Interview de M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics, à "LCI" le 9 avril 2014, sur le remaniement ministériel et les grandes orientations économiques pour relancer la croissance.

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Média : La Chaîne Info

Texte intégral

FRANÇOIS PALLEE
On va tout de suite aller retrouver Guillaume DURAND qui nous attend depuis les studios de RADIO CLASSIQUE avec son invité, son invité ce matin c'est Michel SAPIN, le ministre des Finances et des Comptes publics, ils vont bien sûr revenir sur la déclaration de politique générale de Manuel VALLS hier au perchoir de l'Assemblée. Guillaume ! C'est à vous, bonne interview.
GUILLAUME DURAND
Ravi de vous retrouver et ravi de retrouver Michel SAPIN ! J'ai beaucoup de questions, évidemment des questions ponctuelles, des questions à caractère économique et financières, ça c'est évidemment votre domaine. On va commencer par une question politique, est-ce que vous avez l'impression de l'intérieur que quelque chose a quand même changé et que le quinquennat, comme le disent certains commentaires ce matin, a véritablement commencé sur le plan politique hier ?
MICHEL SAPIN
Le quinquennat n'a pas commencé hier mais il a hier trouvé cette deuxième phase que souhaitait le président de la République, un deuxième moment, une deuxième phase. Il fallait d'abord colmater les brèches, c'est ce qui a été fait avec le gouvernement de monsieur AYRAULT et avec nous-mêmes pour beaucoup d'entre nous à des postes et même pour d'autres et, aujourd'hui, c'est l'élan c'est l'approfondissement, c'est la rapidité, c'est l'efficacité, c'est le temps des résultats, les résultats c'est ce qu'attendent les Français, les résultats c'est ce qu'ils nous reprochent de ne pas avoir vus suffisamment vite…
GUILLAUME DURAND
Et, ça, vous en êtes conscients ?
MICHEL SAPIN
Mais bien sûr !
GUILLAUME DURAND
Que sur le…
MICHEL SAPIN
Et je trouve qu'une des grandes caractéristiques du discours du Premier ministre hier c'était de regarder les vérités en face et y compris de la dire, y compris lorsque ça pouvait apparaître comme une forme de critique vis-à-vis de nous-mêmes – nous n'avons pas peur de la critique vis-à-vis de nous-mêmes, les Français nous ont adressé une critique - il faut donc tenir compte de cette critique…
GUILLAUME DURAND
Mais est-ce que vous…
MICHEL SAPIN
Non pas parce qu'il y aurait un changement de majorité à l'Assemblée nationale, c'est toujours la même majorité - heureusement - qui peut continuer cette politique, mais parce que, quand il y a une élection, quand on subit une défaite aussi forte que celle que nous avons subie, c'est qu'il y a un sens à donner et ce sens-là qui aujourd'hui a été mis en oeuvre, qui a été mis en force…
GUILLAUME DURAND
Donc, vous l'avez trouvé bon ?
MICHEL SAPIN
Qui a été mis en mouvement par le Premier ministre.
GUILLAUME DURAND
Donc, vous l'avez trouvé bon ?
MICHEL SAPIN
Mais je ne suis pas là pour distribuer des bons points, surtout pas à celui qui…
GUILLAUME DURAND
Oui ! Mais parce qu'au début on vous a tous trouvé inquiet ?
MICHEL SAPIN
A celui qui est dans l'Assemblée.
GUILLAUME DURAND
Il y avait une bronca dans l'Assemblée, on vous regardait, vous, Ségolène ROYAL, MONTEBOURG, la porte-parole – l'ancienne – du gouvernement, on vous a trouvé inquiet au début ?
MICHEL SAPIN
Je ne sais pas ce que vous appelez de l'inquiétude ! De la concentration, oui, parce que nous avions tous, tous, le sentiment que c'était un moment. D'ailleurs vous aussi, en tant que commentateur, vous aviez le sentiment que c'était un moment important ?
GUILLAUME DURAND
Oui !
MICHEL SAPIN
C'est toujours un moment important. Là, quand un nouveau Premier ministre vient devant une Assemblée avec une certaine hostilité aussi à droite, c'est une démocratie, il y a des…
GUILLAUME DURAND
Eh bien Christian JACOB vous a même traité de vieux cheval de retour…
MICHEL SAPIN
Oui !
