Interview de M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement, à "France Info" le 4 janvier 2017, sur la préparation des primaires à gauche en vue de l'élection présidentielle 2017.

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Média : France Info

Texte intégral

FABIENNE SINTES
Bienvenue dans l'émission politique de Franceinfo. Bonjour Jean-Michel APHATIE, Gilles BORNSTEIN est là aussi avec Guy BIRENBAUM et notre invité ce matin est porte-parole du gouvernement et ministre de l'Agriculture.
JEAN-MICHEL APHATIE
Bonjour Stéphane LE FOLL.
STEPHANE LE FOLL
Bonjour.
JEAN-MICHEL APHATIE
Nous allons parler de l'élection présidentielle et donc de la primaire des socialistes qui va se dérouler dans trois semaines maintenant. Mais avant, c'est le porte-parole du gouvernement que nous allons interroger puisque la ministre de la Santé vient de décider de suspendre la commercialisation de l'Uvestérol D après la mort suspecte d'un nourrisson. Pourquoi cette décision a-t-elle été prise, Stéphane LE FOLL ?
STEPHANE LE FOLL
Elle a été prise parce que, vous l'avez dit, il y a eu la mort d'un nourrisson. D'après ce que je comprends de la décision qui est prise suite à un avis de l'ANSES, ce n'est pas la vitamine D en soi, qui est là pour lutter contre le rachitisme, permettre de lutter aussi contre les problèmes de croissance, donc qui était nécessaire, c'est semble-t-il, et je reste extrêmement prudent, le mode d'administration qui est remis en cause et qui nécessite qu'il y ait une précaution immédiate qui soit prise.
JEAN-MICHEL APHATIE
Le mode d'administration est contesté depuis 2006, donc il était temps. Nous sommes en 2016.
STEPHANE LE FOLL
Vous vous rendez compte, quand vous posez cette question vous sous-entendez que sur un sujet comme celui-là, tous ceux qui ont pu administrer de la vitamine D depuis 2006 aient pris un risque à chaque fois qu'ils l'ont fait.
JEAN-MICHEL APHATIE
Peut-être.
STEPHANE LE FOLL
Et c'est pour ça qu'il y a eu cette mort de ce nourrisson malheureusement, et qu'il faut prendre des décisions pour corriger les choses. Mais s'il-vous-plaît, sur ce genre de sujet, je comprends.
JEAN-MICHEL APHATIE
On ne peut pas poser de questions ? C'est ça que vous voulez dire ?
STEPHANE LE FOLL
Si, mais la précaution qu'on prend aujourd'hui par rapport à ce qui s'est passé, on sait qu'il y avait potentiellement un risque et ç'a été dit par un médecin tout à l'heure, et en même temps la vitamine D est absolument nécessaire. Donc il faut prendre une décision de précaution, ç'a été rappelé tout de suite. La ministre de la Santé l'a prise et je pense que c'était absolument indispensable au vu de ce qui s'est passé.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et nous verrons. Ce n'est pas forcément une mise en cause du gouvernement actuel mais beaucoup de gens disent : « Pourquoi on a autant tardé à prendre cette décision ? » Nous verrons dans les jours prochains si ce débat est légitime ou pas ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, attendez monsieur APHATIE, c'est très important. Dans chaque médicament qui est administré, il y a à la fois ce qu'il apporte comme avantage et souvent il y a un risque. Et en fonction de ce qu'est l'avantage, le risque doit être minimisé au maximum. Il existe – le médecin l'a dit tout à l'heure – tous ceux qui utilisent la pipette savaient, et même il l'a rappelé : si vous prenez un Doliprane, vous pouvez l'avaler de travers, donc on a un risque. Et là, il y a un principe de précaution qui s'applique mais ne nous mettons pas tout de suite dans cette situation qui consiste à dire : « Et alors, pourquoi on a attendu si longtemps ? » Pourquoi ? Parce que ces médicaments sont aussi très utiles.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et donc en tout cas, la ministre de la Santé a décidé la suspension de la commercialisation de ce médicament. Nous parlons maintenant de politique.
