Interview de M. Kader Arif, secrétaire d'Etat aux anciens combattants et à la mémoire, avec RFI le 25 août 2014, sur la politique du gouvernement, la commémoration de la libération de paris et sur la retraite des anciens combattants originaires d'Afrique.

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Média : Radio France Internationale

Texte intégral


FREDERIC RIVIERE
Notre invité ce matin le secrétaire d'Etat aux Anciens combattants et à la mémoire. Bonjour Kader ARIF.
KADER ARIF
Bonjour.
FREDERIC RIVIERE
On va parler histoire ce matin, Kader ARIF, la libération de Paris il y a 70 ans, mais avant d'y venir, un mot de politique, Arnaud MONTEBOURG a franchi la ligne jaune en remettant en cause la politique du gouvernement, voilà ce que dit l'entourage de Manuel VALLS. Kader ARIF, est-ce que, Arnaud MONTEBOURG et Benoît HAMON – qui le soutient – doivent démissionner du gouvernement ?
KADER ARIF
Ecoutez, moi, je n'ai pas à répondre à la place d'Arnaud MONTEBOURG et de Benoît HAMON, ce que je sais, c'est que ce sont deux bons ministres, que par ailleurs, ce qu'ils ont exprimé, c'est des choses qui sont déjà mises en place, deux exemples : la réorientation dans la politique européenne, au regard de la situation aujourd'hui en Europe, c'est une demande qui est faite par la France, tant en terme de politique budgétaire qu'en terme de politique monétaire, et des avancées ont lieu dans ce domaine, et des alliés de la France ont manifesté aux côtés de la France pour demander une réorientation. Deuxième élément, le mix – si vous me permettez cette expression – entre politique de l'offre et politique de la demande, c'est ce qui est aujourd'hui mené à l'échelle de notre pays, et là, avec des exemples précis, pacte de compétitivité et solidarité qui est mis en place, la possibilité de donner des marges aux entreprises, d'une part, mais de l'autre côté, une politique de la demande qui est aussi prise en compte, avec des propositions qui sont faites en terme de pouvoir d'achat, tant sur le plan fiscal, la baisse des impôts pour plusieurs millions de nos concitoyens, et en même temps, des mesures, même si elles ont été reprises par le Conseil constitutionnel, mais des propositions seront faites et sont à l'étude aujourd'hui, en ce qui concerne les cotisations sociales pour permettre du pouvoir d'achat supplémentaire à nos concitoyens, et en particulier aux plus modestes. Donc vous voyez, rien de bien nouveau, j'allais dire, là-dessus…
FREDERIC RIVIERE
Il n'y a pas de contradiction selon vous ? La semaine dernière, François HOLLANDE réaffirme que sa ligne est la bonne, il demande du temps, les résultats vont venir, et voilà son propre ministre de l'Economie qui le contredit, ça ne vous choque pas ?
KADER ARIF
Je me méfie beaucoup de ce monde de politico-médiatique, si vous me permettez l'expression…
FREDERIC RIVIERE
Ah, c'est la faute des journalistes !
KADER ARIF
Non, je n'ai pas dit ça, mais vous savez bien que ce n'est pas ce que je pense et ce n'est pas ce que je dis, mais la réalité, c'est : ne faisons pas non plus un buzz pour l'idée du buzz là-dessus, je veux dire, ils expriment des choses, on peut avoir des choses et on a le droit de s'exprimer sur : faut-il réorienter, ce que je vous dis là, c'est que cette réorientation au regard de ce qui est aujourd'hui la situation européenne, la prise en compte aujourd'hui d'un risque de déflation, la prise en compte aujourd'hui d'un manque de croissance dans une grande partie des pays européens, et pays européens, comme la France, l'Italie et l'Allemagne, elle-même qui est touchée. Cette réorientation, la France l'a demandée, et il y a des évolutions qui sont en cours. De la même manière, ce que je vous dis, c'est que, oui, on dit : il y a une politique de l'offre, cette politique de l'offre, elle est assumée aujourd'hui sur le plan gouvernemental, elle a été rappelée et par le président de la République et par le Premier ministre, mais en même temps, à côté de ça, il y a une prise en compte de la nécessité d'avoir une politique de la demande, d'où aussi des choix qui ont été faits, annoncés en ce qui concerne, j'allais dire l'augmentation du pouvoir d'achat de nos concitoyens sur les impôts, plusieurs millions de personnes, ça a été annoncé partout la semaine dernière, qui sont concernées par cela, et une augmentation du pouvoir d'achat en terme de cotisations sociales pour les salaires les plus bas…
FREDERIC RIVIERE
Sauf que la personne qui fait ces critiques, c'est la personne chargée de mettre en oeuvre cette politique de l'offre, lui demande maintenant une inflexion majeure de la politique du gouvernement !
