Déclaration de Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat à la famille, aux personnes âgées et à l'autonomie, sur l'accompagnement des personnes âgées dépendantes, notamment dans le secteur de l'aide à domicile, Paris le 10 avril 2015.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral


Il y un an quasiment jour pour jour, j'acceptais cette responsabilité ministérielle autour d'un portefeuille original, celui des liens entre les générations, de la petite enfance au grand âge ; celui aussi de l'accompagnement des enfants, des adolescents, des familles, des personnes âgées fragilisées.
Un an également que je suis rentrée dans les dossiers, les enjeux, les défis du secteur des personnes âgées et au coeur de lui, des spécificités du domicile qui nous réunit cet après-midi à Tours.
C'est donc un plaisir pour moi de retrouver le réseau UNA pour participer à cette conférence de clôture que vous avez choisi d'intituler « Enjeux d'avenir ».
Le secteur du domicile vit en effet une transition importante et je mesure qu'elle peut chambouler, interroger, voire interpeller dans le contexte économique encore difficile que nous connaissons même si des embellies se dessinent.
Permettez-moi tout d'abord de revenir sur l'accord-cadre UNA – CNSA qui vient de vous être présenté et je remercie Geneviève GUEYDAN, directrice de la CNSA, pour l'action de son Institution auprès du secteur du domicile.
Les conventions de modernisation et de professionnalisation du secteur du domicile constituent des leviers d'actions très importants. Au niveau national et pour l'ensemble des programmes, environ 65 M€ y sont consacrés chaque année.
Si la CNSA a engagé l'Etat dans la signature de cet accord avec l'UNA, c'est bien que les projets et les axes de travail qui y sont inscrits convergent avec les orientations des politiques publiques que nous impulsons.
Je voudrais d'ailleurs souligner que ce nouvel accord-cadre est la continuité d'un programme ambitieux engagé par votre réseau dès 2009.
Pour la nouvelle convention 2014-2018, le budget est à nouveau conséquent avec 46 M€ répartis sur 5 ans et financés à 52% par la CNSA.
Je voudrais saluer particulièrement le 1er axe de travail, celui qui témoigne le plus à mon sens de la capacité des grands réseaux associatifs de s'adapter aux évolutions des besoins des personnes qu'ils accompagnent :
- Dans ce 1er axe, vous mettez l'accent d'abord sur l'accompagnement des personnes en situation de handicap. Nous avons avec Ségolène Neuville, la responsabilité de construire avec vous des solutions plus adaptées, plus innovantes pour les personnes handicapées vieillissantes.
- Ce 1er axe, c'est aussi celui du cap SPASAD que j'avais lancé lors de votre assemblée générale en juin dernier et qui a, je crois, trouvé un écho particulièrement fort au sein d'UNA et je vous en remercie.
Je ne vais pas refaire devant les professionnels que vous êtes, la vulgarisation de cette promotion des SPASAD. Vous vivez pour la plupart ce rapprochement de l'aide et du soin sur le terrain et j'ai en tête que plus d'1/3 des autorisations SPASAD actuelles sont détenues par des adhérents UNA.
Je souhaite davantage vous livrer ici les perspectives à venir et lever, je l'espère, quelques-unes de vos inquiétudes.
Le 7 mars dernier, votre réseau exprimait des préoccupations que j'ai entendues : inquiétudes sur la loi d'adaptation de la société au vieillissement ; Interrogations aussi sur les financements pour cette année 2015.
Sur la loi tout d'abord, elle sera votée définitivement avant la fin de l'année et nous avons commencé à travailler depuis plusieurs semaines maintenant, à la préparation des décrets les plus importants permettant une pleine et entière entrée en vigueur, notamment sur la réforme de l'APA à domicile, au 1er janvier 2016.
Le président de la République et le premier Ministre s'y sont engagés.
Au sein de la loi, je veux insister sur ce fameux « acte 2 de l'APA à domicile » car on ne l'a peut-être pas assez dit : avec plus de 450 M€ / an de dépenses supplémentaires (et une indexation sur la CASA pour suivre l'évolution des besoins), c'est une augmentation de 13% du budget de l'APA à domicile en une seule fois.
C'est un effort sans précédent et de l'activité en plus pour les services à domicile, y compris grâce au nouveau droit au répit pour les aidants.
Le 7 mars, vous demandiez également une augmentation de la part du financement Etat pour soutenir les départements et surtout apporter plus d'égalité entre les territoires. Vous avez raison de souligner ce point : car entre 2002 et 2012, le taux de compensation des dépenses APA par l'Etat auprès des départements a chuté de 12 points passant de 43% à 31%. Avec la loi d'adaptation de la société au vieillissement et l'action de ce Gouvernement, ce taux remontera à 36%.
L'entrée en vigueur de la loi, c'est aussi le lancement dès janvier, des expérimentations SPASAD intégrés. Votre fédération, au sein du COPIL de refondation des services, participe activement aux travaux autour du cahier des charges.
Tout cela, c'est le 1er janvier 2016.
Cette échéance, c'est à la fois demain mais cela peut paraître lointain aussi lorsqu'en tant que Président, directeur ou salarié d'associations, vous vous interrogez pour les prochains mois.
Car l'année 2015 est en effet une année difficile sur le plan budgétaire pour l'ensemble des secteurs sanitaires et médico-sociaux.
Dans ce contexte là, nous nous sommes mobilisées avec Marisol Touraine pour que la CASA 2015 puisse être partiellement dépensée au profit soit de mesures d'anticipation de la loi ASV, soit de financement de la perte d'autonomie, le solde allant dans les réserves de la CNSA.
