Interview de Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication à France-Info le 23 août 2016, sur le climat politique et les déclarations des candidats à la primaire des Républicains.

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Média : France Info

Texte intégral


ALEXIS MOREL
L'invitée politique de France Info ce matin est donc ministre de la Culture et de la communication. Bonjour Audrey AZOULAY.
AUDREY AZOULAY
Bonjour.
ALEXIS MOREL
Vous êtes forcément attentive à la rentrée littéraire, parmi les nouveautés, il y a donc ce livre : « Tout pour la France », Nicolas SARKOZY officiellement candidat. On dit que c'est l'adversaire préféré de François HOLLANDE, vous confirmez ?
AUDREY AZOULAY
En tout cas, sa déclaration de candidature à la présidentielle à travers la primaire, on peut dire, n'est pas une surprise, donc je ne pense pas que ce soit la principale surprise de la rentrée littéraire…
ALEXIS MOREL
C'est une surprise littéraire, en tout cas.
AUDREY AZOULAY
Oui, alors ça, il faut lire pour savoir. Moi, dans la rentrée littéraire, j'ai plus envie de vous parler d'un premier roman, qui m'a bouleversée, qui s'appelle « La Désorientale » de Négar DJAVADI.
ALEXIS MOREL
En ce qui concerne votre champ de compétences, il fait déjà plusieurs propositions, Nicolas SARKOZY dans son livre, pour l'audiovisuel public par exemple, fini la nomination des patrons par le CSA, zéro pub sur la radio et la télé publique ; tout le contraire en fait de ce que vous avez décidé depuis quatre ans.
AUDREY AZOULAY
C'est vrai que sur l'audiovisuel public, je crois qu'on peut effectivement bien comparer ce qui a été fait d'ailleurs dans le précédent mandat de Nicolas SARKOZY, et ce qui a été fait sous le mandat de François HOLLANDE, et effectivement, c'est assez opposé. En ce qui concerne la nomination par exemple des dirigeants de l'audiovisuel public, la réforme qu'avait voulue Nicolas SARKOZY, c'était de nommer directement les patrons de chaînes, et celle voulue par François HOLLANDE, ça a été au contraire que ce ne soit pas le président de la République, que ce ne soit pas l'exécutif…
ALEXIS MOREL
Alors, il ne propose plus cela maintenant, il propose une nomination via le Parlement.
AUDREY AZOULAY
Alors, il a changé d'avis, mais ce qu'il a fait… enfin, l'avantage avec un candidat qui a exercé des fonctions, c'est qu'on peut comparer les bilans, et l'inverse, ce qu'on a prôné et ce qu'on a fait, ce qu'on a mis en oeuvre très vite, c'est l'indépendance de l'audiovisuel public à travers un organe indépendant, qui est le CSA.
ALEXIS MOREL
Alors, et puis, Nicolas SARKOZY, il est aussi assez sceptique dans ce livre sur la création de la chaîne d'info publique, France Info, elle sera lancée la semaine prochaine. Vous lui répondez quoi là-dessus ? En gros, il dit que, il n'y a plus de place aujourd'hui pour une quatrième chaîne d'info.
AUDREY AZOULAY
Alors, je pense qu'il faut faire un petit peu d'histoire, parce qu'il y avait déjà eu un projet de création de chaîne d'information publique, tous les services publics en Europe ont une chaîne d'information, sauf en France jusqu'à présent, et il y avait déjà eu un projet au début des années 2000, et qui avait été stoppé par la droite justement en 2003. Là, je crois qu'on a une belle opportunité de mettre à profit tous les talents des rédactions publiques, celles de Radio France, de France Télévisions, de les mettre ensemble pour avoir un service à la fois à la télévision, mais aussi sur les nouveaux médias, puisque, entretemps, ils ont pris une place considérable dans l'information des Français.
ALEXIS MOREL
Je reviens à la campagne, à gauche, ça devient en ce moment le tous sauf HOLLANDE, il a encore une chance, François HOLLANDE aujourd'hui de se représenter face à toutes ces forces contraires, ces vents contraires ?
AUDREY AZOULAY
On est dans une période un peu particulière, puisqu'on n'est pas encore vraiment dans la campagne, même si c'est la rentrée, et qu'on a cette échéance qui arrive en mai 2017. Mais chacun essaie de se positionner dans les primaires, et je crois que les primaires, le processus des primaires, conduisent inexorablement à ce qui me semble, moi, être plus un bal des égos qu'autre chose, et que pour exister, il faut s'opposer, et c'est ce qu'on voit dans tous les camps.
ALEXIS MOREL
Vous, quel sera votre rôle dans les prochains mois ? Réconcilier les artistes, le monde de la culture avec le président ?
AUDREY AZOULAY
Mon rôle, en tout cas, c'est mon rôle aujourd'hui, celui de ministre de la Culture, ce n'est pas un rôle de réconciliation, c'est mon rôle auprès des artistes pour favoriser la création, et surtout, auprès des Français, et c'est un rôle que je tiens avec plaisir et bonheur depuis six mois.
