Interview de M. Benoit Hamon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche à BFM/TV le 6 juin 2014, sur la réorganisation du temps scolaire et la réussite scolaire.

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Média : BFM TV

Texte intégral


JEAN-JACQUES BOURDIN
Benoît HAMON est avec nous, Benoît HAMON bonjour.
BENOIT HAMON
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ministre de l'Education nationale. Je vous précise que BFM TV est en opération spéciale sur les plages du débarquement, nous ne faisons que de la radio, mais j'en suis très heureux, moi j'aime la radio avant tout. Benoît HAMON a accepté de venir ce matin, je l'en remercie. Benoît HAMON, les commémorations, dans de très nombreuses écoles, collèges, lycées, on parle beaucoup de ce 6 juin 1944 aujourd'hui, mais pourquoi ne pas avoir organisé une grande journée nationale, dans toutes les écoles, imposer à toutes les écoles, à tous les collèges et à tous les lycées, d'organiser une journée consacrée à ce 6 juin 44 ?
BENOIT HAMON
Il y a d'abord eu un nombre invraisemblable d'initiatives, je veux le dire, qui concernent des centaines d'établissements, du second degré comme du premier degré, et qui ont mobilisé à la fois les enseignants, mais plus généralement des groupes d'enseignants, pas simplement les professeurs d'Histoire et de géographie, des dizaines de milliers de collégiens, d'écoliers ou de lycéens, sur à la fois des rencontres avec des témoins de l'Histoire, et c'est important que ces rencontres aient lieu parce que nous sommes dans un moment charnière dans ces commémorations, disparaissent au fur et à mesure les derniers témoins vivants du débarquement, et c'est précieux de les rencontrer. Je dis ça pourquoi ? parce que, dans l'enseignement de l'Histoire, c'est toujours un moment charnière quand il n'y a plus de témoin vivant des faits historiques, et on voit bien aujourd'hui, pour cet enseignement, qu'est celui de l'Histoire, qu'avec les sources d'informations qui sont celles des lycéens, des collégiens, avec Internet, le travail du professeur d'Histoire appelle des fois à des efforts de pédagogie, pour déconstruire des représentations qui peuvent naître de la lecture de tel ou tel document sur Internet et qui ne correspondent pas à la vérité des faits historiques, au sens de ce qui s'est passé. Je dis ça parce que, il y a donc eu des milliers de projets, qui se sont traduits par de nombreuses initiatives, et je crois qu'incontestablement l'Education nationale a pris toute sa place dans ces commémorations.
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'enseignement de la Seconde Guerre mondiale, 3ème je crois, et 1ère !
BENOIT HAMON
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
3ème et 1ère, c'est au programme de…
BENOIT HAMON
Et des CM2 aussi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des CM2 aussi.
BENOIT HAMON
CM2, 3ème, 1ère, ce n'est pas pareil selon les filières d'ailleurs, et selon les séries, ce n'est pas forcément au même moment et les mêmes périodes, mais on a…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il faut conserver tous ces, tous ces… évidemment, l'enseignement de ces grands moments d'Histoire, c'est la base même…
BENOIT HAMON
Oui, et puis pas simplement dire ce qui s'est passé, mais donner le sens. C'est toujours intéressant de dire… évidemment, le débarquement a été un fait majeur de la guerre, mais en même temps il se passait sur le front de l'Est une opération qui, en termes de puissance, était à peu près équivalente, on en parle assez peu, elle s'appelait l'opération Bagration, et moi je relisais ce qu'était l'adresse de Dwight EISENHOWER à ceux qui allaient débarquer, il évoquait quoi ? Les alliés sur d'autres fronts qui allaient permettre la libération de l'Europe, et c'est intéressant de voir comment ces faits s'inscrivent dans une Histoire globale qu'il convient d'enseigner aux enfants français, et, évidemment, la prouesse technologie, l'opération qui a été celle du débarquement, suscite aujourd'hui une grande admiration, aussi parce que ces femmes et ces hommes…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce devoir de mémoire il faut le protéger évidemment.
