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C'est la deuxième fois que nous nous retrouvons dans le cadre du salon infirmier, la plus grande manifestation paramédicale d'Europe.
Au fil des éditions, votre salon connaît un succès croissant : il est devenu un événement incontournable pour toutes celles et ceux qui s'intéressent aux enjeux de la santé. Votre corps de métier est celui qui rassemble le plus grand nombre de professionnels paramédicaux. Votre rôle est décisif, puisque vous êtes présents à chaque étape du parcours de soins. La proximité que vous entretenez avec vos patients explique l'attachement qu'ils expriment à votre égard.
Je suis venue aujourd'hui vous adresser trois messages.
I/ Vous êtes des acteurs à part entière de la stratégie nationale de santé.
Pour enclencher la refondation de notre système de soins, j'ai présenté, le 23 septembre dernier, les trois piliers de cette stratégie : développer partout, et à tous les âges de la vie, le « réflexe prévention » ; structurer la médecine de parcours à partir des soins de premier recours et développer les droits des patients.
La prévention vous est plus que familière : elle constitue même votre « rôle propre », le cur de votre métier.
En effet, non seulement vous conduisez les actions de prévention, mais bien souvent vous en êtes à l'origine. Votre champ d'intervention est très large : vous vaccinez parfois, vous prodiguez souvent des conseils pour améliorer l'hygiène de vie, pour lutter contre le tabagisme, pour favoriser une bonne nutrition.
Sur le terrain, vos initiatives sont nombreuses pour renforcer la prévention. Je pense à des exemples très concrets, comme cette infirmière qui a développé, dans le cadre de son exercice en libéral, un programme de suivi éducatif des patients diabétiques ou cet infirmier exerçant à l'hôpital qui accompagne ses patients après leur hospitalisation : il améliore ainsi significativement leurs conditions de sortie.
Pour développer encore ces réflexes, pour renforcer la prévention, je fixerai dans la loi des priorités, avec des objectifs chiffrés. Dans chaque région, des concertations s'engageront.
Pour développer la prévention, je veux aussi donner un nouvel élan au transfert de compétences.
Cet engagement, je l'avais formulé devant vous, il y a tout juste un an. Dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, je proposerai la mise en place d'un conseil des financeurs. Son rôle sera de traiter, en amont, la question du modèle économique des protocoles de transfert de compétences. Nous lèverons ainsi l'un des principaux obstacles à la poursuite de ce processus.
J'ai également demandé à la Haute autorité de Santé de dresser un bilan exhaustif de l'état d'avancement de ce chantier. Je veux faire preuve de pragmatisme : pour être pleinement efficaces, nous devons savoir ce qui a fonctionné, dans quelles conditions et avec quels acteurs. Par ailleurs, je serai très vigilante quant au bilan qui sera fait des protocoles : la qualité des soins et la gestion des risques vis-à-vis du patient devront être irréprochables.
Je tiens à ce qu'il n'y ait aucune ambigüité sur le sens que je donne aux transferts de compétences. Leur objectif, c'est d'abord et avant tout d'améliorer la qualité des prises en charge.
La stratégie nationale de santé, c'est aussi, évidemment, la révolution du premier recours.
Cette nouvelle organisation passera par le travail en équipes. Le médecin traitant est responsable de l'état de santé global. Il ne s'agit aucunement d'instituer la primauté d'une profession sur l'autre. J'ai entendu vos inquiétudes et je tiens à vous rassurer. La stratégie nationale de santé ne vise pas à subordonner les professionnels de santé au médecin. Elle ne vise pas à établir de hiérarchie.
Dans le cadre du projet de financement de la sécurité sociale pour 2014, je donnerai aux professionnels les outils financiers dont ils ont besoin.
II/ Mon second message concerne vos conditions d'exercice dont je sais qu'elles peuvent être éprouvantes.
La nuit, le week-end et les jours fériés, vous accompagnez les patients à chaque instant. Le stress, les jours alternés, les repos décalés ou supprimés ces irrégularités peuvent dégrader votre vie personnelle.
Parce que vous êtes en première ligne, il arrive que vous soyez victimes de violences. Cela ne peut être toléré. Et cela concerne tous les modes d'exercice, à l'hôpital comme en ville. C'est pourquoi j'adresse une circulaire aux ARS pour qu'elles portent une attention particulière à ces situations et s'assurent de la formation des professionnels à la prévention des situations de violence.
