Interview de M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale à BFMTV le 28 août 2017, sur la rentrée scolaire et les effectifs d'élèves dans le primaire.

Prononcé le

Média : BFM TV

Texte intégral


JEAN-JACQUES BOURDIN
Jean-Michel BLANQUER, ministre de l'Éducation nationale, est notre invité ce matin, bonjour...
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Il parait, j'ai entendu dire, que la rentrée cette année – là je suis heureux de vous recevoir, vous faites votre rentrée sur RMC et BFM TV – la rentrée se fera en musique, c'est vrai ça ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, bien sûr, c'est une proposition que j'ai faite au mois de juin aux écoles, aux collèges et aux lycées, chacun le fait un peu comme il le souhaite si vous voulez, c'est un message que nous voulons donner pour la rentrée, c'est qu'aller à l'école c'est d'abord du bonheur, c'est d'abord de l'épanouissement ; et puis l'autre message c'est que la musique c'est extrêmement important, la culture en général...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc dans chaque école, le jour de la rentrée, il y aura de la musique, ou du chant ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ca ne sera pas exactement dans chaque école, tout ça est laissé à la liberté de chacun...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Donc certains y arriveront, d'autres pas, mais mon message était un message vis-à-vis de toutes les écoles, collèges et lycées, c'était un message de simplicité, c'est-à-dire que ça peut être quelques personnes qui chantent, ça peut être la chorale de l'année dernière qui vient, ça peut être une institution culturelle locale qui vient – puisque la ministre de la Culture Françoise NYSSEN a fait cela avec moi - donc par exemple vous aurez tel conservatoire qui viendra devant telle école, vous aurez la Garde républicaine devant quelques écoles à Paris, vous aurez le chanteur qui a gagné à The Voice – qui est un élève de lycée professionnel à Cannes – chantera devant son lycée; et puis surtout dans des milliers de cas vous verrez tout simplement les enfants de l'école, ceux de l'année de l'année qui ont grimpé d'une classe, chanter devant les nouveaux, c'est ce que j'ai vécu il y a 10 jours à l'île de La Réunion où je suis allé faire la rentrée scolaire qui commence avant et où ça s'est passé merveilleusement, -d'ailleurs la vidéo est sur le site du ministère pour ceux qui ont eux envie de voir - ça montre un moment de joie et ça montre que l'école c'est le langage, la musique c'est un des langages et le langage c'est la vie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien ! Jean-Michel BLANQUER, nous allons parler de cette rentrée, mais j'ai vu dans une interview – je crois que c'est à L'Obs ou dans Les Échos – que le budget de l'Éducation nationale allait augmenter en 2018 ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, le budget de l'Éducation nationale va augmenter et d'ailleurs c'est tout à fait cohérent puisque l'éducation a été définie comme un des grands chantiers du président – vous savez qu'on a beaucoup parlé de la Défense qui est effectivement aussi un budget qui a une attention particulière parce que c'était prioritaire...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui va augmenter.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Et l'Éducation nationale...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Combien ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je ne vais pas vous le dire aujourd'hui, parce que d'abord vous savez c'est une prérogative du Parlement, on a tendance à l'oublier...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, mais c'est vrai, non, non, mais.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Nous allons faire un projet de loi de finance qui ensuite passera...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais en pourcentage ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, mais ce que je peux vous dire c'est qu'on est en dessous de 50 milliards aujourd'hui, on va passer au-dessus...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Au-dessus de 50 milliards donc, au dessus de 50 milliards.
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est tout, mais je ne peux pas vous en dire plus parce que...
EAN-JACQUES BOURDINJ
Oui, mais au-dessus de 50 milliards c'est déjà une indication, c'est un budget énorme le budget de l'Éducation nationale...
JEAN-MICHEL BLANQUER
Le premier budget de la Nation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ca veut dire enseigner en plus ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bien sûr, surtout en réalité il y a des priorités à l'intérieur...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Enseignant ou personnel de l'Éducation nationale ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Tout à fait. Mais ce qui caractérise ce gouvernement si vous voulez c'est qu'on sait définir des priorités et l'Éducation nationale est une et, à l'intérieur de l'Education nationale, l'école primaire, on a dit clairement que l'école primaire était une priorité, il y a donc des créations de postes à cette rentrée, il y en aura à la rentrée suivante à l'école primaire, parce que...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Combien ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, c'est trop tôt, alors là c'est encore trop tôt pour le dire largement, mais enfin en fonction...
