Interview de M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social à RTL le 10 février 2015, sur les mesures de résorption du chômage et la mise en place du compte personnel de formation.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral


JEAN-MICHEL APHATIE
Bonjour François REBSAMEN.
FRANÇOIS REBSAMEN
Bonjour Jean-Michel APHATIE.
JEAN-MICHEL APHATIE
Deux millions deux cent mille demandeurs d'emploi sont au chômage depuis plus d'un an mais, parmi eux, un million depuis plus de deux ans. Pour ces gens-là, on le comprend, le retour au travail est très difficile et c'est pour tenter de les aider que vous avez présenté hier soir un plan, un énième plan peut-être mais il faut bien faire quelque chose. C'est quoi la mesure principale ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Non, pourquoi un énième plan ? On a beaucoup travaillé. J'ai travaillé avec les partenaires sociaux et je leur ai présenté d'ailleurs l'ensemble des mesures. C'est vingt mesures nouvelles que nous mettons en place, pour certains pour les préparer, pour les former, pour les aider, pour les accompagner, pour lever les obstacles à la reprise d'emploi. Il y a des mesures qui sont des mesures qui sont tout à fait nouvelles.
JEAN-MICHEL APHATIE
Laquelle par exemple, s'il y en a une que vous deviez citer ?
FRANÇOIS REBSAMEN
S'il y en a une que je peux présenter, c'est le compte personnel de formation. On a cette particularité en France, c'est qu'avant la mise en place de ce compte personnel de formation, c'étaient les chômeurs qui avaient le plus de difficulté à avoir accès à de la formation. Aujourd'hui, ils pourront avoir accès à de la formation et c'est financé par les partenaires sociaux. Ils mettent deux cent-vingt millions d'euros, Pôle emploi accompagnera et les conseils régionaux, et les chômeurs ainsi pourront se former et avoir des formations qualifiantes. Tel n'était pas le cas avant. Voilà une mesure nouvelle.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et vous espérez permettre le retour à l'emploi plus tôt de certaines de ces personnes qui sont, hélas, écartées du marché de l'emploi depuis longtemps ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Bien sûr. Il y a tout un panel de mesures. D'abord, il faut tout de suite s'en occuper. Quand un chômeur, par exemple un senior, s'inscrit à Pôle emploi, il fallait attendre quatre mois pour avoir un vrai entretien de carrière, voir comment il pouvait évoluer. Maintenant, ce sera entre deux et quatre semaines le premier entretien. Et puis, il y a ce qu'on appelle l'accompagnement intensif : comment le suivre, comment l'aider. Là, il y avait deux cent quarante mille personnes qui étaient dans ce cas-là à Pôle emploi, il y en aura quatre cent soixante mille. Vous voyez qu'il y a donc des moyens nouveaux qui sont mis en place. Et puis, tout le monde me demandait : « Mais pourquoi vous ne faites pas des contrats aidés ? Ça aide les chômeurs, les chômeurs de longue durée notamment, dans le secteur marchand ». On va passer de quarante mille contrats aidés dans le secteur marchand à cent mille. L'Etat fait aussi un effort important. C'est 3,2 milliards qui sont consacrés à ces emplois aidés. Il y a également pour les chômeurs de longue durée – excusez-moi mais sur ces choses, je suis intarissable – il faut lever les obstacles que l'on n'imagine pas et sur lesquels nous avons travaillé avec les partenaires sociaux. Souvent des problèmes d'hébergement, des problèmes de mobilité, des problèmes de moyens, des problèmes de garde d'enfants, donc nous avons travaillé sur tous ces aspects. C'est un plan global et d'ailleurs, c'est pour ça que les partenaires sociaux l'ont porté avec moi.
JEAN-MICHEL APHATIE
Il faut bien sûr aider ces gens-là, vous le dites, l'Etat fait beaucoup de choses. L'efficacité, on verra bien ; on la mesurera. On espère qu'elle sera au rendez-vous mais le plus simple, ce serait de créer des emplois. Pourquoi est-ce qu'on ne crée pas suffisamment d'emplois en France ? Pourquoi est-ce que la machine ne créée pas d'emplois ? C'est ça qu'on a du mal à comprendre.
FRANÇOIS REBSAMEN
J'espère bien qu'elle va recréer des emplois.
JEAN-MICHEL APHATIE
Cent mille chômeurs de plus cette année dit l'UNEDIC.
FRANÇOIS REBSAMEN
L'activité économique 2014 n'a pas été une bonne année, je l'ai dit.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et 2015 ne le sera pas non plus ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Je ne sais pas.
