Interview de M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, à France Info le 4 octobre 2016, sur l'avenir du site Alstom à Belfort et la préparation de l'élection présidentielle.

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Média : France Info

Texte intégral

FABIENNE SINTES
Bienvenu dans l'émission politique de Franceinfo, une demi-heure ensemble comme tous les matins. Bonjour Jean-Michel APHATIE.
JEAN-MICHEL APHATIE
Bonjour Fabienne.
FABIENNE SINTES
Gilles BORNSTEIN et Guy BIRENBAUM sont là ce matin comme d'habitude, et notre invité est le Secrétaire d'Etat chargé des Relations avec le Parlement.
JEAN-MICHEL APHATIE
Bonjour Jean-Marie LE GUEN.
JEAN-MARIE LE GUEN
Bonjour Jean-Michel APHATIE, bonjour à tous.
JEAN-MICHEL APHATIE
À tous, c'est très gentil. Bien sûr, soyons polis. Toute la presse annonce que le gouvernement va passer commande de 16 TGV et pour tracter ces 16 TGV, 32 locomotives que fabriquerait l'usine ALSTOM à Belfort. Tout cela sera annoncé officiellement à midi mais comme toute la presse est informée par on ne sait qui et le dit dès ce matin, est-ce que vous le confirmez Jean-Marie LE GUEN ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ce que je peux vous dire, c'est ce qu'a dit le Premier ministre Manuel VALLS. C'est que nous mettons vraiment tout en oeuvre pour trouver une issue à la fois sur ALSTOM d'une façon globale, qui n'est pas véritablement en cause, mais surtout sur le site de production de Belfort. Il y a une volonté, il y a l'idée d'avoir des solutions imaginatives, fortes.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc 16 TGV commandés.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je laisse à Christophe SIRUGUE qui est le ministre en charge…
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous laissez à Christophe SIRUGUE le soin d'annoncer la commande par l'État de 16 TGV.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je sens que vous me poussez à annoncer un certain nombre de choses que je ne suis pas en situation de faire.
GILLES BORNSTEIN
Ce sont des rumeurs fondées.
JEAN-MARIE LE GUEN
[Rires] J'ai l'impression d'être un peu dans une enquête à la DGSI.
GUY BIRENBAUM
Mais non, mais non !
GILLES BORNSTEIN
Votre garde à vue se passe bien ?
JEAN-MARIE LE GUEN
[Rires]
JEAN-MICHEL APHATIE
Si vous répondiez, ce serait pas mal, oui.
JEAN-MARIE LE GUEN
Écoutez, je pense qu'il y aura des annonces fortes, des annonces qui vont apporter satisfaction aussi à ces salariés et qui montrent qu'il y a véritablement une volonté d'une politique industrielle. On connaît le problème. Il y a un trou de charges en quelque sorte pendant quatre ans, entre 2016 et 2020. Il y a des ondoiements comme ça dans les commandes de train. On sait qu'à partir de 2020, il y aura des commandes massives et que d'ici-là il faut trouver le raccord. Imagination, volonté, mobilisation de l'État bien sûr mais aussi de l'entreprise.
GUY BIRENBAUM
Et le raccord, c'est des TGV sur les lignes Intercités. Ça fait un peu rigoler, non ?
JEAN-MICHEL APHATIE
La moquerie est déjà là.
JEAN-MARIE LE GUEN
Écoutez, vous verrez bien les solutions, vous en ferez les commentaires et vous en aurez surtout les explications.
JEAN-MICHEL APHATIE
Diriez-vous que la décision concernant l'usine ALSTOM à Belfort n'a aucun rapport avec l'élection présidentielle ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Écoutez, si nous n'intervenions pas, vous nous condamneriez à juste titre en disant : « c'est l'État impuissant ». Nous agissons comme on l'a fait sur d'autres sites en trouvant à chaque fois des solutions. On a sauvé PSA, on a sauvé STX, on a sauvé y compris RENAULT, il y a des choses qui se font sur l'usine MICHELIN. À chaque fois que l'État agit sur la politique industrielle, il ne le fait pas simplement pour plaire à vos commentaires mais pour répondre à un besoin d'une politique industrielle française.