GUILLAUME DURAND
Vous, Ségolène ROYAL et un certain nombre d'autres…
MICHEL SAPIN
J'ai trouvé ça…
GUILLAUME DURAND
Parce que vous étiez en poste…
MICHEL SAPIN
J'ai trouvé ça d'une élégance extraordinaire vis-à-vis de Ségolène ROYAL, pour moi bien entendu ça n'a aucune importance. Mais tout ça montre aussi qu'on peut avoir de l'expérience, il parait qu'il faut des pros, eh bien il y a des pros, des pros qui sont au gouvernement avec un Premier ministre jeune, déterminé, une fougue, une flamme…
GUILLAUME DURAND
Oui ! Alors…
MICHEL SAPIN
Oui ! Il y aune flamme dans ce discours, cette flamme d'être… fierté d'être Français et cette confiance dans les forces de la France. C'est ça qui manque aujourd'hui, il faut que les entreprises, les Français reprennent confiance en eux.
GUILLAUME DURAND
Alors, j'ai plein de questions. D'abord, est-ce que vous considérez que si jamais tout ça ne marche pas, -je parle du Pacte, les économies et de cet emballement dont vous parlez - si tout ça ne marche pas, Européennes, Régionales, tout ça pourra aboutir à une dissolution, si le PS se retrouve minoritaire ?
MICHEL SAPIN
La réponse est non et, d'ailleurs, ce n'est même pas la question. Nous faisons ça pourquoi ? Pour que ça marche !
GUILLAUME DURAND
Oui !
MICHEL SAPIN
Et vous voulez que je commence par vous dire ça ne va pas marcher ?
GUILLAUME DURAND
Non ! Non, je pose la question.
MICHEL SAPIN
La réponse est non ! Ca va marcher. Je ne le dis pas comme ça juste pour nous encourager nous-mêmes, mais parce qu'il y a – on aura peut-être le temps d'y revenir – dans ce qui a été présenté hier…
GUILLAUME DURAND
On va y revenir !
MICHEL SAPIN
Qui avait commencé à être préparé auparavant, mais qui est mis en mouvement aujourd'hui, il y a des solutions, il y a des décisions extrêmement concrètes, extrêmement précises pour les entreprises, pour les ménages, pour le financement, sans augmentation d'impôts, pour la diminution des déficits, enfin de quoi redonner confiance à notre…
GUILLAUME DURAND
Oui ! Mais le grand discours de l'opposition, monsieur SAPIN, c'est de dire justement : « ils nous ont promis le retournement de la courbe du chômage », c'est ça, c'est-à-dire qu'ils veulent voir, les mots oui…
MICHEL SAPIN
Mais l'opposition veut voir, évidemment, mais la majorité veut voir, les Français veulent voir, ils veulent voir des choses concrètes et précises. C'est le temps des résultats, c'est le moment…
GUILLAUME DURAND
Et pourquoi marcherait aujourd'hui ce qui n'a pas marché hier ?
MICHEL SAPIN
Mais parce que vous ne pouviez pas, dans un premier temps, lancer un bateau à toute vitesse alors qu'il était en train de couler. Moi je ne veux pas… Le Premier ministre ne l'a pas fait, il n'a pas voulu le faire, mettre tout sur le dos de l'ancienne majorité, mais soyons honnêtes les uns et les autres – à droite comme à gauche – la France…
GUILLAUME DURAND
Vous allez me reparler de SARKOZY ?
MICHEL SAPIN
Je vais même laisser Nicolas SARKOZY de côté pour vous faire plaisir ! La France… Je vais vous parler de la France, mais ça ne se résume pas seulement à un nom la France, celui d'hier ou celui d'aujourd'hui, la France était en mauvais état en 2014, ne me dites pas le contraire, il fallait donc colmater les brèches, il fallait faire en sorte que les déficits qui s'aggravaient on arrête cette aggravation - on a arrêté et on a même diminué les déficits – et on a eu recours, oui, ce qui nous est beaucoup reproché, à des augmentations d'impôts comme précédemment ça avait été fait, maintenant c'est terminé.
GUILLAUME DURAND
Alors plusieurs questions, parce qu'on va revenir sur le fond évidemment, parmi les propositions il y avait celle de rencontrer évidemment… Bon ! Il y a les partenaires sociaux évidemment à la fin de la semaine et il y a aussi l'idée de rencontrer les grands dirigeants de l'opposition, qui a été énoncé par Manuel VALLS…
MICHEL SAPIN
Oui !
