Texte intégral
Madame la Présidente,
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui pour cette conférence sur les enjeux du changement climatique pour les investisseurs institutionnels.
Je remercie Vigeo Eiris pour son invitation et SCOR de nous accueillir tous ensemble ce soir.
Permettez-moi de commencer en saluant le succès de l'accord trouvé à la COP 21 en décembre dernier. Un peu plus de 100 jours après, il est désormais évident que l'accord de Paris représente un tournant dans notre effort collectif pour enrayer le réchauffement climatique.
Un changement en profondeur s'observe au sein même du secteur financier, qu'il s'agisse de banques, d'assurances ou gestionnaires d'actifs. Au niveau mondial, on ne compte pas moins de 433 institutions financières ayant pris des engagements dans le cadre du plan d'action Lima - Paris.
Les acteurs français ne sont pas en reste. Nombre d'entre vous se sont mobilisés en 2015, depuis le Climate Finance Day en mai et les engagements pris collectivement sous l'égide de Paris Europlace, jusqu'à la COP elle-même.
Et je n'oublie pas la coalition pour la décarbonation des portefeuilles, emmenée par un fonds de pension suédois, Amundi et quelques autres acteurs français, qui a rassemblé en l'espace d'un an plus de 25 institutions de premier plan dans une démarche de réduction du risque carbone de plus de 600 Md$ d'actifs.
Je tiens à vous remercier pour cette mobilisation :
- cet effort suppose de remettre en cause des habitudes et des procédures et il n'est jamais facile d'être précurseur (ii) cette mobilisation a eu valeur d'exemple et cette exemplarité a été déterminante pour le succès de la présidence française de la COP ;
- Elle a eu un effet d'entrainement dont l'ampleur ne cesse de croître. Nombre d'institutions étrangères, y compris des centres financiers de tout premier plan, prennent aujourd'hui la mesure de ce qui se joue sur ce terrain. Pour tout ceci, et parce que votre mobilisation a très certainement contribué à la réussite de ce sommet, je vous remercie.
Comme vous le savez, l'année 2015 a été aussi l'occasion pour la France, en tant que présidente de la COP21, de prendre des mesures pionnières pour accélérer la transition énergétique. L'article 173 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui fait l'objet de ce colloque, en est un excellent exemple mais il n'est pas le seul.
Depuis la publication du décret d'application en décembre dernier, la France est désormais le premier pays dans lequel les investisseurs institutionnels et les gestionnaires rendent compte de la manière dont ils prennent en compte dans leur politique d'investissement des critères ESG (environnementaux au sein desquels les enjeux climatiques ont une place clé sociaux et de qualité de gouvernance).
L'objectif des pouvoirs publics est simple : il s'agit d'encourager les investisseurs institutionnels à s'approprier pleinement les enjeux ESG, notamment ceux liés au changement climatique, dans le cadre de leur gestion.
Permettez-moi d'insister sur deux points :
* Première remarque : cette appropriation vise bien l'ensemble du secteur. Les enjeux ESG ne sont pas seulement une considération pour investisseurs engagés. Ces investisseurs ont un rôle important à jouer, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle les pouvoirs publics ont souhaité lancer un label ISR et un autre consacré aux investissements dans la transition. Mais c'est bien l'ensemble des acteurs qui est appelé à se saisir de ces enjeux dont la matérialité n'est plus à démontrer.
Je suis convaincu que l'article 173 permettra aux investisseurs institutionnels de jouer pleinement leur rôle dans la transition vers une économie bas-carbone.
* Deuxième remarque : je suis tout à fait conscient que cette appropriation se heurte encore, pour certaines questions, à l'absence de méthodes éprouvées. La flexibilité du cadre établi par ce décret est la conséquence directe de ce constat. Il n'impose aucune méthode prescriptive et doit vous permettre de décrire simplement et effectivement la manière dont vous appréhendez ces enjeux essentiels. Il s'agit avant tout de faire progresser l'ensemble des acteurs et de faire émerger des bonnes pratiques.
Nous ne partons pas de rien. Je pense notamment au reporting RSE des entreprises, créé en 2011 par la loi sur les nouvelles régulations économiques. L'obligation d'établir annuellement un rapport RSE s'applique depuis 3 ans aux grandes entreprises et aux entreprises cotées et sera étendue cette année aux sociétés non cotées. Cela a permis la mise au point d'une batterie d'informations stables, comparables et fiables puisqu'auditées dans toutes les entreprises assujetties. Ces informations constituent aujourd'hui pour les investisseurs, pour les agences de notation extra financière, ainsi que toutes les parties prenantes concernées, une ressource précieuse qui permettra d'alimenter l'analyse des risques des portefeuilles.