GILLES BORNSTEIN
Vincent PEILLON et Manuel VALLS ont présenté hier leurs propositions. Comme vous n'avez pas encore fait votre choix, je suppose que vous y avez été très attentif. Qu'est-ce qui vous a marqué ? Qu'est-ce que vous en avez retenu ?
STEPHANE LE FOLL
J'ai été attentif comme tous ceux qui s'intéressent bien sûr à cette primaire et qui regardent les propositions et le débat qui va commencer et s'engager. Attentif à la fois aux lignes directrices qui sont celles qui sont proposées et puis au fait qu'il va y avoir quand même un débat sur un certain nombre de positions qui peuvent être différentes.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et alors, qu'est-ce que vous en avez retenu ?
STEPHANE LE FOLL
En tout cas, j'ai retenu une chose et je vous l'avais déjà dit d'ailleurs, je ne suis très clairement pas sur la ligne qui peut être incarnée par Arnaud MONTEBOURG ou Benoît HAMON parce que là, je trouve que ce seraient des lignes qui sont certes revendiquées depuis longtemps et qui ont été d'ailleurs beaucoup à l'origine de ce qu'on a appelé la fronde ou des frondeurs dans le débat pendant ce quinquennat.
GILLES BORNSTEIN
Il en reste donc deux.
STEPHANE LE FOLL
Il en reste deux. Sur ces sujets, moi je vais…
FABIENNE SINTES
Techniquement un peu plus.
STEPHANE LE FOLL
Vincent PEILLON et Manuel VALLS et puis Sylvia PINEL, Jean-Luc BENHAMIAS et François de RUGY. Il en reste donc cinq. Je regarde tout ça.
JEAN-MICHEL APHATIE
Non mais hier matin, la présentation des deux programmes, ça vous a créé une émotion particulière ? Il s'est passé quelque chose hier matin.
STEPHANE LE FOLL
Non, ça ne m'a pas créé une émotion particulière. J'ai vu que le débat était pour le coup engagé et que ça allait aller vite puisque d'abord cette campagne est sur une durée qui est extrêmement courte. Je vois bien que, pour ceux qui n'avaient pas encore présenté leur projet, il fallait le faire rapidement. D'ailleurs, ça va se succéder toute la semaine. Moi, je vais répondre à la question qui m'a été posée : pourquoi vous n'avez pas fait de choix et quel est votre choix ? Je ne ferai pas de choix.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous posez les questions tout seul maintenant !
STEPHANE LE FOLL
Oui, parce que je veux l'anticiper et je vais éviter d'avoir comme ça quatre fois la même question. Je ne ferai donc pas de choix jusqu'au premier tour.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous ne ferez pas de choix jusqu'au premier tour ?
STEPHANE LE FOLL
Voilà.
FABIENNE SINTES
Pardon. Vous ne voterez pas au premier tour ?
STEPHANE LE FOLL
J'anticipe justement parce que je sentais que ce matin j'étais invité et qu'il fallait que je réponde. Donc, je ne fais pas de choix. Je vais être en capacité aussi de pouvoir être utile au rassemblement. Je pense que je choisisse ou pas n'apportera pas quelque chose de plus à celui ou à celle qui se présentent aujourd'hui. La primaire doit être un enjeu de clarification et doit être capable de créer une dynamique politique, et il faut qu'on soit aussi en capacité de se rassembler.
FABIENNE SINTES
Je n'ai pas bien compris. Vous votez au premier tour ou vous ne votez pas au premier tour ?
STEPHANE LE FOLL
Attendez, je vote au premier tour et je vote au deuxième tour.
FABIENNE SINTES
Vous ne savez pas pour qui mais vous choisirez au premier tour.
JEAN-MICHEL APHATIE
Ça veut dire que vous ne direz pas publiquement pour qui vous allez voter au premier tour.
STEPHANE LE FOLL
Dites donc ! Vous avez répondu à la question que je me posais.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et si je peux me permettre, Stéphane LE FOLL, quel courage !
STEPHANE LE FOLL
« Quel courage » ? Ah bon ?
