institutionnels, qu’ils soient nationaux, régionaux, syndicaux ou patronaux, il y a en effet des millions d’hommes et de femmes pour lesquels la « sécurisation » que j’évoquais doit être bien plus qu’un mot. Elle doit être une assurance
- assurance d’une reconversion quand son emploi vient à disparaître,
- assurance d’améliorer ses compétences voire d’acquérir une qualification, et donc de s’ouvrir le champ des possibles professionnels,
- assurance enfin d’avoir une protection contre l’incertitude de l’économie, un filet qui évite de se retrouver livré à son propre sort au gré du fonctionnement du marché et des accidents conjoncturels.
2. L’approche territorialisée
Le second élément qui fonde à mes yeux l’importance de cet accord, c’est qu’il permet de compléter notre approche traditionnelle par publics (les demandeurs d’emplois, les premiers niveaux de qualifications, les personnes en situation d’illettrisme), par une approche territorialisée, c’est-à-dire inscrite dans une géographie ou, pour le dire en spécialiste de la politique de l’emploi, par bassin d’emploi.
Notre accord-cadre le souligne : l’action du FPSPP peut aussi être territorialisée. La loi, dès 2009, en prévoyait la possibilité mais nos prédécesseurs, vous le savez, y étaient peu favorables.
Nous le savons bien, il est faux de croire que nous serons tous mobiles et sans attache. Il est donc pertinent de travailler à l’échelle du bassin d’emploi. Ensuite, la même question est toujours posée : à cette échelle, qui est le plus compétent pour agir ? Avec cet accord, nous proposons une réponse à cette question : sortons des querelles théoriques pour savoir si l’Etat, les régions ou les partenaires sociaux sont les plus à même d’agir… et agissons justement ensemble !
Agissons au plus près des besoins des salariés ET des entreprises. Car la sécurisation n’est pas seulement l’affaire des salariés, mais aussi celle des entreprises qui ont besoin d’une main d’oeuvre formée, confiante, impliquée.
Le saut de compétitivité se trouve ici. Nous le savons bien, dans un monde où les mutations s’accélèrent et où la concurrence internationale se renforce, notre compétitivité ne se joue plus seulement sur les prix, mais aussi sur la qualité de nos produits et services, et donc sur la qualification des femmes et des hommes dans nos entreprises.
C’est donc à nous tous, collectivement, de créer cet écosystème favorable à la performance économique et sociale de nos entreprises et de nos salariés. Cet accord, qui incite les partenaires sociaux à renforcer leur représentation et leur capacité d’action au niveau local, y contribue.
C’est un tournant qui peut être extrêmement fructueux pour l’avenir. Ce n’est pas l’union sacrée, mais ça y ressemble. C’est l’union des signataires pour améliorer dans les territoires
- l’insertion professionnelle durable des jeunes et leur accès à au moins un premier niveau de qualification,
- l’accès à la formation des demandeurs d’emploi, et des salariés notamment les plus fragiles. Mais pourquoi tout cela me direz-vous ? Parce que la bataille de l’emploi, ce n’est pas seulement de créer des emplois aidés, même de grande qualité, même comportant de la formation. Je pense bien sur aux emplois d’avenir, dont le succès est en partie lié à l’investissement du FPSPP qui participe au financement de leur formation,. C’est important, c’est nécessaire mais ce n’est pas suffisant. « L’union pour l’emploi », c’est aussi l’accès pour tous, salariés ou demandeurs d’emploi, aux savoirs, compétences et qualifications dans la durée. Voilà une arme massive contre le chômage et un levier puissant pour permettre le retour à l’emploi, les évolutions professionnelles et les reconversions lorsqu’elles sont nécessaires. Par le déploiement des politiques de filières, d’anticipation, de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, nous construisons une politique structurelle, en plus des outils conjoncturels pour faire face à la crise.
3. Les mutations économiques
Le troisième élément structurant de cet accord, c’est le cadre donné pour mettre en oeuvre des actions d’accompagnement des mutations économiques, qui seront financées par le biais d’un appel à projet spécifique du fonds paritaire. Son objectif principal : anticiper les mobilités des salariés et particulièrement de ceux qui évoluent dans des TPE-PME.
Parmi ces mutations, figurent au premier rang celles liées à la transition écologique et au développement du numérique.
Nous ne pouvons pas aller contre les mouvements profonds de l’économie – nous ne le souhaitons d’ailleurs pas : des emplois vont se créer, d’autres se détruire et d’autres encore changer profondément. C’est normal, c’est le cycle économique. Et il va de plus en plus vite.
Alors, il nous faut accompagner, je dirais même devancer, ce mouvement, en formant en amont, en étant capable d’anticiper les mutations de l’activité, l’évolution des compétences – et ce, territoire par territoire. Il nous faut pouvoir moderniser ici des activités déclinantes en apportant des compétences nouvelles, là créer des passerelles entre celles qui s’éteignent et celles qui prennent de l’ampleur, ailleurs mutualiser la formation, en créant des pôles territoriaux et des solidarités.
C’est ce que nous faisons déjà dans les treize plateformes d’appui aux mutations économiques que nous avons mises en place depuis 6 mois dans le cadre du Pacte National pour la Croissance, la Compétitivité et l’Emploi.
Aujourd’hui, je veux que nous allions plus loin. Ayons l’ambition d’être demain bien plus forts dans les périodes de transitions souvent difficiles. C’est là que notre plus-value est réelle : sécuriser les transitions, agir contre les fragilités du marché du travail.
Je sais que tous les territoires peuvent réussir.
Alors en avant !
Appuyons nous sur cet accord pour constituer ensemble une réponse collective qui assurera à chacun – chaque individu ou chaque bassin d’emploi – des sécurités dynamiques, adaptées au mouvement de l’économie.
Pour cela, deux conditions doivent être réunies :
- D’abord une mobilisation collective, pas seulement des opérateurs, mais aussi des décideurs et les financeurs, mobilisation qui doit permettre, je le souhaite, de décliner cet accord cadre dans chaque région par une convention tripartite.
- Ensuite, celle des moyens bien sur. Pour ce qui est de l’accompagnement des mutations économiques, l’Etat et les partenaires du fonds ont d’ores et déjà décidé de mettre 10 millions d’euros pour le restant de l’année 2013. L’an prochain, nous pourrons, je l’espère, multiplier par trois ou quatre ce montant, et je ne doute pas que l’Etat et les Régions sauront conforter cet effort.
Les conventions régionales auront pour objet de déterminer les objectifs et les modalités de ce partenariat, incluant la nature et le montant des cofinancements. Elles seront les « bras armés » de l’ambition politique et collective que je viens de vous décrire. Cap donc désormais sur les projets et les actions car les défis ne manquent pas et il y a beaucoup de belles réalisations devant nous.
L’heure est aux nouvelles ambitions. Je vous fais confiance, je nous fais confiance, pour les atteindre ensemble.
Je vous remercie.
Source http://travail-emploi.gouv.fr, le 11 octobre 2013