Déclaration de M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville, sur la sécurité des professions de santé dans les zones sensibles, Paris le 11 juillet 2001.

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Circonstance : Clôture de la réunion de travail organisée au ministère de la ville sur le thème "la sécurité des professions de santé dans les zones sensibles" à Paris le 11 juillet 2001

Texte intégral

Mesdames et messieurs,
1. La représentante du Ministère de l'intérieur et Bernard Kouchner vous ont exposé leurs décisions.
Je vais conclure pour vous donner une vue complète de notre plan d'action.
J'ai entendu vos demandes, j'ai bien noté vos propositions. Ce dialogue était très nécessaire et je vous remercie de votre franchise.
2. Avant de vous dire ce que j'ai décidé, je voudrais vous donner mon point de vue selon trois angles complémentaires
Vous avez abordé plusieurs domaines qu'il faut distinguer:
la mission de service public des professions de santé
la permanence des soins et la démographie médicale
les agressions que vous avez subies.
Ces différents domaines, même si dans les faits ils se télescopent, ne doivent pas être traités tous ensemble.
En revanche, ils méritent tous de recevoir une réponse adaptée et proportionnée.
Ce qui est certain c'est que la réponse à l'insécurité ne relève pas que du seul acte policier et qu'elle doit être collective.
Cette réponse relève de trois responsabilités que je voudrais ici souligner :
Celle de l'Etat bien sûr et nous l'assumons comme vous pouvez le constater ;
Celle des élus et des collectivités locales dont on voit bien le rôle majeur joué dans les villes où ils exercent pleinement cette responsabilité. Vous en avez donné plusieurs exemples.
Enfin, et je tiens à le réaffirmer, votre sécurité dépend aussi de vous.
C'est l'organisation des professionnels médicaux entre eux, en relation avec les autres acteurs de la politique de la ville et les habitants, qui permettra de faciliter d'une part, l'accès aux soins des habitants et d'autre part, d'accroître leur sécurité dans l'exercice de leur profession.
3. Je vous propose le, plan d'action suivant sachant qu'il pourrait être l'objet, par la suite sur la base d'une discussion interministérielle de conventions territoriales d'application.
Je demande, en préalable, à la Délégation interministérielle à la ville d'organiser la suite de cette première réunion de travail par la mise en place d'un groupe de suivi qui devra réunir les principaux représentants des professions de santé.
En effet, cette sécurisation nécessite de travailler en continu et ne s arrête pas à une série de mesures prises une fois pour toutes. Il s'agit de s'inscrire dans la durée, de poursuivre la réflexion et d'entretenir le dialogue, au plus près de vos préoccupations.
J'ai demandé en accord avec Bernard Kouchner au professeur Jacques Lebas d'en assurer la présidence. Je le remercie d'avoir accepté.
Nous devrons faire un état des lieux précis pour identifier les territoires désertés par les professionnels médicaux. Dans cette perspective, des géographes, la Direction des recherches et des études statistiques et la CNAM seront mobilisés.
Je demande au groupe de travail de bien vouloir se constituer rapidement et de me rendre compte de l'état d'avancées de ses travaux avant la fin de l'année.
4. Le partenariat est, certains d'entre vous l'ont souligné, une des stratégies les plus efficaces de prévenir la violence et il doit être renforcé en votre faveur.
D'abord, il convient de prévoir une meilleure participation des professionnels de santé aux différentes instances prévues à cet effet les conseils communaux de prévention de la délinquance, les contrats locaux de sécurité et le cas échéant les groupes locaux de traitement de la délinquance.
Avec Daniel Vaillant, nous avons demandé aux préfets (que, chaque fois que cela sera nécessaire dans un site en contrat de ville, la question de la sécurité des professionnels de la santé et notamment des libéraux, soit intégrée par le biais d'un avenant au coeur des CLS.
Le conseil de sécurité intérieure du 31/01/2001 a décidé pour l'année 2001 un doublement de l'effort financier de la politique de la ville, consenti en faveur des contrats locaux de sécurité des contrats de ville.
La circulaire interministérielle du 29 mars 2001 précise les conditions d'utilisation de ces crédits.
Mais nous sommes conscients que ce partenariat n'est pas aisé pour les professions libérales. Pour favoriser leur participation, nous avons prévu des financements en terme d'ingénierie de projets. Cela est tout à fait possible dans le cadre actuel, c'est pourquoi je demande qu'ils soient mobilisés pour élaborer les projets qui verront le jour à la suite de cette réunion.