BENOIT HAMON
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je dis ça parce que j'ai vu que des plaintes avaient été déposées contre une vidéo d'extrême droite qui s'attaque au devoir de mémoire justement. Vous n'avez peut-être pas vu ça, mais ce sont des négationnistes notoires qui font circuler – ça arrive – sur Internet, des documents qui vantent les mérites, évidemment, des nazis, du régime nazi.
BENOIT HAMON
D'où l'importance du travail des historiens et de l'enseignement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien sûr.
BENOIT HAMON
Pour que ces documents, qui circulent librement, soit déconstruits, et que des élèves, qui sont, par définition jeunes, ne savent pas faire le tri entre les informations, ne soient pas abusés par aujourd'hui cette volonté de nier la vérité historique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'ailleurs, le devoir de mémoire à l'école, ça commence dès le primaire, vous l'encouragez vraiment ?
BENOIT HAMON
Ecoutez, tout ce travail d'histoire, évidemment…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous l'encouragez vraiment. Non, mais parce qu'il fut un temps où…
BENOIT HAMON
Il fut un temps où on a supprimé…
JEAN-JACQUES BOURDIN
On critiquait un peu ce devoir de mémoire.
BENOIT HAMON
Ça dépend de ce qu'on enseigne, et dans l'apprentissage et la progressivité des savoirs on ne peut pas enseigner à un élève de CM1 le même type de faits concernant la Deuxième Guerre mondiale, qu'on enseignerait en 1ère ou en terminale, et donc là il y a évidemment à construire les programmes en fonction de la capacité des enfants à comprendre ce qu'on leur enseigne et à assimiler ces connaissances, ça c'est indiscutable, mais c'est ce sur quoi nous travaillons, puisqu'il y a aujourd'hui un travail sur les programmes de ce qu'on appelle « le socle », qui va du primaire jusqu'au collège, la scolarité obligatoire, et qui m'aidera à prendre des décisions dans les mois à venir.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Justement, j'allais vous en parler.
BENOIT HAMON
Comme quoi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le passage de témoin entre le primaire et le collège.
BENOIT HAMON
Décisif.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Décisif. C'est un moment décisif. Alors, qu'est-ce que vous allez faire là, dites-nous, est-ce que vous avez en projet là ?
BENOIT HAMON
D'abord, pourquoi est-ce que c'est décisif ? parce qu'on constate aujourd'hui que le, hélas, le niveau de l'école baisse, il y a entre 15 et 20 % d'élèves qui en fin de CM2, et à l'entrée en 6ème, ne maîtrisent pas ce qu'on appelle les compétences et les connaissances attendues en français et en mathématiques, c'est-à-dire lire, écrire correctement, parler correctement, compter, et cette question-là elle concerne évidemment tous les élèves parce que l'échec de ces 15 à 20 % d'enfants il dit aussi que c'est la réussite de tous les élèves qui est mise en cause par cette performance moins bonne de l'école française. Et on voit bien qu'il y a un moment charnière entre le CM2 et le collège.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors que faire ? Qu'est-ce que vous avez en projet ?
BENOIT HAMON
Continuer à travailler à la progressivité des apprentissages. La base, moi je veux être l'avocat des élèves, la base c'est que nous sachions, nous puissions comme parents d'élèves, comme citoyens, savoir que nos enfants, en fin de CM2, sur les apprentissages fondamentaux, comptent correctement, lisent correctement, écrivent correctement, et parlent correctement le français. Or ce sont sur ces apprentissages fondamentaux qu'aujourd'hui il apparaît un certain nombre de reculs. J'ai rendue publique une évaluation des enfants français, des élèves français en fin de CE2, qui montre un recul significatif, et en même temps, réjouissons-nous de voir qu'en fin de maternelle, à l'entrée en CP, le niveau des enfants, lui, augmente.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il y a un problème entre le CP et le CE2 ou le CM1.
BENOIT HAMON
Il y a un problème. D'abord, il y avait moins de profs, des profs qui n'étaient plus formés, des profs qui étaient saturés d'annonces de changements et dénigrés, il y avait ensuite des rythmes scolaires – pardon de le dire – qui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
On va en parler évidemment.
