Texte intégral
PATRICK COHEN
Bonjour Stéphane LE FOLL.
STEPHANE LE FOLL
Bonjour.
PATRICK COHEN
On va parler dans un instant du malaise des légumiers bretons après l'incendie de deux bâtiments publics ce week-end à Morlaix, mais d'abord question au porte-parole du gouvernement, que savez-vous de la réalité de la menace terroriste en France et du sérieux de ce message de l'organisation de l'Etat islamique, que vient de rappeler Bernard GUETTA, qui appelle au meurtre de Français ?
STEPHANE LE FOLL
Qu'est-ce que j'en sais ? je sais une chose, c'est que depuis le début, au conseil des ministres, est évoquée cette situation de manière très régulière, que le constat qui a été fait c'est que, à peu près 1000 jeunes, ou moins jeunes, Français, ont été, à un moment ou à un autre, en Syrie ou en Irak, que cette menace, liée à leur retour potentiel, a suscité, déjà depuis longtemps, une mobilisation des services de l'Etat, qu'on a renforcé l'arsenal pour éviter qu'ils partent, ces jeunes, qu'ils se laissent entraîner par des sites Internet et qu'ils partent - je fais le constat, je le dis, qu'il y a 2 jours à peine une jeune sarthoise de 17 ans a été prise à Marseille - donc, aucun territoire, ni département, n'est à l'abri malheureusement, que la situation est grave. Qu'en Irak, ça a été très bien dit tout à l'heure, on est face à une situation extrêmement dangereuse dans le sens où un groupe terroriste veut devenir un Etat terroriste, c'est ça qui se passe, que ça ramène aussi, effectivement, historiquement, à une situation extrêmement complexe dans toute cette région, et qu'il faut être mobilisé, et surtout déterminé. Déterminé à lutter contre ce groupe terroriste, à l'empêcher d'atteindre ses objectifs...
PATRICK COHEN
Et ne pas lui céder face...
STEPHANE LE FOLL
Et ne pas lui céder.
PATRICK COHEN
Aux menaces, et aux menaces d'exécution d'un otage, ce qui est le cas en Algérie aujourd'hui.
STEPHANE LE FOLL
Ne pas lui céder, même si, avec ce qui s'est passé hier soir, ou avant-hier soir, on a appris ça hier en tout cas, un otage français est aujourd'hui aux mains d'un groupe terroriste, on fera tout pour le retrouver, mais on doit être tout aussi déterminé à gagner contre ce terrorisme, contre ces organisations, contre cette idéologie qui est barbare et qui a été rappelée ce matin, qui ne vise qu'à tuer, tuer, et donc c'est aujourd'hui une bataille, c'est un engagement de la France, mais ça doit se faire dans la durée avec une détermination totale.
PATRICK COHEN
Stéphane LE FOLL, ministre de l'Agriculture, confronté à nouveau aux légumiers bretons en colère, on va revenir sur les raisons de cette colère, crise de surproduction, effets aussi de l'embargo russe. Je voudrais vous faire entendre un court extrait du maraîcher, de ce légumier, qui dit avoir participé aux incendies de Morlaix ce week-end, et qu'on a entendu tout à l'heure dans le journal de 7H00 sur INTER.
UN LEGUMIER
C'est juste le désespoir des agriculteurs qui s'est manifesté à ce moment-là, et en ce moment, ce qu'on se rend compte, et depuis de nombreuses années, c'est que de toute façon avant de se faire écouter à Paris, par n'importe quel politique, on est obligé par foutre le feu dans quelque chose, ou alors faire des actions assez importantes.
JOURNALISTE
Est-ce que vous craignez les poursuites judiciaires ?
LE LEGUMIER
Non. Non, parce que je vois qu'ils ont lancé un appel à témoins, c'est-à-dire qu'ils n'ont rien trouvé sur place.
PATRICK COHEN
Pour se faire entendre on est obligé de foutre le feu, dit ce maraîcher.
STEPHANE LE FOLL
Non mais là, je ne peux pas accepter ça, d'abord parce que l'histoire des légumiers bretons c'est l'histoire d'une partie de la région du nord Finistère, avec GOURVENNEC qui a été un leader...
PATRICK COHEN
Alexis GOURVENNEC.
STEPHANE LE FOLL
Breton et un leader professionnel, mais ceux qui poursuivent en disant il faut toujours casser, ou même brûler, c'est ça qui a été dit, pour se faire entendre, mais moi il y a 15 jours, plus de 15 jours, 3 semaines, avait été prévu un rendez-vous, quand on a été pendant tout l'été...
PATRICK COHEN
Le rendez-vous de demain mercredi ?
