Texte intégral
Monsieur le président de la FNADEPA, Madame la vice-présidente du conseil général,
Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs, bonjour et merci de m'accueillir à votre tribune aujourd'hui.
Nous sommes entrés, avec la FNADEPA, dans un processus de dialogue attentif et vigilant.
J'ai présenté au mois de mai 2014, lors des 4e Assises des logements foyers, le projet de loi sur l'adaptation de la société au vieillissement. Le contenu de ce projet a sans doute déjà largement animé vos échanges.
Il y a un mois, la principale question était de savoir quand le projet de loi serait présenté au conseil des ministres. Je vous avais répondu « avant l'été calendaire ». Le premier engagement que j'avais pris devant vous est donc tenu, puisque le projet est passé en conseil des ministres au début du mois de juin 2014.
Angers est une ville emblématique des changements sociétaux désormais enclenchés, qui avait accueilli au début de l'année 2014 la clôture de la concertation de la loi. C'est à Angers, en effet, que la loi avait été lancée par le gouvernement précédent.
Ce matin, j'étais à Nantes. Des déplacements nombreux m'obligent à passer trop rapidement d'un endroit à un autre, sans prendre le temps de visiter comme je le souhaiterais tout ce qu'Angers et son agglomération ont réalisé en faveur de l'accueil des personnes âgées, en particulier autour du Gérontopole.
Il y a un mois, vous me demandiez si les 640 millions d'euros de la CASA seraient affectés, comme il était prévu initialement, à la loi sur le vieillissement. Je peux vous l'affirmer aujourd'hui : c'est quasiment acquis.
J'ambitionne que cette loi soit examinée à l'Assemblée nationale d'ici la fin de l'été calendaire. Les travaux devraient même pouvoir commencer, en première lecture, au mois de septembre 2014. Le gouvernement et le Parlement sont déterminés à agir vite.
La commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale a commencé à uvrer. Sa rapporteur, Martine PINVILLE, est déjà active. Elle devrait remettre son rapport d'ici la fin du mois de juillet 2014.
J'aimerais maintenant vous présenter quelques-uns des choix importants que Marisol TOURAINE, ma ministre de tutelle, le président de la République, le premier Ministre et moi avons effectués ces dernières semaines.
D'abord, je tiens à préciser que le texte adopté en conseil des ministres est conforme, dans son architecture, au texte transmis au Conseil d'État et discuté par le CESE. Je m'inscris donc dans la continuité des concertations menées par ma prédécesseur, Madame DELAUNAY.
Cela ne signifie pas que je n'aurais pas eu envie de reprendre un peu les choses depuis ma nomination d'autant que certaines associations avaient encore des propositions intéressantes à présenter , de mettre un peu ma patte à cette loi, mais j'ai fait le choix de l'efficacité, effaçant mes propres attentes au profit de la rapidité.
Si j'avais commencé à retravailler le texte alors qu'il était déjà passé devant le Conseil d'État, il aurait fallu repartir pour un tour institutionnel.
Le texte a donc été adopté en l'état. C'était la meilleure façon de le porter au plus vite devant le Parlement. Je fais confiance au débat parlementaire pour améliorer la loi, si elle peut l'être encore, et l'ancrer dans le quotidien des familles.
Quand je parle des familles, je pense particulièrement aux femmes, qui vivent plu s longtemps que les hommes, mais avec des retraites bien inférieures, et qui sont aussi les principales aidantes dans leur propre génération et parfois celle qui les a précédées.
J'ai la chance de piloter un département ministériel qui regroupe enfance, famille et personnes âgées. Je peux donc m'inspirer de ce qui est entrepris dans un secteur pour l'étendre intelligemment dans un autre secteur, comme le droit au répit, et renforcer la prise en compte globale des parcours de vie, en particulier celui des femmes qui, avant d'être aidantes de leurs parents, ont souvent été mères, grands-mères, épouses. Leur parcours d'aidantes n'a donc pas commencé avec la prise en charge de la génération précédente, mais il y a plusieurs dizaines d'années. Il était donc essentiel de prendre en compte la globalité de ces parcours.
Le projet de loi s'efforce de mobiliser la société autour des enjeux du vieillissement, de la prévention et de la prise en charge de la perte d'autonomie, à travers trois axes majeurs : anticipation, adaptation et accompagnement.
Je souhaiterais, si possible, vous faire mesurer à quel point dans un contexte budgétaire extrêmement contraint, dans le cadre d'une politique globale de redressement des comptes publics, de relance de l'appareil productif et de soutien à l'économie et à la compétitivité des entreprises, compte tenu aussi de l'exigence affirmée par le président de la République de réaliser 50 milliards d'euros d'économie dans les dépendances publiques d'ici 2017, à quel point, donc, ce projet de loi est important et exceptionnel.
Le vieillissement est probablement le seul secteur dans lequel le gouvernement va engager de nouvelles dépenses.