BENOIT HAMON
Ne favorisaient pas les apprentissages fondamentaux, notamment en ayant les journées les plus longues d'Europe. Vous savez qu'on est un pays exotique quand même, la France, au regard de l'organisation du temps scolaire, partout dans le monde, nous étions le seul pays à asséner à ses enfants des journées aussi longues alors que, tout le monde sait, que les pics de vigilance, là où les enfants sont concentrés le mieux, là où ils apprennent le mieux, c'est le matin entre 9H00 et 11H00. Et la réforme des rythmes scolaires elle est aussi simple que ça, c'est que, nous rajoutons une matinée, une matinée durant laquelle les jeunes français, les élèves français, apprendront mieux, davantage, ce que nous attendons qu'ils apprennent, en français et en calcul, en mathématiques.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, réforme des rythmes scolaires, obligatoire à la rentrée 2014, sauf dérogation.
BENOIT HAMON
Non, non, elle s'applique partout. Parce que je veux préciser…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je fais exprès, précisez les choses. Rentrée prochaine. Est-ce que la réforme des rythmes scolaires, les quatre jours et demi de classe, neuf demi-journées si l'on préfère, s'appliqueront dans toutes les écoles ?
BENOIT HAMON
Oui, oui, et je vais vous dire même dans des villes où un maire dit : « Je ne le ferai pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'en avais un ce matin, le maire des Pennes-Mirabeau à côté de Marseille, vingt mille habitants.
BENOIT HAMON
Laissez-moi vous expliquer. L'organisation du temps scolaire, les horaires où les enfants sont en classe devant les professeurs, c'est l'Etat qui la fixe. Quelle a été la nouveauté ? C'est que pour la première fois sur une compétence de l'Etat, où il me revient de décider au nom du ministère de l'Education nationale l'organisation du temps scolaire, nous avons ouvert la discussion aux maires. Pas pour leur transférer la compétence mais pour discuter avec eux de l'organisation optimale de cette nouvelle organisation du temps scolaire, mais c'est l'Etat qui fixe le temps scolaire. Ce qui revient à la commune, ce sont les activités périscolaires, ce qui se passe autour de l'école. Je rappelle que dans la réforme que nous organisons, elle est facultative. Elle est facultative pour les parents qui ne sont pas obligés d'y laisser leurs enfants, mais ça les arrange souvent, mais facultative aussi pour les communes. Il n'y a aucune obligation d'organiser des activités périscolaires.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire qu'on peut ouvrir les écoles quatre jours et demi, les écoles seront ouvertes quatre jours et demi.
BENOIT HAMON
Mais il y a des mairies qui n'avaient pas de projet éducatif et qui n'ont pas du tout l'intention d'organiser des activités périscolaires.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils ne feront rien alors une demi-journée par semaine ?
BENOIT HAMON
Auparavant c'était une journée par semaine où ils ne faisaient rien. Vous vous posiez la question de savoir quelles étaient les activités que faisaient les enfants le mercredi ? Nous rajoutons des activités périscolaires si les communes le souhaitent. Monsieur BOURDIN, je peux vous dire que c'est l'immense majorité. On pourra revenir sur les chiffres.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez les chiffres ?
BENOIT HAMON
Oui, j'ai les chiffres. Je vais vous les donner, c'est assez simple. Sur la totalité des communes françaises, il y en avait quatre mille qui étaient déjà passées à la nouvelle organisation des rythmes scolaires. Trente-huit d'entre elles ont décidé de se saisir du décret d'assouplissement que j'ai proposé pour modifier leur organisation du temps scolaire. C'est aujourd'hui qu'on enregistre les dernières copies mais sur le reste des communes, nous allons avoir en l'occurrence où 100 % de réponses des communes validées par le rectorat, ou alors quand il n'y aura pas de réponse des communes, nous appliquerons le décret tel qu'il existait des neuf demi-journées. Ça veut dire qu'aujourd'hui, l'organisation du temps scolaire sera fixée dans 100 % des communes françaises par l'Etat parce que c'est de la compétence de l'Etat.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Si on imagine qu'une commune n'organise pas d'activités périscolaires, ça se passe comment ?