Enfin, un mot de notre action internationale.
La France promeut également ces thématiques au niveau international, européen et multilatéral. Le G20 travaille depuis plusieurs années sur les moyens de faciliter l'investissement en infrastructures, ce qui inclut évidemment les projets en faveur de la transition énergétique.
Cette année, la présidence chinoise du G20 a lancé le Green Finance Study Group avec deux principaux objectifs :
- identifier les obstacles à l'émergence d'une finance plus verte, plus cohérente avec le développement durable ;
- proposer des options pour mobiliser le système financier vers les investissements verts.
La France a accueilli favorablement cette initiative et y participe activement. Le secteur privé est associé à cette démarche : certains d'entre vous ont d'ailleurs été sollicités pour une réunion de haut niveau du groupe d'étude hier à Londres. J'espère que ces travaux pourront contribuer à une meilleure intégration des enjeux environnementaux, dont le changement climatique, au sein de la finance mondiale.
Par ailleurs, sous l'impulsion de la France, le G20 a mandaté en 2015 le Conseil de Stabilité Financière le "FSB" pour travailler sur la prise en compte du risque climatique par le secteur financier. Une task force, présidée par Michael BLOOMBERG, a été constituée, rassemblant des acteurs privés représentatifs de l'ensemble des économies du G20 la France y prend toute sa part.
Cette task force travaille sur la publication d'informations "disclosure" par les acteurs économiques permettant d'apprécier les enjeux liés au climat. Il s'agit d'un élément clef, pour les entreprises et leurs actionnaires, pour apprécier les risques et discerner les opportunités. Un premier rapport sera bientôt soumis à consultation publique, auquel je vous invite à contribuer.
En tant que présidente de la COP21, la France a par ailleurs demandé à l'OCDE d'intégrer encore davantage les enjeux climatiques dans l'ensemble de son action et notamment de travailler sur l'intégration ESG chez les investisseurs institutionnels. L'OCDE réalisera ainsi un état des lieux des pratiques et des réglementations permettant une meilleure prise en compte de ces risques et plus globalement, de ces enjeux, encore mal appréhendés et difficiles à évaluer.
Dans certaines juridictions, il s'agit de comprendre ce que sont effectivement les implications du devoir fiduciaire. Pour un pays comme la France, il s'agit davantage de comprendre comment notre droit positif, notre cadre règlementaire et des approches comme celle de l'article 173 se combinent pour permettre une prise en compte effective et appropriée de ces enjeux.
Enfin, l'Europe n'est pas en reste. Vous savez qu'une consultation publique sur les lignes directrices sur la publication d'informations extra-financières a été engagée par la Commission jusqu'à la mi-avril, en plus d'une consultation sur l'investissement de long terme qui est sur le point de s'achever. Ces exercices vous concernent directement et j'espère que vous y avez pris part. Il est important que les acteurs français fassent entendre leur voix et leurs ambitions au niveau européen.
Beaucoup a été accompli depuis quelques mois, par les pouvoirs publics comme par les acteurs privés. Cette mobilisation est essentielle. En effet, chacun sait combien le secteur financier joue un rôle central dans l'économie : en allouant le capital, il permet de gérer les risques et de préparer l'économie de demain.
C'est à l'ensemble des acteurs économiques, à nous tous, qu'il importe que l'ensemble du système financier prenne en compte les enjeux du changement climatique dans ses activités, à la fois en termes de risques qui doivent être précisément évalués mais aussi en termes d'opportunités et de perspectives futures.
2015 a été, avec la COP 21 et avec votre mobilisation, un tournant dans la lutte contre le changement climatique. Mais 2016 est tout aussi important.
Pour les pouvoirs publics français, il s'agit de jouer pleinement et jusqu'au bout notre rôle de président de la COP 21, en soutenant l'effort international et en continuant à montrer l'exemple au niveau national. Et notre action se poursuivra, dans la durée.
Pour l'ensemble des acteurs financiers, il s'agit de donner une traduction concrète, pérenne et opérationnelle à une prise de conscience. C'est un devoir, c'est aussi une ambition. Celle d'un secteur financier qui joue pleinement son rôle, celle d'une place de Paris reconnue comme référence mondiale dans ce domaine.
