Déclaration de Mme Yamina Benguigui, ministre de la francophonie, sur le développement de l'espace francophone, à Paris le 27 janvier 2014.

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Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Représentants personnels,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames, Messieurs les Élus,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Je suis très heureuse de vous accueillir pour ce moment de rassemblement et de partage.
Le moment des voeux, c'est prendre le temps pour dire l'attachement à des équipes dont on ne connait pas forcément le visage, mais dont on connait l'énergie et le travail. C'est la même ambition qui nous anime pour contribuer au développement de l'espace francophone.
Un espace solidaire, un espace de dialogue dont les valeurs s'expriment aussi bien dans la langue qu'il partage que dans l'espoir qu'il nourrit.
L'espoir d'un monde toujours plus humain fondé sur le respect des droits des femmes et des hommes, le respect de la diversité, dont la langue française et son rayonnement sont les deux piliers fondamentaux : c'est l'humaniste intégral dont parlait Senghor.
Ces voeux pour la nouvelle année sont des voeux de paix, des voeux de bonne santé, qui vous sont d'abord adressés à vous, à vos familles et aux institutions que vous représentez.
Que nous soyons acteurs d'une francophonie politique, universitaire ou culturelle, que nous agissions par la coopération ou la diplomatie, c'est la même ambition qui nous anime pour contribuer au développement de l'espace francophone.
Je salue ici le travail dévoué, l'expertise remarquable et le volontarisme de toutes ces équipes qui, au Quai d'Orsay, permettent d'intégrer la francophonie au coeur de la diplomatie française.
Je tiens à remercier en particulier tous ceux et celles qui permettent le succès de ces initiatives. Je remercie personnellement le Secrétaire général de l'Organisation internationale de la francophonie, le président Abdou Diouf, le président de l'Association internationale des maires francophones (AIMF), Bertrand Delanoë, le président de l'Institut français, Xavier Darcos, le recteur de l'Agence universitaire de la francophonie (AUF), Bernard Cerquiglini, la présidente directrice générale de France médias monde, Marie-Christine Saragosse, le directeur général de TV5 Monde, Yves Bigot, la directrice générale de l'AFD, Anne Paugam, le délégué à la langue française et aux langues de France, Xavier North.
Et au moment où il s'apprête à partir de ses fonctions, je souligne l'excellent travail de Jean-Marc Berthon comme chef de la mission de la langue française et l'éducation du ministère des affaires étrangères.
Mesdames et Messieurs,
La Francophonie !
Combien de fois n'ai-je pas entendu la FRAN-CO-PHO-NIE au juste, mais qu'est-ce que c'est ?
La défense de la langue française ?
La France-Afrique ?
Cela ne fait-il pas partie du ministère de la culture ?
Mais est-ce que Daft Punk fait partie de la francophonie ?
Alors ce soir, c'est un immense plaisir pour moi de vous en dire deux mots :
La francophonie c'est d'abord un espace de 77 pays sur les cinq continents. C'est 220 millions de francophones dans le monde ; en 2050 ce seront 800 millions, dont 80 % en Afrique.
Cet espace se fera entendre de plus en plus dans le monde. C'est tout le sens de l'engagement pris par le président de la République François Hollande qui a souhaité créer un ministère dédié.
Ce formidable espoir démographique francophone doit être porté et accompagné par une politique linguistique déterminée pour assurer la transmission aux nouvelles générations.
La francophonie c'est un espace économique de proximité.
Car à compétences égales et dans le respect des procédures de passation de marchés publics, nos entreprises ont un plus : le transfert de compétences. Les populations ont en partage la langue française, c'est un avantage indéniable qu'il faut valoriser auprès des Etats. A chacun de mes déplacements, comme représentante personnelle du chef de l'Etat pour la francophonie, je défends les entreprises françaises auprès des chefs d'Etats et de gouvernements.
J'ai porté la parole de nos entreprises dans plus de 60 pays. J'ai signé de nombreux accords économiques, encore récemment deux accords aériens avec la République du Congo et la République démocratique du Congo, en novembre dernier.
La francophonie, c'est un espace et une langue qui attirent :
A Almaty, où la signature d'un accord historique entre la Sorbonne et l'université Abaï permettra à des étudiants de suivre des enseignements en français au Kazakhstan ;
A Sao Paulo, où l'assemblée générale de l'Agence universitaire de la francophonie a permis de renforcer les coopérations avec le Brésil et le continent sud-américain ;
En Asie, où le défi du renouvellement du corps enseignant francophone a donné lieu à un plan de formation des enseignants de français que j'ai signé à Bangkok en octobre dernier.
Au sein de cet espace francophone en expansion, la culture sous toutes ses formes reste un formidable trait d'union entre les peuples ; le cinéma participe à la diffusion de la culture francophone.
C'est pourquoi j'ai soutenu la création en juin dernier des premiers trophées du cinéma francophone à Dakar ; j'ai engagé la participation du ministère des affaires étrangères au festival du film francophone d'Angoulême ; j'ai été présente aux festivals francophones organisés au Burkina Faso - j'ai d'ailleurs à cette occasion signée une convention de formation aux métiers du cinéma, en Tunisie, en Belgique.
La francophonie, c'est un espace de droits :
En mars 2013, avec le soutien actif de l'Organisation internationale de la francophonie, j'ai organisé le premier Forum mondial des femmes francophones à Paris. Il a réuni plus de 700 femmes et hommes des 77 pays de la francophonie, sur la question des droits des femmes dans l'espace francophone. Un appel a été signé et remis au président François Hollande.
