Texte intégral
JOURNALISTE
RMC, 07h4. Votre invitée, Jean-Jacques, Pascale BOISTARD, secrétaire d'Etat chargée des Droits des femmes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Pascale BOISTARD, bonjour.
PASCALE BOISTARD
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On va parler de la prostitution, du texte de loi contre la prostitution qui a été voté à l'Assemblée nationale, rappelons-le, en décembre 2013, c'est-à-dire qu'il y a un an, presque un an, à deux mois près. Le texte est toujours au Sénat, il ne bouge plus. Je crois, je crois, enfin, je crois, je sais même, c'était en juillet, je crois, la Commission spéciale du Sénat a supprimé la pénalisation du client, ce que prévoyait le texte.
PASCALE BOISTARD
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et depuis, le texte n'est inscrit, n'est pas inscrit à l'ordre du jour du Sénat. Non ? Ou est-ce que l'on en est, là ?
PASCALE BOISTARD
Oui, il n'est pas inscrit. Alors, en juillet, après il y a eu l'interruption, après vous avez eu les élections, donc là tout se remet en route, donc oui, maintenant il faut l'inscrire à l'agenda
JEAN-JACQUES BOURDIN
A l'agenda, oui.
PASCALE BOISTARD
Et que le processus parlementaire puisse continuer, c'est-à-dire que les sénateurs et sénatrices puissent en discuter, puissent le voter, pour qu'il revienne à l'Assemblée nationale et qu'on puisse définitivement l'adopter.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, le Sénat juge la pénalisation du client, inefficace pour lutter contre les réseaux, et susceptible de précariser davantage les prostituées.
PASCALE BOISTARD
Il s'agit, à travers ce texte, de s'attaquer au système prostitutionnel, c'est-à-dire d'aider les prostituées qui souhaitent le faire, à s'en sortir, d'agir aussi en prévention sur la responsabilisation du client, mais d'agir en général contre les violences faites aux femmes, car c'est une violence faite aux femmes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, une violence faite aux femmes, tout le monde en convient, hein, Pascale BOISTARD, même s'il y a de la prostitution volontaire, ça existe aussi, Pascale BOISTARD.
PASCALE BOISTARD
En très petite proportion.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça veut dire que la prostitution volontaire est baie, elle est interdite, d'une manière Si vous pénalisez le client, vous interdisez la prostitution volontaire.
PASCALE BOISTARD
Oui, mais 90 %, si vous voulez, des personnes qui se prostituent aujourd'hui, sont sous la main de systèmes mafieux, et c'est aussi lutter contre ces systèmes-là, en disant : s'il n'y a plus d'offre, c'est
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce que vous croyez que vous allez abolir toute idée de prostitution à travers ce texte ?
PASCALE BOISTARD
Nous ne sommes pas totalement
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes naïve ou quoi ?
PASCALE BOISTARD
Non, je ne pense pas que les parlementaires comme Catherine COUTELLE ou Maud OLIVIER ou même Bruno LE ROUX sont naïfs. Par contre
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bruno LE ROUX, on ne sait pas.
PASCALE BOISTARD
Par contre, dire que ce système n'est plus possible dans notre pays, et que, contraindre des femmes à se prostituer, c'est-à-dire aussi autoriser le fait de penser qu'on peu prendre, acheter, monnayer, le corps d'une femme, ou d'un homme aussi, parce qu'il y a de la prostitution masculine
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien sûr, bien sûr.
PASCALE BOISTARD
Il faut lutter contre, et donc c'est un texte qui est très équilibré, à la fois sur la prévention, à la fois sur l'accompagnement des prostituées, d'un point de vue sanitaire, et d'un point de vue social, et c'est aussi surtout, lutter contre les systèmes mafieux, qui, à 90 %, agissent sur cette prostitution.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais, vous voulez abolir la prostitution.
PASCALE BOISTARD
Il s'agit de dire que la prostitution
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est une abolition.
PASCALE BOISTARD
C'est le mouvement qui accompagne Rosen HICHER, la volonté des parlementaires c'est d'agir sur cette violence qui est faite aux femmes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais est-ce que vous voulez abolir la prostitution ? Je vous pose la question, Pascale BOISTARD.
PASCALE BOISTARD
Il s'agit de faire reculer au maximum la prostitution. Vous savez, c'est comme tout, comme toutes les déviances de notre société, eh bien on légifère, on éradique jamais totalement les phénomènes mais en tout cas on les réduit au maximum.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, la prostitution, rappelons-le, est tolérée en France, hein
PASCALE BOISTARD
Oui, enfin, il y le délit de racolage, et d'ailleurs
JEAN-JACQUES BOURDIN
par la loi, oui, délit de racolage
PASCALE BOISTARD
et ça fait partie des points, aussi, de cette loi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, délit de racolage, on est bien d'accord, mais il y a une tolérance.
PASCALE BOISTARD
Il y a toujours une tolérance, parce que la société, en général, est toujours extrêmement mal à l'aise avec ces questions, aussi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous le comprenez qu'il y ait vous comprenez qu'il y ait cette tolérance, franchement, Pascale BOISTARD ?
PASCALE BOISTARD
Ecoutez, moi je n'ai aucune tolérance vis-à-vis de système mafieux, aucune tolérance vis-à-vis de systèmes mafieux, qui réduisent des femmes en esclavage.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça, on est bien d'accord, mais qu'il y ait échange entre un homme et une femme, ou entre deux hommes ou entre
PASCALE BOISTARD
Je pense que considérer que l'on peut acheter, même pour un moment, une femme, n'est pas tolérable.
JEAN-JACQUES BOURDIN
N'est pas tolérable. Et même si la femme est consentante.
PASCALE BOISTARD
Parce que, mais personne n'est
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même si elle le désire, même si elle a fait ce choix ?
PASCALE BOISTARD
A partir du moment où il y a une transaction financière, il n'y a pas, si vous voulez, une relation qui est équilibrée, c'est une soumission, pour des raisons économiques, c'est un rapport de force, et donc on est dans un système violent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Un Français sur huit a déjà eu recours à une prestation sexuelle tarifée, je crois, j'ai vu. Enfin, ce sont les chiffres, hein, en fait il y en a peut-être beaucoup plus.
PASCALE BOISTARD
Peut-être.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Peut-être. Donc pour vous c'est la meilleure façon d'éradiquer la prostitution ?
PASCALE BOISTARD
En tout cas ça fait partie des outils. Encore une fois, elle est très équilibrée cette loi, elle a été construite par les parlementaires, ceux que j'ai cités notamment tout à l'heure.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais pourquoi est-ce que les sénateurs tardent tant, selon vous ?
PASCALE BOISTARD
Il faudrait leur poser la question, mais je crois que
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez une idée ?
PASCALE BOISTARD
Je crois maintenant que toutes les instances du Sénat sont rétablies, il n'y a aucune raison que ce texte ne soit pas inscrit à l'ordre du jour du Sénat.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Pascale BOISTARD.
PASCALE BOISTARD
Merci à vous.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être venue nous voir.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 octobre 2014