JEAN-MICHEL APHATIE
Quel courage de ne pas dire votre vote. Vous êtes quand même un homme public, un ministre. Quel courage !
STEPHANE LE FOLL
Jean-Michel APHATIE, le courage qui consisterait à laisser penser que c'est en donnant son avis qu'on est courageux, franchement… Si on veut regarder l'histoire qui est la mienne, pour ce qui est du courage je crois que j'en ai eu beaucoup.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais ce n'est pas courageux de ne pas dire pour qui on vote quand on est un homme public.
STEPHANE LE FOLL
Pourquoi ? C'est parce que je pense qu'aujourd'hui l'enjeu après le début de cette campagne que je vois bien commencer, ça va être de se rassembler, et il devra y avoir des personnalités politiques qui seront là pour rappeler à tout le monde que l'essentiel c'est le rassemblement. Je compte bien être là au moment où ça sera nécessaire. Oui, je serai de toute façon et je l'ai dit, courageux mais au bon moment.
FABIENNE SINTES
Donc ça veut dire que vous savez pour qui vous allez voter mais vous ne le dites pas. Vous n'ignorez pas pour qui vous allez voter au moment où on se parle.
STEPHANE LE FOLL
Mais vous savez que ça arrive. Il y a des gens qui aujourd'hui sont sûrement en train d'écouter et qui doivent d'abord peut-être douter sur leur vote, et peut-être savoir ce qu'ils vont voter mais qui ne le disent pas. Et je préfère ne pas le dire et que de toute façon ce débat ait lieu, et de me mettre dans une position où, quand il va falloir se rassembler, il y aura besoin de personnalités qui seront là pour le rappeler. Et je serai là pour le rappeler : le rassemblement est l'enjeu essentiel après la primaire comme au premier tour de la présidentielle. […]
FABIENNE SINTES
C'est Stéphane LE FOLL qui est l'invité politique de France Info ce matin, question Gilles BORNSTEIN.
GILLES BORNSTEIN
Dans sa conférence de presse hier Manuel VALLS a fait une proposition qui est de revenir sur la défiscalisation des heures supplémentaires, on l'écoute.
MANUEL VALLS
Je veux une société du travail, qui reconnaît les efforts de chacun à leur juste valeur. Nous rétablirons la défiscalisation des heures supplémentaires.
GILLES BORNSTEIN
Alors deux questions, est-ce que vous êtes d'accord avec cette proposition, et si oui, c'est quand même un aveu de, c'est une critique de ce qu'a fait votre gouvernement, enfin celui de Jean-Marc AYRAULT en l'occurrence.
STEPHANE LE FOLL
En tout cas je me souviens très bien des débats qui ont précédé à la prise de cette décision, elle n'a pas été prise par hasard. Cette décision a été prise avec l'analyse suivante. A un moment où on avait plus de 10 % de chômage, le fait de subventionner les heures supplémentaires, alors qu'on a des chômeurs, c'était de ne pas se donner les moyens de favoriser l'emploi, c'était ça la décision, c'était cette décision qui a été prise, et c'est pourquoi elle a été prise.
GUY BIRENBAUM
Ce n'était pas pour ennuyer Nicolas SARKOZY ?
STEPHANE LE FOLL
Ce n'était pas pour ennuyer Nicolas SARKOZY, d'ailleurs je crois que sur ce sujet, ensuite, il y a eu pas mal de discussions, c'était le fait de se dire, dans un moment où le chômage est en train d'augmenter, et il avait augmenté, et il a continué d'augmenter, subventionner à hauteur de 3,5 milliards les heures supplémentaires, c'était favoriser les heures supplémentaires plutôt que l'embauche, c'est ça qui a conduit à cette décision.
GUY BIRENBAUM
Et là, aujourd'hui ?
STEPHANE LE FOLL
Alors maintenant, de dire qu'on revient dessus, il faut bien réfléchir ! Il y a l'idée que, derrière, on est en train d'inverser une courbe du chômage, mais ça vient juste de commencer. A partir du moment où vous subventionnez les heures supplémentaires, vous favorisez plus l'heure supplémentaire, que l'embauche, c'est la seule question qui doit être posée.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc vous n'êtes pas d'accord avec Manuel VALLS ?
