Texte intégral
Madame la présidente Eliane Assassi,
Je ne vais pas faire de surenchère verbale après votre intervention, mais je ne sais pas si vous, vous partagez vraiment ce que vous venez de dire, parce que vous allez très, très loin et je pense que ce type de discours aboutit au néant. Et aboutit surtout à l'impuissance, et je sais que ce n'est pas votre volonté. Votre volonté c'est bien que les choses aillent mieux pour les Français, c'est bien que le chômage recule, c'est que la justice sociale progresse et que les inégalités reculent, vous l'avez dit d'ailleurs dans votre propos mais les solutions je ne les vois pas.
Alors vous dîtes que gérer un pays ce n'est pas simplement être comptable. Le Gouvernement n'est pas un Gouvernement de comptables, mais il a des comptes à rendre, par contre, au peuple français. Et "comptes à rendre" ça veut dire que, et je le répète parce que je l'avais dit dans ma déclaration de politique générale de juillet 2012, que nous ne pouvons pas poursuivre le développement et l'avenir du pays en laissant filer à ce point la dette, payée par les générations futures, mais surtout qui nous empêche de préserver notre souveraineté et notre capacité à décider par nous-mêmes. Quand la dette atteint presque 100% du PIB et que, si on continue elle dépassera les 100%, est-ce que vous, vous pouvez accepter que nous soyons demain dans la main des marchés financiers ?
Vous avez rappelé les engagements du président de la République, notamment dans son discours du Bourget. Oui justement, ce n'est pas à la finance, ce n'est pas aux marchés financiers de décider pour la France. C'est la raison pour laquelle nous voulons mettre fin à cette spirale, car quand on a dans un pays un budget du remboursement des intérêts d'emprunts qui est plus important que le budget de l'Education nationale, alors c'est qu'il y a quelque chose qui ne va pas. Donc tout l'enjeu du Gouvernement ce n'est pas de faire une politique de comptable, mais c'est de faire une politique qui redonne à la France des marges de manoeuvre, des marges de manoeuvre pour investir, investir dans le soutien à l'innovation, l'investissement industriel dans les infrastructures mais aussi un soutien pour investir dans l'humain.
Croyez-vous que la France n'a pas besoin de refonder son école, je le disais tout à l'heure, pour qu'elle soit plus efficace, pour que le France n'accepte plus de se résigner à ce que chaque année 20 % des enfants échouent à l'école et que dans certains quartiers la norme ça ne soit pas simplement la réussite, comme c'est pour la majorité heureusement des enfants de notre pays, mais que la norme soit l'échec scolaire ? Pour ça il faut des moyens et gouverner c'est choisir et nous nous choisissons des priorités, je les ai évoquées il y a quelques instant en réponse à un sénateur UMP.
Alors j'essaie de vous convaincre, j'essaie de vous convaincre que ce que nous faisons non seulement est utile au pays mais juste, mais ça demande effectivement de la lucidité et du courage parce que ce n'est pas dans la fuite en avant verbale, ce n'est pas non plus dans la fuite en avant de la dépense budgétaire que vous trouverez les solutions. Il faut donc de la lucidité, du courage et un effort. Mais cet effort, il faut qu'il soit juste et c'est en effet tous les grands chantiers que nous avons lancés avec le président de la République, qui l'a évoqué dans son message de voeux aux Français, le 31 décembre dernier.
Demander aux entreprises un pacte pour renforcer encore l'engagement à investir, à innover, à embaucher, faire en sorte aussi que dans le dialogue social les salariés trouvent des contreparties, c'est ce qu'il a dit dans son discours, et je l'ai pas entendu dans le rappel que vous avez fait là, et vous avez dit : il n'y pas un mot sur la justice sociale, il n'y a pas un mot sur les inégalités. Mais enfin le président de la République a dit une chose extrêmement importante : c'est que nous devons réformer notre modèle, non pas pour l'abandonner mais pour le sauver.
Vous avez fait référence à 2012 et à la campagne des élections présidentielles. Un des désaccords fondamentaux que nous avions avec le Président sortant Nicolas Sarkozy, qui n'a pas été réélu, je vous le rappelle, c'était que, pendant plusieurs années il a voulu convaincre les Français qu'une des difficultés de la France à retrouver la performance économique, à retrouver la compétitivité, à retrouver la croissance, c'était le modèle français, c'était son modèle social, c'était son organisation politique. Eh bien, nous pensons le contraire, nous pensons que c'est un socle, que c'est un levier, qu'il faut activer, dont il faut se servir pour réformer, transformer, et c'est ce que François Hollande a dit dans son discours du Bourget lorsqu'il avait dit : "la France n'est pas le problème, mais la solution".
La solution nous devons la trouver en nous-même, dans ce que nous avons de meilleur, dans ce que la République a porté, et qui aujourd'hui ne tient pas toujours ses promesses. Et donc, ça demande, je le répète, du courage, de la lucidité, de la volonté pour réformer, transformer, et remettre sur les rails notre pays sans pour autant abandonner ce que nous sommes, c'est ça le combat du Gouvernement. Je souhaite que nous soyons encore plus nombreux à le soutenir. Je vous invite à le faire, parce qu'en matière de justice sociale, je n'ai pas de doute, c'est aussi votre volonté. Donc, si vous le voulez, avec un peu de simplicité, avec un peu d'écoute réciproque, je crois que nous pouvons avancer, et je préfère que vous laissiez de côté les paroles un peu excessives, les anathèmes parce que je crois qu'ils n'ont pas vraiment de raison d'être, et surtout, ils ne sont pas utiles à l'avenir de la France.
Source http://www.gouvernement.fr, le 10 janvier 2014