Texte intégral
Madame la Ministre de la Culture et de la Communication, Chère Aurélie Filippetti,
Monsieur le Délégué général à la langue française, Cher Xavier North,
Monsieur le Président de la Bibliothèque nationale de France, Cher Bruno Racine,
Mesdames et Messieurs les Personnalités du monde des arts et de la culture,
Mesdames et Messieurs les Responsables d'institutions culturelles,
Chers Invités, Chers amis,
Je suis très heureuse d'être aux côtés d'Aurélie et de Xavier pour lancer la semaine de la langue française et de la francophonie à partir de l'un de ses plus prestigieux écrins, la Bibliothèque nationale de France.
Pour moi, tous les francophones répartis sur les cinq continents contribuent au renouveau lexical et à l'enrichissement de la langue, renouveau et enrichissement qui sont au coeur de cette semaine de la langue française.
Il y a les orfèvres en la matière et ils sont nombreux rassemblés ici aujourd'hui : les écrivains, les auteurs, tous les artistes qui plongent dans les profondeurs de la langue pour la réinventer et faire surgir, au coeur des lignes, des émotions nouvelles.
Parfois ils créent des mots comme Rimbaud qui, coloriste de voyelles, fait bombiner «les mouches éclatantes», et évoque les «mers virides» et leur «divins vibrements».
Mais c'est aussi dans les rues de Paris, dans les rues de Bamako, dans les rues de Montréal, dans les rues de Dakar, dans les rues de Bruxelles, dans les rues de Tunis et de Toulouse, dans les rues de l'espace francophone que la langue française palpite, rayonne et s'invente, une langue commune nourrie de cultures différentes.
L'espace francophone est à la fois un atelier de création et un laboratoire de recherche et de développement de la langue française.
C'est ainsi qu'aujourd'hui dans tous les pays francophones les ambianceurs font danser les jeunes et les moins jeunes : ambiancer, un des 10 mots retenus pour les défis «Dis-moi dix mots», vient des maquis et des discothèques de l'Afrique de l'ouest.
Il y a l'artisanat et le façonnage des mots de la vie quotidienne qui s'inspirent à la fois du français et de l'environnement linguistique et social immédiat des locuteurs :
- le chialage, le fait de se plaindre tout le temps, vient du Québec ;
- agender, fixer une date, de Suisse ;
- le brol, le fouillis, de Belgique.
Ces créations traduisent avec justesse et subtilité un sentiment, un ressenti, ou une réalité que d'autres mots peuvent exprimer mais de manière moins incisive, moins percutante.
Pour dire qu'une chose ou une personne avance ou marche lentement, nous disons : «avancer à pas de fourmis». Mais à y regarder de plus près, et toutes proportions gardées, les fourmis avancent vraiment très vite, beaucoup plus vite que nous le pouvons.
«Aller au pas de caméléon», expression congolaise, me parait décrire et évoquer avec plus de justesse notre désarroi face à tout ce qui n'avance pas assez rapidement.
L'invention de la langue française s'enrichit par le surgissement de nouvelles cultures, de nos nouveaux usages et de nouvelles images dans notre vocabulaire.
Mais cela n'est parfois pas suffisant pour nommer avec précision les transformations du monde, et quand nous n'avons pas, dans notre langue, un mot pour dire et nommer le nouveau, nous devons le chercher, l'inventer, le forger, au coeur de notre langue, si nous ne voulons pas que demain, l'anglais ou le franglais ne devienne notre langue par défaut.
Je salue l'initiative d'Aurélie Filippetti qui a mis en place le dispositif interministériel d'enrichissement de langue française et la commission générale de la terminologie et de néologie pour pouvoir conjuguer les apports de la recherche et de la création à ceux des lanceurs de mots qui vivent la langue française sur les cinq continents.
La langue française est dotée d'une extrême vitalité et dispose d'importantes ressources naturelles, mais encore faut-il vouloir les exploiter et les valoriser pour maintenir, renforcer et développer le rayonnement mondial et unique dont elle jouit depuis le siècle des Lumières.
C'est en Afrique que se trouvent les nouvelles sources d'énergie et de dynamisme de la francophonie.
En 2050, l'espace francophone sera formé de plus de 700 millions de locuteurs dont 9 sur 10 seront africains. L'Afrique est appelée à être le grand marché économique de demain, le principal lieu d'investissement mondial, le carrefour de tous les échanges culturels et humains.
Le français est la langue des affaires sur ce continent en devenir dont le taux de croissance moyen est de 6 % en 2013.
Le français est la langue de l'attractivité économique dans cette région du monde dont le PIB cumulé en 2020 pourrait atteindre 2000 milliards d'euros.