Les professions libérales doivent par ailleurs bénéficier de l'aide aux victimes. A l'exemple du service d'aide aux victimes de Reims, financé dans le cadre du contrat de ville ce sont 156 structures le plus souvent associatives qui, sur le territoire, apportent notamment aux victimes d'infractions pénales, un soutien moral et psychologique et une aide leur permettant d'accéder à leurs droits tant sociaux que juridiques.
Pour l'accompagnement des médecins, notamment la nuit, à l'instar de ce qui se passe déjà de façon très positive avec les correspondants de nuit, il s'agit de développer largement les relations avec les dispositifs de médiation sociale déjà existantes.
Enfin, vos associations pourront bénéficier de l'aide d'adultes relais.
Le conseil de sécurité intérieure a décidé de réserver 4000 postes d'adultes-relais pour des actions développées dans le cadre des CLS et des volets prévention - sécurité des contrats de ville.
Je vous informe, par exemple, qu'une trentaine d'adultes relais en Ile-de-France, bénéficient en ce moment d'une formation en santé publique, financée conjointement par la politique de la ville et le ministère de la santé.
4. Ce plan d'action prend également la forme de moyens, qui seront attribués localement.
Il s'agit d'abord de la sécurisation des lieux de soins par le biais du Fonds de revitalisation économique.
Ce fonds a été créé pour soutenir le développement économique dans les quartiers de la politique de la ville.
Il a notamment comme objectif de compenser les charges exceptionnelles de certains commerçants ou des professions libérales exerçant leur activité dans les quartiers en difficulté et devant engager, à ce titre, des dépenses liées à la mauvaise qualité du bâti ou aux troubles répétés en matière d'insécurité.
Vous pouvez donc le mobiliser, si besoin est, pour une sécurisation de vos locaux ou pour des aménagements qui pourraient avoir des effets sécurisants.
Par ailleurs, je prépare une note d'orientation en direction des élus au sujet de l'implantation des pharmacies dans les quartiers.
J'entends par là ce que vous avez évoqué, c'est-à-dire qu'il s agit d'éviter la désertification induite des quartiers par l'appel d'air que constituent les centres commerciaux et qu'on réfléchisse, par exemple, à une stratégie de type pharmacie mutualiste.
Les pharmaciens sont en effet des acteurs économiques indispensables qui contribuent à la vie " normale " des quartiers.
En guise de réponse immédiate pour les acteurs qui ont déjà construit des projets, je vais demander aux préfets de bien vouloir instruire leur dossier avant la rentrée prochaine et d'en suivre la progression, en cohérence avec les avancées du groupe de travail.
D'autre part, certains d'entre vous ont proposé la création de lieux de santé où pourraient se regrouper ceux qui le souhaitent, afin de faciliter, d'une part, l'accès à la prévention et aux soins pour les habitants, et, d'autre part, de donner aux professionnels de meilleures conditions de travail. La sécurité est aussi une affaire de réassurance.
C'est pourquoi, nous avons décidé de répondre favorablement à ces propositions et de permettre la création de lieux de type maison de santé ou maison médicale.
Je veux que vous soyez assuré de mon souci de travailler dans le respect de vos décisions locales et de la, demande originale de chaque porteur de projet.
Ce sera donc l'objet d'une mesure lors du prochain Comité interministériel des villes, à la mi-septembre. Lionel Jospin l'a lui même annoncé en clôture de la rencontre nationale des CLS le 25 juin dernier.
Les ateliers santé ville, qui se mettent en place progressivement et avec succès, pourront être les moteurs de cette politique.
En effet l'exemple de ceux qui les ont initiés ouvre la voie vers des solutions efficaces. La création de véritables réseaux de santé, mobilisés autour de ces ateliers, donne l'occasion de partager : partager les expériences professionnelles, partager le pouvoir sur la santé avec les habitants et partager des projets de santé communs qui ont des effets bénéfiques, et sur la santé de la population, et sur le climat général du quartier et de la ville.
Je vous remercie de votre patience et je suis persuadé que, en agissant ensemble et de façon simple, nous devrons améliorer sensiblement les conditions de votre exercice au quotidien, dont je répète qu'il nous importe au premier chef.
(source http://www.medsyn.fr, le 17 décembre 2001)