STEPHANE LE FOLL
Moi je trouve que sur ce sujet, je vous donne toute la réflexion qui avait été conduite.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais vous n'êtes pas d'accord avec Manuel VALLS, vous ne les remettriez pas si vous étiez, enfin vous ne souhaiteriez….
STEPHANE LE FOLL
Je ne suis pas candidat.
JEAN-MICHEL APHATIE
Non, mais ça ne vous paraît pas être une bonne idée ?
STEPHANE LE FOLL
Je vous ai dit pourquoi ça avait été décidé.
GILLES BORNSTEIN
Moi j'ai quand même le sentiment que vous ne voulez pas soutenir, j'en reviens à votre choix, ne pas soutenir celui qui a été votre Premier ministre depuis maintenant, je crois, 2,5 ans, je ne peux pas m'empêcher de penser que c'est quand même un signe de défiance, enfin de manque de confiance. C'était votre patron.
STEPHANE LE FOLL
Non, ce n'est pas un signe de défiance, Manuel VALLS est candidat, il y a une primaire qui s'engage, il y a un débat qui va s'organiser, chacun a vu les propositions hier. C'est un moment important, parce que de cette primaire on doit sortir avec une dynamique, et la dynamique elle est d'abord contre l'extrême droite et contre la droite.
JEAN-MICHEL APHATIE
C'est un manque d'enthousiasme quand même ! Vous pouvez appeler ça comme vous voulez, mais si les ministres ne soutiennent pas l'ancien Premier ministre, ce n'est pas terrible.
STEPHANE LE FOLL
Attendez, moi j'ai suffisamment soutenu tout le monde en tant que porte-parole du gouvernement, quelles que soient les situations, quelles qu'aient été les positions…
GUY BIRENBAUM
Même quand c'était difficile.
STEPHANE LE FOLL
Même quand c'était difficile Monsieur APHATIE.
JEAN-MICHEL APHATIE
Non, c'est monsieur BIRENBAUM.
STEPHANE LE FOLL
Donc là-dessus, s'il vous plaît, je ne veux pas avoir de leçon à recevoir, de quiconque, et je ne crois pas que j'en mérite. Donc aujourd'hui je me positionne, dans cette idée que, il y aura besoin, nécessairement d'un rassemblement après ce débat, et je serai là pour le rappeler. Et sur la question que vous m'avez posée, je vous ai dit ce qui s'était passé à l'époque, comment on a décidé…
GILLES BORNSTEIN
C'était à l'époque.
JEAN-MICHEL APHATIE
C'était à l'époque. François FILLON, de son côté, a fait sa rentrée hier soir…
STEPHANE LE FOLL
Oui, j'ai vu.
JEAN-MICHEL APHATIE
Au 20h00 de TF1. Vous connaissez bien François FILLON, c'est un voisin, vous êtes sarthois tous les deux. Nous écoutons François FILLON hier soir sur TF1.
FRANÇOIS FILLON
Je vais mettre en oeuvre le programme sur lequel je me suis engagé, et personne…
GILLES BOULEAU
Vous n'êtes pas frappé que de nombreux hommes politiques parlent de brutalité ?
FRANÇOIS FILLON
Personne ne m'en détournera. Pourquoi ? Pas par obstination, il n'y a rien de brutal dans ce programme, simplement parce que c'est le seul qui peut permettre le redressement national.
JEAN-MICHEL APHATIE
Est-ce qu'on peut dire de François FILLON qu'il est le favori de l'élection présidentielle aujourd'hui ?
STEPHANE LE FOLL
Moi ce qui me frappe c'est qu'après une primaire, qui a été réussie, qu'il a emportée de manière large, il y a un véritable doute, alors que normalement, quand je me souviens de celle de 2011, après la désignation de François HOLLANDE, on voyait bien que le match allait se jouer entre Nicolas SARKOZY et François HOLLANDE, et là il y a un doute, parce que le doute il est sur le programme. François FILLON dit qu'il va le mettre en place, son programme, et il souhaite qu'il y ait un débat sur le fond. Donc je vais prendre deux propositions qui sont faites dans son programme, pour bien montrer l'enjeu.