GUILLAUME DURAND
Voici ce qu'en pense François FILLON qui était l'invité de Jean-Michel APHATIE il y a quelques instants, ce qui vous permettra de le commenter et, après, on rentrera dans le détail des mesures qui vous concernent, les finances. François FILLON ! FRANÇOIS FILLON, EXTRAIT SUR RTL – INVITE DE JEAN-MICHEL APHATIE Vous n'avez pas entendu hier d'attaque contre les riches, de dénonciation des patrons, des entreprises, du capitalisme mondial, donc c'est un discours qui marque le tournant social démocrate qui était annoncé mais c'est surtout un discours qui signifie que pendant 2 ans le gouvernement s'est trompé, qu'il a fait le contraire de ce qu'il fallait faire et qu'il faut maintenant essayer de remettre les choses à l'heure.
GUILLAUME DURAND
Alors ils rencontreront probablement le Premier ministre ! Mais cette idée, que nous avons déjà abordée, c'est-à-dire que ça démarre aujourd'hui quoi parce que vous vous êtes trompés pendant 2 ans, c'est quand même le thème de FILLON qui va présenter demain ses propositions économiques ?
MICHEL SAPIN
Je comprends que ce soit son thème et je n'attends pas de monsieur FILLON, même s'il est très mesuré aujourd'hui - et je salue cette mesure dans son appréciation vis-à-vis du discours du Premier ministre – il est dans l'opposition, je n'attends donc pas de monsieur FILLON qu'il nous décerne des bons points et qu'il nous offre un bouquet de fleurs – d'ailleurs les Français ne nous ont pas offert un bouquet de fleurs au cours de ces dernières élections. Non ! Nous ne nous sommes pas trompés pendant 2 ans pour faire autre chose aujourd'hui, nous avons remis à flot un bateau qui peut maintenant accélérer et on allume les moteurs, tous les moteurs, pour que la croissance soit plus forte, pour que les créations d'emploi soient plus fortes, pour que le financement de tout cela…
GUILLAUME DURAND
On y arrive !
MICHEL SAPIN
Se fasse par des économies et non pas par des augmentations d'impôts.
GUILLAUME DURAND
J'ai encore une question ponctuelle qui est importante ! On parle de Jean-Pierre JOUYET à la présidence, est-ce que vous avez des informations ? D'Harlem DESIR qui quitterait le pays, est-ce que vous avez des informations ? Et de Valérie RABAULT qui pourrait être ministre du Budget, ça vous concerne…
MICHEL SAPIN
Je n'ai aucune information sur aucun de ces 3 points !
GUILLAUME DURAND
Ce n'est pas possible !
MICHEL SAPIN
Eh bien j'ai le droit de ne pas avoir d'information !
GUILLAUME DURAND
Vous avez le droit de ne pas me le dire ! Mais vous avez des informations ?
MICHEL SAPIN
Mais j'ai le droit de ne pas avoir d'information.
GUILLAUME DURAND
C'est-à-dire rien.
MICHEL SAPIN
Et tout cela ça ne change rien à la vie po…
GUILLAUME DURAND
Ah ! Mais quand même.
MICHEL SAPIN
A la vie quotidienne des Français.
GUILLAUME DURAND
Eh bien ça change d'équipe ?
MICHEL SAPIN
Ca ne change rien à la vie quotidienne des Français et aux préoccupations des entreprises qui veulent aujourd'hui investir, embaucher et qui veulent en avoir les moyens.
GUILLAUME DURAND
Alors on va parler justement des chiffres qui concernent le soutien à la croissance, puisque c'est le grand objectif développé par Manuel VALLS. Je voudrais revenir sur les 39 milliards d'économies qui semble-t-il ont été quand même relativement documentés hier par le Premier ministre, il en manque une dizaine, est-ce que ça veut dire que dans les mois qui viennent, vous – puisque vous êtes ministre des Finances – vous allez nous apprendre qu'il y a des opérateurs de l'Etat qui vont disparaître, qu'il y a des gens qui vont fusionner, je ne sais pas, je pense à des choses comme le CNC, l'ADEME, enfin ce n'est pas ceux-là, mais est-ce que ça c'est prévu pour les 11 milliards qui manquent ?
MICHEL SAPIN
Je ne veux pas en citer ! Mais hier le Premier ministre a décrit de manière extrêmement précise, courageuse, volontariste une réforme des collectivités territoriales, de l'administration territoriale de la France, il y aura aussi une réforme profonde de l'organisation de l'Etat et de ce qu'on appelle habituellement ses opérateurs, un certain nombre d'établissements qui ont été créés, qui se sont multipliés - y compris et j'allais dire surtout sous la précédente majorité – une sorte de démembrement de l‘Etat qui, à la fin, finit par coûter cher…
GUILLAUME DURAND
Et quand est-ce qu'on aura la liste ?