JEAN-MICHEL APHATIE
ALSTOM voulait délocaliser 400 emplois en Alsace, ce n'est pas très, très loin. S'il n'y avait pas eu l'élection présidentielle, sans doute ALSTOM l'aurait fait.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, je ne crois pas. Je pense qu'il y a un site, je pense qu'il y a la nécessité dans la manière dont ALSTOM a traité les questions. Je pense qu'il y a encore dans l'industrie française une culture. J'essaye de mesurer mes propos mais il y a une culture un petit peu trop grande de l'industrie sans usine. Je pense que ce n'est plus – ç'a été une utopie dangereuse pendant les années 90-2000 – je pense qu'il faut revenir à l'idée qu'il y a une localisation en France.
FABIENNE SINTES
Pardon, mais est-ce que Valenciennes ne va pas faire les frais de Belfort quand même à un moment ? En tous cas, ils doivent se poser la question et même BOMBARDIER à côté. BOMBARDIER est Canadien, d'accord, mais enfin ce sont des ouvriers en France qui sont là. Est-ce que l'un ne va pas déshabiller l'autre ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Nous avons le souci de répartir l'effort et pour ça, il y a des réponses industrielles. Il y a aussi des réponses sociales, c'est vrai. Nous avons mis en place des mécanismes qui permettent de conserver l'emploi, de conserver les compétences et il y a un travail. C'est pour ça qu'il est beaucoup plus complexe, ce travail, que ce que dit la presse aujourd'hui ce matin et que Christophe SIRUGUE apportera justement les réponses dans leur globalité puisque c'est bien d'une filière industrielle dont il s'agit et pas simplement d'un site de localisation. Le traitement qui est apporté par le gouvernement – je réponds à Jean-Michel APHATIE très directement – ce n'est pas une annonce ponctuelle industrielle qui est là pour tenir six mois. C'est une annonce stratégique, globale et vous avez raison de dire qu'il y a des sites de production d'ALSTOM et d'autres entreprises et qu'il faut gérer l'ensemble.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc annonce du Secrétaire d'Etat à l'Industrie Christophe SIRUGUE en fin de matinée. On attend cela. Gilles BORNSTEIN ?
GILLES BORNSTEIN
Après l'affaire Kerviel, l'État avait accordé un crédit d'impôt de 2,2 milliards d'euros à la SOCIETE GENERALE. Maintenant puisque votre étalon, c'est les TGV, ça fait un cadeau de 80 TGV, c'est quand même pas mal. Christian ECKERT a dit que l'Etat pourrait revenir sur ce cadeau puisque la responsabilité de la gauche est engagée.
JEAN-MARIE LE GUEN
De la gauche ?
GILLES BORNSTEIN
De la banque !
JEAN-MARIE LE GUEN
La gauche et la banque, c'est deux choses différentes, avouez-le.
GILLES BORNSTEIN
Absolument. Est-ce que vous confirmez que l'Etat pourrait revenir sur ce cadeau fiscal ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Si Christian ECKERT l'a dit. Et puis, j'allais dire, c'est quasiment automatique. Vous savez, la France est un État de droit y compris en matière fiscale. A partir du moment où il y a des choses qui ont été faites en fonction de la justice telle qu'elle s'était prononcée, que se prononçant définitivement, la justice dise des choses différentes, le calcul fiscal est différent et donc l'action qui se fait des pouvoirs publics…
GILLES BORNSTEIN
La SOCIETE GENERALE va rendre l'argent si je puis dire.
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui. Nous allons discuter avec ceux qui ont touché indûment, au-delà de leur propre volonté, j'allais dire – puisque je ne les accuse pas d'avoir triché pour toucher de l'argent – mais simplement ils ont bénéficié de circonstances qui n'existent plus. Donc ces circonstances seront rectifiées et l'État touchera évidemment les sommes qui lui sont dues. C'est logique.
FABIENNE SINTES
Jean-Marie LE GUEN, un retour rapide vers l'industrie. Depuis hier lundi, SMART travaille 37 heures payées 35. C'est un bon accord ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Vous savez qu'il y a un conflit, un référendum à SMART, et cætera. Voilà, moi je ne vais pas me substituer à ce qu'ont décidé les salariés de SMART. Il y a un dialogue social.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais sur le sujet précis des 37 heures payées 35, c'est un problème chez SMART. Ils travailleront 37 payées 35.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non mais qu'il y ait eu des problèmes de compétitivité, qu'il y ait des problèmes de charges, quelle est la nature de l'accord ? Je pense que vous êtes d'accord avec moi pour dire que l'accord est un peu plus complexe que celui-là, c'est-à-dire qu'il prévoit aussi des emplois, qu'il prévoit des ondulations du temps de travail sur l'ensemble de l'année, donc voyons l'accord dans sa globalité.