JEAN-MICHEL APHATIE
L'UNEDIC dit : « Cent mille chômeurs supplémentaires ».
FRANÇOIS REBSAMEN
L'UNEDIC se base sur des prévisions qui étaient celles du mois d'octobre et sur des prévisions de croissance qui étaient celles du mois d'octobre. On verra, ils sont très prudents à l'UNEDIC.
JEAN-MICHEL APHATIE
Un pourcent de croissance, ça ne permet pas de créer des emplois dans une économie.
FRANÇOIS REBSAMEN
Non, mais on peut avoir, j'espère, avec la reprise économique plus d'un pourcent de croissance. Ça crée des emplois, le problème c'est que ça n'en crée pas suffisamment. On imagine qu'on ne crée pas d'emplois dans ce pays mais on crée de l'emploi, sauf en 2014 où on a détruit mais normalement on crée de l'emploi. Il faut créer suffisamment d'emplois pour que les cent vingt mille personnes qui arrivent de manière supplémentaire, parce qu'on a aussi un boom démographique, tout à la fois quand même une chance pour demain et après-demain. Ça prouve que les Français croient en l'avenir d'ailleurs.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous espérez que la courbe du chômage, pour reprendre une expression un peu fameuse, s'inversera cette année ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Je ne parle pas, vous l'avez remarqué, de courbe du chômage. Ce que j'espère, c'est que le nombre de chômeurs diminuera à la fin de l'année, oui.
JEAN-MICHEL APHATIE
Pour certains, le travail du dimanche pourrait être une solution pour créer quelques emplois.
FRANÇOIS REBSAMEN
Je peux donner quelques exemples précis. Par exemple Guillaume PEPY, le responsable de la SNCF, a un plan qui prévoit la création de deux mille emplois avec l'ouverture des gares internationales au commerce le dimanche avec l'accord des partenaires sociaux. C'est un exemple. Le principe, ce sera pas d'accord, pas d'ouverture. Je le redis quand même.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous l'évoquez, la loi Macron créerait des zones touristiques internationales. Les magasins pourraient être ouverts le dimanche. Anne HIDALGO dit : « D'accord, c'est une très bonne idée » puisque sont concernés bien sûr les grands magasins à Paris, mais cette ouverture ne pourra se faire qu'avec l'accord du maire. Elle veut un droit de veto au niveau de la municipalité de Paris. C'est raisonnable ou pas de demander ça de la part de la maire de Paris ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Je crois qu'il y a une discussion qui s'est engagée et l'avis du maire doit être sollicité. Je le crois, oui.
JEAN-MICHEL APHATIE
Elle peut donc avoir un droit de veto ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Ça, c'est un autre sujet. J'ai dit que l'avis du maire peut être sollicité, on verra.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais l'avis compterait pour du beurre.
FRANÇOIS REBSAMEN
Il faut qu'elle discute avec le ministre de l'Economie de ce sujet.
JEAN-MICHEL APHATIE
D'accord. Vous, vous n'êtes pas intéressé. Enfin, vous n'êtes pas partie prenante de ces discussions.
FRANÇOIS REBSAMEN
Si, je suis ça, bien sûr. C'est pour ça que je vous ai dit d'ailleurs qu'il fallait un accord, il faut du volontariat et le travail dominical doit rester une exception. Il doit rester une exception, je le dis comme cela.
JEAN-MICHEL APHATIE
La progression du Front national est-elle inexorable ?
FRANÇOIS REBSAMEN
J'espère que non. Je pense qu'elle est résistible mais encore faut-il y résister. Pour y résister, il faut prendre des mesures, pratiquer le désistement républicain quand il arrive - j'ai bien dit le désistement républicain – et donc expliquer aussi les positions. Regardez cette candidate députée européen qui prônait l'inégalité des races quand même, ça fait froid dans le dos, et le parti de madame LE PEN reste un parti à part dans la République.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais vous avez constaté que le parti tout seul, contre tous, le Front national, est parvenu à 48 % des suffrages. A votre place hier, Bruno LEMAIRE disait : « La montée du Front national est inexorable ».
FRANÇOIS REBSAMEN
Surtout quand à l'UMP, on abat les digues pour se rapprocher du Front national.
JEAN-MICHEL APHATIE
Ce n'est pas un peu facile ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Non, ce n'est pas facile. C'est ce qui s'est produit et malheureusement.
JEAN-MICHEL APHATIE
François REBSAMEN, ministre du Travail, était l'invité de RTL ce matin.
YVES CALVI
Pour les séniors, dossier traité en quatre semaines par Pôle emploi. C'est une des mesures annoncées par François REBSAMEN. Merci à tous les deux.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 16 février 2015