MICHEL SAPIN
Sans pour autant que cela apporte beaucoup plus d'efficacité. Le travail…
GUILLAUME DURAND
Michel SAPIN, quand est-ce qu'on aura la liste de ceux qui vont disparaître…
MICHEL SAPIN
Le travail…
GUILLAUME DURAND
Etre mutualisés…
MICHEL SAPIN
Le travail est en cours…
GUILLAUME DURAND
Ou continuer ?
MICHEL SAPIN
Le travail est en cours. Vous avez dit, à juste titre, qu'hier le Premier ministre a décrit en grande masse, s'il était rentré dans le détail million par million vous auriez trouvé que ce discours était sans souffle et ce n'était pas son rôle, mais c'est mon rôle, il est rentré dans le détail de grande masse : les collectivités locales, l'assurance maladie, la sécurité sociale, l'Etat, nous aurons milliard par milliard une explication précise sur chacune de ces économies, c'est la vérité que nous devons aux Français…
GUILLAUME DURAND
Oui !
MICHEL SAPIN
C'est la vérité que nous devons aux parlementaires Français et c'est la vérité que nous devons aussi à nos partenaires Européens.
GUILLAUME DURAND
Oui ! Mais c'est quand, monsieur SAPIN ?
MICHEL SAPIN
Mais c'est d'ici la fin de ce mois, car après, au mois de mai et au mois de juin, au mois de juin nos partenaires Européens auront – et c'est normal – à échanger avec nous, nous sommes des partenaires, nous regardons attentivement ce qui se passe dans les autres pays, ils regardent attentivement ce qui se passe chez nous et il est normal que nous…
GUILLAUME DURAND
Donc on aura une feuille comme celle-là, documentée…
MICHEL SAPIN
Et le Premier ministre…
GUILLAUME DURAND
… économique ?
MICHEL SAPIN
Et le Premier ministre a annoncé qu'il y aurait une loi de finance rectificative à l'été, une loi de finance rectificative vous savez pourquoi c'est faire ? C'est pour rectifier les finances !
GUILLAUME DURAND
Oui ! Mais je suis d'accord.
MICHEL SAPIN
Et donc on rectifiera les finances.
GUILLAUME DURAND
Et donc ce sera extrêmement précis ?
MICHEL SAPIN
Et ce sera précis, parce que dans ce domaine-là il faut aussi jouer la vérité, même si la vérité n'est pas toujours simple, ni à dire, ni à faire.
GUILLAUME DURAND
Mais c'est une obligation, on est d'accord, on arrivera au bout des 50 milliards ?
MICHEL SAPIN
Mais nous aurons un financement… Revenons un peu sur ce point-là ! C'est la première fois dans l'histoire récente de la France que l'on va financer intégralement un programme d'allégement d'impôts pour les ménages, pour les entreprises, uniquement par des économies et des économies réelles qui seront réparties sur les 3 années de manière à ce que par ailleurs…
GUILLAUME DURAND
Parce que c'est là-dessus que vous êtes attaqués aussi, on dit ça… (brouhaha)…
GUILLAUME DURAND
Ils sont en train de nous enfumer et il ne se passera rien ?
MICHEL SAPIN
On est attaqués, on ne peut pas encore être attaqués, on est interrogés, cette interrogation elle est nécessaire. Je suis sûr que nous serons critiqués par les uns comme par les autres, les mêmes qui aujourd'hui nous réclament 2 fois plus d'économies ils nous disent 130 milliards – vous leur poserez la question d'ailleurs – 130 milliards, moi je n'ai pas l'explication…
GUILLAUME DURAND
Oui ! Là, on parle du programme de l'UMP et du programme…
MICHEL SAPIN
Bien sûr de l'UMP ! Je n'ai pas la réponse sur un seul milliard de leurs économies.
GUILLAUME DURAND
Ah ! Eh bien ils vont dire comme vous, ils vont arriver avec une feuille blanche et il y aura tout.