FABIENNE SINTES
Et on en reparle dans un instant.
(…)
FABIENNE SINTES
La suite de l'émission politique de France Info avec Jean-Marie LE GUEN ce matin. Question, Jean-Michel APHATIE.
JEAN-MICHEL APHATIE
Nadine MORANO était l'invitée de France Info hier matin, elle était donc à votre place, elle a dessiné le portrait idéal du candidat à la présidentielle pour les électeurs de gauche, et elle l'a fait en partant de l'appel qu'Alain JUPPE a lancé aux déçus de François HOLLANDE. On écoute Nadine MORANO.
NADINE MORANO
Je pense que, en fait, l'appel d'Alain JUPPE démontre une chose, c'est qu'il est plutôt sur une ligne politique qui est proche de celle de François HOLLANDE, donc il essaye de troubler cette primaire de la droite et du centre, par sa ligne politique.
JEAN-MICHEL APHATIE
La ligne politique d'Alain JUPPE, en fait, peut séduire les électeurs de gauche. Quand vous entendez ça, Jean-Marie LE GUEN ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Écoutez, d'abord c'est dit par Nadine MORANO, donc je prends un tout petit peu de distance si vous voulez…
JEAN-MICHEL APHATIE
Pourquoi ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Pour analyser.
JEAN-MICHEL APHATIE
Pourquoi ? Votre phrase a l'air de contenir un peu de mépris vis-à-vis de Nadine MORANO.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je pense qu'elle est connue par un certain nombre de déclarations à l'emporte-pièce, on va dire ça comme ça.
JEAN-MICHEL APHATIE
Oui, mais l'analyse, est-ce qu'elle est fausse ? Est-ce qu'Alain JUPPE peut séduire les déçus du « hollandisme » ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, l'analyse est fausse. Je renvoie Nadine MORANO à la lecture des propositions d'Alain JUPPE, je ne suis pas sûr que ce soit qui l'intéresse, je pense qu'elle est là sur commande pour dire un certain nombre de choses contre un certain nombre…
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous avez un peu de mépris pour elle !
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, pas du tout.
JEAN-MICHEL APHATIE
Si, si, elle est là sur commande, ses analyses…non ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Écoutez, si j'ai du mépris, j'ai tort, donc voilà, simplement elle fait partie de cette droite réactionnaire qui aujourd'hui… allons au fond des choses. Il y a, sans aucun doute, au-delà des personnes, et moi je ne rentre pas dans le jeu des personnes, mais il y a effectivement, à droite, un certain nombre de gens qui sont sur une droite dure, en fait qui converge avec le Front national, pour dire les choses comme elles sont, et puis il y a aussi une droite républicaine, de tradition, gaulliste sociale, démocrate chrétienne, centriste, etc., qui ne se reconnaît pas. Ça ne veut pas dire que les hommes, et donc je ne tombe pas dans la provocation de madame MORANO laissant entendre qu'il y aurait le gentil JUPPE et le méchant SARKOZY, pour dire les choses comme ça, parce que dans la réalité, quand je vois le programme de monsieur JUPPE, je vois qu'il s'aligne, en réalité, sur monsieur SARKOZY. Mais il y a, dans le pays, il y a dans le pays des droites qui n'acceptent pas la droitisation de la droite, et ça c'est un élément important, et je pense que beaucoup de gens à gauche devraient comprendre, un, les enjeux de l'heure, les enjeux de l'heure c'est la République, la République, le danger de l'extrême droite, le danger de la droite dure, et donc on devrait ne pas être simplement dans le gauche/ droite, qui existe, mais dans la capacité aussi à rassembler les républicains.
GUY BIRENBAUM
Donc des électeurs de gauche devraient aller voter à la primaire.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, parce que je vous ai dit, me semble-t-il, qu'Alain JUPPE ne représentait pas, à travers ses propositions, ce courant…
GUY BIRENBAUM
Oui, mais si c'est si grave les réactionnaires contre les républicains.