Je compte sur vous.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 25 mars 2016
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui pour cette conférence sur les enjeux du changement climatique pour les investisseurs institutionnels.
Je remercie Vigeo Eiris pour son invitation et SCOR de nous accueillir tous ensemble ce soir.
Permettez-moi de commencer en saluant le succès de l'accord trouvé à la COP 21 en décembre dernier. Un peu plus de 100 jours après, il est désormais évident que l'accord de Paris représente un tournant dans notre effort collectif pour enrayer le réchauffement climatique.
Un changement en profondeur s'observe au sein même du secteur financier, qu'il s'agisse de banques, d'assurances ou gestionnaires d'actifs. Au niveau mondial, on ne compte pas moins de 433 institutions financières ayant pris des engagements dans le cadre du plan d'action Lima - Paris.
Les acteurs français ne sont pas en reste. Nombre d'entre vous se sont mobilisés en 2015, depuis le Climate Finance Day en mai et les engagements pris collectivement sous l'égide de Paris Europlace, jusqu'à la COP elle-même.
Et je n'oublie pas la coalition pour la décarbonation des portefeuilles, emmenée par un fonds de pension suédois, Amundi et quelques autres acteurs français, qui a rassemblé en l'espace d'un an plus de 25 institutions de premier plan dans une démarche de réduction du risque carbone de plus de 600 Md$ d'actifs.
Je tiens à vous remercier pour cette mobilisation :
- cet effort suppose de remettre en cause des habitudes et des procédures et il n'est jamais facile d'être précurseur (ii) cette mobilisation a eu valeur d'exemple et cette exemplarité a été déterminante pour le succès de la présidence française de la COP ;
- Elle a eu un effet d'entrainement dont l'ampleur ne cesse de croître. Nombre d'institutions étrangères, y compris des centres financiers de tout premier plan, prennent aujourd'hui la mesure de ce qui se joue sur ce terrain. Pour tout ceci, et parce que votre mobilisation a très certainement contribué à la réussite de ce sommet, je vous remercie.
Comme vous le savez, l'année 2015 a été aussi l'occasion pour la France, en tant que présidente de la COP21, de prendre des mesures pionnières pour accélérer la transition énergétique. L'article 173 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui fait l'objet de ce colloque, en est un excellent exemple mais il n'est pas le seul.
Depuis la publication du décret d'application en décembre dernier, la France est désormais le premier pays dans lequel les investisseurs institutionnels et les gestionnaires rendent compte de la manière dont ils prennent en compte dans leur politique d'investissement des critères ESG (environnementaux au sein desquels les enjeux climatiques ont une place clé sociaux et de qualité de gouvernance).
L'objectif des pouvoirs publics est simple : il s'agit d'encourager les investisseurs institutionnels à s'approprier pleinement les enjeux ESG, notamment ceux liés au changement climatique, dans le cadre de leur gestion.
Permettez-moi d'insister sur deux points :
* Première remarque : cette appropriation vise bien l'ensemble du secteur. Les enjeux ESG ne sont pas seulement une considération pour investisseurs engagés. Ces investisseurs ont un rôle important à jouer, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle les pouvoirs publics ont souhaité lancer un label ISR et un autre consacré aux investissements dans la transition. Mais c'est bien l'ensemble des acteurs qui est appelé à se saisir de ces enjeux dont la matérialité n'est plus à démontrer.
Je suis convaincu que l'article 173 permettra aux investisseurs institutionnels de jouer pleinement leur rôle dans la transition vers une économie bas-carbone.
* Deuxième remarque : je suis tout à fait conscient que cette appropriation se heurte encore, pour certaines questions, à l'absence de méthodes éprouvées. La flexibilité du cadre établi par ce décret est la conséquence directe de ce constat. Il n'impose aucune méthode prescriptive et doit vous permettre de décrire simplement et effectivement la manière dont vous appréhendez ces enjeux essentiels. Il s'agit avant tout de faire progresser l'ensemble des acteurs et de faire émerger des bonnes pratiques.
Nous ne partons pas de rien. Je pense notamment au reporting RSE des entreprises, créé en 2011 par la loi sur les nouvelles régulations économiques. L'obligation d'établir annuellement un rapport RSE s'applique depuis 3 ans aux grandes entreprises et aux entreprises cotées et sera étendue cette année aux sociétés non cotées. Cela a permis la mise au point d'une batterie d'informations stables, comparables et fiables puisqu'auditées dans toutes les entreprises assujetties. Ces informations constituent aujourd'hui pour les investisseurs, pour les agences de notation extra financière, ainsi que toutes les parties prenantes concernées, une ressource précieuse qui permettra d'alimenter l'analyse des risques des portefeuilles.