A l'hôpital, dans le cadre du pacte de confiance, j'ai pris 13 engagements, dont plusieurs d'entre eux concernent directement l'amélioration de vos conditions de travail : d'ores et déjà, les travaux ont commencé. En redonnant toute sa place au dialogue social à l'hôpital, je souhaite que vos attentes, ainsi que celles de la communauté hospitalière tout entière, soient mieux prises en compte. Des négociations sont en cours et ont déjà bien avancé.
En parallèle, je me suis engagée à dégager des crédits fléchés qui seront dédiés à l'amélioration de vos conditions de travail. Ce qui importe, c'est surtout ce à quoi vont être destinés ces fonds et comment ils seront utilisés. Au cours des discussions avec les organisations représentatives de la fonction publique hospitalière, un consensus s'est établi sur le fait que les équipes devaient contribuer à élaborer les plans d'amélioration des conditions de travail. Quoi de plus normal en effet, que les utilisateurs participent au choix du matériel et que les formations soient ciblées en fonction de vos besoins ?
Mais je sais que l'enjeu des conditions de travail est plus large encore. Il concerne aussi, par exemple, la prévention par l'amélioration des conditions de travail. Cette question fera l'objet d'une négociation spécifique dans un cadre commun à la fonction publique.
La ministre de la fonction publique ouvrira prochainement des négociations inter-fonction publique sur le thème de la prévention de la pénibilité. Il conviendra de travailler en relation étroite avec les partenaires sociaux sur les dispositifs qui permettront de reconnaître la pénibilité des métiers du soin dans la fonction publique hospitalière.
S'agissant de l'exercice en libéral, la constitution des équipes aura un impact positif sur vos conditions de travail.
Le partage des expériences et des savoirs, l'interaction des compétences contribueront à modifier votre exercice professionnel. Par ailleurs, la mutualisation des charges administratives permettra de libérer du temps que vous consacrerez au soin et à l'accompagnement du patient.
III/ Mon troisième message concerne votre formation. Il nous faut poursuivre le processus licence-master-doctorat.
Si je suis enthousiaste quant à l'objectif, j'estime que nous devons rompre avec la méthode utilisée ces dernières années.
Cette méthode a généré une grande confusion concernant l'intégration des formations sanitaires et sociales au dispositif LMD. Je veux donc clarifier : avec Geneviève FIORASO, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, nous mettrons en place une licence en santé. Mon objectif est de rapprocher la formation des différents professionnels. Il est logique de former un socle commun de formation pour des futurs soignants amenés à s'occuper des mêmes patients. La transversalité contribuera au développement de passerelles et à la diversité des parcours professionnels. Et l'attractivité même du métier d'infirmier s'en trouvera renforcée !
Sur le processus LMD, plusieurs d'entre vous attendent des avancées : je pense en particulier aux infirmières de puériculture et aux infirmières de bloc opératoire. Vous le savez, nous avons lancé, avec Geneviève FIORASO, une mission inter-inspections sur ce sujet. Je vous annonce que la feuille de route retenue à l'issue de ce rapport sera partagée dans les prochaines semaines.
Si la formation doit évoluer, c'est parce que vos métiers évoluent. C'est pourquoi, en parallèle, nous travaillerons dès l'an prochain avec les professionnels de santé pour identifier les nouveaux métiers dont nous aurons besoin. J'ai à l'esprit, en particulier, celui d'infirmier clinicien.
Pour finir, je souhaiterais dire un mot sur le sujet de l'ordre infirmier. L'an dernier, j'avais indiqué que j'étais favorable à ce que le Parlement se saisisse de ce sujet. Et bien c'est chose faite, puisqu'un groupe de travail a été créé à l'initiative de madame LE HOUEROU, députée. Je souhaite que les travaux de ce groupe puissent nous permettre d'avancer sur ce sujet. Je serai, comme je l'ai déjà dit, vigilante sur la nécessaire continuité des missions de service public qui incombent à l'ordre.
Mesdames et messieurs,
Cette année, vous avez choisi comme phrase d'accroche pour votre salon : « infirmière pour la vie ».
Voilà l'ambition que nous partageons. Car c'est bien en améliorant vos conditions de travail, en adaptant le contenu de vos formations, en vous permettant d'évoluer tout au long de la vie, que vous conserverez le goût pour ce métier formidable. C'est en atteignant ces objectifs, aussi, que nous relèverons, sur le terrain, les défis de la stratégie nationale de santé.
Je vous remercie.
Source http://www.social-sante.gouv.fr, le 21 octobre 2013