JEAN-MARIE LE GUEN
Ce qui est si grave c'est que la gauche se mette à la hauteur des enjeux et qu'elle soit capable de proposer un rassemblement des Français pour faire face à ce bloc réactionnaire, c'est ça.
GILLES BORNSTEIN
Donc vous dites clairement aux gens de gauche de ne pas aller voter ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je dis clairement aux gens de gauche… d'abord, les Français sont les Français, souvent ils sont à gauche, parfois ils sont à gauche et à droite, et certains, qui sont à droite, sont à droite et à gauche, je veux dire que… non, mais c'est fini ces histoires-là. Je veux dire, on ne nait pas avec une conscience de gauche ou une conscience de droite, du moins pas tous les Français, et beaucoup de Français qui m'intéressent sont des gens qui ont des doutes, des interrogations, qui se posent des questions et qui savent que l'offre politique d'il y a 20 ans n'est plus la bonne aujourd'hui. Et donc il faut que nous soyons capables, nous, de trouver les éléments d'un rassemblement qui porte un certain nombre de valeurs communes à tous les républicains, voilà ce que je dis.
JEAN-MICHEL APHATIE
On va parler de votre campagne, Jean-Marie LE GUEN, sur l'hypothèse de voir des électeurs de gauche voter à la primaire des Républicains, voilà ce que disait hier soir en meeting Nicolas SARKOZY.
NICOLAS SARKOZY (HIER À STRASBOURG)
On m'a dit il faut une primaire loyale, où est la loyauté quand on appelle des électeurs de gauche à venir voter, à signer, parjure, un papier dans lequel ils s'engageraient à partager les valeurs de la droite et du centre, alors qu'en vérité ils n'en partagent aucune. Je ne veux pas de cette primaire-là.
JEAN-MICHEL APHATIE
Est-ce que vous dites, Jean-Marie LE GUEN, aux électeurs de gauche « n'allez pas voter à la primaire» ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je crois d'abord que monsieur SARKOZY, semble-t-il, est un peu inquiet, pour son score.
JEAN-MICHEL APHATIE
Est-ce que vous dites…
JEAN-MARIE LE GUEN
Deuxièmement, je pense que des gens… mais moi je n'ai pas de leçon à donner, simplement, quand on est de gauche…
JEAN-MICHEL APHATIE
Ce n'est pas de leçon.
JEAN-MARIE LE GUEN
Quand on est de gauche, ça ne veut pas dire qu'on est de gauche parce qu'on a voté un jour François HOLLANDE ou pour un député socialiste, mais, quand on est de gauche, qu'on se croit même de gauche, il me semble assez naturel de ne pas aller signer un papier où on dit qu'on est de droite et du centre, voilà, c'est tout.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc vous êtes d'accord avec SARKO.
JEAN-MARIE LE GUEN
Attendez, pour être très clair, je pense que les petits calculs, la confusion, les primaires c'est déjà compliqué, c'est déjà, la régulation de ce genre de choses c'est compliqué, alors si en plus on doit y mettre de la confusion, faisons attention. Ne jouons pas trop avec la démocratie, essayons d'avoir des attitudes les plus responsables possibles…
JEAN-MICHEL APHATIE
Une autre question qui se pose, c'est de savoir si François HOLLANDE sera candidat ou pas. Alors, on scrute chaque indice. Dimanche François HOLLANDE a inauguré la Maison d'Émile ZOLA, et en l'écoutant, eh bien on a eu du mal à se faire une opinion. On l'écoute.
FRANÇOIS HOLLANDE (MAISON ZOLA-MUSÉE DREYFUS MÉDAN DIMANCHE 2 OCTOBRE 2016)
Face aux plus grandes adversités il y a toujours un choix, même dans la nuit la plus sombre luit toujours une espérance, même dans l'engrenage d'une machinerie infernale, il suffit d'une voie, une seule, pour changer le cours des choses et le destin des hommes.
JEAN-MICHEL APHATIE
Alors, il va y aller ou pas ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Écoutez, ça c'est vous qui êtes les commentateurs, moi je ne suis pas un commentateur, je suis un acteur, donc je souhaite premièrement que la gauche…
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous avez des informations ?