Je sais que la CASA existe depuis quelques années. Les sommes qu'elle a permis de dégager ont toujours été affectées aux dépenses sociales liées à la retraite et au vieillissement. Or, il faudra continuer à garantir et abonder le minimum vieillesse.
C'est pourquoi il est prévu une dépense supplémentaire de 640 millions d'euros. Cette dépense, justifiée et exceptionnelle dans le contexte que je viens de décrire, montre la détermination du gouvernement et du président de la République à tenir un engagement et répondre à une nécessité de notre société.
Si l'architecture du texte qui est passé devant le conseil des ministres est identique à celle du texte transmis au Conseil d'État, deux évolutions sont à noter toutefois.
La première concerne l'articulation entre la réforme territoriale et le projet de loi. Au moment où le projet de loi était finalisé, la réforme territoriale n'était pas aussi précise qu'aujourd'hui. Les articles relatifs à la gouvernance, en particulier ceux qui s'appuient sur les collectivités territoriales, ont donc été « réservés ». Cela signifie qu'ils ont simplement été mis de côté. Ils ne figuraient pas dans le projet adopté par le conseil des ministres. Afin de mieux les articuler avec la réforme territoriale, ils seront réintroduits par un membre du gouvernement au cours de l'examen du projet de loi devant l'Assemblée nationale, au mois de septembre 2014.
Cela permettra d'éviter les erreurs et rendra les discussions plus simples et plus cohérentes. Il ne vous a d'ailleurs pas échappé que l'essentiel de la compétence sociale continuera à relever des départements dans des conditions identiques à celles que nous connaissons aujourd'hui.
La seconde évolution du projet concerne le positionnement sur les établissements.
Je vous l'avais dit clairement en mai 2014, je l'ai rappelé au cours de différents entretiens, je ne peux pas vous demander de suspendre vos activités pour participer à un groupe de travail EHPAD dont je sais par ailleurs que l'aboutissement est lié au redressement des comptes publics.
Nous ne pourrons envisager l'engagement de dépenses nouvelles et importantes qu'à partir du moment où l'effort de redressement des comptes publics aura commencé à produire ses effets.
Cela ne signifie pas qu'aucun travail ne sera entrepris d'ici là, mais il faudra se concentrer sur des mesures de transparence, de lisibilité et de simplification de la tarification. Nous avons là de quoi mettre un groupe de travail en mouvement, qui puisse produire des solutions et des propositions directement et immédiatement applicables, sans entrer dans un lourd processus législatif, financier et budgétaire.
Je ne doute pas que la FNADEPA participera à ce groupe de travail sur la tarification.
Si cette loi d'orientation et de programmation est nécessaire et très attendue, c'est qu'elle a été longtemps repoussée. Depuis 2000, on en parle, mais on ne la voit jamais. Elle devrait maintenant avancer dans les meilleurs délais. N'hésitez pas, pour ceux d'entre vous qui connaissent des parlementaires, à leur dire d'être raisonnables et responsables, en faisant valoir leurs positions sans nuire au processus d'adoption de la loi. Le temps perdu au Parlement coûte cher, surtout à la session d'automne qui est celle des lois de finance.
De nombreux chantiers avancent aussi sans la loi : le contrat de filière pour le développement de la silver economy, le plan national d'action pour une politique du médicament, l'accord engagement pour le développement de l'emploi et des compétences autonomie, la poursuite des expérimentations pour la refondation des aides à domicile auprès des publics fragiles, l'abondement de fonds de restructuration à hauteur de 30 millions d'euros supplémentaires.
Les services d'aide à domicile sont aussi qui me préoccupe. Je souhaiterais que nous parvenions à rendre ces métiers attractifs, en valorisant la dignité et l'engagement des personnels. Ce volet doit être absolument sécurisé, car en faisant le choix du maintien à domicile, la loi vieillissement doit pouvoir s'appuyer sur des services d'aide solides. C'est donc au prix de la sécurisation de ces métiers, sur le plan de leur pérennité financière et de la prise en compte de l'engagement, des compétences et du professionnalisme des personnels, notamment des femmes, que la loi réussira à changer la vie des personnes âgées.
Le pacte de solidarité et de responsabilité permettra de réduire le coût du travail pour les bas salaires dès le 1er janvier 2015. Il devrait donc ainsi bénéficier au secteur des personnes âgées qui, malheureusement, compte de nombreux métiers peu rémunérateurs.
Enfin, permettez-moi, Monsieur le président et vous tous, directrices et directeurs d'EHPAD, participants à ce 29e Congrès national de la FNADEPA, de vous féliciter d'avoir choisi pour thème le vivre ensemble.
Vivre ensemble n'est pas une utopie, mais bien ce à quoi aspirent nos concitoyens, quelle que soit la génération à laquelle ils appartiennent : vivre ensemble avec ses voisins, au sein d'un même quartier, d'une même ville, entre générations.
