Texte intégral
THOMAS SOTTO
L'Interview politique d'Europe 1, Jean-Pierre ELKABBACH vous recevez ce matin le ministre de l'Économie et des Finances, Michel SAPIN.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et pas du tout lessivé, au contraire dopé, bienvenue Michel SAPIN, bonjour.
MICHEL SAPIN
Bonjour.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quel est votre jugement sur les projets de la droite ou des droites après trois débats passionnés, de fond, sans spectacle et sans gadget ?
MICHEL SAPIN
J'y ai vu beaucoup de confusion et beaucoup de difficulté à faire des différences, hormis les personnalités, les histoires, les expériences des uns et des autres qui comptent évidemment dans un choix, par contre je vois un élément qui les réunit ce sont les propositions économiques et sociales, elles sont toutes relativement brutales même si elles peuvent être dites de manière moins brutale...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Brutales ?
MICHEL SAPIN
Oui brutales.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Pour qui ?
MICHEL SAPIN
Pour au fond les plus faibles, pour ceux qui sont le plus dans la difficulté, mais aussi d'une manière générale pour les Français. Je ne pense pas qu'on puisse faire avancer la France et il faut que la France avance on ne peut pas réformer la France et il faut que la France continue à se réformer par des cassures qui opposent les Français les uns avec les autres ou en cherchant des boucs émissaires, je ne sais pas quoi, par exemple les fonctionnaires, il y a un cours pour savoir celui qui va annoncer le plus de suppressions de postes de fonctionnaires ; il y a d'ailleurs un concours aussi pour ne jamais dire de quels fonctionnaires il s'agit, parce que sinon on prend un risque, on se mettrait à dos telle ou telle catégorie. Donc, cette manière de vouloir dire : « il faut faire bouger la France », que je partage, nous la faisons déjà bouger, mais la faire bouger par des cassures, des ruptures, des Français qui s'opposent les uns aux autres ça ce n'est pas possible.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et, pourtant, c'est une alternative qui va conduire à l'alternance...
MICHEL SAPIN
C'est une alternative, heureusement qu'il y a des alternatives...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qui devrait conduire à l'alternance ?
MICHEL SAPIN
Heureusement qu'il y a des alternatives, sinon il n'y aurait pas de démocratie ; heureusement qu'il y a des possibilités d'alternance, sinon d'ailleurs nous nous n'aurions jamais été élus à plusieurs moments de cette histoire contemporaine. Mais enfin ce n'est pas automatique, ce n'est pas obligatoire, aujourd'hui on a presque parfois le sentiment que ce serait chose faite, ça n'est pas chose faite, il y a encore du temps devant nous, il y a encore des évènements, il y a encore des décisions qui vont se prendre d'ici...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On va voir lesquelles dans un instant avec vous, Michel SAPIN.
MICHEL SAPIN
D'ici quelques mois et qui vont faire bouger les lignes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais quand vous voyez toute la famille de droite s'exprimer, se disputer, mais en même temps se retrouver pour réformer le pays, est-ce que vous vous dites : « il faudrait que la gauche fasse sa primaire » alors que vous n'aurez ni Jean-Luc MELENCHON, ni le Parti communiste, ni les Verts, ni Emmanuel MACRON, est-ce que ça aurait un sens une primaire de gauche dans ces conditions ?
MICHEL SAPIN
Nous verrons si la droite se retrouve, nous verrons dans quelles conditions ces primaires se passeront et si, au bout du compte, il n'y a qu'une seule candidature à droite, on peut avoir des doutes sur ce point. Mais nous le verrons, je ne suis pas là pour...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
A gauche il y en aura plusieurs, ça c'est sûr déjà.
MICHEL SAPIN
Ce qui est certain à gauche c'est que la gauche elle est aujourd'hui fracturée, c'est une évidence, elle est fracturée. Il lui est arrivée de se réunir, il lui est arrivée de se désunir dans l'histoire, lorsqu'elle s'est désunie elle a toujours perdu, lorsqu'elle a su se réunir sur l'essentiel elle a pu gagner et elle a pu apporter aux Français des...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc, elle est perdue aujourd'hui ?
