Texte intégral
Mesdames et Messieurs les officiers,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux de vous accueillir à l'Hôtel de Brienne, alors que vous vous préparez à assumer la responsabilité de représenter le ministère de la Défense, et singulièrement le ministre lui-même, à l'étranger, sur les cinq continents.
Au terme de votre formation, d'ici quelques semaines, vous allez intégrer l'un des réseaux d'attachés de défense les plus denses au monde, à la mesure d'un réseau diplomatique unique, qui garantit tout à la fois l'image de la France et la force de sa voix sur la scène internationale.
Depuis près de deux ans que j'occupe mes fonctions, j'ai fait de nombreux déplacements à l'étranger. De tous les attachés de défense que j'ai rencontrés à l'occasion de ces voyages, je retiens une triple conviction, que je voudrais partager avec vous : la mission que vous vous apprêtez à remplir est une mission essentielle, difficile, passionnante.
Une mission essentielle, parce que vous serez au cur de l'action de la Défense à l'étranger. Relais mais aussi acteurs de l'action internationale de la France, de sa diplomatie de défense, vous allez devoir faire vivre, selon les priorités définies ici, la relation bilatérale de défense. Mais votre rôle ne s'y bornera pas.
D'abord, vous animerez la coopération proprement militaire avec le pays où vous serez en poste. Ensuite, vous accompagnerez les industriels français dans leur démarche d'export, en lien avec la DGA. Dans un monde toujours plus globalisé et concurrentiel, l'attaché de défense est ainsi l'un des premiers relais de l'excellence industrielle et technologique. C'est là, également, une dimension majeure de votre mission. Des progrès ont été réalisés l'année dernière : en témoignent les chiffres encourageants de nos exportations d'armement. Mais nous devons impérativement poursuivre cet effort. Enfin, vous contribuerez à faire vivre le dialogue stratégique,en expliquant la stratégie et les intérêts de la France, ainsi qu'en expliquant, au besoin, ceux du pays qui vous accueillera. Le Livre blanc de 2013 doit être votre livre de chevet, autant que la LPM d'ailleurs ; il vous appartiendra d'en expliquer les messages et les déclinaisons. Enfin, vous jouerez un rôle important dans le domaine du renseignement. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles j'ai demandé au Général Gomart de me faire des propositions pour améliorer la prise en compte des relations avec la DRM, y compris dans vos processus de nomination.
En un mot, pour construire une relation de confiance dans la durée, vous serez les têtes de pont du ministère de la Défense dans toutes ses dimensions, et le relais de l'action du ministre dans tous ses volets.
Par votre capacité à intégrer, à l'étranger, toutes les dimensions de l'action du ministère, et pas uniquement sa dimension militaire, vous serez à la fois le relais et le reflet de la nouvelle direction générale de l'action internationale et de la stratégie de défense. Cette direction générale, j'en avais arrêté le principe dès l'été 2013 et nous venons d'en arrêter les missions, les effectifs et les contours aujourd'hui même, lors du Comité exécutif que j'ai présidé cet après-midi.
En effet, le ministère a mis à profit ces derniers mois pour travailler ensemble avec le CEMA, le DGA, le SGA et bien sûr Philippe Errera et permettre à la réforme de la fonction des relations internationales d'apporter une plus-value réelle à notre action.
Une réelle plus-value, d'abord en termes de cohérence : la situation précédente, marquée par une fragmentation et un cloisonnement excessifs, constituait un handicap que nous ne pouvions plus nous permettre.
Une réelle plus-value en termes d'efficacité, pour le ministère dans son ensemble, et plus particulièrement pour l'EMA et la DGA au quotidien. Il fallait lutter contre les duplications les plus évidentes, en un temps où le ministère,marqué par les diminutions d'effectifs dans toute l'administration centrale, ne peut plus se les permettre et où la perspective de l'installation de tous à Balard ouvre de nouveaux horizons au travail collectif. En permettant à chacun d'agir pleinement dans son métier,c'est bien notre capacité collective à agir, sur le plan interministériel comme sur le plan international, que nous allons renforcer.
Une réelle plus-value encore en termes d'animation de notre réseau à l'étranger. La nouvelle direction générale concentrera en effet la responsabilité du pilotage du réseau des postes permanents à l'étranger, au plan politique comme pour sa gestion. Cette direction générale sera donc votre interlocuteur au quotidien. Elle sera à votre disposition, comme elle comptera sur vous, vos analyses, vos conseils et vos propositions. Car l'influence ne se décrète pas elle se construit. L'influence ne se mesure pas de manière quantitative, en effectifs ou en postes, elle s'exerce, de manière dynamique : en transmettant les bonnes informations au bon interlocuteur au bon moment, en identifiant les opportunités de coopération et en les saisissant. Tout cela, vous le ferez,ensemble, avec la future direction générale.
