Déclaration de Mme Carole Delga, secrétaire d'État au commerce, à l'artisanat, à la consommation et à l'économie sociale et solidaire, sur le développement du secteur de l'économie sociale et solidaire, Paris le 10 juin 2014.

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Circonstance : Séminaire de l'association Entreprises territoires et développement (ETD) sur l'économie sociale et solidaire, à Paris le 10 juin 2014

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
L'ESS, ce n'est pas une économie philanthropique, c'est une économie démocratique ; ce n'est pas une économie de réparation, c'est une économie d'innovation ; c'est l'alliance de la tempérance et de la performance. Il y a quelques jours encore, j'étais Présidente d'Etd ; à présent, j'ai la chance de porter et de défendre le projet de loi sur l'Economie Sociale et Solidaire, en tant que Secrétaire d'Etat. Et je suis heureuse d'être parmi vous aujourd'hui, je vous remercie pour votre invitation.
Refuser la fatalité, telle est l'idée de notre Gouvernement. Nous refusons de croire en effet qu'il existe un mode d'entreprendre unique où la seule recherche du profit prime. Nous croyons au contraire qu'il existe une alternative, un autre mode d'entreprendre. La fatalité n'est qu'un vieux mythe à court d'imagination. Et c'est parce que nous avons cette ambition inédite, - celle de donner un élan fondateur à l'ESS en la reconnaissant enfin au sein de notre économie, de notre société, de notre pays -, que nous souhaitons faire de la France l'un des pionniers, dans ce domaine. Ce choix politique, c'est un projet de société, un édifice à faire grandir et auquel chacun peut apporter sa pierre.
Ce séminaire de réflexions et de débats est donc particulièrement d'actualité, puisque le projet de loi en discussion reconnaît le rôle primordial des collectivités. Il le reconnaît, et il les encourage à s'engager au service des dynamiques entrepreneuriales, en faveur de l'ESS.
Comme les expériences décrites au cours de ce séminaire en témoignent, les collectivités territoriales ont même anticipé cette nouvelle fonction. En précurseurs, elles se sont impliquées aux côtés des acteurs locaux, en les accompagnant, pour marcher avec eux sur des chemins nouveaux, inédits et jalonnés de promesses.
Les collectivités soutiennent l'ESS, en raison d'objectifs multiples qui se conjuguent, parfois. Leurs objectifs ? Explorer des voies de diversification et de consolidation du modèle économique des structures concernées, dans un contexte de raréfaction des ressources publiques. Leurs objectifs ? S'assurer de l'ancrage et de la compétitivité du tissu économique local. Rechercher des voies innovantes pour préserver, pour développer l'emploi et le lien social. Leurs objectifs ? C'est aussi d'accompagner la naissance de nouvelles filières économiques locales ; c'est aussi de rechercher des solutions nouvelles pour traduire un projet de développement durable et le rendre tangible.
Ce qui est mis en valeur, c'est la richesse, c'est le caractère particulièrement fécond des actions engagées en faveur de l'essor de l'ESS. Ce séminaire en a très bien rendu compte et je félicite chacun pour la qualité des interventions et des analyses. Les routes qui sont empruntées sont singulières et portées par un souffle d'innovation. Ces chemins sont à ré-inventer en fonction des contextes spécifiques et des ressources locales, - notamment les ressorts de l'entrepreneuriat -, que les collectivités sont en capacité de mobiliser, d'accompagner et d'organiser.
C'est tout l'intérêt du travail qui a été mené et qui a donné lieu à un partenariat entre Etd et GrDF pour construire un guide susceptible de rendre compte non seulement de ces dynamiques, mais aussi, - et plus généralement -, de la singularité des approches et des contextes. Ce guide met en lumière les principes directeurs destinés aux collectivités territoriales et à leurs partenaires locaux pour dynamiser, accompagner et intégrer les dynamiques de l'ESS dans les stratégies de territoires.
Ces initiatives n'en sont qu'à leur commencement et cette démarche constitue déjà un premier jalon qu'il faut compléter et consolider. Plusieurs axes en particulier pourraient être approfondis :
- Qu'en est-il de la consolidation des modèles économiques hybrides ?
Le projet de loi sur l'ESS offre des réponses très structurées à cette question. En particulier, son article 1er consolide les modèles traditionnels de l'ESS, tout en proposant une nouvelle forme d'entrepreneuriat social sous forme de sociétés commerciales, qui respecte les exigences et les valeurs de l'ESS. A cet égard, je tiens à saluer le travail remarquable des députés et des sénateurs sur ce projet de loi, sous la houlette des rapporteurs Yves Blein et de Marc Daunis.
- Quelles sont les modalités d'articulation et d'efficience des différentes échelles d'intervention des politiques publiques territoriales ?
Sur ce point, je voudrais rappeler que, à l'occasion de la clôture des Assises de l'entrepreneuriat fin mai dernier, le Président de la République a annoncé la création du Fonds d'innovation sociale. Il sera cofinancé par l'Etat et les régions. Il sera géré par Bpifrance, pour une capacité publique totale (Etat et régions) de 40 millions d'euros.
Ce partenariat avec les régions marque la volonté de l'Etat de bien reconnaître les initiatives locales : l'expérience prouve que ces initiatives sont souvent mieux identifiées et portées au niveau territorial.
Je veux dire ici qu'une telle initiative entre Bpifrance et les régions est en soi une réelle innovation, car elle donne une véritable place aux régions en tant qu'échelon territorial d'investissement.
- Comment prendre en compte les impacts extra-économiques dans les modèles d'évaluation des projets ?
Il ne faudra pas oublier la capacité à intégrer les ressorts d'innovations non technologiques contenus dans les dynamiques de l'ESS : et c'est là tout le sens de la démarche de création du Fonds d'innovation sociale. Mais c'est aussi le sens recherché dans la loi ESS : les entreprises bénéficiaires de l'agrément solidaire devront prouver qu'elles recherchent un impact social significatif. Je rappelle que l'agrément solidaire constitue une « porte » ouverte pour bénéficier de financements issus de la collecte d'épargne solidaire.
L'Economie Sociale et Solidaire, c'est donc bien une révolution. Celle de l'imagination qui crée de nouvelles technologies. Qui fabrique d'insolites formes d'organisation. Qui propose des idées inédites pour la société. Etd va bénéficier des enseignements de l'étude pour engager au second semestre de l'année un programme sur l'innovation sous toutes ses formes. Ce sera l'occasion, par exemple, de s'intéresser plus profondément à l'innovation sociétale et aux moyens dont les collectivités disposent pour l'accompagner.
L'ESS est une opportunité pour réconcilier les finalités économiques, sociales et environnementales. Cette réconciliation peut se faire grâce à des outils comme les SCIC qui permettent aux diverses parties, - dont les collectivités -, de porter notamment des projets économiques de transition écologique. Cette question sera approfondie dans le programme consacré à la transition énergétique qui sera lancé au second semestre par Etd également.
Ce projet de loi sur l'ESS propose donc un nouvel horizon économique, social, solidaire, durable et démocratique qui prouve, à ceux qui en doutaient, que performance économique et utilité sociale peuvent être synonymes !
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 11 juin 2014