De ce forum et de cet appel sont nés un certain nombre d'actions :
- Le 11 octobre 2013, nous avons lancé avec TV5 Monde le site Terriennes, femmes francophones ;
- Le 25 octobre 2013, l'OIF a créé le réseau francophone de l'égalité femmes-hommes. Il lance sa phase opérationnelle demain à Dakar et a vocation à porter très largement la parole de la société civile auprès des institutions de la francophonie ;
- Le 7 novembre 2013, le Sénégal a annoncé que le thème du prochain sommet de la francophonie serait : «Femmes et jeunes : vecteurs de paix, acteurs du développement». C'est la première fois, grâce à l'impulsion de la France, que la question des femmes est le sujet d'un sommet.
- Toujours le 7 novembre, j'ai demandé officiellement aux instances de la Francophonie qu'une déclaration solennelle et spécifique sur le droit des femmes soit élaborée et annexée aux textes fondamentaux de la francophonie.
Le français, c'est une langue accessible à tous, c'est une langue pour tous, c'est pourquoi j'ai lancé en juillet dernier le site «Parlons français c'est facile» accessible en sept langues dont l'arabe et le chinois.
Ensemble Chers Amis, nous avons encore en 2014, l'occasion de faire vivre cette francophonie. D'ici au XVe sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de la francophonie qu'accueillera Dakar en novembre prochain, nous avons de nouveaux chantiers, de nouvelles actions francophones.
L'année 2014, sera aussi l'année de la francophonie en France et du «français, langue du travail», conformément à mon plan d'actions adopté en 2012.
En tant que ministre de la francophonie, j'ai placé dans le périmètre qui est le mien la langue française au coeur de la mobilisation pour l'emploi, la langue française comme clé pour l'emploi des jeunes.
Chaque année, 150.000 jeunes quittent le système scolaire sans maîtriser les bases de la langue française.
Cette population se retrouve sur le bord de la route, reléguée, oubliée, exclue du monde du travail, de la société. La base de tous les savoirs, de tous les pouvoirs, c'est la maîtrise de la langue française.
J'ai donc l'intention de confier à un parlementaire une mission d'étude sur cette question.
Avec le projet «le français, langue du travail», nous mettrons le français au coeur de l'insertion dans le monde du travail. Tout doit être entrepris pour redonner confiance à cette jeunesse, pour la restaurer dans sa dignité, dans sa pleine citoyenneté.
Les 3 et 4 mars prochain, dans 5 semaines exactement, se tiendra le 2e Forum mondial des femmes francophones, à Kinshasa en République démocratique du Congo. Il portera sur «Les femmes et le développement» et se déclinera autour de 3 thèmes :
- Femmes et paix ;
- Femmes et éducation ;
- Femmes et pouvoirs.
Et parce que j'ai l'habitude de dire que les droits des femmes sont le baromètre implacable de l'évolution des sociétés, les conclusions de ce Forum seront remises très solennellement à l'OIF et au Sénégal comme contribution de la société civile sur les droits des femmes dans ce vaste et magnifique territoire que représente, sur les cinq continents, la francophonie.
Durant l'année écoulée, nous avons fait le constat qu'une politique linguistique efficace devait se concentrer sur les territoires où la transmission qualitative du français présente des signes d'affaiblissement.
La France lancera dès le 20 mars prochain le projet «100 000 professeurs pour l'Afrique» pour la formation d'enseignants à l'échelle du continent.
Ce projet associe le Centre international d'etudes pédagogiques et l'Institut français comme partenaires français aux côtés des universités et écoles de formations des maitres africaines.
Il permettra d'introduire de nouvelles actions de formation dans 9 pays et vient renforcer les actions de formations existantes dans 11 pays différents, tant en Afrique francophone qu'anglophone.
Nous axerons notre politique sur la formation à distance du français, grâce à des logiciels mis à disposition librement.
Mesdames et Messieurs,
Comme d'autres zones du monde, l'espace francophone n'a pas été épargné en 2013 par les crises. J'en retiens surtout la solidarité francophone qui s'est manifestée en ces occasions.
Celle de l'OIF qui déploie toujours plus avant ses efforts de médiation et s'engage dans les processus électoraux.
Celle de la France, qui a pris ses responsabilités au Mali comme en Centrafrique.
Celle des pays africains qui déploient des contingents sous mandat africain ou Nations unies.
En République démocratique du Congo, la prise de conscience des atrocités commises dans l'est du pays et des violences sexuelles de masse a entraîné un sursaut de la communauté internationale, le renforcement de la MONUSCO et la restauration de l'autorité centrale.
En ce début d'année, la perspective prochaine du retour de Madagascar dans l'OIF ou encore l'adoption d'une constitution consensuelle en Tunisie sont autant de motifs de satisfaction pour la francophonie politique.
L'année 2013 a commencé avec la disparition de Norodom Sihanouk, l'un des pères fondateurs de la francophonie, et s'est achevée avec celle de Nelson Mandela, l'incarnation du combat pour la liberté de tout un peuple.
Deux hommes différents, mus par la même passion de la liberté, de la dignité, avec, chevillée au coeur, la même certitude que rien ne se construit sans respect de l'homme et de ses droits, et la conviction que ce combat est encore plus noble quand il est dénué de ressentiment et vise à la réconciliation.
En 2014, deux figures de femmes francophones ont émergé : Rachel Mwanza, l'enfant des rues de Kinshasa, devenue «miraculeusement» l'actrice reconnue du Festival de Berlin, aujourd'hui Ambassadrice de bonne volonté à l'UNESCO, et Catherine Samba-Panza, à la tête de la Centrafrique : c'est la première fois qu'une femme est élue présidente d'un pays d'Afrique francophone, c'est l'élection historique d'une femme présidente, pour incarner l'espoir de tout un peuple déchiré par la haine de l'autre et ramener la paix.
Chers Amis, je vous souhaite une belle année francophone 2014 à tous.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 janvier 2014