MICHEL SAPIN
Non, il y a deux voies à gauche de rassemblement. Il y a un devoir qui s'impose à tous, à tous, même ceux qui sont les plus critiques vis-à-vis de nous, vis-à-vis du président de la République, vis-à-vis de notre politique, même ceux-là quand ils vont voir ce que la droite propose et quand ils vont s'intéresser plus à l'alternative comme vous l'avez dit qu'à « critiquailler » ou tel ou tel parmi le gouvernement, à ce moment-là c'est l'essentiel qui l'emportera.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Michel SAPIN, si je vous décris le portrait du candidat idéal pour la Présidence de la République, il défend l'autorité et la sécurité...
MICHEL SAPIN
François HOLLANDE !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il est ferme...
MICHEL SAPIN
François HOLLANDE !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Bienveillant, généreux, solidaire...
MICHEL SAPIN
François HOLLANDE !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
A qui vous pensez ?
MICHEL SAPIN
François HOLLANDE oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est le portrait que Manuel VALLS a fait presque de lui...
MICHEL SAPIN
Donc de François HOLLANDE !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
De lui à Berlin.
MICHEL SAPIN
Ah ! Pas de lui, de François HOLLANDE. Non, il a fait le portrait de ce qui doit être un homme d'État, un homme de décision mais en même temps j'aime bien le terme de bienveillance un homme qui ne cherche pas à mener une bande de Français contre une autre bande de Français, cette théorie des bandes, cette théorie je le répète des cassures elle est mortelle pour la France.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous ne pensez pas que Manuel VALLS parlait pour lui-même, parce que vous allez peut-être clarifier ce matin, Manuel VALLS avez-vous dit c'est le candidat naturel si François HOLLANDE renonce, est ce que vous avez des doutes sur François HOLLANDE - votre ami est-ce que vous le lâchez ?
MICHEL SAPIN
J'ai toujours le sourire, parce que je connais les mécaniques médiatico-politiques...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Encore la faute des médias ?
MICHEL SAPIN
Non, non, mais non, j'ai vu que c'était hier soir la faute des médias, j'ai admiré parce que j'ai trouvé qu'hier soir il y en avait à peu près un seul qui était bon, vous trouverez le nom de celui qui a été bon.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est qui ? Qui est-ce ? Qui est-ce ? Qui est-ce ?
MICHEL SAPIN
Ce n'était pas parmi les candidats, ce n'était pas parmi les candidats. J'arrête, parce que sinon je vais avoir l'air d'être - comment dirais-je gentil avec tel ou tel parmi vous. Donc, sur... Je laisse de côté !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On reste dans la confusion, on reste dans la confession.
MICHEL SAPIN
Je laisse de côté, je laisse de côté. Non, mais aujourd'hui nous avons besoin de quelqu'un qui ait de l'expérience, qui a montré sa capacité, qui a montré ses décisions, enfin qui a pris des décisions les plus lourdes, les plus fortes, qui a décidé ? C'est terrible pour un homme de dire : « j'autorise la mort, j'autorise l'engagement des forces armées, j'autorise mes soldats à y aller, je leur dis prenez des risques », certains sont morts, ça c'est la décision, ça c'est l'homme d'État, et l'homme d'Etat aujourd'hui c'est François HOLLANDE. Je dis ça, je le dis avec plein de conviction, et en même temps François HOLLANDE il est face à une décision qui lui est propre, qui lui est personnelle, on n'est pas candidat par obligation, on n'est pas candidat parce que ce serait plus confortable pour les uns ou pour les autres...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
D'accord ! Mais, face à ce lyrisme, Michel SAPIN...
MICHEL SAPIN
On est candidat par rapport à soi-même et par rapport aux Français.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Face à cette solitude qu'il a, face à cette adversité et l'impopularité, est-ce qu'il finira par baisser les bras - vous le connaissez et laisser la place ? Il y a des candidats, probablement Manuel VALLS et tiens - on a entendu tout à l'heure avec Thomas SQOTTO - Emmanuel MACRON, est-ce que c'est une voie neuve et une alternative à gauche ou au centre, au...
MICHEL SAPIN
Une voie neuve, une voie neuve c'est un visage neuf, c'est une démarche vierge - mais ça chacun le sait - à chaque moment il y a quelqu'un qui dit : « je suis nouveau, je suis neuf, j'ai de nouvelles idées », donc laissons-le dans la banalité que l'histoire lui rendra.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Boum !