JEAN-MARIE LE GUEN
J'ai donné quelques éléments un peu rapides, d'orientation de ce que pourrait être une candidature de la gauche, une candidature offensive, une candidature qui porte un espoir, qui est celle que… parce que ce pays, on voit ses difficultés, mais on ne parle pas aussi de ses atouts, il a des atouts considérables, y compris…
JEAN-MICHEL APHATIE
Il est porté par qui, cet espoir ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Eh bien j'espère que cet espoir sera porté par le président de la République et qu'il se mettra dans cette dynamique.
GUY BIRENBAUM
Quand ? Il ne devrait pas un peu anticiper parce que…
JEAN-MARIE LE GUEN
Il a parlé du mois de décembre.
GUY BIRENBAUM
Oui, mais justement, ne faudrait-il pas anticiper ? C'est loin.
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais moi je n'ai pas de conseil particulier. D'abord, c'est loin, pour vous qui êtes…
JEAN-MICHEL APHATIE
C'est loin pour tout le monde.
JEAN-MARIE LE GUEN
Et quand il aurait annoncé son truc, qu'est-ce que vous aurez à commenter après ? Gardez un certain nombre de commentaires pour le calendrier.
GUY BIRENBAUM
Non, mais nous ce n'est pas le sujet. Les commentateurs ce n'est pas le sujet.
JEAN-MARIE LE GUEN
D'ici le mois de mai, et éventuellement d'ici le mois de juin, parce que je vous le dis, moi je crois fondamentalement que cette campagne de 2017 n'a rien à voir avec les campagnes précédentes. Nous sommes à une période de tension et de rupture, les choses ne se passeront pas comme elles sont prévues, j'en ai la conviction, j'en ai la conviction, il y aura des bouleversements plusieurs fois dans cette campagne.
FABIENNE SINTES
Qu'est-ce qui est prévu ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ce qui est prévu c'est, c'est ce que l'on dit, la victoire annoncée de la droite, ce qui est prévu, c'est la division de la gauche, ce qui est prévu, c'est un certain nombre de choses qui font que la gauche part battue à la veille de cette élection, voilà. eh bien je dis que les choses ne sont pas si simples, je pense qu'il y a évidemment beaucoup de doutes par rapport à l'action qui est la nôtre, et notre premier travail c'est de rétablir la vérité sur ce bilan et de dire que s'il y a eu des insuffisances, s'il y a eu des échecs, il y a aussi des réussites, et lorsque l'on compare avec la droite, eh bien on peut être fiers de ce que nous avons fait, avec notre identité propre. Et je le dis, à partir de là nous passerons, lorsqu'il s'agira de comparer ce que proposent les uns et les autres, et quand il s'agira de proposer un rassemblement aux Français, je pense que la gauche à beaucoup de choses à dire à nos compatriotes.
FABIENNE SINTES
Et donc, vous le dites, ce sera une candidature sur un bilan, etc., mais lorsqu'on voit que François HOLLANDE attendra probablement le mois de décembre, ce qu'on ne peut pas s'empêcher de penser c'est, il attend de savoir contre qui il va jouer, et peut-être qu'il n'ira pas en fonction du candidat qui sortira des primaires à droite.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je vous laisse vos commentaires.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous pensez qu'il peut être réélu François HOLLANDE ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, je pense.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous le pensez vraiment ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, je le pense vraiment, je pense que rien n'est joué. Je pense que rien n'est joué, je pense que la lecture qui est celle que nous avons tous, vous les commentateurs, nous les acteurs, qui est celle, la lecture classique, ne correspond en rien à une situation où le Front national est à 30 % et où les forces réactionnaires sont à l'offensive.
FABIENNE SINTES
La suite de l'émission politique de France Info, on fera tourner quelques questions dans un instant.
(…)
FABIENNE SINTES
L'émission politique de Franceinfo dernière partie avec Jean-Marie LE GUEN. Question de Gilles BORNSTEIN.
GILLES BORNSTEIN
Oui. Un autre candidat à gauche qui lui est déjà déclaré, c'est Arnaud MONTEBOURG. Un sondage le place en tête, en tous cas montre que le deuxième tour sera très délicat pour François HOLLANDE lors des primaires. Il a déjà accepté de participer aux primaires et d'en accepter les règles. Voilà ce qu'il disait sur TF1.