STEPHANE LE FOLL
Le rendez-vous de demain, mercredi, c'était prévu, de dire de se faire écouter, il faut qu'on brûle, ce n'est pas vrai, ce n'est pas vrai. Quand moi, cet été, je suis allé en Espagne, je suis allé en Allemagne, on a mis en place un conseil extraordinaire, le 5 septembre, pour mobiliser 250 millions d'euros, on n'avait pas besoin, je n'ai pas eu besoin, d'être saisi un matin d'une perception ou d'une MSA brûlées, ce n'est pas vrai. Et la MSA en plus, parce que ce qui n'est pas dit, c'est la Mutualité Sociale Agricole, la Mutualité Sociale Agricole, c'est ce qui fait que tous les agriculteurs ont une Sécurité Sociale, contre la maladie et contre les accidents de travail, depuis des réformes qu'on a faites.
PATRICK COHEN
Donc la justice ira jusqu'au bout pour poursuivre les casseurs et les incendiaires ?
STEPHANE LE FOLL
Mais, donc je condamne, et je ne peux pas entendre et laisser dire, parce que ça c'est aussi une habitude qui a été prise depuis des années, c'est-à-dire on casse pour se faire entendre...
PATRICK COHEN
Oui.
STEPHANE LE FOLL
Mais attendez...
PATRICK COHEN
Attendez, ça a marché avec l'écotaxe, les portiques écotaxe ils ont brûlé...
STEPHANE LE FOLL
Oui, ça a marché, eh bien écoutez, si c'est ça la logique, puisque c'est ça qui est revendiqué, moi je dis que je condamne cette logique. Je pense que depuis 30 ans, et à chaque fois qu'il y a eu une crise, parce que, sur les crises du chou-fleur et de l'artichaut, il y en a eu, des prises du pont de Morlaix, à chaque fois il y a eu ces attitudes, et est-ce que ça a donné quelque chose, à terme, pour trouver des solutions ? Non. Est-ce que ça nécessite qu'on soit à l'écoute ? Oui, ça c'est absolument vrai, et je l'ai été.
PATRICK COHEN
Est-ce que ceux qui, parmi les responsables qui se sont réjouis, ou qui n'ont pas condamné cette violence, ce sont toujours des interlocuteurs pour vous Stéphane LE FOLL ?
STEPHANE LE FOLL
Moi j'ai des interlocuteurs qui ont été désignés par la profession, donc je ferai, en responsabilité, en responsabilité pour ce qui me concerne, une discussion, avec des propositions.
PATRICK COHEN
Bon !
STEPHANE LE FOLL
En responsabilité.
PATRICK COHEN
Vous voyez à qui je pense, Thierry MERRET.
STEPHANE LE FOLL
Oui, mais Thierry MERRET, je connais...
PATRICK COHEN
Président de la FDSEA du Finistère, l'un des leaders des Bonnets rouges, qui a tiré son coup de chapeau aux incendiaires.
STEPHANE LE FOLL
Je vous signale que Thierry MERRET je l'ai rencontré au SPACE à Rennes, et il m'a donné son bonnet rouge, et il m'a salué en breton, et je l'ai salué, donc moi je suis capable de respecter, et quand on respecte, mutuellement, on peut trouver des solutions, mais on n'est pas obligé de faire, sûrement pas obligé de faire ce qui a été fait il y a 2 jours dans la nuit, sûrement pas.
PATRICK COHEN
Sur le fond, surproduction, notamment pour les artichauts, ces derniers mois, embargo russe, effet de l'embargo russe, il n'y a plus de débouché en Russie, à la fois pour les producteurs français, mais aussi pour les producteurs de l'Est qui retournent leur production vers la France avec des moindres coûts.
STEPHANE LE FOLL
C'est bien pour ça qu'il fallait que l'Europe...
PATRICK COHEN
Comment on y répond ?
STEPHANE LE FOLL
Si on ne se coordonne pas à l'échelle européenne, comme il y a plein de pays qui exportaient vers la Russie, c'est effectivement un retour de ce qui était exporté sur le marché européen, et là on risque d'avoir des chutes de prix extrêmement importantes, toutes filières confondues, fruits, légumes, viande porcine, viande bovine, et pas céréales, parce que sur cette partie-là on n'exportait pas, mais la déstabilisation des marchés, si on ne fait rien, c'est vrai qu'elle est tout à fait possible, et elle a commencé. Donc, il fallait se coordonner, c'est le sommet extraordinaire, c'est 200 millions d'euros, et on y rajoute, la Commission hier, 125 millions d'euros, mais je rappellerais, parce que le président de la SICA a aussi fait des annonces, c'était sur FRANCE INFO, en disant qu'il a reçu un chèque de 353 euros.
PATRICK COHEN
70.