MICHEL SAPIN
Mais je regarde les choses en face, le président de la République a une décision à prendre, ça n'est pas moi qui vais la donner cette décision, ce n'est pas même moi qui vais la faire mûrir, c'est lui qui la prendra, c'est pour ça que je respecte profondément... je le répète il n'y a pas de candidature automatique, c'est énorme, c'est grave, c'est une décision qui vous...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce qu'il est en état de prendre cette décision grave, lourde...
MICHEL SAPIN
Qui vous projette vous-même...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Personnelle ?
MICHEL SAPIN
Évidemment qu'il l'est en état, évidemment, et - si vous me le demandez sur le thème du souhait - mon souhait est clair et net, je souhaite que ce soit François HOLLANDE le candidat. Mais, au-delà de ça, une fois que j'ai dit ça, c'est lui qui est face à la décision.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qui va décider et on va voir quand. Ici vous aviez prévu avec Thomas et moi une croissance de 1,5 % pour 2016, finalement - vous allez l'annoncer aujourd'hui elle sera de combien ?
MICHEL SAPIN
Oh ! Je pense que c'est 1,4 %, c'est en tous les cas le chiffre que nous retiendrons pour cette année comme hypothèse.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ce n'est pas une déconvenue, 1, 4 au lieu de 1, 5 ?
MICHEL SAPIN
Franchement 0,1 % de croissance, si vous rencontrez ça au coin de la rue, vous me le dites. Mais ce qui compte, c'est de savoir : est-ce que ça a une conséquence en termes de chômage ? Non ! La preuve c'est que jamais on n'a autant créé d'emplois, d'emplois nets - la différence entre ceux qui sont créés et ceux qui sont détruits dans le secteur privé, jamais on n'en a autant créés depuis un an, depuis la crise, il faut remonter à 2005 2006 pour retrouver une situation comme celle d'aujourd'hui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et le chômage qui augmente de 0,1 % en décembre...
MICHEL SAPIN
Oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce qu'il ne va pas dépasser les 10 % et avec des conséquences politiques ?
MICHEL SAPIN
Quand il a baissé de 0,3 % le trimestre dernier j'ai peu entendu de commentaires, il augmente aujourd'hui de 0,1, j'entends beaucoup de commentaires, mais c'est parce qu'on a cette vision peut-être que c'est dommage pour la France mais on a cette vision un peu pessimiste. Donc le chômage aujourd'hui et je sais que... à chaque fois que je dis ça, je me dis : « les gens ne veulent pas l'entendre », mais c'est la vérité - et tant mieux pour la France - le chômage baisse...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On va dire que vous vous embobinez encore ?
MICHEL SAPIN
Oui, mais le chômage baisse, c'est clair...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le brouillard de SAPIN ?
MICHEL SAPIN
Le chômage baisse, il ne baisse pas suffisamment, il ne baisse pas pour tout le monde, il faut continuer, il faut amplifier, mais le chômage baisse en France parce qu'on a retrouvé de la croissance, parce qu'on a des politiques de compétitivité pour nos entreprises, parce qu'on a mené des politiques d'encouragement à la prise de décision des entreprises en faveur des créations d'emploi.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Essayez avec ça de mobiliser les socialistes ! Autre question...
MICHEL SAPIN
Mais il vaut mieux essayer d'avoir des résultats à peu près corrects plutôt que des résultats qu'avaient monsieur SARKOZY lorsqu'il est parti en 2012.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'administration fiscale a mis sept mois à éplucher, elle a lancé 560 contrôles fiscaux sur les Pan...
MICHEL SAPIN
Les Panama papers !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Panama Papers, c'est ce que je voulais dire pour terminer, quel retour, quel résultat vous en attendez ? Il y aura du gras, comme disait quelqu'un ?
MICHEL SAPIN
Oui le gras, il y a d'ailleurs un grand nombre de ceux qui ont pu être repérés par le biais des Panama papers je vous parle des personnes qui cherchaient à échapper au fisc - que nous connaissions et qui étaient déjà en train dêtre poursuivies ou qui avaient d'ailleurs d'eux-mêmes faits des déclarations pour régulariser leur situation. Juste un mot, la lutte contre la fraude fiscale, la lutte contre l'optimisation fiscale, c'est une des grandes réussites de ce quinquennat, une des grandes réussites, on a pris tous les moyens...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ca rapporté combien ?