Pour toutes ces raisons je lancerai le 18 mars à Paris le programme de francophonie numérique «100.000 professeurs pour l'Afrique» : pour soutenir la transmission du français auprès des nouvelles générations, pour renforcer son attractivité dès aujourd'hui et miser sur ses immenses potentialités.
Notre objectif est de former des formateurs grâce aux nouvelles technologies pédagogiques. Ces formateurs, à leur tour, formeront les professeurs de français de demain.
Nous créons le premier réseau mondial d'enseignants de français grâce à la plateforme «Vizamonde» avec une ambition numérique mondiale pour l'enseignement du français et l'enseignement en français.
100.000 professeurs pour l'Afrique, c'est la 4G de l'enseignement de la langue française ! G pour Générations futures, G pour Gratuit, G pour Global et G pour Gagner !
Langue de la formation et langue de l'information, le français est présent sur tous les fronts de la communication.
Le rôle des grands médias internationaux comme France 24, RFI, Monte Carlo Doualiya et TV5Monde est crucial pour défendre la liberté d'expression des francophones qui commence par la liberté de pouvoir parler et s'informer en français.
La langue française est un réseau social mondial vivant et je me félicite de toutes les initiatives qui vont permettre de montrer ses capacités d'invention et d'adaptation tout au long de cette semaine, en France, dans l'espace francophone, dans le monde entier et dans l'espace numérique.
Le ministère de la culture et de la communication et la délégation générale à la langue française ont programmé de nombreuses actions sur le territoire national, et je salue les marraines et les parrains qui les accompagnent, ces «grands témoins» qui travaillent avec les mots et incarnent avec talent le génie de notre langue.
La semaine de la langue française et de la francophonie est aussi un temps fort du calendrier culturel de la diplomatie française : les services culturels des ambassades, les Instituts français et les Alliances française se mobilisent avec enthousiasme pour faire vivre cette semaine au plus grand nombre et partager avec les enseignants et les apprenants le plaisir d'inventer et de découvrir une langue, la joie de jouer avec les mots.
Grâce aux programmes et dispositifs élaborés par les pays ayant le français en partage et par l'Organisation internationale de la francophonie, la semaine de la langue française et de la francophonie est devenue un événement mondial incontournable qui réunit des millions de personnes qui participent toutes au renouveau lexical et à l'enrichissement de la langue.
J'en veux pour preuve que le mot semaine ne désigne plus une période de sept jours mais un mois tout entier, un mois dédié à la langue française, un mois dont l'apogée sera la Journée mondiale de la francophonie le 20 mars prochain.
Pour moi, chaque jour est une journée mondiale de la francophonie, chaque semaine est une semaine de la langue franaise et de la Francophonie et je peux vous dire que dans tous les pays où je me suis rendue depuis ma prise de fonction, j'ai entendu combien la langue française est porteuse de renouveau et d'enrichissement, mais aussi d'espoir.
C'est parce qu'elles partagent toutes la même langue que les femmes qui nous rejoindront en République démocratique du Congo à Kinshasa au 2e forum mondial des femmes francophones les 3 et 4 mars prochains, pourront participer à l'élaboration d'un nouveau statut des femmes dans l'espace francophone.
Car c'est avec des mots que l'on inscrit des droits dans les constitutions.
Éducation, égalité, justice, paix, démocratie, développement, mais aussi «bois mort» qui signifie l'amputation de la féminité, la mutilation sexuelle, l'excision.
Je leur fais confiance pour en inventer de nouveaux pour faire entendre leurs voix et leurs choix.
Je me souviens lors du tournage de mon documentaire «Mémoires d'immigrés, l'héritage maghrébin» de ces pères, venus dans les années 50, qui vivaient toujours dans les foyers de leur jeunesse, fascinés par la télévision, devenue la compagne bruyante de leur solitude muette, pour entendre le bruit des mots.
Je me souviens aussi de cette mère, arrivée en France avec le regroupement familial me racontant :
«En France, j'ai rangé mon foulard dans ma valise, et au bout de quelques années, j'ai mis mon premier maillot de bain».
Puis en me regardant dans les yeux, elle avouait, la voix nouée, «Ce que j'aurais voulu par-dessus tout, c'est apprendre à lancer les mots».
Lancer des mots c'est aussi innover, imaginer des mots nouveaux qui correspondent aux innovations du monde contemporain, qu'elles soient humaines, culturelles, scientifiques, techniques, économiques, politiques ou poétiques.