STEPHANE LE FOLL
Combien ?
PATRICK COHEN
353,70 euros.
STÉPHANE LE FOLL
353,70 euros...
PATRICK COHEN
C'est-à-dire 23 centimes par exploitant.
STEPHANE LE FOLL
Oui. Je ne sais pas, je vous le dis là, de manière très claire, de quel chèque il parle, parce que les demandes qui ont été faites par la SICA, pour des retraits, s'élèvent exactement à 853, 895 euros, parce qu'elle n'a pas fait beaucoup de retraits, voilà ce qui nous a été demandé. On ne verse des aides, à l'échelle européenne, que quand on nous fait une demande.
PATRICK COHEN
Donc, si le chèque est ridicule, c'est parce que la demande a été mal formulée ?
STEPHANE LE FOLL
C'est d'abord... parce que ce chèque, je n'ai pas trouvé trace de ce chèque.
PATRICK COHEN
Ah bon ?
STEPHANE LE FOLL
Alors on a, depuis hier ou avant-hier, c'était sur FRANCE INFO, un débat qui consiste à dire, vous vous rendez compte, l'Etat donne 23 centimes par producteur, eh bien on donne ce que les professionnels demandent.
PATRICK COHEN
Vous le voyez demain monsieur JACOB...
STEPHANE LE FOLL
Eh bien je vais le voir demain.
PATRICK COHEN
Il vous apportera son chèque, sans doute.
STEPHANE LE FOLL
Eh bien, qu'il apporte son chèque demain, au ministre de l'Agriculture, que je vois de quoi on parle.
PATRICK COHEN
En attendant, on fait quoi, allégement, étalement des charges, qu'est-ce que vous proposerez ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, on va proposer des choses qui correspondent à des besoins pour des entreprises et des exploitations qui ont des difficultés, on va mobiliser, se mobiliser à l'échelle européenne, aussi, pour réintroduire, et les brocolis, et les choux-fleurs, et les artichauts, dans les listes des produits qu'il faut aider. On va mobiliser les sommes, au niveau de FranceAgriMer, chaque filière est organisée, pour faire des demandes, et c'est comme ça qu'on réglera le problème, plus les autres mesures qu'on pourra prendre dans une situation qui peut être difficile.
PATRICK COHEN
Donc il y aura des mesures concrètes, précises, immédiates, rapides, annoncées pour les maraîchers demain ?
STEPHANE LE FOLL
Concrètes, immédiates, rapides, et à la hauteur de l'enjeu, voilà, si vous voulez avoir...
PATRICK COHEN
Dès demain ?
STEPHANE LE FOLL
Voilà. Dès demain, demain il y a une rencontre, et j'aurai en plus, et j'avais prévu, alors que cet été on a eu une première réunion, j'avais prévu vendredi une réunion avec toute la filière, parce qu'il n'y a pas que la filière légumière bretonne qui est touchée, toute la filière légumière française, c'était prévu, je le rappelle, depuis le 22 août. Donc, quand j'entends qu'on dise qu'il faut aller casser et brûler pour se faire écouter, je dis non, il y a un moment, non, ce n'est pas possible.
PATRICK COHEN
D'autres questions, agricoles sans doute, dans la deuxième partie de cet entretien, avec les auditeurs d'INTER. Un mot de politique. Nicolas SARKOZY, il a honte de la façon dont le pays est gouverné, et vous, vous êtes fier, Stéphane LE FOLL ?
STEPHANE LE FOLL
Je ne crois pas que c'est honte de la façon dont le pays est gouverné.
PATRICK COHEN
C'est ce qu'il a dit.
STEPHANE LE FOLL
Oui, il a dit qu'il avait honte, plutôt, aujourd'hui, de son pays, c'est ce qu'a répondu d'ailleurs Manuel VALLS, très bien. Moi j'ai conscience des difficultés, j'ai parfaitement conscience du fait qu'il faut qu'on assure, dans ce moment présent, surtout une capacité, une détermination à redresser un pays, ça j'en ai conscience, je ne me permettrais pas de porter de tel jugement. Et puis autrement, pour Nicolas SARKOZY, au bout de 3 minutes on a compris que celui qu'on avait quitté en 2012 était revenu, c'est le même, voilà. Il n'y a pas d'autre commentaire à faire, c'est le même. Il est candidat à la tête de l'UMP, et au vu de ce que je vois, eh bien l'UMP est partie pour 3 ans, maintenant, d'un match, pour reprendre l'expression d'Alain JUPPE, mais plutôt d'une bataille.
PATRICK COHEN
Stéphane LE FOLL invité de FRANCE INTER ce matin, on vous retrouve donc dans quelques minutes.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 8 octobre 2014