MICHEL SAPIN
Les chiffres sont très simples, avant nous ça rapporté 16 milliards par an ce n'est déjà pas si mal aujourd'hui c'est 22 milliards, six milliards de différence entre les deux, ce n'est pas rien, je vous assure que ça permet d'économiser des impôts à d'autres.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et les 560, Michel SAPIN, les non rapportés ?
MICHEL SAPIN
Oui, je ne sais pas combien ils rapporteront, ça dépend des situations, mais évidemment ça fait des sous.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Une dernière remarque !
MICHEL SAPIN
Et c'est autant en moins d'impôts à payer.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Dans trois semaines, on va vite, dans trois semaines le 11 décembre la Chine doit en principe obtenir de Bruxelles le statut d'économie de marché, si c'est oui la France est inondée de produits chinois à bas prix et on casse nos industries, qu'est-ce que fait l'Etat français ?
MICHEL SAPIN
Non, c'est la commission qui prend ce genre de décision c'est normal...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais la position que vous...
MICHEL SAPIN
Et ça ne sera pas une affaire de oui ou non, la commission a fait des propositions pour mettre sur de nouvelles bases des relations avec la Chine - la Chine est un grand partenaire pour nous, un partenaire indispensable mais nous ne sommes pas des enfants de choeur, nous savons aussi qu'il peut y avoir des politiques qui sont des politiques de dumping qui consistent à vendre moins cher...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc, il y a des barrières ?
MICHEL SAPIN
Et, donc, il faut forcément se protéger contre les politiques de dumping, et c'est ce qui sera fait demain comme hier.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Merci Michel SAPIN.
THOMAS SOTTO
Merci Michel SAPIN, merci Jean-Pierre, on vous retrouve évidemment dimanche à 10 h pour « Le Grand rendez-vous I Télé Europe 1 Les Échos ».
source : Service d'information du Gouvernement, le 23 novembre 2016
L'Interview politique d'Europe 1, Jean-Pierre ELKABBACH vous recevez ce matin le ministre de l'Économie et des Finances, Michel SAPIN.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et pas du tout lessivé, au contraire dopé, bienvenue Michel SAPIN, bonjour.
MICHEL SAPIN
Bonjour.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quel est votre jugement sur les projets de la droite ou des droites après trois débats passionnés, de fond, sans spectacle et sans gadget ?
MICHEL SAPIN
J'y ai vu beaucoup de confusion et beaucoup de difficulté à faire des différences, hormis les personnalités, les histoires, les expériences des uns et des autres qui comptent évidemment dans un choix, par contre je vois un élément qui les réunit ce sont les propositions économiques et sociales, elles sont toutes relativement brutales même si elles peuvent être dites de manière moins brutale...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Brutales ?
MICHEL SAPIN
Oui brutales.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Pour qui ?
MICHEL SAPIN
Pour au fond les plus faibles, pour ceux qui sont le plus dans la difficulté, mais aussi d'une manière générale pour les Français. Je ne pense pas qu'on puisse faire avancer la France et il faut que la France avance on ne peut pas réformer la France et il faut que la France continue à se réformer par des cassures qui opposent les Français les uns avec les autres ou en cherchant des boucs émissaires, je ne sais pas quoi, par exemple les fonctionnaires, il y a un cours pour savoir celui qui va annoncer le plus de suppressions de postes de fonctionnaires ; il y a d'ailleurs un concours aussi pour ne jamais dire de quels fonctionnaires il s'agit, parce que sinon on prend un risque, on se mettrait à dos telle ou telle catégorie. Donc, cette manière de vouloir dire : « il faut faire bouger la France », que je partage, nous la faisons déjà bouger, mais la faire bouger par des cassures, des ruptures, des Français qui s'opposent les uns aux autres ça ce n'est pas possible.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et, pourtant, c'est une alternative qui va conduire à l'alternance...
MICHEL SAPIN
C'est une alternative, heureusement qu'il y a des alternatives...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qui devrait conduire à l'alternance ?