- Extrait de l'interview d'Arnaud MONTEBOURG du 02 octobre (document TF1) :
« Je crois que dès lors qu'on accepte des primaires, on en accepte toutes les règles. Une chose est sûre, c'est que j'en accepterai le résultat et ne me présenterai pas et ne serai pas agent de division mais plutôt de rassemblement. »
GILLES BORNSTEIN
Alors question très simple. Lui dit clairement que si François HOLLANDE gagne les primaires, il le soutiendra. Si lui gagnait les primaires, est-ce vous et les Hollandais le soutiendrez ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je ne suis pas candidat aux primaires, je tiens à vous l'annoncer.
GILLES BORNSTEIN
Sera-t-il votre candidat s'il gagne les primaires ?
GUY BIRENBAUM
Ne faites pas semblant de ne pas avoir compris.
JEAN-MARIE LE GUEN
[Rires]
GILLES BORNSTEIN
Si Arnaud MONTEBOURG gagne les primaires, est-ce que le PS se rassemblera derrière lui ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, je pense que… Oui, sans doute, mais…
GILLES BORNSTEIN
Ouh là ! Sans doute ou c'est sûr ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non mais si je dis sans doute, c'est que je vais préciser.
GILLES BORNSTEIN
D'accord.
JEAN-MARIE LE GUEN
Bien. Donc je pense que le problème est la tonalité sur laquelle on fait campagne. Vous avez signalé cette déclaration, je la trouve positive. J'en ai entendu d'autres où les primaires c'était l'occasion inespérée de pouvoir dire non à un président sortant. Si la logique c'est celle de la déconstruction, du dénigrement, il n'y aura aucune avancée collective de fait. Si ces primaires sont juste l'occasion pour certains de continuer le procès qu'ils ont instruit depuis quatre ans…
GILLES BORNSTEIN
Mais là, lui joue le jeu. Il va aux primaires, il accepte les règles donc dites-lui.
JEAN-MARIE LE GUEN
Attendez. Excusez-moi, j'ai entendu aussi ce qu'il a dit par ailleurs. Il n'y a pas eu que les cinq secondes qui sont là. J'entends, je vois et j'écoute le parcours qui est le sien, comme j'essaye d'écouter d'ailleurs tout le monde, y compris monsieur MELENCHON par exemple.
JEAN-MICHEL APHATIE
Ça dépend de ce que dira MONTEBOURG en fait. Cela dépend de la nature de la campagne qu'il mènera.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je pense qu'on ne peut pas faire campagne pour rassembler la gauche en dénigrant le travail qui a été fait depuis quatre ans. Voilà, ça me paraît clair.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc vous vous réservez le droit de le soutenir ou pas s'il était désigné par la primaire. Est-ce que ce n'est pas une déchéance pour un président de la République élu au suffrage universel que de devoir se soumettre à la primaire d'un parti politique ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, je ne crois pas. J'ai été très réservé sur ces primaires, je le suis toujours parce que je pense qu'elles peuvent être l'occasion – on en parlait pour la droite – de manipulations qui ne seront pas grandioses pour la démocratie donc il y a un vrai danger. C'est un processus non contrôlé, les primaires.
JEAN-MICHEL APHATIE
Ce n'est pas ma question.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non mais ça, c'est ma réponse comme on dit.
JEAN-MICHEL APHATIE
Ce n'est pas ma question. Ma question c'est est-ce que ce n'est pas une déchéance de voir l'élu du suffrage universel obligé de se soumettre à la primaire d'un parti politique ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je vous dis, je disais donc que je n'étais pas fan de la question des primaires. Maintenant l'argument dit d'autorité, c'est-à-dire est-ce que le président de la République ne déchoit pas et cætera ne me paraît pas correspondre à l'époque. Je suis personnellement pour une évolution d'ailleurs. Mais ce n'est pas le problème de ce que peut dire François HOLLANDE ou le candidat de droite : il faut que le regard des Français change sur l'élection présidentielle. On ne va pas revenir sur l'élection présidentielle au suffrage universel, mais l'élection du petit Jésus, du Père Noël, et cætera tous les cinq ans il faut que ça cesse. Il faut que les Français, les citoyens, soient un petit peu plus – nous tous, nous tous…
JEAN-MICHEL APHATIE
Ça devient un état de faiblesse quand même. D'être obligé de passer par la primaire d'un parti pour être à nouveau candidat à un deuxième mandat, ça ne dit pas une situation de force.
JEAN-MARIE LE GUEN
S'il l'avait refusé, vous auriez dit que c'était une situation d'arrogance.
