Interview de M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'Etat au numérique, à France 2 le 16 juin 2017, sur la campagne du deuxième tour des élections législatives.

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Média : France 2

Texte intégral

JEFF WITTENBERG
Mounir MAHJOUBI, le secrétaire d'Etat chargé du Numérique, qui est aussi l'une des figures de La République En Marche, nous allons en particulier parler des élections législatives qui ont lieu après-demain. Bonjour Mounir MAHJOUBI...
MOUNIR MAHJOUBI
Bonjour.
JEFF WITTENBERG
53 % des Français s'apprêtent à s'abstenir si l'on en croit un sondage Odoxa rendu public ce matin par nos confrères de France info, c'est encore plus que les 51 % du premier tour, est-ce que la victoire annoncée de votre parti n'aura pas un goût amer si on a une telle abstention dimanche ?
MOUNIR MAHJOUBI
Il nous reste une journée, une journée de campagne c'est aujourd'hui, c'est eux qu'on doit suivre, c'est eux qu'on doit aller convaincre, il faut que les Français se convainc qu'il y a un choix à faire ce dimanche...
JEFF WITTENBERG
Un choix, mais plus vraiment d'enjeu, c'est peut-être ce qui donne l'impression – en tout cas la tentation - à un très grand nombre d'électeurs de rester chez eux ?
MOUNIR MAHJOUBI
C'est la conviction ! J'ai fait du porte-à-porte hier soir, j'étais sur le terrain encore, tous les militants de La République En Marche partout en France sont sur le terrain pour convaincre qu'il y a un enjeu, il y a un enjeu à donner cette majorité mais il y a un enjeu à faire un choix de société entre les différents projets qui sont proposés. Aujourd'hui voter La République En Marche c'est permettre l'action, c'est permettre le projet de transformation de la France qu'on propose et, donc, il ne faut absolument laisser aucun doute sur ce vote et, donc, c'est pour ça qu'il est essentiel qu'on arrive à mobiliser les Français qui ont ce doute. Parce que si les gens ne vont pas voter, c'est qu'il y a un questionnement, il y a un question sur la politique en général, il y a un questionnement sur le rôle, à quoi ça sert d'aller voter ? Eh bien c'est sûr ça qu'on essaie de les convaincre.
JEFF WITTENBERG
Mais est-ce que la victoire sera aussi belle, aussi légitime, si effectivement plus de 1 Français sur 2 ne vote pas dimanche ?
MOUNIR MAHJOUBI
Vous savez on se fiche qu'une victoire soit belle, ce qui est essential...
JEFF WITTENBERG
Légitime, légitime en tout cas.
MOUNIR MAHJOUBI
Légitime c'est plus important, la légitimité elle vient de ceux qui viennent voter, si on arrive en tête dimanche soir alors un signal aura été envoyé par les Français et nous aurons mandat de responsabilité pour les cinq ans à venir pour transformer la France.
JEFF WITTENBERG
Parmi ceux qui vont voter 32 % des électeurs ont voté pour La République En Marche dimanche dernier, dimanche prochain, après-demain, vous aurez sans doute, vous aurez peut-être 80 % des sièges au Parlement, est-ce démocratique, n'y a-t-il pas un besoin urgent de scrutin proportionnel en France aujourd'hui quand on voit cette amplification ?
MOUNIR MAHJOUBI
Ce qui est certain c'est qu'aujourd'hui les institutions telles qu'elles fonctionnent elles posent des questions, les Français se posent des questions, et c'est pour ça que pendant toute la campagne – et le président de la République l'a rappelé – on va les poser aux Français ces questions et donc là...
JEFF WITTENBERG
Proportionnelle ou pas proportionnelle pour les prochaines Législatives ?
MOUNIR MAHJOUBI
Je vous le dis, la volonté qu'on a eue pendant cette campagne – et c'est ce qu'on va demander aux Français d'abord – on va discuter, on va échanger et puis on va demander à ce Parlement de travailler sur le sujet. Nous on aimerait introduire une dose de proportionnelle, parce qu'effectivement on pense que ce serait intéressant que dans les assemblées : 1) déjà qu'il y ait un peu moins d'élus, que ces élus aient plus de responsabilités, plus de moyens, plus de moyens d'action, plus de moyens de surveillance et, en échange, on introduit cette dose de proportionnelle
JEFF WITTENBERG
Une dose, par exemple est-il normal que le Front national qui à travers Marine LE PEN a réalisé 21 % des voix à l'élection présidentielle ne dispose dans la prochaine Assemblée que de trois ou quatre députés comme l'annoncent les projections ?
MOUNIR MAHJOUBI
C'est ce que je viens de vous dire, en introduisant une dose de proportionnelle les parties qui front des scores à hauteur de ce que vous venez de décrire auront plus de représentants et ce sera plus juste mais surtout ça permettra un débat plus profond, c'est-à-dire que l'enjeu c'est de ne pas empêcher – parce qu'on a vu dans différents régimes étrangers et on l'a vu dans l'histoire française – quand on n'a pas une capacité à faire majorité, quand on n'a pas une capacité à agir, on ne peut pas transformer, c'est pour ça qu'on a voulu ce système qui crée une sur-majorité pour le parti arrivé en tête.
JEFF WITTENBERG
