Interview de M. Benoit Hamon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche à France Bleu Sud Lorraine le 18 avril 2014, sur la réforme des rythmes scolaires et l'échec scolaire.

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Média : France Bleu

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JOURNALISTE
L'invité de FRANCE BLEU Lorraine ce matin, Benoît HAMON, ministre de l'Education, qui était en déplacement hier à Nancy, il répond aux questions de Sophie DUPUY.
SOPHIE DUPUY
Benoît HAMON, bonjour. Première question, on va attaquer directement sur les rythmes scolaires, vous avez annoncé un nouveau texte en complément au décret. Concrètement, qu'est-ce que ça veut dire, pourquoi un tel texte ?
BENOIT HAMON
D'abord, la réforme elle s'appliquera à la rentrée 2014, à toutes les villes, toutes les écoles. Ce que j'ai constaté, à partir de la première année expérience et de mise en oeuvre de la réforme des rythmes scolaires, c'est qu'il pouvait y avoir des expérimentations, proposées par des villes, qui parce qu'elles n'entraient pas dans le cadre réglementaire fixé au niveau national, étaient écartées. A partir de là j'ai trouvé dommage qu'on écarte des expérimentations au motif que le texte réglementaire n'était pas adapté. Donc, ça ne sera plus aux expérimentations de s'adapter au texte réglementaire, ça sera au texte de s'adapter à ce qui a été expérimenté sur le terrain, au niveau local, et donc je vais ouvrir la possibilité, pour des villes, de nous proposer une organisation du temps scolaire, parfois originale, plus originale que ce qui se fait en règle générale, mais qui poursuit le même objectif, la réussite de l'élève.
SOPHIE DUPUY
Donc pas de remise en cause, en clair, des 4 jours et demi ?
BENOIT HAMON
Pas de remise en cause d'une organisation du temps scolaire, qui est dans l'intérêt des enfants. Moi je comprends que ça suscite de l'embarras, chez les parents d'élèves, on leur demande de s'organiser différemment le mercredi matin, parfois le samedi matin ailleurs, de l'embarras chez les professeurs, de l'embarras chez les élus, mais je le redis, l'organisation du temps scolaire c'est une prérogative de l'Etat, et nous allons en changer parce que nous constatons que, aujourd'hui, non seulement l'école ne parvient plus à lutter contre les inégalités sociales, mais en plus nous constatons que l'école, parfois, aggrave les inégalités, et donc, pour changer cela, il fallait modifier l'organisation du temps scolaire. Il y avait consensus, c'est même monsieur CHATEL, le précédent ministre de l'Education nationale, avant Vincent PEILLON, qui avait arrêté ce principe-là. Tout le monde était d'accord. Dès lors qu'on veut mettre en oeuvre la réforme, je comprends que ça pose des difficultés, nous en tiendrons compte, mais la réussite de nos enfants elle passe par le fait qu'ils puissent apprendre le matin, parce que c'est en apprenant le matin qu'on a le plus de chance de réussir, tout le monde le sait, eh bien il fait le faire, c'est tout.
SOPHIE DUPUY
Est-ce que vous comprenez l'embarras ou le désarroi de certains maires, par exemple de communes rurales, qui se demandent comment on va l'appliquer cette réforme, on n'a pas forcément les moyens ?
BENOIT HAMON
Oui, je le comprends, c'est pour ça que nous avons mis en place un fonds d'aide à la mise en oeuvre de cette réforme, parfois ils nous disent que ce n'est pas suffisant, je l'entends, mais là où on est en zone rurale défavorisée, quand on a mis en place un dispositif périscolaire qui est conforme aux exigences de la Caisse d'Allocations Familiales, on peut bénéficier d'une aide qui va jusqu'à 144 euros par enfant. Cela étant dit, mon bureau est ouvert, j'ai pris cet engagement d'écouter, au plus près, la situation des villes rurales, des villes de montagne, d'un certain nombre de territoires plus défavorisés, nous tiendrons compte de la spécificité de chacun de ces territoires, mais n'en demeure pas moins, que l'on soit un enfant scolarisé dans les Alpes, à Trappes dans les Yvelines, ou ici à Nancy, les enfants ils ont tous les mêmes rythmes biologiques, ils ont des moments où ils sont plus disponibles, plus concentrés pour apprendre, eh bien ce sont dans ces moments que nous devons concentrer les apprentissages fondamentaux, sinon, nous continuerons à avoir un nombre de plus en plus important de nos enfants qui, en 6ème, ne maîtriseront pas les compétences élémentaires en matière de français, à l'écrit, à l'oral, à la lecture, et ça ce n'est pas acceptable.
SOPHIE DUPUY
Une dernière chose. Quelle est votre position par rapport aux maires qui ont décidé de ne tout simplement pas appliquer cette réforme à la prochaine rentrée ?
BENOIT HAMON
C'est une drôle de leçon, si on devait parler d'éducation, qu'ils envoient à nos concitoyens, aux plus jeunes. Ils disent « là où il y a une règle, la loi nous ne l'appliquerons pas. » Ces maires ne comprendraient pas davantage que leurs propres concitoyens ne respectent pas leurs arrêtés municipaux, pas davantage que je ne peux comprendre ce discours qui consiste à dire « nous n'appliquerons pas la loi. » Et je vais vous le dire, aujourd'hui bon nombre d'élus, quelle que soit leur couleur politique, de gauche aussi, mais de droite bien sûr, notamment après les dernières élections municipales, qui ont vu un nombre important de candidats UMP gagner, aujourd'hui sont impliqués pour réussir la réforme des rythmes scolaires, et je préfère retenir que l'immense majorité des maires UMP travaillent à une organisation du temps scolaire qui est favorable à la réussite des élèves plutôt que de suivre les consignes de l'appareil UMP et de monsieur COPE, qui demande à tout le monde de ne pas respecter la loi. Tout ça ne m'émeut pas dès lors que je sais que, aujourd'hui, les maires, de l'opposition, comme de la majorité, sont au travail pour organiser le temps scolaire et ne suivent pas les consignes du maire de Meaux, qui est bien seul sur ces questions.
SOPHIE DUPUY
Merci Benoît HAMON.
BENOIT HAMON
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 18 avril 2014