MICHEL SAPIN
Heureusement qu'il y a des alternatives, sinon il n'y aurait pas de démocratie ; heureusement qu'il y a des possibilités d'alternance, sinon d'ailleurs nous nous n'aurions jamais été élus à plusieurs moments de cette histoire contemporaine. Mais enfin ce n'est pas automatique, ce n'est pas obligatoire, aujourd'hui on a presque parfois le sentiment que ce serait chose faite, ça n'est pas chose faite, il y a encore du temps devant nous, il y a encore des évènements, il y a encore des décisions qui vont se prendre d'ici...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On va voir lesquelles dans un instant avec vous, Michel SAPIN.
MICHEL SAPIN
D'ici quelques mois et qui vont faire bouger les lignes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais quand vous voyez toute la famille de droite s'exprimer, se disputer, mais en même temps se retrouver pour réformer le pays, est-ce que vous vous dites : « il faudrait que la gauche fasse sa primaire » alors que vous n'aurez ni Jean-Luc MELENCHON, ni le Parti communiste, ni les Verts, ni Emmanuel MACRON, est-ce que ça aurait un sens une primaire de gauche dans ces conditions ?
MICHEL SAPIN
Nous verrons si la droite se retrouve, nous verrons dans quelles conditions ces primaires se passeront et si, au bout du compte, il n'y a qu'une seule candidature à droite, on peut avoir des doutes sur ce point. Mais nous le verrons, je ne suis pas là pour...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
A gauche il y en aura plusieurs, ça c'est sûr déjà.
MICHEL SAPIN
Ce qui est certain à gauche c'est que la gauche elle est aujourd'hui fracturée, c'est une évidence, elle est fracturée. Il lui est arrivée de se réunir, il lui est arrivée de se désunir dans l'histoire, lorsqu'elle s'est désunie elle a toujours perdu, lorsqu'elle a su se réunir sur l'essentiel elle a pu gagner et elle a pu apporter aux Français des...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc, elle est perdue aujourd'hui ?
MICHEL SAPIN
Non, il y a deux voies à gauche de rassemblement. Il y a un devoir qui s'impose à tous, à tous, même ceux qui sont les plus critiques vis-à-vis de nous, vis-à-vis du président de la République, vis-à-vis de notre politique, même ceux-là quand ils vont voir ce que la droite propose et quand ils vont s'intéresser plus à l'alternative comme vous l'avez dit qu'à « critiquailler » ou tel ou tel parmi le gouvernement, à ce moment-là c'est l'essentiel qui l'emportera.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Michel SAPIN, si je vous décris le portrait du candidat idéal pour la Présidence de la République, il défend l'autorité et la sécurité...
MICHEL SAPIN
François HOLLANDE !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il est ferme...
MICHEL SAPIN
François HOLLANDE !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Bienveillant, généreux, solidaire...
MICHEL SAPIN
François HOLLANDE !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
A qui vous pensez ?
MICHEL SAPIN
François HOLLANDE oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est le portrait que Manuel VALLS a fait presque de lui...
MICHEL SAPIN
Donc de François HOLLANDE !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
De lui à Berlin.
MICHEL SAPIN
Ah ! Pas de lui, de François HOLLANDE. Non, il a fait le portrait de ce qui doit être un homme d'État, un homme de décision mais en même temps j'aime bien le terme de bienveillance un homme qui ne cherche pas à mener une bande de Français contre une autre bande de Français, cette théorie des bandes, cette théorie je le répète des cassures elle est mortelle pour la France.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous ne pensez pas que Manuel VALLS parlait pour lui-même, parce que vous allez peut-être clarifier ce matin, Manuel VALLS avez-vous dit c'est le candidat naturel si François HOLLANDE renonce, est ce que vous avez des doutes sur François HOLLANDE - votre ami est-ce que vous le lâchez ?
MICHEL SAPIN
J'ai toujours le sourire, parce que je connais les mécaniques médiatico-politiques...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Encore la faute des médias ?
MICHEL SAPIN
Non, non, mais non, j'ai vu que c'était hier soir la faute des médias, j'ai admiré parce que j'ai trouvé qu'hier soir il y en avait à peu près un seul qui était bon, vous trouverez le nom de celui qui a été bon.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est qui ? Qui est-ce ? Qui est-ce ? Qui est-ce ?