Mais qui aujourd'hui apporte un déficit de démocratie puisque beaucoup ne seront pas représentés, vous l'admettez. Est-ce que demain, lorsque l'Assemblée sera composée de novices essentiellement qui devront toute la carrière et toute leur élection en tout cas au chef de l'Etat on n'aura pas ce que beaucoup redoute c'est-à-dire une Assemblée de godillots qui ne discutera pas, qui ne s'opposera jamais à ce que propose le gouvernement ?
MOUNIR MAHJOUBI
Ecoutez, pour avoir rencontré beaucoup d'entre eux, moi je vous demande à vous autoriser vous-même d'être surpris dans les prochains jours et les prochaines semaines...
JEFF WITTENBERG
C'est-à-dire, à quoi va-r-on assister ?
MOUNIR MAHJOUBI
Vous allez voir une Assemblée qui va changer de façon de travailler, vous allez voir des nouveaux visages, vous allez voir des nouvelles méthodes. Vous dites qu'ils sont débutants, mais ils ne sont pas débutants dans la vie, ils ont été...
JEFF WITTENBERG
Ils sont débutants en politique.
MOUNIR MAHJOUBI
Ils sont débutants en politique, mais vous savez – c'est qui est intéressant dans cette assemblée que j'espère on va former – on va avoir des gens qui ont été entrepreneurs, on va avoir des gens qui ont été salariés, on va avoir des gens qui ont été syndicalistes, on va avoir des gens qui sont engagés dans la vie... Vous allez voir ! Moi je n'ai absolument pas peur d'une Assemblée godillote, vous allez voir des gens qui vont parler, qui vont débattre, qui ne seront pas toujours d'accord, on va enfin remettre de la vie et on va enfin remettre du débat à l'Assemblée.
JEFF WITTENBERG
Vous pensez par exemple que la future Assemblée, composée de novices encore une fois, aura les moyens juridiques de discuter du projet de loi antiterroriste qui est critiqué de toute part, même le New York Times s'inquiète d'un abus de pouvoir d'Emmanuel MACRON – vous l'avez peut-être lu hier – en fait ce journal qui s'enthousiasmait de la victoire du président français dit aujourd'hui : « il n'aura aucun contrepouvoir ».
MOUNIR MAHJOUBI
Je vous assure, regardez ceux qui seront élus, ce contrepouvoir existera, le débat sera profond, le débat sera technique ; et on parle de novices, sur les questions de sécurité, sur les questions de terrorisme, on a proposé des candidats qui sont parmi les plus grands experts sur les sujets, donc on peut compter sur eux, on peut compter sur eux pour commenter...
JEFF WITTENBERG
Experts aussi sur le respect des libertés individuelles, comme le dénoncent certains, comme le dénonce la Ligue des droits de l'Homme, certains avocats qui s'inquiètent déjà des dérives auquel ce projet de loi pourraient aboutir ?
MOUNIR MAHJOUBI
Dont certains qui sont spécialistes de ces questions et je vous rappellerais que moi-même à titre personnel je suis un spécialiste de ces questions, donc je vous assure que dans cette Assemblée et dans ce gouvernement ces questions sont essentielles pour eux. Donc, le débat aura bien lieu et vraiment ce qui a fait La République En Marche, ce qui a fait le succès de notre démarche depuis un an, c'est ce dialogue, c'est cette écoute, c'est ce débat interne.
JEFF WITTENBERG
On parle rapidement de votre secteur, le numérique : « l'Etat doit devenir numérique » a dit Emmanuel MACRON hier en clôture du salon, enfin en clôture de sa visite au salon VIVATECH, qu'est-ce que ça veut dire, c'est une phrase lancée comme cela, concrètement elle signifie quoi ?
MOUNIR MAHJOUBI
Ce n'est pas une phrase lancée comme cela, j'ai eu l'occasion de présenter ma lettre de mission au conseil des ministres mercredi, ça veut dire un Etat qui est inclusif, qui va déployer Internet sur les territoires pour ceux qui ne l'ont pas et ça veut dire aussi un Etat qui se transforme lui-même et qui fait que d'ici cinq ans 100 % des procédures administratives seront numérisées, c'est-à-dire que d'un côté on n'exclut personne, on fait venir tout le monde au numérique et de l'autre on crée plus de services pour les Français avec un Etat qui est plus performant et qui crée plus de valeurs sociales pour chacun grâce au numérique.
JEFF WITTENBERG
Une dernière question, vous êtes en campagne, on a vu hier ce qui est arrivée à Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, sur le terrain vous observez vous aussi cette violence aujourd'hui dans les comportements de certains électeurs ?
MOUNIR MAHJOUBI
Je vois cette violence dans les comportements ! Il ne faut pas parler d'électeurs, je pense qu'il s'agit-là chez certains, chez certaines personnes qui ont été très déçues par l'élimination de certains partis et qui ont eu des attitudes vis-à-vis des candidats, des candidats qui incarnaient un renouveau, un sentiment de violence, une incapacité à débattre...
JEFF WITTENBERG
Il y a plus de violences que dans les précédents scrutins, vous trouvez ?
MOUNIR MAHJOUBI
Oui je trouve et l'un de nos enjeux c'est de pacifier tout ça, c'est de créer du rassemblement, c'est de réussir à réconcilier les Français avec l'idée de voter, avec l'idée de s'impliquer socialement et, ça, ça va être un de nos enjeux ces prochaines années.
JEFF WITTENBERG
Eh bien on vous a écouté, merci beaucoup Mounir MAHJOUBI.
MOUNIR MAHJOUBI
Merci.
JEFF WITTENBERG
C'est à vous William et très bonne journée.
WILLIAM LEYMERGIE
Merci beaucoup.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 juin 2017