KADER ARIF
Oui, mais est-ce qu'il lui a été refusé de faire une inflexion quand on aborde la question qui était en même temps souhaitée par le Premier ministre sur les monopoles, qui porte cela ? Si ce n'est Arnaud MONTEBOURG. Et ça va dans le bon sens pour redonner, là aussi, du pouvoir d'achat à nos concitoyens, voilà quelles sont les réalités.
FREDERIC RIVIERE
Et sur l'Allemagne, il ne faut pas s'aligner sur les axiomes idéologiques de la droite allemande, est-ce que ce n'est pas préjudiciable aux relations entre Paris et Berlin ?
KADER ARIF
D'où le refus, si vous me permettez, du président d'être dans une confrontation seulement entre la France et l'Allemagne, la France porte une parole forte, elle est incarnée, exprimée par le président de la République, conseil après conseil, portée par l'ensemble des ministres autour du Premier ministre sur cette question, il n'y a pas à rechercher une confrontation bilatérale avec l'Allemagne, mais à faire et à continuer à faire ce que nous faisons, c'est-à-dire à demander à l'Europe, ça a été exprimé d'ailleurs par le New York Times la semaine dernière, en terme de changement de politique économique au sein de l'Union européenne, pour que l'Europe redevienne et soit aussi une partie du monde qui retrouve de la croissance, ça n'intéresse pas que l'Europe et les pays européens, c'est ce que nous portons, dont des avancées de la BCE en terme de politique monétaire, une baisse aujourd'hui qui peut éventuellement nous avantager, de l'euro en terme d'exportation, des annonces qui sont faites en terme de politique d'investissement, on verra ce que ça donnera, mais des expressions qui ont eu lieu de manière très forte à l'échelle européenne.
FREDERIC RIVIERE
Pour l'instant, le gouverneur de la Banque centrale allemande a dit niet.
KADER ARIF
Oui, mais la Banque centrale allemande, et là, on ne parle pas de la Banque centrale allemande, on parle de la Banque centrale européenne, donc la France dit des choses, exprime des choses très fortes, elles sont portées, à nous de trouver des alliés, et ils existent.
FREDERIC RIVIERE
On commémore aujourd'hui la libération de Paris, Kader ARIF, la fin de l'occupation allemande dans la capitale, c'était il y a 70 ans, le 25 août 1944. Pourquoi avoir choisi de célébrer cet événement en particulier ?
KADER ARIF
Parce que célébré chaque année, mais j'étais déjà, hier soir, 24 août, on oublie que la libération de Paris, quand je disais hier soir qu'un pays se grandit chaque fois qu'il fait qu'il n'y a pas de mémoire oubliée, c'était La Nueve…
FREDERIC RIVIERE
Voilà, il est célébré avec un peu plus de faste cette année…
KADER ARIF
Voilà, des Espagnols qui ont libéré Paris, qui sont arrivés les premiers dans Paris, le 24 août au soir ; donc nous avons fait ça avec le maire de Paris, Anne HIDALGO, l'ensemble des associations qui étaient présentes. Paris, pour plusieurs raisons, Paris s'est libérée elle-même, Paris, ça a été une insurrection de ses habitants, qui avait commencé le 10 août, les cheminots parisiens qui avaient commencé cela, Paris, c'est la libération de la France, quand on libère la capitale, mais plus encore, la libération du monde, après quatre ans d'occupation, les cloches, les tocsins résonnaient à travers le monde, parce que libérer Paris, c'était la paix qui revenait, et c'était le fascisme et la barbarie nazie qui disparaissaient, Paris, ça représente, au-delà de ce qu'elle est, une ville lumière, mais une ville qui est porteuse de ce qu'est la France, ce pays des Droits de l'Homme et des valeurs universelles, Paris, c'est rappeler que Paris a été libérée aussi par des gens venus d'horizons différents…
FREDERIC RIVIERE
Dans la deuxième DB, vous voulez dire ?