JEAN-MICHEL APHATIE
Rapidement.
STEPHANE LE FOLL
Rapidement. 500.000 suppressions de fonctionnaires, plus 100 milliards de réduction de la dépense publique, pour moi, de manière très simple, ça fera de la récession et donc plus de chômage, quoi qu'il en dise. Alors, après il put imaginer qu'après…
JEAN-MICHEL APHATIE
Une dépression.
STEPHANE LE FOLL
Une telle…
JEAN-MICHEL APHATIE
Purge.
STEPHANE LE FOLL
Purge, ou de telles mesures, on pourra redresser le pays, mais moi je le dis, 500.000 suppressions de postes, parce que c'est quand même ça, 500.000 suppressions de postes en 5 ans dans la fonction publique, plus 100 milliards de réduction de la dépense publique, c'est égal récession, ça c'est sûr.
JEAN-MICHEL APHATIE
Qui peut battre François FILLON selon vous ?
STEPHANE LE FOLL
Alors la question qui est posée, qui peut le battre ? c'est d'abord un programme qui va répondre aux enjeux des Français et qui sera un programme qui protège contre ce que propose François FILLON, et ce que propose aussi, bien sûr, je ne l'oublie jamais, Marine LE PEN. Donc, on est sur un modèle républicain, on est sur un enjeu européen, et on est sur la défense d'un modèle social français. Voilà ce qui doit être la ligne directrice pour le candidat de la gauche. Et, condition de la victoire, c'est le rassemblement.
GILLES BORNSTEIN
Ce n'est pas 500.000 postes plus 100 milliards, c'est 100 milliards de baisse de dépenses qui occasionnent…
STEPHANE LE FOLL
Bien sûr, c'est les deux, oui, mais en termes économiques, vous discuterez avec tous les économistes, 500.000 comme objectif, plus 100 milliards…
GILLES BORNSTEIN
Non, non, mais c'était pour être clair.
STEPHANE LE FOLL
100 milliards sur 5 ans ça veut dire que dès la première année c'est 20 milliards d'économie de dépenses publiques.
JEAN-MICHEL APHATIE
Dans la scène politique telle qu'elle est devant nous, on a l'impression que face à François FILLON, au fond, le candidat socialiste pèsera peu, des difficultés à se qualifier pour le second tour, est-ce qu'Emmanuel MACRON peut être un candidat susceptible d'accéder au second tour d'après vous ?
STEPHANE LE FOLL
Mais l'accession au second tour elle va être avec une équation assez simple. S'il y a trois blocs à gauche, la capacité à dépasser les 23, 24, 25 %...
JEAN-MICHEL APHATIE
Est nulle.
STEPHANE LE FOLL
Voilà.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais il y aura trois blocs à gauche, soyons réalistes.
STEPHANE LE FOLL
Mais je le dis, soyons réalistes…
JEAN-MICHEL APHATIE
Il y aura trois blocs à gauche.
STEPHANE LE FOLL
Donc il faut qu'on soit réaliste, en capacité de réussir une primaire pour qu'elle crée une dynamique, avec un rassemblement fort…
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous y croyez vraiment ?
STEPHANE LE FOLL
Pour pouvoir faire en sorte qu'on ne soit pas dans cette situation.
GILLES BORNSTEIN
Et si à la fin, enfin quelques jours avant le premier tour, la dynamique elle est chez MACRON, vous faites quoi ?
STEPHANE LE FOLL
Ecoutez, chaque étape d'un processus politique nécessite qu'on franchise les étapes les unes après les autres.
JEAN-MICHEL APHATIE
Certes.
GILLES BORNSTEIN
Ça je suis d'accord.