Le fil rouge de votre congrès est celui de la loi sur le vieillissement dont vous avez posé les fondations avec ma prédécesseur, Michèle DELAUNAY, e t dont nous allons ensemble assurer le bâti et, je le souhaite, les finitions.
Merci à vous.
* De la salle
Bonjour à tous, je m'appelle Nicole SEDDIK et suis directrice d'un service à domicile en Lozère. Vous avez mis l'accent, Madame la ministre, sur les services à domicile. C'est la raison pour laquelle il me paraît opportun de vous soumettre ma question.
La Lozère est un département extrêmement rural. La densité de la population y est très faible. Comment continuer à y rendre des prestations de qualité, conformément aux obligations de la loi de 2002, sachant que pour cela il faudrait augmenter le tarif horaire, mais que, dès lors que ce tarif augmente, l'enveloppe d'heures attribuées aux bénéficiaires diminue et donc les personnes âgées se tournent vers d'autres services à domicile qui ne répondent pas toujours à la réglementation à laquelle nous sommes soumis ?
Plébisciter le domicile en le présentant comme un gisement d'emplois est contradictoire avec le fait que ces emplois demeurent précaires parce que, pour la plupart, à temps très partiel. Malgré la formation, nous avons du mal à convaincre nos aides à domicile qu'ils sont de vrais professionnels.
Concrètement, les efforts annoncés sur les services à domicile se font toujours attendre.
* Laurence ROSSIGNOL, Secrétaire d'État chargée de la Famille, des Personnes âgées et de l'Autonomie, auprès de la ministre des Affaires sociales et de la Santé
Merci pour votre témoignage, votre interpellation et votre question.
Le projet de loi prévoit un peu plus de 400 millions d'euros pour augmenter le nombre d'heures à domicile, sachant que cette augmentation du volume d'heures hebdomadaires sera proportionnelle au GIR. Plus le GIR est proche de 1, plus le nombre d'heures sera élevé. En outre, il est prévu de baisser le reste à charge pour l'usager bénéficiaire de l'aide à domicile.
Normalement, ces deux mesures devraient améliorer la situation, mais elles ne régleront pas toute la problématique des services d'aide à domicile et de la professionnalisation.
Si l'on n'arrive pas à stabiliser l'aide à domicile, on n'arrivera pas à stabiliser les avancées de la loi dont les plus belles heures auront été la discussion et la concertation, mais pas l'application pour les personnes âgées.
Dans son volet accompagnement, la loi repose absolument sur les services d'aide à domicile.
* De la salle
En attendant que le volet concernant les EHPAD soit adopté, ne serait-il pas possible, Madame la Ministre, de suspendre certaines des obligations auxquelles sont soumis les établissements à qui l'on en demande toujours plus, en termes qualitatifs et quantitatifs, pour s'occuper des personnes âgées ?
Plus le temps passe, plus les établissements sont soumis à des obligations nouvelles alors que les moyens ne sont déjà pas à la hauteur. Ne serait-il pas possible d'être moins submergé par les demandes permanentes des différentes autorités, notamment les évaluations internes/externes, les enquêtes du département, de l'ARS, des différents chefs de service de l'ARS, ou les tableaux de bord de l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) ?
* Laurence ROSSIGNOL, Secrétaire d'État chargée de la Famille, des Personnes âgées et de l'Autonomie, auprès de la ministre des Affaires sociales et de la Santé
Plus l'État est pauvre, plus il est normatif et tatillon.
Nous n'avons pas toujours les moyens d'être à la hauteur des exigences que nous imposons aux acteurs et opérateurs des politiques publiques que nous souhaitons mettre en uvre.
J'ajouterai, toutefois, que nous vivons dans une période extrêmement judiciarisée, dans laquelle les questions de responsabilité civile, voire pénale, sont très lourdes. La responsabilité des directrices et directeurs d'établissement peut ainsi être engagée pour des dommages et des accidents qui se produisent dans leur structure.
La difficulté est donc de trouver le bon équilibre entre garantir la sécurité et le meilleur accueil d'une part, et se prémunir en répondant à des obligations de contrôle et d'évaluation d'autre part.
Dans cette période un peu particulière, nous pourrions effectivement chercher à reporter à des jours meilleurs, pour alléger la charge des établissements, l'application de certaines obligations de nature administrative.
J'espère que le prochain groupe de travail sur les EHPAD fera des propositions de simplification pour les établissements, afin de traverser au mieux cette période difficile.
* Claudy JARRY, Président de la FNADEPA Nationale
Merci encore, Madame la Ministre, de votre présence et votre intervention.
Un travail important reste à mener sur les logements foyers et les résidences avec services. Cela ne fait aucun doute. Ce travail nécessaire permettra de faire bouger les lignes. J'espère qu'il sera entrepris dans le cadre des travaux parlementaires à venir, sans quoi la loi tant attendue risque de ne pas produire tous ses effets.
Source http://www.fnadepa.com, le 2 octobre 2014