BENOIT HAMON
Elle n'en a pas l'obligation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais alors, ça va se passer comment pour les enfants ? Qu'est-ce qu'ils vont faire les enfants ?
BENOIT HAMON
L'organisation du temps scolaire sera communiquée aux parents comme elle l'était auparavant, avec des horaires pour commencer l'école et des horaires pour finir l'école, des horaires qui peuvent aller avec des activités jusqu'à 18 heures 30 comme ça se passait auparavant. Les communes savent parfaitement gérer cela. Je veux rajouter une chose. Non seulement c'est facultatif, mais ce que je veux dire à tous ceux qui nous écoutent, c'est qu'y compris dans les communes ou les maires disent : « Je ne veux pas organiser d'activités périscolaires », l'Etat va verser cinquante euros par enfant pour les activités périscolaires.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même dans les communes qui n'en organiseront pas ?
BENOIT HAMON
Oui, parce que nous ne pouvions par trier, nous. Moi, je redis que je suis l'avocat des élèves. Il y a beaucoup de gens qui veulent faire la réforme des rythmes scolaires non pas en fonction de l'intérêt des élèves mais en fonction de l'intérêt des adultes. Moi, je le dis, ça suffit les réformes de l'école pensées en fonction des intérêts des adultes et pas des intérêts des enfants.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous êtes clair : à la rentrée, 100 % des écoles seront ouvertes.
BENOIT HAMON
Oui, parce que c'est la compétence de l'Etat. Je vais prendre un autre exemple. Il y a des communes qui me disent : « Je refuse d'ouvrir l'école ». C'est comme si une commune disait : « Ecoutez, le jour du scrutin où les votes se passent souvent dans les écoles, j'ai décidé de ne pas ouvrir l'école un dimanche pour que s'organise le scrutin ». C'est aussi absurde que cela ! Ça ne se passe pas et ça ne se passera pas à la rentrée. Il peut y avoir des communes qui disent : « On aurait préféré que ce soit en 2015 » ; je les ai écoutées et c'est pour ça qu'on a fait un décret d'assouplissement. Il y en a qui disaient : « Donnez-nous donc un moratoire ou des souplesses » et je les ai écoutées là encore. Mais ne pas appliquer la loi, au passage quel drôle de message en termes d'éducation civique de la part d'un maire ! Dire « je n'appliquerai pas la loi », drôle de message ! Ils sont heureusement seulement une petite poignée à le dire sur les trente six mille maires.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dont quand même le maire de Lyon.
BENOIT HAMON
Non, il applique la loi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il applique la loi mais quand même avec des restrictions.
BENOIT HAMON
Ecoutez, vous ne pouvez pas dire au maire de Lyon qui a arrêté une organisation du temps scolaire qu'il n'applique pas la loi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais enfin il contourne quand même un peu la réforme.
BENOIT HAMON
Non !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il dit : « Les activités périscolaires seront regroupées le vendredi après-midi et seront payantes », alors qu'au début de la réforme PEILLON, c'était la gratuité qui était prônée. Pardon, Benoît HAMON.
BENOIT HAMON
Mais nous, nous pouvons recommander la gratuité et je la recommande partout.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous trouvez bien que le maire fasse payer les activités périscolaires, franchement ?
BENOIT HAMON
Je préfère quand ça n'est pas payant. Je vous le dis, je préfère quand ça n'est pas payant. Cela étant dit, je prends acte de communes qui ont des difficultés de financement et qui disent : « On fera payer ».
JEAN-JACQUES BOURDIN
En fonction des revenus des parents, évidemment.
BENOIT HAMON
Mais le ministre de l'Education nationale se préoccupe de quoi d'abord ? De ce qu'on apprend dans la classe avec le professeur. Et les professeurs se préoccupent de quoi ? De faire en sorte que les enfants apprennent correctement le français notamment et les mathématiques. Ce qui se passe autour, et pour lequel nous avons évidemment travaillé à ce que ça se passe le mieux possible, est d'abord de la responsabilité du dialogue entre les élus et nous, mais d'abord de la responsabilité des élus. Je rappelle que nous donnons donc cinquante euros par enfant.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Beaucoup de maires disent que c'est insuffisant, largement insuffisant.