STEPHANE LE FOLL
C'est toujours pareil. Est-ce que vous savez que vous avez besoin d'anticiper ce qui pourrait se passer pour avoir des réponses qui permettent de faire des commentaires sur ce qui pourrait se passer ? Ce qui se passe c'est, on ne sait pas. On essaye de s'organiser pour faire en sorte que, ce que vous évoquez comme question, ne se passe pas, voilà, c'est tout.
GILLES BORNSTEIN
Et nous on est là…
STEPHANE LE FOLL
Et vous vous êtes là pour me dire mais si, mais si Monsieur LE FOLL, vous allez voir, ça va se passer.
GILLES BORNSTEIN
Comment va François HOLLANDE ?
STEPHANE LE FOLL
On me pose à chaque fois la question.
GUY BIRENBAUM
Pardon, désolé.
GILLES BORNSTEIN
Vous le connaissez mieux que nous !
GUY BIRENBAUM
Vous le connaissez bien.
STEPHANE LE FOLL
Voilà, je suis un fidèle…
JEAN-MICHEL APHATIE
Et puis c'est un souci d'humanité…
STEPHANE LE FOLL
Ça va bien. Moi je ne peux pas dire autre chose que, moi je l'ai vu, et qu'il va bien, mais ce n'est pas les sujet d'aujourd'hui.
GUY BIRENBAUM
Il ne regrette pas la décision qu'il a prise ?
STEPHANE LE FOLL
Il faudra lui poser la question, moi je n'ai pas…
GUY BIRENBAUM
Non, mais c'est à vous qu'on la pose là.
STEPHANE LE FOLL
Oui, mais écoutez, vous me posez des questions qui consistent à ce que je sois un interprète de ce que pense François HOLLANDE président de la République. Je comprends qu'à chaque fois on me dise, comme vous êtes très proche et que vous le connaissez très bien, voilà…
JEAN-MICHEL APHATIE
Comme vous ne répondez pas aux questions qui vous concernent, on vous pose des questions à propos des autres.
STEPHANE LE FOLL
Je réponds aux questions auxquelles je peux répondre, et auxquelles j'ai envie de répondre d'ailleurs aussi…
GUY BIRENBAUM
Oui, c'est plutôt ça à mon avis.
STEPHANE LE FOLL
C'est plutôt ça, oui, mais ça peut arriver.
GUY BIRENBAUM
Oui, c'est ça.
STEPHANE LE FOLL
Vous avez remarqué ?
GUY BIRENBAUM
Oui, on a compris.
FABIENNE SINTES
Mais il en reste encore des questions à poser, donc on verra bien ce qui se passe dans les 7 minutes qui viennent. […]
JEAN-MICHEL APHATIE
Le chantier naval de Saint-Nazaire STX est en passe d'être repris par l'armateur italien FINCANTIERI ; l'Etat est actionnaire à 33 % de ce chantier et le maire socialiste de Saint-Nazaire au micro de France Bleu Loire-Océan en appelle au gouvernement : « Ne permettez pas cette transaction ». On écoute David SAMZUN.
- Document France Bleu Loire-Océan :
DAVID SAMZUN, MAIRE DE SAINT-NAZAIRE
L'Etat français peut bloquer cette proposition. Il peut construire une proposition complémentaire. Il est encore temps, possible de la travailler et y compris l'Etat français peut peut-être intervenir un peu plus qu'il ne le fait aujourd'hui sur l'actionnariat et donc sur les aspects financiers. Il y a des outils pour ceci : DCNS, la Caisse des dépôts et consignations. Bref, aujourd'hui il ne faut rien exclure. Moi je considère que la partie n'est pas perdue.
JEAN-MICHEL APHATIE
L'Etat français peut bloquer la reprise du chantier par l'armateur italien FINCANTIERI. Le fera-t-il ?
GILLES BORNSTEIN
Ou nationaliser, c'est ce qu'il demande, c'est-à-dire prendre une part.
