Déclaration de Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat à la famille, aux personnes âgées, à l'autonomie et à l'enfance, sur le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement, (Sénat) le 14 novembre 2015.

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Des droits sociaux nouveaux, des réponses originales et adaptées à des besoins qui évoluent, une mobilisation de l'ensemble de la société, des orientations qui donnent une vision de l'avenir : voilà un texte porteur d'avancées plus que jamais attendues par nos concitoyens.
En des temps où la défiance peut être de mise, il est, je crois, particulièrement important de rappeler que ce projet de loi répond à un engagement présidentiel désormais tenu qui permettra aux Français confrontés à leur propre perte d'autonomie ou à celle d'un proche de mesurer concrètement les effets de cette réforme sur leur quotidien.
Le Gouvernement a donc mené, dès 2012, sous l'impulsion de Michèle DELAUNAY, une large concertation qui a permis de construire le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement avec l'ensemble des acteurs concernés.
Ce projet de loi est également l'aboutissement d'un travail parlementaire soutenu qui a permis de l'enrichir et de le perfectionner au cours des 18 derniers mois.
Je souhaite tout particulièrement saluer le travail remarquable des rapporteurs de ce texte au nom de la Commission des affaires sociales : Messieurs Gérard ROCHE et Georges LABAZEE. Vous vous êtes investis sur ce texte de façon constructive et pragmatique, et c'est là tout à votre honneur.
Vous êtes parvenus au fil des étapes parlementaires à adopter des positions justes, fidèles à vos convictions et fondées sur des objectifs communs, à commencer par celui de perfectionner et de faire avancer ce projet de loi.
Je tiens également à saluer la présence sans faille et l'engagement du Président de la Commission des affaires sociales, Monsieur Alain MILON, sur ce texte.
Je souhaite, enfin, remercier chacun de vous pour la richesse des échanges que nous avons pu avoir à la fois en séance ou lors des auditions réalisées par la Commission.
Ce parcours parlementaire nous a permis de donner le jour à un texte fort qui marquera l'histoire de la prise en charge collective de la perte d'autonomie. Ce texte restera le témoin d'un engagement politique soutenu en faveur du bien vieillir et de la protection des plus vulnérables.
Cet engagement se traduit par un effort financier conséquent puisque ce sont plus de 700 millions d'euros qui viendront financer les mesures du présent projet de loi après leur montée en charge.
Je ne reviendrai pas à nouveau sur l'ensemble des dispositions de ce texte qui, au terme de ces deux lectures, sont bien connues de vous.
Je voudrais profiter de ma présence ici pour souligner tout l'intérêt de l'examen de ce texte par votre Haute assemblée, forte de son expérience locale et de sa connaissance des problématiques de terrain.
Vous avez souhaité renforcer le soutien aux proches aidants qui acquièrent par cette loi une reconnaissance et un nouveau droit : celui du répit.
Vous avez voulu aller plus loin en transformant le congé de soutien familial en congé de proche aidant. Le proche aidant d'une personne âgée pourra ainsi bénéficier d'un congé d'une durée de 3 mois renouvelable et fractionnable, éventuellement sous forme de temps partiel.
C'est là une avancée positive qui permettra au monde du travail d'être davantage sensibilisé aux problématiques rencontrées par les aidants afin de mieux les intégrer à leur fonctionnement. Nombre de proches mènent de front leur activité professionnelle et leur rôle d'aidant : une meilleure prise en compte de leurs difficultés, de leurs besoins est nécessaire pour améliorer un bien être personnel qu'ils tendent bien souvent à négliger, au moment où le dévouement génère de l'épuisement.
Je tiens également à saluer la reconnaissance juridique que vous avez apportée aux structures d'hébergement temporaire qui regroupent, sur un même lieu, le répit de l'aidant et la prise en charge médico-sociale de l'aidé.
Ces lieux permettent à l'aidant de véritablement prendre du repos dans un espace de loisir, tout en lui assurant la prise en charge de son proche par une équipe professionnelle. Ce type d'établissement ouvre des perspectives nouvelles pour le répit des proches aidants, comme un moment créateur de lien social et de relation entre les générations.