KADER ARIF
Dans la deuxième DB…
FREDERIC RIVIERE
Celle du Général LECLERC ?
KADER ARIF
Voilà, de couleurs différentes, mais aussi Paris libérée par des hommes qui étaient engagés dans la résistance, des antifascistes italiens, des anti-fascistes allemands, qui étaient là depuis longtemps, c'est aussi ça. Donc voilà, il fallait et il faut rappeler cela, chaque ville, chaque libération de la ville a son histoire singulière, sa particularité, Paris a cette particularité, et en même temps, c'est une des capitales du monde.
FREDERIC RIVIERE
On le sait peu que, avant l'arrivée des troupes françaises et américaines à Paris, comme vous le rappeliez, il y a eu une insurrection populaire. Est-ce que, selon vous, on en fait assez aujourd'hui pour toucher les jeunes à ce sujet ?
KADER ARIF
Ecoutez, moi, je suis assez content de ce qui s'est fait pendant ce cycle mémoriel, c'est-à-dire cette appétence de nos concitoyens à l'égard de la mémoire, le pays se pose des questions quant à ce qu'il est aujourd'hui, ce qu'il peut devenir, et de belles initiatives ont été prises sur le plan pédagogique, dans les collèges, les écoles, les lycées, et moi, je me félicite, mais je crois qu'on peut aller encore plus loin en terme de transmission, sur le travail sur les manuels scolaires en particulier, ce sont des choses que nous avons engagées avec le ministère de l'Education nationale, qui vont prendre certainement du temps, mais qui vont dans le bon sens.
FREDERIC RIVIERE
Ça se traduit comment concrètement dans les manuels scolaires ?
KADER ARIF
Ça se traduit comment, je pense qu'il faut rappeler des parties de l'histoire, ce qui a été réellement la résistance, peut-être avec un peu plus de force, quelle était-elle, ce qu'était l'armée d'Afrique, des choses parfois un peu oubliées, ou sur lesquelles on passe trop vite.
FREDERIC RIVIERE
A ce propos de l'armée d'Afrique, il y a eu un alignement des pensions entre les anciens combattants français et ceux d'origine étrangère. Est-ce que, aujourd'hui, la situation des deux côtés, entre Paris et de l'autre côté de la Méditerranée, du point de vue des anciens combattants, vous semble égalitaire, totalement égalitaire ?
KADER ARIF
Ecoutez, elle est égalitaire avec beaucoup de retard sur le plan des dossiers, moi, quand je suis arrivé, c'était des milliers de dossiers qui n'étaient pas traités, des gens qui n'étaient peut-être pas informés de leurs droits en terme de cristallisation, puisque c'est ça que vous évoquez, la décision que j'ai prise a été de prolonger d'un an, puisqu'il y avait trois ans de délai pour déposer les dossiers, jusqu'à fin 2013, de prolonger d'un an ce délai de forclusion, donc jusqu'à fin 2014, ces anciens combattants, de l'autre côté de la Méditerranée, sur l'Afrique subsaharienne, pourront continuer à déposer leur dossier, donc à ouvrir leurs droits, c'est douze millions d'euros qui ont été engagés pour cette prolongation d'un an, et en même temps, une communication qui est faite par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre en Algérie, au Maroc, en Tunisie, et sur l'Afrique subsaharienne, nous sommes en train de combler ce retard, mais c'est les mêmes droits pour les mêmes combattants.
FRÉDÉRIC RIVIERE
Merci beaucoup Kader ARIF.
KADER ARIF
Merci à vous.
FREDERIC RIVIERE
Je rappelle que vous êtes secrétaire d'Etat aux Anciens combattants et à la mémoire.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 septembre 2014