BENOIT HAMON
« Insuffisant » mais là où il n'y a rien d'organisé, je suppose que les parents d'élèves demanderont aussi, et je les incite à le faire, au maire…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Où passe l'argent.
BENOIT HAMON
Voilà ! Cinquante euros par enfant pour le périscolaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vanessa, vous êtes agent hospitalier. Bonjour. Le ministre Benoît HAMON est avec vous. Allez-y, Vanessa. Vous pouvez dialoguer avec lui et lui poser une question.
BENOIT HAMON
Bonjour madame.
VANESSA, AUDITRICE
Monsieur HAMON, bonjour. Je voulais savoir en fait quel était le but de cette réforme, quand on sait que dans les écoles de campagne il n'y aura aucune activité de mise en place parce qu'ils n'ont pas les locaux et les moyens pour faire ces activités, et que ce sera principalement de la garderie qui sera payante ?
BENOIT HAMON
Merci Vanessa pour cette question. Elle me permet de clarifier un point. Quel est d'abord l'intérêt de cette réforme ? On parle effectivement beaucoup de ce qui va se passer après le temps de classe, mais l'intérêt de cette réforme était d'abord ce qui se passe dans la classe et qu'on a totalement perdu de vue. Nous étions en France le pays où nous avions les journées de classe les plus longues, les moments où les enfants sont devant leurs professeurs en primaire. Or, nous constatons quoi ? C'est que pour une série de raisons dont des journées trop lourdes, les enfants français apprennent moins bien. Ce que nous avons voulu faire, c'est changer l'organisation de ce temps de classe pour qu'il y ait dans toutes les écoles de France le 2 septembre cinq matinées obligatoires. Après, ça peut être trois demi-journées, quatre demi-journées selon l'organisation qui a été arrêtée d'une commune à une autre, mais ces cinq matinées obligatoires offrent une matinée de plus pour bien apprendre. On reproche souvent à ce pays que nos jeunes n'auraient pas le goût d'apprendre, le goût de l'effort, le goût du travail mais pour bien apprendre, encore faut-il être concentré, encore faut-il être disponible. Tous les enfants sont aujourd'hui plus concentrés entre neuf heures et onze heures. Offrir un matin de plus, c'est une chance de plus de bien apprendre. Il y en avait quatre, il y en aura cinq. C'est cela d'abord l'intérêt. Je reconnais, comme l'a dit madame, que pour les communes rurales sur l'organisation des activités périscolaires c'est plus compliqué. C'est la raison pour laquelle j'ai offert dans ce fameux décret d'assouplissement, en écoutant l'association des maires ruraux de France, la possibilité de concentrer les activités périscolaires sur une seule et même après-midi. Pour faire quoi ? Parce que dans des petites communes, ce sont souvent les mêmes intervenants qui vont passer d'une commune à une autre. S'ils doivent le faire simultanément dans quatre communes entre 16 heures et 16 heures 45 ou 16 heures 30, c'est compliqué. Par contre, s'ils peuvent le faire dans la commune A le lundi matin, dans la commune B le mardi matin, dans la commune C le jeudi – pardon, c'était l'après-midi – la commune C le jeudi après-midi, on mutualise les interventions, on fait faire des économies d'échelle et on a là la possibilité de travailler plus correctement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Deux autres questions, très vite la réponse. Les vacances, puisqu'on est dans le rythme scolaire. Vous allez toucher ou pas aux dates des vacances ? Je parle des grandes vacances.
BENOIT HAMON
Pour l'instant, le calendrier scolaire ne bouge pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ne bouge pas.
BENOIT HAMON
Ne bouge pas. Il peut bouger avec la réforme des rythmes scolaires dans certaines communes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Justement.
BENOIT HAMON
Il y a certaines communes qui ont décidé… aujourd'hui le temps que l'on passe devant son professeur c'est 24 heures par semaine, certaines communes ont décidé d'alléger encore et de passer à 23 heures par semaine, il y a 36 semaines de classe par an, si vous passez de 24 heures à 23 heures, ça nécessite de faire 36 heures qui vont être prises sur le temps de vacances, l'équivalent d'une semaine et demie de cours supplémentaire, eh bien il y a des communes qui vont proposer…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vont réduire les grandes vacances.
