Déclaration de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international, sur le secteur du tourisme et l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, à Paris le 10 mars 2015.

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Circonstance : Dixième anniversaire de l'association «Femmes du tourisme», le 10 mars 2015

Texte intégral

Cela me fait plaisir d'être avec vous parce que vous êtes au confluent de deux causes auxquelles je crois.
La première, c'est l'égalité entre les femmes et les hommes. Le Quai d'Orsay emploie un langage particulier et, dans ce domaine, l'on dit qu'il y a encore des marges de progression. Chacun comprend de quoi il s'agit. Des progrès ont été faits, c'est sûr, mais l'on est encore loin du compte. Au-delà de toutes les lois, de tous les décrets, de tous les règlements qui sont certainement utiles, c'est à chacun dans sa vie courante de s'impliquer. Vous avez décidé de le faire, il y a maintenant dix ans, et vous donnez le meilleur exemple. Cette cause est juste, elle avance aussi grâce à vous et je pense que lors d'un anniversaire il faut porter témoignage, c'est ce que je fais en vous félicitant vous et toutes les personnes qui travaillent avec vous.
Vous me faites penser à une anecdote. Lorsque j'étais Premier ministre, j'avais fait voter une loi sur la parité. A l'Assemblée nationale, les députés hommes n'étaient pas spontanément enclins à la voter. Je cherchais donc des arguments et finalement j'avais trouvé celui-là : «votez pour la parité parce que plus tard cela vous protégera».
Cette cause, absolument juste, progresse trop lentement, mais il faut saluer ce que vous faites. Au dixième anniversaire le 10 mars - le 8 mars n'est pas très loin -, c'était un très bon choix.
Et puis, la deuxième raison de ma présence, c'est que vous animez le tourisme et c'est un secteur auquel je crois énormément. J'y crois tellement que j'ai demandé au président de la République et au Premier ministre, à l'occasion d'un remaniement précédent, de m'accorder deux compétences supplémentaires que d'habitude le Quai d'Orsay n'a pas : le commerce extérieur et le tourisme.
Chargé de la politique extérieure de la France, je leur ai dit s'agissant du commerce extérieur, que dans le monde où nous sommes, il n'y a pas de politique étrangère si on n'a pas une force économique. Je ne pouvais donc pas séparer ce qui était l'action purement diplomatique - la grande stratégie, Ukraine, Iran, etc. - et l'action économique. Concernant le tourisme, cela a été souvent le parent pauvre des organisations gouvernementales. On peut très bien réussir sans être présent dans l'organisation gouvernementale, mais il est vrai que cela a été considéré très longtemps comme un secteur un peu à part, marginal, pas vraiment comme un secteur industriel. C'est une erreur car il s'agit d'un secteur absolument majeur ; cela représente des millions d'emplois, en général non délocalisables, et des milliards de recette. Et puis c'est un secteur qui va se développer d'une façon extraordinaire.
Aujourd'hui, un milliard de personnes dans le monde voyagent à l'étranger ; dans quinze ans, il y en aura deux milliards. Si nous prenons une part assez significative de ce milliard actuel, ajouté à un milliard supplémentaire, notre situation économique se présentera d'une façon tout à fait différente.
De plus, c'est un secteur où nous sommes bons et réputés comme tels. Il y a certes la concurrence qui arrive, et certains sont excellents, mais quand on demande aux citoyens du monde - c'est quand même quelque chose qui devrait frapper - quel est le pays du monde où ils aimeraient aller, ce qui sort en numéro un, sur 195 pays, c'est la France. Il n'y a pas tellement de secteurs dans lesquels la France est numéro un. Il faut donc mettre le paquet et j'ai pensé que les touristes, finalement, étaient les meilleurs ambassadeurs de notre pays car lorsqu'un touriste est satisfait, il fait une publicité extraordinaire à notre pays. Comme je dirige les ambassadeurs, il n'était pas complètement anormal que je m'occupe aussi du tourisme. Je le fais et j'essaie de le faire le mieux possible ; c'est un secteur passionnant.
En combinant ces deux aspects, à la fois la demande légitime d'égalité professionnelle et la promotion des femmes - surtout aux postes de responsabilité -, et en même temps en le faisant dans un secteur qui est un secteur essentiel et d'avenir, vous faîtes un choix heureux, qui me paraît excellent.
Madame la Présidente, je veux à travers vous et tous ceux qui sont là, vous remercier de ce que vous faites. Je veux associer à ces remerciements et à ces félicitations la «Chaîne de l'espoir» puisque j'ai eu l'occasion de travailler avec le professeur Deloche et permettez-moi de saluer Mme Mireille Darc. C'est une association qui fait un travail absolument magnifique, là aussi à partir d'une volonté de l'humain, car la vie ne limite pas simplement à des chiffres. C'est aussi ce que vous faites dans votre association puisque c'est utile à votre propre activité mais vous montrez surtout le chemin pour les autres.
Voilà ce que je voulais dire en quelques mots. En tout cas, dans cette semaine chargée, un moment extrêmement heureux aura été celui que j'ai passé avec vous.
Je vous souhaite un excellent anniversaire. Je ne suis pas sûr dans dix ans d'être encore à ce poste, j'espère donc vous voir avant. Merci.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 mars 2015