Lancer des mots, tel sera le défi réussi de cette Semaine de la Langue française et de la Francophonie, qui offre au grand public l'occasion de fêter la langue française en lui manifestant son attachement et en célébrant sa richesse et sa diversité.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 février 2014
Monsieur le Délégué général à la langue française, Cher Xavier North,
Monsieur le Président de la Bibliothèque nationale de France, Cher Bruno Racine,
Mesdames et Messieurs les Personnalités du monde des arts et de la culture,
Mesdames et Messieurs les Responsables d'institutions culturelles,
Chers Invités, Chers amis,
Je suis très heureuse d'être aux côtés d'Aurélie et de Xavier pour lancer la semaine de la langue française et de la francophonie à partir de l'un de ses plus prestigieux écrins, la Bibliothèque nationale de France.
Pour moi, tous les francophones répartis sur les cinq continents contribuent au renouveau lexical et à l'enrichissement de la langue, renouveau et enrichissement qui sont au coeur de cette semaine de la langue française.
Il y a les orfèvres en la matière et ils sont nombreux rassemblés ici aujourd'hui : les écrivains, les auteurs, tous les artistes qui plongent dans les profondeurs de la langue pour la réinventer et faire surgir, au coeur des lignes, des émotions nouvelles.
Parfois ils créent des mots comme Rimbaud qui, coloriste de voyelles, fait bombiner «les mouches éclatantes», et évoque les «mers virides» et leur «divins vibrements».
Mais c'est aussi dans les rues de Paris, dans les rues de Bamako, dans les rues de Montréal, dans les rues de Dakar, dans les rues de Bruxelles, dans les rues de Tunis et de Toulouse, dans les rues de l'espace francophone que la langue française palpite, rayonne et s'invente, une langue commune nourrie de cultures différentes.
L'espace francophone est à la fois un atelier de création et un laboratoire de recherche et de développement de la langue française.
C'est ainsi qu'aujourd'hui dans tous les pays francophones les ambianceurs font danser les jeunes et les moins jeunes : ambiancer, un des 10 mots retenus pour les défis «Dis-moi dix mots», vient des maquis et des discothèques de l'Afrique de l'ouest.
Il y a l'artisanat et le façonnage des mots de la vie quotidienne qui s'inspirent à la fois du français et de l'environnement linguistique et social immédiat des locuteurs :
- le chialage, le fait de se plaindre tout le temps, vient du Québec ;
- agender, fixer une date, de Suisse ;
- le brol, le fouillis, de Belgique.
Ces créations traduisent avec justesse et subtilité un sentiment, un ressenti, ou une réalité que d'autres mots peuvent exprimer mais de manière moins incisive, moins percutante.
Pour dire qu'une chose ou une personne avance ou marche lentement, nous disons : «avancer à pas de fourmis». Mais à y regarder de plus près, et toutes proportions gardées, les fourmis avancent vraiment très vite, beaucoup plus vite que nous le pouvons.
«Aller au pas de caméléon», expression congolaise, me parait décrire et évoquer avec plus de justesse notre désarroi face à tout ce qui n'avance pas assez rapidement.
L'invention de la langue française s'enrichit par le surgissement de nouvelles cultures, de nos nouveaux usages et de nouvelles images dans notre vocabulaire.
Mais cela n'est parfois pas suffisant pour nommer avec précision les transformations du monde, et quand nous n'avons pas, dans notre langue, un mot pour dire et nommer le nouveau, nous devons le chercher, l'inventer, le forger, au coeur de notre langue, si nous ne voulons pas que demain, l'anglais ou le franglais ne devienne notre langue par défaut.
Je salue l'initiative d'Aurélie Filippetti qui a mis en place le dispositif interministériel d'enrichissement de langue française et la commission générale de la terminologie et de néologie pour pouvoir conjuguer les apports de la recherche et de la création à ceux des lanceurs de mots qui vivent la langue française sur les cinq continents.
La langue française est dotée d'une extrême vitalité et dispose d'importantes ressources naturelles, mais encore faut-il vouloir les exploiter et les valoriser pour maintenir, renforcer et développer le rayonnement mondial et unique dont elle jouit depuis le siècle des Lumières.
C'est en Afrique que se trouvent les nouvelles sources d'énergie et de dynamisme de la francophonie.
En 2050, l'espace francophone sera formé de plus de 700 millions de locuteurs dont 9 sur 10 seront africains. L'Afrique est appelée à être le grand marché économique de demain, le principal lieu d'investissement mondial, le carrefour de tous les échanges culturels et humains.
Le français est la langue des affaires sur ce continent en devenir dont le taux de croissance moyen est de 6 % en 2013.
Le français est la langue de l'attractivité économique dans cette région du monde dont le PIB cumulé en 2020 pourrait atteindre 2000 milliards d'euros.