BENOIT HAMON
Des expérimentations où, effectivement, elles mordent, ou grignotent…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur les grandes vacances.
BENOIT HAMON
Les grandes vacances.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Benoît HAMON, autre chose. Les vacances intermédiaires restent…
BENOIT HAMON
L'idéal, pour les rythmes d'apprentissage, c'est 7 semaines de classe, 2 semaines de coupure, ça c'est l'idéal.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est ce que vous voulez…
BENOIT HAMON
Sauf qu'avec le système des zones…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous voulez garder ce système ?
BENOIT HAMON
Il est utile quand même à…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le tourisme.
BENOIT HAMON
L'économie du tourisme, puisqu'elle permet…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous gardez ces zones ?
BENOIT HAMON
Nous allons garder, nous allons être amenés à rediscuter, en raison de la réforme territoriale, de l'organisation et de la distribution des zones puisqu'il apparait que des régions qui fusionnent ne sont pas forcément sur les mêmes zones.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Exactement, donc vous allez bouger les zones ?
BENOIT HAMON
Oui, mais pour l'instant, honnêtement ce n'est pas le débat le plus compliqué qu'on aura.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors dernière chose, dernière question, le bac, parce que ça a commencé le bac, est-ce que vous allez réformer le bac et introduire un peu plus de contrôles continus, sincèrement ? C'est un des projets que vous avez ou pas ?
BENOIT HAMON
Moi, mon projet principal c'est du primaire au collège, la scolarité obligatoire, moi je veux que tous les enfants… ce qui ne dit pas que le baccalauréat ne m'intéresse pas, mais je veux que tous les enfants réussissent, et parmi le baccalauréat, je veux parler d'un bac, le bac pro.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, on n'en parle pas suffisamment, on est d'accord.
BENOIT HAMON
Oui, mais c'est le bac où il y a aujourd'hui le taux de réussite le moins bon. Pourquoi ? Parce que ce n'est pas un bac au rabais déjà. Et on nous dit toujours le bac pro c'est une filière, et c'est vrai, vers laquelle, parfois, on oriente des élèves qui n'ont pas pu aller sur la filière générale, mais aussi on oriente des élèves qui ont voulu faire un bac pro, parce que le bac pro il cible l'emploi, et le fait aujourd'hui que l'on sache que le bac professionnel a un taux de réussite, qui peut être un taux de réussite inférieur aux filières générale et technologique, ça dit aussi que ce bac est un bac difficile, exigeant…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais ça, on est d'accord.
BENOIT HAMON
Non, mais je veux le dire parce qu'il y a aujourd'hui une image du bac professionnel, il y a 30 % des bacheliers français qui sont des bacheliers…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je suis d'accord, mais Benoît HAMON, alors qu'est-ce que vous allez changer pour améliorer… qu'est-ce que vous faites pour améliorer ce résultat au bac pro ?
BENOIT HAMON
Justement, on travaille aujourd'hui à faire en sorte que, les formations qui sont celles du bac pro, correspondent à ce que sont les grandes filières industrielles, les besoins de main d'oeuvre d'un certain nombre de grands secteurs, et à organiser ces diplômes-là en fonction des besoins de croissance, des besoins de développement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Améliorer les rapports entre l'entreprise et les lycées.
BENOIT HAMON
D'innovation de nos entreprises. Et ça c'est un travail qui est un travail au jour le jour, et qui est fait par des enseignants remarquables, qui sont les enseignants des filières professionnelles. Et je voulais dire ça parce que je sais qu'il y a beaucoup d'élèves qui préparent leur bac professionnel…
JEAN-JACQUES BOURDIN
En ce moment.
BENOIT HAMON
On voit ce bac-là comme une sorte de troisième bac, ce n'est pas un troisième bac, c'est une filière qui est une filière exigeante, difficile, et tout le monde n'a pas son bac pro parce que ce n'est pas un bac qu'on donne aujourd'hui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Benoît HAMON d'être venu nous voir ce matin.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 juin 2014