Le deuxième axe sur lequel je souhaiterais souligner votre engagement est celui de la diversification de l'offre d'hébergement à destination des personnes âgées. Au fil du parcours, les besoins et les aspirations évoluent. C'est pourquoi avec cette loi, nous nous attachons à donner aux personnes âgées le choix du modèle d'habitat qui leur convient.
Les résidences services constituent une réponse adaptée, une étape intermédiaire pour des personnes âgées pour lesquelles la vie au domicile est rendue difficile sans pour autant que leur situation ne justifie une entrée en EHPAD.
Vous avez ainsi été pleinement engagés dans le travail qui a permis :
- d'une part, de définir le cadre juridique de ces résidences services, notamment pour personnes âgées,
- et d'autre part, de sécuriser les pratiques contractuelles entre les gestionnaires et les résidents. Il s'agit là d'une avancée importante à la fois pour le développement de ce secteur économique mais également pour la protection des consommateurs.
Sur le volet de l'aide à domicile, vous avez nourri la refondation du secteur, qui sous des aspects particulièrement techniques, interpelle un sujet profondément humain : celui de l'accompagnement des publics fragiles.
Vous avez courageusement investi un sujet éminemment complexe : la dualité des régimes juridiques des services d'aide et d'accompagnement à domicile, intervenant auprès de publics fragiles.
Je tiens véritablement à saluer cette initiative prise en première lecture et, à rappeler le travail de réflexion mené en amont par Jean-Marie VANLERENBERGHE et Dominique WATRIN, au travers de leur rapport paru en 2014.
Le Gouvernement a suivi votre démarche en proposant un nouveau dispositif en deuxième lecture à l'Assemblée. Grâce aux échanges et aux amendements adoptés, le dispositif a pu être enrichi pour garantir une souplesse et des garanties supplémentaires en termes de transparence et d'égalité de traitement pour le secteur, tout en positionnant clairement, sans charges supplémentaires, les Départements en pilote de la structuration de ces services médico-sociaux sur son territoire.
Il permet ainsi également l'accès et la lisibilité de l'offre de services aux personnes âgées où qu'elles se trouvent sur le territoire.
In fine, ce qui nous rassemble sur ce texte, c'est la conviction que nous devons aujourd'hui moderniser et élargir nos protections collectives, au moment où notre société doit relever le défi du vieillissement.
Ce rassemblement s'est directement illustré dans le texte soumis aux parlementaires des deux chambres lors de la commission mixte paritaire puisqu'il avait d'ores et déjà été adopté conforme aux deux tiers.
Le travail mené par les rapporteurs des deux assemblées a été remarquable et mené en grande et bonne intelligence. Cette implication a permis d'aboutir, au fil des accords, à un texte équilibré et renforcé à la fois par les apports du Sénat et de l'Assemblée.
A cette occasion, je me félicite que vos réticences initiales aient pu être levées pour permettre l'adoption du Haut Conseil de la Famille, de l'Enfance et de l'Age. La formation « âge » de ce Haut conseil correspondra pleinement aux aspirations que vous aviez avec le « Haut Conseil de l'âge ».
Je souhaite véritablement que la formation « âge » du Haut conseil devienne une référence en termes de réflexion de prospective, une véritable ressource pour les politiques publiques. La dimension intergénérationnelle du Haut Conseil viendra amplifier ce mouvement : elle a démontré tout son intérêt et permettra à chaque formation de gagner en ampleur et en pertinence.
Je me réjouis également que l'entrée en vigueur du régime d'autorisation rénovée soit maintenue au 1er janvier 2016, qui offrira davantage de lisibilité au secteur et aux départements.
Je m'en remets favorablement à vos conclusions concernant l'affectation de 100 millions d'euros par an à l'aide à l'investissement dans les EHPAD. Ce soutien renouvelé à l'investissement permettra de réduire le reste à charge des résidents, dont nous mesurons, tous, les besoins actuels.