La plus-value de cette direction générale ira au-delà même de la fonction internationale, en permettant au ministère de disposer d'une structure qui soit une force de réflexion et de proposition en matière de stratégie de défense et de prospective, en particulier pour renforcer la préparation,l'actualisation et le suivi du Livre blanc au niveau du ministère.
Tout cela, la Direction générale le fera en étroite collaboration avec l'état-major des armées et la Direction générale de l'armement, qui conservent leurs prérogatives propres, et seront désormais épaulés directement dans leur action internationale, comme dans la réflexion stratégique indispensable à notre métier.
Nous le savons tous, la réussite d'une telle réforme ne peut intervenir que si, au quotidien, entre les hommes et les femmes qui y sont impliqués, des relations de confiance permettent à tous de travailler, efficacement, dans le seul intérêt de notre ministère et de notre pays. J'ai pleine confiance en Pierre de Villiers, en Laurent Collet-Billon et en Philippe Errera, ainsi qu'en Jean-Paul Bodin, et en leurs équipes, pour travailler dans cet état d'esprit.
Voilà en quelques mots ce que je tenais à vous dire à propos de cette importante réforme, qui vous concerne au premier chef.
Sur l'utilité de votre mission, j'ajoute que, dans un monde qui demeure incertain et dangereux, la fonction d'attaché de défense peut devenir très opérationnelle. Nos attachés de Défense au Mali et en RCA vivent cette situation au quotidien. Votre horizon, même à distance de votre pays et de vos camarades, demeure fondamentalement militaire.
Une mission essentielle donc, une mission difficile aussi, que vous ne maîtriserez pas en quelques jours. De ce point de vue votre formation, commencée à Paris, ne s'arrêtera pas à la fin de votre stage. Je forme le vu que votre curiosité soit insatiable. C'est la première qualité qui vous est demandée. Il y en a évidemment bien d'autres. Je pense d'abord aux compétences dites techniques, comme la compréhension des relations internationales, vos capacités linguistiques, toujours précieuses, ou encore la connaissance que vous avez des différentes facettes du ministère, du renseignement aux exportations, qui est fondamentale maintenant que vous représentez, loin de votre armée d'origine, le ministère dans son ensemble.
Mais je pense surtout à des qualités humaines particulièrement précieuses dans un contexte étranger. J'ai parlé de la curiosité. Je veux parler aussi de l'intelligence de situation, qui est votre capacité à vous orienter dans le divers de situations qui parfois s'entrechoquent, qui vous permet de distinguer le sûr de l'incertain,l'essentiel de l'accessoire. Enfin, vos qualités proprement militaires sont spécialement à cultiver le temps de votre affectation. Elles constituent au premier chef la clé de votre crédibilité - une clé qui vous permettra d'ouvrir bien des portes.
Une mission difficile pour toutes ces raisons, mais pour laquelle vous avez été choisis, au terme d'une sévère sélection, qui vous honore et vous oblige. Le succès de votre mission, en tout cas, dépendra en bonne partie de l'équilibre personnel que vous saurez trouver. Je veux dire ici que la mobilité est au cur de votre vocation militaire. Mais si une affectation à l'étranger est bien souvent une chance pour vos familles, celle de découvrir avec vous de nouveaux horizons , elle peut être aussi une épreuve. Elle réclame donc de construire un projet partagé, et que toujours,conjoints et enfants soient associés, d'une façon ou d'une autre, à l'aventure dans laquelle vous vous lancez aujourd'hui. Et en disant cela, je me tourne naturellement vers les conjoints que je suis très heureux de saluer parmi vous ce soir. Ils ont pour cette raison toute leur place parmi nous.
J'ai enfin la conviction que c'est une mission passionnante qui vous attend.
A chaque époque ses troubles, et la nôtre ne fait pas exception. Mais notre temps, loin du confort de pensée des grands affrontements, nous met en présence d'une complexité géopolitique et d'une incertitude stratégique qui ont rarement été aussi grandes. Qui aurait pu penser il y a quelques semaines que nous serions aujourd'hui confrontés à une grave crise sur le sol européen. Dans vos fonctions, vous serez demain aux premières loges de ces grandes évolutions. Vous devrez être, au bord du « monde connu », les sentinelles de la Défense.
J'ai toute confiance en vous pour mener à bien la mission que nous vous confions aujourd'hui. Dans cette fonction, nous comptons sur vous pour donner le meilleur de vous-mêmes. C'est une nouvelle étape de votre parcours,une étape importante, singulière par les responsabilités qui seront les vôtres,par l'univers où vous évoluerez, mais je suis sûr que même loin du cadre familier de nos armées, vous demeurerez au plus près des missions et des valeurs de la Défense.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 7 avril 2014