ALEXIS MOREL
Alors, c'est un été culturel un peu particulier qui s'achève, des festivals sous très haute sécurité, beaucoup d'événements annulés aussi, après les attentats. Est-ce que l'exception culturelle française est menacée aujourd'hui par le terrorisme ?
AUDREY AZOULAY
Ce qui s'est passé a choqué, bien sûr, tout le pays, des événements dramatiques, et la question s'est posée très vite des festivals, fallait-il les tenir, tout ce qui se passe dans l'espace public, quelle part entre la sécurité, la création, la sécurité et la culture, et très vite, notre réponse a été, au contraire, de maintenir les festivals, et de les aider à se maintenir. Pour cela, nous avons fait deux choses, d'abord, nous avons mobilisé les forces de sécurité publique – que je tiens à remercier – qui ont été très présentes pour que ces événements puissent se tenir, en réalité, il y a eu très peu de festivals annulés. Il y a eu beaucoup d'annulations par exemple de feux d'artifice, à l'initiative des mairies, mais très peu de festivals annulés. Première chose, grâce aux forces de sécurité publique, et deuxième chose, nous avons lancé un fonds de soutien, qui a été abondé dès juin 2016…
ALEXIS MOREL
Que certains déjà jugent insuffisant, les petites structures qui ont du mal à vivre quand on leur impose comme ça des mesures de sécurité, ça devient très compliqué.
AUDREY AZOULAY
Alors justement, c'est pour ça qu'on les aide financièrement à le faire. Et pour l'instant, nous continuons à le faire de façon satisfaisante, il nous reste des crédits pour cela. Par exemple, si elles doivent embaucher des vigiles parce qu'il y a des fouilles à faire ou si elles doivent avoir des mesures de sécurité privée supplémentaires, nous les finançons, et beaucoup de festivals ont fait appel à ce fonds. Et je dois dire qu'il y a eu cette année une fréquentation exceptionnelle des festivals. Les Français étaient au rendez-vous, ils étaient là, les festivals qui se sont tenus, donc la très grande majorité, ont vu leur public au contraire augmenter.
ALEXIS MOREL
Parfois, ces mesures de sécurité, elles ont un peu du mal à passer, on l'a vu la semaine dernière à Aurillac, avec des incidents, des violences entre festivaliers et forces de l'ordre, c'est compliqué dans la culture du festival d'imposer, comme ça, ces mesures de sécurité, ces forces de l'ordre qui se voient, autour des spectacles ?
AUDREY AZOULAY
C'est vrai qu'on n'en a pas l'habitude, c'est une nouveauté, mais Aurillac a été le seul exemple où cela s'est passé, enfin, je ne sais pas si ce sont des festivaliers ou des gens qui se sont rendus au festival spécifiquement pour manifester de façon violente le fait qu'ils ne voulaient pas avoir de forces de sécurité publique dans ce festival, qui est un festival populaire, un festival de théâtre de rue, c'est le seul endroit où il y a eu des incidents, et qui ont été très vite gérés et maîtrisés. Au contraire, dans les autres festivals, les gens étaient plutôt demandeurs, et les familles rassurées de savoir qu'elles pouvaient s'y rendre avec ces mesures de sécurité, qui permettraient aux manifestations de se tenir.
ALEXIS MOREL
Un mot, Audrey AZOULAY, des intermittents du spectacle, on a frôlé la crise ce printemps, finalement, un accord a été trouvé, il est entré en vigueur il y a quelques jours, le 1er août, mais il ne respecte pas le cadrage financier imposé par l'UNEDIC. Ce texte, il est vraiment pérenne ? C'est un sujet réglé pour vous ou c'est reculer pour mieux sauter ?
AUDREY AZOULAY
Ah non, c'est un sujet qui a connu, je dirais, un aboutissement, un dénouement tel qu'il n'en avait pas connu depuis treize ans. On avait tous les ans une crise, une angoisse, est-ce que le système allait être pérennisé, était-il en danger ? Et les partenaires sociaux, qui ont négocié cet accord, à la fois côté patronat et côté syndicats de salariés, ont trouvé un accord, je dirais, qui est responsable, parce qu'il produit des économies, et qui est juste, parce qu'il fait droit à des revendications qui étaient donc en déshérence depuis treize ans. Donc cet accord historique qui a eu lieu en avril, le gouvernement l'a accompagné, et l'a fait rentrer en vigueur par décret de façon donc pérenne, à partir du 1er août dernier. Donc je crois que cela répond de façon pérenne et juste et durable aux attentes des uns et des autres.
ALEXIS MOREL
Audrey AZOULAY, ministre de la Culture et de la communication, invitée politique de France Info, ce matin. Merci beaucoup.
AUDREY AZOULAY
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 24 août 2016