JEAN-MICHEL APHATIE
Non. Je ne l'aurais pas dit, je vous l'assure.
GUY BIRENBAUM
Vous avez dit avec beaucoup d'humour en première partie que la gauche et la banque, c'étaient deux choses différentes. Justement quelqu'un de gauche qui a travaillé à la banque, c'est monsieur MACRON qui sera en meeting ce soir à Strasbourg. Est-ce que vous allez vous intéresser à cette performance, ce qu'il va dire ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, moi oui. J'écoute tout ce qui se dit bien sûr, bien évidemment. Je vous parlais de monsieur MELECHON : vous imaginez bien que je peux écouter monsieur MACRON. Au passage, on en reviendra sur les trajets politiques des uns et des autres parce que non seulement MELENCHON a été de façon régulière contre, essentiellement contre, la social-démocratie et le Parti socialiste, mais ce qui est en train de se passer c'est aussi des évolutions. Moi, je me demande – puisque vous ne me posez pas la question, je vous donne une réponse – si on ne prépare pas un vote révolutionnaire de ce côté-là. Mais je mets ça de côté parce que c'est dans l'oreille d'un certain nombre de gens qui savent très bien ceux que je veux écouter.
GUY BIRENBAUM
Sur monsieur MACRON.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je viens à MACRON. Vous y réfléchirez si vous voulez. Vous écoutez ce que dit le Parti communiste français par exemple sur l'évolution du discours de MELENCHON.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous suggérez que Jean-Luc MELENCHON veut faire battre François HOLLANDE. C'est ça que vous voulez dire ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ça peut aller plus loin, ça peut aller plus loin. La théorie du chaos, il l'a portée et je me pose la question de savoir s'il n'est pas un des tenants de la théorie du chaos.
GUY BIRENBAUM
C'est-à-dire ?
JEAN-MICHEL APHATIE
Qu'est-ce que c'est « aller plus loin » ? Comme ça on va être clair.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non mais j'ai été suffisamment clair, je crois.
JEAN-MICHEL APHATIE
Non, non. Je vous assure que vous ne l'avez pas été.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je le serai dans les semaines qui viennent.
JEAN-MICHEL APHATIE
Que cherche Jean-Luc MELENCHON ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Donc je dis attention. Quand on est…
JEAN-MICHEL APHATIE
Non, non, non ! Que cherche Jean-Luc MELENCHON ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Jean-Michel APHATIE, quand on met l'Europe comme étant le seul critère, le critère décisif ; quand on commence à jouer sur la question des Gaulois alors qu'on vient d'un courant d'extrême gauche - ou plus directement pas lui personnellement mais les gens qui sont autour de lui, et cætera – et qu'on tient ce type de discours, je pense que ce n'est pas neutre. Donc j'attends de sa part une clarification pour que je ne sois pas amené à me poser des questions. On a connu le vote révolutionnaire.
GILLES BORNSTEIN
Il fait le jeu de Marine LE PEN ? C'est ce que vous voulez dire ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Laissez-moi terminer Gilles BORNSTEIN parce que beaucoup de gens ne savent pas quand je dis vote révolutionnaire ce que ça veut dire.
JEAN-MICHEL APHATIE
Rapide alors.
JEAN-MARIE LE GUEN
En 81, le Parti communiste avait appelé à voter contre François MITTERRAND pour Valéry GISCARD D'ESTAING parce qu'il voulait empêcher la victoire de la gauche d'une part et deuxièmement, pousser plus loin les contradictions. Est-ce que c'est la théorie portée par certains à l'extrême gauche ? Voilà, c'est la question que je me pose. MACRON, il dira des choses. Il a besoin de dire des choses parce que pour l'instant, on ne voit pas bien ni sa trajectoire, ni le contenu de ses propositions. C'est le moins qu'on puisse dire. Donc nous verrons bien ce qu'il dira.
JEAN-MICHEL APHATIE
Voilà. C'était un peu désordonné mais avez suggéré, Jean-Marie LE GUEN, que Jean-Luc MELENCHON favorisait Nicolas SARKOZY.
JEAN-MARIE LE GUEN
[Silence]
JEAN-MICHEL APHATIE
Et vous ne le démentez pas, donc nous avions bien compris. Merci d'avoir accepté l'invitation de Franceinfo.
FABIENNE SINTES
Et bonne journée.Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 octobre 2016