MICHEL SAPIN
Oui ! Oui, bon. Mais moi je suis au pouvoir, donc je ne peux pas me permettre de faire comme eux : annoncer 130 milliards sans être capable d'expliquer quoi - et même 50 milliards – ce sera précisément, précisément point par point l'explication du chemin qui sera le nôtre…
GUILLAUME DURAND
Alors…
MICHEL SAPIN
Pour financer intégralement notre programme de relance de l'économie, de soutien à l'activité... Vous savez le meilleur moyen pour s'en sortir à tout point de vue c'est d'avoir une croissance plus forte et tout ce programme-là il est fait pour que la croissance s'accélère en France.
GUILLAUME DURAND
On va parler de nos partenaires, on va parler du délai réclamé pour le déficit, de l'Euro qui a été critiqué évidemment par Manuel VALLS hier, mais - je ne vais pas vous demander de me regarder dans les yeux - je suis certain qu'à titre personnel le fait de vous être occupé du Travail, donc de la lutte contre le chômage et d'obtenir des résultats décevants, il faut bien le dire, ça vous a touché personnellement. Est-ce que vous avez le sentiment qu'aujourd'hui quelque chose de plus satisfaisant pour les Français est en cours ?
MICHEL SAPIN
Mais j'ai toujours dit - et je crois l'avoir dit ici même – que lorsqu'on veut se battre contre le chômage, comme nous l'avons, il y a 2 fronts : il y a le front de ce qu'on appelle les politiques de l'emploi, des Emplois d'avenir, je suis fier des plus de 100.000, on doit être à 120.000 Emplois d'avenir aujourd'hui mis en place, parce que c'est…
GUILLAUME DURAND
Mais enfin la courbe ne s'est pas retournée ?
MICHEL SAPIN
Mais parce que ce sont 120.000 solutions apportées à des jeunes qui, sinon, seraient au chômage - et il y a beaucoup d'autres politiques - mais j'ai toujours dit qu'il y avait ce front-là, nous l'avons mené et nous l'avons mené avec efficacité ; mais il y a le front de l'économie réelle, de la création d'emplois dans les entreprises, au fond si je me trouve ici c'est peut-être parce que ça me permet, après avoir avancé sur le premier front : les politiques de l'Etat, de pouvoir avancer sur le deuxième front, que l'économie produise plus d'emplois.
GUILLAUME DURAND
Mais c'est peut-être là-dessus qu'il aurait fallu commencer ? Enfin je ne vais pas refaire le débat de tout à l'heure.
MICHEL SAPIN
Mais nous l'avons fait ! Nous l'avons fait par ailleurs, mais il faut accélérer, il faut que ça aille plus vite et il faut que...
GUILLAUME DURAND
Est-ce que ce matin vous pouvez me dire je suis certain que d'ici la fin de l'été ça va vraiment décélérer, parce qu'on avait dit avant Noël et puis les Français vous ont sanctionné sévèrement, parce que c'est le chômage, c'est quand même le discriminant numéro 1 dans le domaine politique, est-ce que ça va changer-là ?
MICHEL SAPIN
Oui ! Mais je ne veux pas revenir sur toutes les histoires de courbe, etc.
GUILLAUME DURAND
Non ! Mais oublions le passé, mais là, maintenant, en juin ?
MICHEL SAPIN
Non pas parce que je voudrais l'effacer, je rappelle simplement – comme l'a dit hier le Premier ministre – qu'à la fin de l'année dernière nous avons stabilisé le chômage qui a explosé pendant 6 années de suite, donc les Français qui se prennent sur la figure pendant 6 années, mois après mois, des chômeurs de plus…
GUILLAUME DURAND
Mais ils ne l'ont pas compris, vous avez vu la…
MICHEL SAPIN
Eh bien à un moment donné ils ne croient plus en rien….
GUILLAUME DURAND
Voilà !
MICHEL SAPIN
Ils ne croient plus personne…
GUILLAUME DURAND
Et ils ne votent plus pour vous.
MICHEL SAPIN
Et ils ne votent plus pour nous, ni pour les autres – c'est le pire – c'est quand ils ne votent même pas, ils ne croient plus personne, ils ne croient plus en personne, il faut leur redonner confiance, y compris…
GUILLAUME DURAND
Donc, vous pensez que d'ici le mois de juin la politique elle peut se retourner vraiment ?
MICHEL SAPIN
Mais, d'ici ce mois de juin, nous nous battons pour que sur les 2 fronts… il y en a un où ça a beaucoup avancé, les politiques de l'emploi - et François REBSAMEN va continuer à sa manière, avec ses mots, avec sa personnalité pour continuer sur ce front-là - moi, avec Arnaud MONTEBOURG, j'ai la responsabilité…
GUILLAUME DURAND
Ca marche MONTEBOURG et le…
MICHEL SAPIN
Oui ! Très bien, contrairement à ce qui est dit, il y a des bêtises qui ont été dites sur notre déplacement à Berlin qui sont quand même incroyables.