STEPHANE LE FOLL
Oui, j'ai bien entendu. Quel est l'enjeu ? C'est que ce chantier qui a des commandes qui sont largement remplies pour les cinq ou dix ans qui viennent, qui est un enjeu aussi de défense, qui est un enjeu aussi pour la construction de paquebots de grande taille, avec un problème : l'actionnaire coréen, qui était celui qui existait aujourd'hui, tombe dans la situation de défaillance, STX, catastrophique qui fait que…
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais le chantier en lui-même est rentable.
STEPHANE LE FOLL
Le chantier lui-même est rentable mais on est toujours sur le même sujet. C'est qu'un chantier rentable et une activité industrielle rentable nécessitent des financements pour pouvoir assurer son développement. Donc l'Etat va agir. Qu'est-ce qu'on veut ?
JEAN-MICHEL APHATIE
Qu'est-ce qu'il peut faire ?
STEPHANE LE FOLL
Mais c'est très simple. C'est qu'on a un chantier qui est un des plus performants au niveau mondial avec un savoir-faire qui nous met en position de compétitivité sur l'ensemble de la planète et sur des segments extrêmement précis, je l'ai dit, sur les grands paquebots de luxe et de croisière, et aussi…
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais il va agir comment l'Etat ?
FABIENNE SINTES
Et vous avez surtout 33 %. Est-ce que vous bloquez avec vos 33 % ?
STEPHANE LE FOLL
On est actionnaire donc l'Etat posera des conditions. Les conditions, c'est la pérennité de l'activité, la sécurisation des savoir-faire et la capacité de se projeter dans l'avenir.
GILLES BORNSTEIN
Ne faut-il pas être plus violent ? Donald TRUMP, qui n'est même pas encore président, vient de dissuader FORD d'investir au Mexique, laquelle FORD rapatrie une partie de l'investissement prévu dans le Michigan, aux Etats-Unis. Finalement, les menaces et le protectionnisme, on a l'impression que ça marche.
STEPHANE LE FOLL
Oui, mais ça c'est sur un sujet. Il faut regarder l'économie aujourd'hui de manière plus large.
GILLES BORNSTEIN
Oui, mais la question est importante.
STEPHANE LE FOLL
Vous prenez un exemple ; vous me dites : « Regardez, ça marche formidablement bien ». J'attends de savoir ensuite ce que seront aussi les conséquences de telle et telle décision sur les exportations américaines vers le Mexique. Moi, j'ai connu des sujets sur des moments de débat entre l'Europe et la Chine et les conséquences que ça pouvait avoir sur des exportations.
GILLES BORNSTEIN
En attendant, ça fait 700 emplois dans le Michigan.
STEPHANE LE FOLL
Oui, mais on peut tout à fait avoir des stratégies. Faut-il qu'elles soient globales. Vous pouvez avoir les 400 emplois sur FORD dans le Michigan et en perdre d'autres ailleurs : c'est le solde. C'est la capacité à avoir une économie de manière globale qui créée de l'emploi et qui se développe qui est intéressante et qui est importante. Ce n'est pas simplement un sujet pris au hasard, ou comme peut le penser par exemple Arnaud MONTEBOURG qui dit qu'il suffit de dire que 80 % des marchés publics doivent être réservés aux industriels français, et on aura réglé le problème de la mondialisation et de l'industrie française. Non, je suis désolé de le dire, c'est un peu plus compliqué que ça. Donc attention à ces sujets qui consistent à simplifier et sur un exemple. Il y a eu aussi des rapatriements de Chine vers la France d'entreprises. J'en ai vus et c'est tant mieux et il faut qu'on les encourage. Et il faut qu'on soit capable aussi d'avoir une politique commerciale au niveau européen qui arrête aussi de laisser penser que c'est uniquement en ouvrant les marchés qu'on va développer l'économie. Ce n'est pas vrai.
GILLES BORNSTEIN
Autre sujet : Cédric HERROU sera jugé cet après-midi à Nice pour avoir aidé des migrants en situation irrégulière. Selon vous, c'est un délinquant…
STEPHANE LE FOLL
Non !
GILLES BORNSTEIN
Ou quelqu'un qui a juste fait preuve d'un geste humain ?
JEAN-MICHEL APHATIE
Avant, on va l'écouter.