MICHEL SAPIN
Ce n'était pas parmi les candidats, ce n'était pas parmi les candidats. J'arrête, parce que sinon je vais avoir l'air d'être - comment dirais-je gentil avec tel ou tel parmi vous. Donc, sur... Je laisse de côté !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On reste dans la confusion, on reste dans la confession.
MICHEL SAPIN
Je laisse de côté, je laisse de côté. Non, mais aujourd'hui nous avons besoin de quelqu'un qui ait de l'expérience, qui a montré sa capacité, qui a montré ses décisions, enfin qui a pris des décisions les plus lourdes, les plus fortes, qui a décidé ? C'est terrible pour un homme de dire : « j'autorise la mort, j'autorise l'engagement des forces armées, j'autorise mes soldats à y aller, je leur dis prenez des risques », certains sont morts, ça c'est la décision, ça c'est l'homme d'État, et l'homme d'Etat aujourd'hui c'est François HOLLANDE. Je dis ça, je le dis avec plein de conviction, et en même temps François HOLLANDE il est face à une décision qui lui est propre, qui lui est personnelle, on n'est pas candidat par obligation, on n'est pas candidat parce que ce serait plus confortable pour les uns ou pour les autres...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
D'accord ! Mais, face à ce lyrisme, Michel SAPIN...
MICHEL SAPIN
On est candidat par rapport à soi-même et par rapport aux Français.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Face à cette solitude qu'il a, face à cette adversité et l'impopularité, est-ce qu'il finira par baisser les bras - vous le connaissez et laisser la place ? Il y a des candidats, probablement Manuel VALLS et tiens - on a entendu tout à l'heure avec Thomas SQOTTO - Emmanuel MACRON, est-ce que c'est une voie neuve et une alternative à gauche ou au centre, au...
MICHEL SAPIN
Une voie neuve, une voie neuve c'est un visage neuf, c'est une démarche vierge - mais ça chacun le sait - à chaque moment il y a quelqu'un qui dit : « je suis nouveau, je suis neuf, j'ai de nouvelles idées », donc laissons-le dans la banalité que l'histoire lui rendra.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Boum !
MICHEL SAPIN
Mais je regarde les choses en face, le président de la République a une décision à prendre, ça n'est pas moi qui vais la donner cette décision, ce n'est pas même moi qui vais la faire mûrir, c'est lui qui la prendra, c'est pour ça que je respecte profondément... je le répète il n'y a pas de candidature automatique, c'est énorme, c'est grave, c'est une décision qui vous...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce qu'il est en état de prendre cette décision grave, lourde...
MICHEL SAPIN
Qui vous projette vous-même...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Personnelle ?
MICHEL SAPIN
Évidemment qu'il l'est en état, évidemment, et - si vous me le demandez sur le thème du souhait - mon souhait est clair et net, je souhaite que ce soit François HOLLANDE le candidat. Mais, au-delà de ça, une fois que j'ai dit ça, c'est lui qui est face à la décision.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qui va décider et on va voir quand. Ici vous aviez prévu avec Thomas et moi une croissance de 1,5 % pour 2016, finalement - vous allez l'annoncer aujourd'hui elle sera de combien ?
MICHEL SAPIN
Oh ! Je pense que c'est 1,4 %, c'est en tous les cas le chiffre que nous retiendrons pour cette année comme hypothèse.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ce n'est pas une déconvenue, 1, 4 au lieu de 1, 5 ?
MICHEL SAPIN
Franchement 0,1 % de croissance, si vous rencontrez ça au coin de la rue, vous me le dites. Mais ce qui compte, c'est de savoir : est-ce que ça a une conséquence en termes de chômage ? Non ! La preuve c'est que jamais on n'a autant créé d'emplois, d'emplois nets - la différence entre ceux qui sont créés et ceux qui sont détruits dans le secteur privé, jamais on n'en a autant créés depuis un an, depuis la crise, il faut remonter à 2005 2006 pour retrouver une situation comme celle d'aujourd'hui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et le chômage qui augmente de 0,1 % en décembre...
MICHEL SAPIN
Oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce qu'il ne va pas dépasser les 10 % et avec des conséquences politiques ?