Je prends également acte de votre volonté de voir le forfait autonomie réparti à l'ensemble des résidences autonomie, y compris celles percevant d'ores et déjà le forfait de soins courants. Si la volonté initiale était d'éviter un « saupoudrage » des crédits, j'entends votre souhait d'assurer le fait que l'ensemble des établissements s'engage véritablement à mener des actions de prévention.
Je retiens aussi votre volonté d'attribuer aux départements la possibilité d'un recours en récupération de l'aide sociale à l'hébergement sur les contrats d'assurance vie et cela, dès le premier euro de prime versée à partir de 70 ans.
Enfin,. le sujet de l'affectation de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie aux différentes mesures de ce projet de loi a également trouvé une juste voie.
Les parlementaires que vous êtes, forts d'expériences locales, avaient souhaité sécuriser encore davantage la compensation des réformes de l'Etat vers les Conseils départementaux. Le Gouvernement avait déjà porté une vigilance particulière à ce sujet en affectant dans le projet initial une fraction de CASA pour la compensation de la réforme de l'APA incluant également le droit au répit.
Vous avez souhaité aller plus loin en inscrivant dans la loi un pourcentage de CASA à la prévention de la perte d'autonomie. Vous avez également entendu les limites que cette sécurisation pouvait avoir, notamment en termes de souplesse de gestion pour les Départements, en supprimant à l'article 38 la sous-répartition aux différents volets de la réforme APA.
Grâce au travail que vous avez mené, la loi pourra être, comme s'y sont engagés à plusieurs reprises le Premier ministre et le Président de la République, votée et promulguée avant la fin de cette année.
Certaines dispositions dépendent de textes d'application qui sont, pour les principaux, déjà élaborés et d'ores et déjà soumis aux instances consultatives obligatoires. Elles entreront en vigueur, si ce n'est au 1er janvier, au cours des premiers mois de l'année 2016, dès la publication des textes.
L'enjeu, tant pour le Gouvernement que pour les élus que vous êtes, sera ensuite de diffuser sur le terrain notre connaissance du texte et des dispositions qu'il contient :
- Afin que chaque citoyen prenne connaissance des droits nouveaux auxquels il est désormais éligible, je pense ici tout particulièrement à la revalorisation de l'allocation personnalisée d'autonomie, à la création du droit au répit, ou encore à l'adaptation des logements ;
- Afin que chaque acteur puisse s'approprier les nouveaux dispositifs introduits, qu'il s'agisse de la conférence des financeurs, de la réforme des régimes juridiques des SAAD ou de la tarification des EHPAD.
Une fois que le projet de loi sera pleinement entré en vigueur, il s'agira d'une première et grande étape qui nous invite d'ores et déjà à poursuivre la réflexion et à construire les chantiers futurs. Les besoins sont grands et le Gouvernement restera pleinement mobilisé sur les enjeux liés à la perte d'autonomie.
Aujourd'hui, le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement est à l'aube de devenir une belle et grande loi sociale.
Grâce à cette loi, nous agissons pour que la protection sociale et la solidarité continuent de progresser.
Nous donnons les moyens aux personnes âgées d'anticiper et d'accompagner la perte d'autonomie lorsqu'elle survient.
Nous reconnaissons le rôle de ces millions de proches aidants et contribuons à leur apporter un souffle nécessaire à leur bien-être.
Nous construisons une société plus juste, animée par le souci de l'autre, dans le respect de son histoire, de ses droits et de ses aspirations.
Nous portons un regard plus ouvert sur la vieillesse qui constitue aussi une période de la vie rythmée par la participation citoyenne et la création de lien social.
Nous mobilisons l'ensemble de la société pour qu'elle s'adapte, pour qu'elle intègre, pour qu'elle échange avec ses aînés.
Pour toutes ces raisons, ce texte constitue une véritable avancée pour la vie de nos concitoyens et l'avenir de notre société. C'est pourquoi je vous invite à adopter les conclusions de la commission mixte paritaire qui vous sont soumises aujourd'hui.
Je vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 15 janvier 2016