Enfin, un mot de notre action internationale.
La France promeut également ces thématiques au niveau international, européen et multilatéral. Le G20 travaille depuis plusieurs années sur les moyens de faciliter l'investissement en infrastructures, ce qui inclut évidemment les projets en faveur de la transition énergétique.
Cette année, la présidence chinoise du G20 a lancé le Green Finance Study Group avec deux principaux objectifs :
- identifier les obstacles à l'émergence d'une finance plus verte, plus cohérente avec le développement durable ;
- proposer des options pour mobiliser le système financier vers les investissements verts.
La France a accueilli favorablement cette initiative et y participe activement. Le secteur privé est associé à cette démarche : certains d'entre vous ont d'ailleurs été sollicités pour une réunion de haut niveau du groupe d'étude hier à Londres. J'espère que ces travaux pourront contribuer à une meilleure intégration des enjeux environnementaux, dont le changement climatique, au sein de la finance mondiale.
Par ailleurs, sous l'impulsion de la France, le G20 a mandaté en 2015 le Conseil de Stabilité Financière le "FSB" pour travailler sur la prise en compte du risque climatique par le secteur financier. Une task force, présidée par Michael BLOOMBERG, a été constituée, rassemblant des acteurs privés représentatifs de l'ensemble des économies du G20 la France y prend toute sa part.
Cette task force travaille sur la publication d'informations "disclosure" par les acteurs économiques permettant d'apprécier les enjeux liés au climat. Il s'agit d'un élément clef, pour les entreprises et leurs actionnaires, pour apprécier les risques et discerner les opportunités. Un premier rapport sera bientôt soumis à consultation publique, auquel je vous invite à contribuer.
En tant que présidente de la COP21, la France a par ailleurs demandé à l'OCDE d'intégrer encore davantage les enjeux climatiques dans l'ensemble de son action et notamment de travailler sur l'intégration ESG chez les investisseurs institutionnels. L'OCDE réalisera ainsi un état des lieux des pratiques et des réglementations permettant une meilleure prise en compte de ces risques et plus globalement, de ces enjeux, encore mal appréhendés et difficiles à évaluer.
Dans certaines juridictions, il s'agit de comprendre ce que sont effectivement les implications du devoir fiduciaire. Pour un pays comme la France, il s'agit davantage de comprendre comment notre droit positif, notre cadre règlementaire et des approches comme celle de l'article 173 se combinent pour permettre une prise en compte effective et appropriée de ces enjeux.
Enfin, l'Europe n'est pas en reste. Vous savez qu'une consultation publique sur les lignes directrices sur la publication d'informations extra-financières a été engagée par la Commission jusqu'à la mi-avril, en plus d'une consultation sur l'investissement de long terme qui est sur le point de s'achever. Ces exercices vous concernent directement et j'espère que vous y avez pris part. Il est important que les acteurs français fassent entendre leur voix et leurs ambitions au niveau européen.
Beaucoup a été accompli depuis quelques mois, par les pouvoirs publics comme par les acteurs privés. Cette mobilisation est essentielle. En effet, chacun sait combien le secteur financier joue un rôle central dans l'économie : en allouant le capital, il permet de gérer les risques et de préparer l'économie de demain.
C'est à l'ensemble des acteurs économiques, à nous tous, qu'il importe que l'ensemble du système financier prenne en compte les enjeux du changement climatique dans ses activités, à la fois en termes de risques qui doivent être précisément évalués mais aussi en termes d'opportunités et de perspectives futures.
2015 a été, avec la COP 21 et avec votre mobilisation, un tournant dans la lutte contre le changement climatique. Mais 2016 est tout aussi important.
Pour les pouvoirs publics français, il s'agit de jouer pleinement et jusqu'au bout notre rôle de président de la COP 21, en soutenant l'effort international et en continuant à montrer l'exemple au niveau national. Et notre action se poursuivra, dans la durée.
Pour l'ensemble des acteurs financiers, il s'agit de donner une traduction concrète, pérenne et opérationnelle à une prise de conscience. C'est un devoir, c'est aussi une ambition. Celle d'un secteur financier qui joue pleinement son rôle, celle d'une place de Paris reconnue comme référence mondiale dans ce domaine.
Je compte sur vous.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 25 mars 2016