GUILLAUME DURAND
Ah ! Eh bien vous êtes partis dans des…
MICHEL SAPIN
On nous reproche de partir dans 2 avions différents…
GUILLAUME DURAND
Eh bien oui !
MICHEL SAPIN
Oui ! Eh bien vous voulez que je vous donne le numéro du vol AIR FRANCE de l'un et du vol AIR FRANCE de l'autre, donc ne faisons pas de polémique de cette nature-là, et vous croyez que moi je dispose…
GUILLAUME DURAND
Donc, à Bercy, ça va fonctionner bien maintenant ?
MICHEL SAPIN
Vous croyez que moi je dispose du temps des autres ministres Allemands, l'un était libre le matin, l‘autre était libre l‘après-midi, je n'allais quand même pas demander à Arnaud MONTEBOURG de passer sa matinée à aller au théâtre ou à aller au concert ? Bien ! Donc, vous voyez il y a des polémiques idiote, au contraire c'était une image très belle qui a été très bien comprise en Allemagne, les 2 ministres exactement de même nature que les ministres Allemands, ministre des Finances, ministre de l'Economie, se déplacent ensemble et vont parler avec notre partenaire allemand non pas pour quémander quoi que ce soit, parce que pour les Allemands une France c'est indispensable à une Europe forte.
GUILLAUME DURAND
Mais il nous faut ce délai, parce que les Italiens disent ce matin : « nous on fera 2,6 à la fin de l'année, les Français basta » ?
MICHEL SAPIN
Eh bien les Italiens ils ont 120% ou 130% de dette, donc chacun a ses difficultés, chacun à ses problèmes, nous, nous avançons avec un programme d'économies qui finance intégralement le soutien à l'activité et à la croissance, avec plus de croissance financée par des économies, il y aura une diminution de notre déficit. Nous ne changeons rien à nos objectifs, nous ne changeons rien à nos engagements, nous ne changeons rien par rapport à nos partenaires…
GUILLAUME DURAND
Mais vous voulez un délai ?
MICHEL SAPIN
Nous ne changeons rien sur tout, le terme qui a été utilisé hier par le Premier ministre : « il faut trouver le bon rythme »…
GUILLAUME DURAND
Oui ! Mais le bon rythme…
MICHEL SAPIN
Le bon rythme, on ne diminue pas les déficits si la croissance n'augmente pas, il faut donc faire en sorte que cette croissance soit plus élevée pour que nous puissions diminuer – même peut-être plus rapidement à la fin - nos déficits.
GUILLAUME DURAND
L'Euro est trop fort ? Répondez-moi très vite ! Pardonnez-moi, je sais que c'est un peu…
MICHEL SAPIN
Je vais le dire autrement ! L'Euro est plus fort aujourd'hui qu'il l'était à l'été 2012, ça a des conséquences.
GUILLAUME DURAND
Qui sont néfastes pour notre économie ?
MICHEL SAPIN
Pour une partie de notre économie, celle qui vend à l'extérieur de la zone euro et qui en particulier a comme concurrent le dollar, oui ça a des conséquences pour nous - comme pour nos autres partenaires - mais je sais que c'est un débat qui est un vrai débat. Le FMI, le Fonds Monétaire International, vient de dire la même chose que le Premier ministre hier, personne ne lui en fera reproche.
GUILLAUME DURAND
Merci beaucoup Michel SAPIN d'être venu nous voir ce matin…
MICHEL SAPIN
Merci !
GUILLAUME DURAND
Je rappelle que vous êtes ministre des Finances. Vous ne pouvez toujours pas me dire si Valérie RABAULT va être ministre du Budget, est-ce que vous allez la retrouver bientôt ?
MICHEL SAPIN
Mais je vous sens très intéressé par Valérie RABAULT !
GUILLAUME DURAND
Non ! C'est le Tarn-et-Garonne qui me passionne.
MICHEL SAPIN
Ah ! Voilà, c'est le Tarn-et-Garonne, mais je peux vous donner son 06 si vous voulez ?
GUILLAUME DURAND
Ah ! Donc elle va être ministre du Budget, je le sens. Merci beaucoup, bonne journée.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 avril 2014