Parmi ces mesures 2015, je voudrais insister sur le fait qu'elles sont toutes ciblées sur le secteur du domicile :
- 25 M€ compensés aux départements pour leur permettre de financer la revalorisation salariale de votre convention collective. Un amendement introduit au Sénat inscrit dans la loi ce fléchage pour le sécuriser comme vous le demandiez ;
- 25 M€ encore pour alimenter le plan pluriannuel d'aide à l'investissement 2015-2017 en plus des réserves de la CNSA ; je rappelle ici que les SPASAD seront bien éligibles à ce plan ;
- 20 M€ au profit de l'ANAH pour adapter 15 000 nouveaux logements à la perte d'autonomie ce qui indirectement, facilite le travail des intervenants à domicile [hommage à Claude Dilain] ;
- 5 M€ pour abonder les fonds départementaux de compensation du handicap notamment au profit des personnes handicapées vieillissantes ;
- Enfin, 4 M€ iront dans le soutien aux aidants et les actions collectives de prévention. A nouveau pour être cohérent avec le cap SPASAD, je rappelle que les actions de prévention conduites par les SPASAD seront éligibles aux crédits CASA (140 M€ / an en année pleine) coordonnées par la future conférence des financeurs.
Ainsi, ce sont plus de 80 M€ sur la CASA 2015 qui sont d'ores et déjà alloués soit entièrement soit partiellement, au secteur du domicile dont 25 M€ vers le seul secteur associatif pour soutenir la BAD.
Ajoutés aux 65 M€ du budget section IV de la CNSA, l'effort financier en faveur du domicile est important.
Alors il est vrai qu'il ne prend pas la forme, en 2015, d'une 4ème année de reconduite du fonds de restructuration de l'aide à domicile.
Pendant les 3 ans d'existence de ce fonds, 130 M€ ont été mobilisés pour soutenir plus de 1 400 services ; des réussites de restructuration sont intervenues ; des rapprochements ARS / départements sont nés.
Mais une nouvelle année sans impulsion nouvelle n'était plus jouable.
J'ai donc fait le choix d'une année 2015 de réforme du modèle économique et de clarification du secteur.
Car dès mon arrivée, j'ai trouvé un projet de loi ambitieux sur la réforme de l'APA à domicile, sur les aidants, sur la mobilisation de l'ensemble des politiques publiques…
Mais j'ai aussi trouvé un texte qui posait des questions sur la refondation des services, avec des réponses qui restaient à construire. Je m'emploie à le faire.
Parmi les chantiers complexes à conduire, il y a celui de l'éventuelle unification des régimes juridiques des SAAD.
Le sujet tournait depuis des mois ; l'ensemble des rapports sur le secteur pointait les difficultés ; les sénateurs ont été assez audacieux pour introduire un article 32 bis dont la rédaction a évolué entre la version de la commission des affaires sociales et celle adoptée en séance.
La loi d'adaptation de la société au vieillissement, telle qu'elle sera examinée en 2ème lecture cet été prévoit donc en l'état actuel, un régime unique d'autorisation en 2021 pour les SAAD PA / PH, précédé d'une expérimentation pendant 2 ans dans au moins 3 départements.
Si le Gouvernement a exprimé sa volonté de travailler dans le sens d'une unification, la rédaction du Sénat comporte plusieurs faiblesses :
- Le périmètre de la réforme tout d'abord : le Sénat a ciblé l'unification pour les publics PA et PH ; je souhaite pour ma part que la réflexion englobe également l'intervention auprès des familles en difficulté au titre du soutien à la parentalité et de la réforme de la protection de l'enfance que je porte.
- La faible structuration territoriale de l'offre avec la poursuite jusqu'en 2021, dans le projet Sénat, de la libre installation permise par l'agrément dans son fonctionnement actuel ;
- Enfin, et il faut être transparent entre nous : l'automatisme entre autorisation et tarification administrée avant sa rénovation n'est pas finançable.
Je vais ainsi conduire dans les 3 prochains mois, une concertation approfondie autour de ce chantier et les fédérations du domicile seront bien évidemment associées. Cette concertation sera nourrie par 2 rapports importants :
- L'évaluation par l'IGAS des expérimentations tarifaires SAAD conduites dans 15 départements. Je recevrais le rapport avant la fin du mois.
- L'étude des coûts et des prestations SAAD conduite dans 50 services répartis dans 10 départements.
Je n'oublierai pas non plus d'analyser et de prendre en compte l'étude du Clersé-CNRS de Lille commandée par l'UNA et ses partenaires, sur les inégalités d'accès aux services.
Les 3 enjeux du débat qui nous anime sont ainsi posés :
1. La structuration territoriale de l'offre notamment dans les zones rurales et isolées ;
2. La qualité de l'accompagnement qui passe par la professionnalisation ;
3. Et les conditions de solvabilisation de la demande pour limiter le reste à charge.
2015, une année de transition dont je ne minimise pas qu'elle puisse être porteuse d'interrogations ;
2015, une année avant tout utile pour travailler sur le fond en parallèle du parcours de la loi ;
En résumé, 2015, une année où il faut tenir, déployer votre programme de modernisation CNSA, signer des autorisations SPASAD, vous positionner auprès de vos ARS et départements pour expérimenter le nouveau cadre…
Je sais le réseau UNA solide et mobilisé pour passer ce cap et être un partenaire de la mise en oeuvre de la loi d'adaptation de la société au vieillissement.
Source http://www.unayonne.net, le 27 avril 2015