Pour toutes ces raisons je lancerai le 18 mars à Paris le programme de francophonie numérique «100.000 professeurs pour l'Afrique» : pour soutenir la transmission du français auprès des nouvelles générations, pour renforcer son attractivité dès aujourd'hui et miser sur ses immenses potentialités.
Notre objectif est de former des formateurs grâce aux nouvelles technologies pédagogiques. Ces formateurs, à leur tour, formeront les professeurs de français de demain.
Nous créons le premier réseau mondial d'enseignants de français grâce à la plateforme «Vizamonde» avec une ambition numérique mondiale pour l'enseignement du français et l'enseignement en français.
100.000 professeurs pour l'Afrique, c'est la 4G de l'enseignement de la langue française ! G pour Générations futures, G pour Gratuit, G pour Global et G pour Gagner !
Langue de la formation et langue de l'information, le français est présent sur tous les fronts de la communication.
Le rôle des grands médias internationaux comme France 24, RFI, Monte Carlo Doualiya et TV5Monde est crucial pour défendre la liberté d'expression des francophones qui commence par la liberté de pouvoir parler et s'informer en français.
La langue française est un réseau social mondial vivant et je me félicite de toutes les initiatives qui vont permettre de montrer ses capacités d'invention et d'adaptation tout au long de cette semaine, en France, dans l'espace francophone, dans le monde entier et dans l'espace numérique.
Le ministère de la culture et de la communication et la délégation générale à la langue française ont programmé de nombreuses actions sur le territoire national, et je salue les marraines et les parrains qui les accompagnent, ces «grands témoins» qui travaillent avec les mots et incarnent avec talent le génie de notre langue.
La semaine de la langue française et de la francophonie est aussi un temps fort du calendrier culturel de la diplomatie française : les services culturels des ambassades, les Instituts français et les Alliances française se mobilisent avec enthousiasme pour faire vivre cette semaine au plus grand nombre et partager avec les enseignants et les apprenants le plaisir d'inventer et de découvrir une langue, la joie de jouer avec les mots.
Grâce aux programmes et dispositifs élaborés par les pays ayant le français en partage et par l'Organisation internationale de la francophonie, la semaine de la langue française et de la francophonie est devenue un événement mondial incontournable qui réunit des millions de personnes qui participent toutes au renouveau lexical et à l'enrichissement de la langue.
J'en veux pour preuve que le mot semaine ne désigne plus une période de sept jours mais un mois tout entier, un mois dédié à la langue française, un mois dont l'apogée sera la Journée mondiale de la francophonie le 20 mars prochain.
Pour moi, chaque jour est une journée mondiale de la francophonie, chaque semaine est une semaine de la langue franaise et de la Francophonie et je peux vous dire que dans tous les pays où je me suis rendue depuis ma prise de fonction, j'ai entendu combien la langue française est porteuse de renouveau et d'enrichissement, mais aussi d'espoir.
C'est parce qu'elles partagent toutes la même langue que les femmes qui nous rejoindront en République démocratique du Congo à Kinshasa au 2e forum mondial des femmes francophones les 3 et 4 mars prochains, pourront participer à l'élaboration d'un nouveau statut des femmes dans l'espace francophone.
Car c'est avec des mots que l'on inscrit des droits dans les constitutions.
Éducation, égalité, justice, paix, démocratie, développement, mais aussi «bois mort» qui signifie l'amputation de la féminité, la mutilation sexuelle, l'excision.
Je leur fais confiance pour en inventer de nouveaux pour faire entendre leurs voix et leurs choix.
Je me souviens lors du tournage de mon documentaire «Mémoires d'immigrés, l'héritage maghrébin» de ces pères, venus dans les années 50, qui vivaient toujours dans les foyers de leur jeunesse, fascinés par la télévision, devenue la compagne bruyante de leur solitude muette, pour entendre le bruit des mots.
Je me souviens aussi de cette mère, arrivée en France avec le regroupement familial me racontant :
«En France, j'ai rangé mon foulard dans ma valise, et au bout de quelques années, j'ai mis mon premier maillot de bain».
Puis en me regardant dans les yeux, elle avouait, la voix nouée, «Ce que j'aurais voulu par-dessus tout, c'est apprendre à lancer les mots».
Lancer des mots c'est aussi innover, imaginer des mots nouveaux qui correspondent aux innovations du monde contemporain, qu'elles soient humaines, culturelles, scientifiques, techniques, économiques, politiques ou poétiques.
Lancer des mots, tel sera le défi réussi de cette Semaine de la Langue française et de la Francophonie, qui offre au grand public l'occasion de fêter la langue française en lui manifestant son attachement et en célébrant sa richesse et sa diversité.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 février 2014