MICHEL SAPIN
Quand il a baissé de 0,3 % le trimestre dernier j'ai peu entendu de commentaires, il augmente aujourd'hui de 0,1, j'entends beaucoup de commentaires, mais c'est parce qu'on a cette vision peut-être que c'est dommage pour la France mais on a cette vision un peu pessimiste. Donc le chômage aujourd'hui et je sais que... à chaque fois que je dis ça, je me dis : « les gens ne veulent pas l'entendre », mais c'est la vérité - et tant mieux pour la France - le chômage baisse...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On va dire que vous vous embobinez encore ?
MICHEL SAPIN
Oui, mais le chômage baisse, c'est clair...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le brouillard de SAPIN ?
MICHEL SAPIN
Le chômage baisse, il ne baisse pas suffisamment, il ne baisse pas pour tout le monde, il faut continuer, il faut amplifier, mais le chômage baisse en France parce qu'on a retrouvé de la croissance, parce qu'on a des politiques de compétitivité pour nos entreprises, parce qu'on a mené des politiques d'encouragement à la prise de décision des entreprises en faveur des créations d'emploi.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Essayez avec ça de mobiliser les socialistes ! Autre question...
MICHEL SAPIN
Mais il vaut mieux essayer d'avoir des résultats à peu près corrects plutôt que des résultats qu'avaient monsieur SARKOZY lorsqu'il est parti en 2012.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'administration fiscale a mis sept mois à éplucher, elle a lancé 560 contrôles fiscaux sur les Pan...
MICHEL SAPIN
Les Panama papers !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Panama Papers, c'est ce que je voulais dire pour terminer, quel retour, quel résultat vous en attendez ? Il y aura du gras, comme disait quelqu'un ?
MICHEL SAPIN
Oui le gras, il y a d'ailleurs un grand nombre de ceux qui ont pu être repérés par le biais des Panama papers je vous parle des personnes qui cherchaient à échapper au fisc - que nous connaissions et qui étaient déjà en train dêtre poursuivies ou qui avaient d'ailleurs d'eux-mêmes faits des déclarations pour régulariser leur situation. Juste un mot, la lutte contre la fraude fiscale, la lutte contre l'optimisation fiscale, c'est une des grandes réussites de ce quinquennat, une des grandes réussites, on a pris tous les moyens...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ca rapporté combien ?
MICHEL SAPIN
Les chiffres sont très simples, avant nous ça rapporté 16 milliards par an ce n'est déjà pas si mal aujourd'hui c'est 22 milliards, six milliards de différence entre les deux, ce n'est pas rien, je vous assure que ça permet d'économiser des impôts à d'autres.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et les 560, Michel SAPIN, les non rapportés ?
MICHEL SAPIN
Oui, je ne sais pas combien ils rapporteront, ça dépend des situations, mais évidemment ça fait des sous.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Une dernière remarque !
MICHEL SAPIN
Et c'est autant en moins d'impôts à payer.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Dans trois semaines, on va vite, dans trois semaines le 11 décembre la Chine doit en principe obtenir de Bruxelles le statut d'économie de marché, si c'est oui la France est inondée de produits chinois à bas prix et on casse nos industries, qu'est-ce que fait l'Etat français ?
MICHEL SAPIN
Non, c'est la commission qui prend ce genre de décision c'est normal...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais la position que vous...
MICHEL SAPIN
Et ça ne sera pas une affaire de oui ou non, la commission a fait des propositions pour mettre sur de nouvelles bases des relations avec la Chine - la Chine est un grand partenaire pour nous, un partenaire indispensable mais nous ne sommes pas des enfants de choeur, nous savons aussi qu'il peut y avoir des politiques qui sont des politiques de dumping qui consistent à vendre moins cher...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc, il y a des barrières ?
MICHEL SAPIN
Et, donc, il faut forcément se protéger contre les politiques de dumping, et c'est ce qui sera fait demain comme hier.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Merci Michel SAPIN.
THOMAS SOTTO
Merci Michel SAPIN, merci Jean-Pierre, on vous retrouve évidemment dimanche à 10 h pour « Le Grand rendez-vous I Télé Europe 1 Les Échos ».
source : Service d'information du Gouvernement, le 23 novembre 2016