- Document Franceinfo :
CEDRIC HERROU, AGRICULTEUR
Moi, j'ai envie de demander au procureur qu'il m'explique concrètement ce que j'ai fait de mal vraiment. Moi, je veux bien être jugé mais j'ai envie aussi que les pouvoirs publics soient jugés aussi. Je préfère être enfermé, avoir la tête libre en prison que de vivre comme Monsieur Tout-le-monde en fermant les yeux, en mettant les oeillères. Moi les oeillères, je ne les mettrai pas en tout cas.
GILLES BORNSTEIN
Alors quelqu'un qui a fait un geste humain ou un délinquant ? Il est jugé aujourd'hui.
STEPHANE LE FOLL
On ne va pas résumer ça entre un délinquant ou c'est un geste humain. Il a fait un geste humain et un geste militant qu'il assume puisque, il le dit lui-même : « Je préfère vivre libre en assumant ». Mais un Etat a aussi une responsabilité. La responsabilité, c'est de faire respecter ce qu'est le droit d'asile et la capacité qu'on a à accueillir des migrants. Je rappellerai qu'il y a dans notre département de la Sarthe, les migrants qu'on a accueillis aujourd'hui et que j'ai été voir à plusieurs reprises pour voir comment ça se passe, la capacité qu'on a à les intégrer, à les insérer et à faire en sorte qu'ils aient cette capacité à trouver en France un vrai projet de vie. Et donc, un Etat qui prend ses responsabilités et qui ne peut pas laisser faire des choses qui ne sont pas conformes aux lois et aux règles qui s'appliquent ici en France. Donc le droit d'asile est un droit qui doit être absolument respecté. L'immigration irrégulière, si on considérait qu'à chaque fois que quelqu'un arrive et que de toute façon on a un devoir – c'est ce qu'il dit – de l'accueillir, à ce moment-là, on aurait de gros problèmes pour pouvoir le faire dans des conditions qui permettent justement que cet accueil débouche sur un projet de vie. C'est ça la différence.
JEAN-MICHEL APHATIE
Le procès de Cédric HERROU démarre cet après-midi.
STEPHANE LE FOLL
Le procès, c'est sur l'application des règles et de la loi. Je n'ai pas en tête exactement ce qui se passe. Il a une position militante que je respecte, je n'en fais pas un délinquant pour autant, mais il ne peut pas dire : « Je voudrais que l'Etat soit en procès ». Parce que le procès de l'Etat, c'est ce que je vous dis : l'Etat a une responsabilité pour tout le monde, pas que pour lui. Pour tout le monde.
FABIENNE SINTES
Une dernière question.
GUY BIRENBAUM
Serez-vous candidat aux législatives ?
STEPHANE LE FOLL
Il y a de fortes probabilités que je sois candidat aux législatives, oui.
JEAN-MICHEL APHATIE
D'accord. Donc ça, c'est au mois de juin. Donc vous serez candidat dans la Sarthe. J'ai une dernière question.
STEPHANE LE FOLL
Je vous signale que là aussi, je vais avoir quelques années. Je n'ai jamais bougé de la circonscription dans laquelle j'habite.
JEAN-MICHEL APHATIE
Alors que François FILLON a déménagé.
STEPHANE LE FOLL
Je n'ai jamais bougé depuis 56 ans – je ne devrais pas le dire – de la quatrième circonscription de la Sarthe.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous n'êtes pas élu depuis 56 ans.
STEPHANE LE FOLL
Pas 56 ans. J'ai été élu la première fois à 23 ans dans mon petit village à Longnes, canton de Loué, quatrième circonscription.
JEAN-MICHEL APHATIE
J'ai une dernière question : pour qui vous allez voter à la primaire des socialistes ?
STEPHANE LE FOLL
Très bonne question, Jean-Michel APHATIE. Bonne journée à vous, au revoir.
JEAN-MICHEL APHATIE
Merci d'être venu, Stéphane LE FOLL. Au revoir.
FABIENNE SINTES
On dirait que la boucle est bouclée.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 5 janvier 2017