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'accord, mais moi j'aime bien vous savez...
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, non, mais à chaque jour dire les choses...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je comprends, oui, non, mais oui.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Mais si vous voulez ce qui est très important c'est qu'il ne s'agit pas de mettre des moyens pour mettre des moyens trop souvent les argumentaires politiques ont été dans le passé : « on va mettre des moyens, donc tout ira mieux » et ça n'est en général pas le cas, ce qu'il faut savoir une politique qualitative et au service de cette politique qualitative des moyens.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Intéressons-nous à l'école primaire, puisque... 12 élèves par classe en primaire, parfois 13 – 14, dans les Rep +, combien de classes cette année ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
2.500 classes sont concernées.
JEAN-JACQUES BOURDIN
2.500, vous confirmez 2.500 ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je confirme et vous vous souvenez que j'étais venu il y a trois mois...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, je me souviens...
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'était au tout début de l'arrivée du gouvernement et à cette époque j'ai dit : « nous allons accomplir la promesse du président de la République, c'est-à-dire diviser les classes de cours préparatoires par deux, il y avait du scepticisme...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous divisez comment, des classes ou alors on met des paravents, ou des cloisons mobiles dans les classes ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, non, non. Là aussi j'ai vu plusieurs fausses polémiques sur ce sujet, là le scepticisme se porte bien en porte en France. Mais nous sommes à la veille de la rentrée, je peux vous dire que 85 % des classes ont pu être dédoublées, autrement dit les communes ont très bien joué le jeu – je voudrais d'ailleurs remercier les maires qui ont parfaitement joué le jeu – et qui fait que, voilà, dans 85 % des cas en effet vous avez deux classes et pas un rideau ou un paravent, des classes, j'en ai visitées, et cela se passe bien ; et pour le 15 % restant, vous avez tout simplement deux maîtres dans la classe et, donc, comme cela ça permet d'expérimenter des modalités...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà, vous avez des enseignants pour ça ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
On a les enseignants pour ça, donc on a fait le travail avec les communes – encore une fois je les remercie – et on a fait le travail nous-mêmes en ressources humaines pour avoir des professeurs expérimentés en cours préparatoires, ça faisait partie de la mesure puisqu'il ne s'agit pas seulement de diviser par deux, mais, comme c'est une politique qualitative, d'avoir des professeurs expérimentés avec une formation continue importante pour être au meilleur de ce que l'on peut faire en matière de transmission des savoirs fondamentaux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et si l'apprentissage n'est pas encore acquis, si la lecture par exemple n'est pas acquise à la fin du premier trimestre, je crois qu'il y a prise en main des élèves en difficulté ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, bien sûr, il y a...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le premier trimestre il y aura une évaluation en quelque sorte ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Tout à fait. C'est une logique générale que je souhaite pour l'ensemble de nos systèmes, si vous voulez c'est que...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, évaluer régulièrement ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bien sûr, vers fin novembre que ce soit dans le Second degré avec les conseils de classes ou dans le Premier degré, quand on commence à constater que des choses ne vont pas à la fin du premier trimestre c'est le moment où il faut déclencher les choses.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Evaluation de toute l'école primaire fin novembre, dans quelles classes ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ce qui est certain c'est qu'il y a une évaluation en début d'année pour voir quel est le niveau des enfants au moment où ils rentrent, vous savez quand on arrive au CP il y a déjà des différences, c'est pourquoi on doit beaucoup travailler sur l'école maternelle qui sera l'une de mes très grandes priorités en tant qu'école du langage pour que les enfants arrivent avec plus de vocabulaire possible, c'est en ayant beaucoup de vocabulaire qu'ils peuvent entrer mieux dans la lecture et l'écriture et, donc, il y a une évaluation de début d'année et puis en cours d'année comme ça se pratique déjà bien entendu, les professeurs peuvent très bien voir – a fortiori dans des classes à 12 – où en est l'élève, on n‘est pas obligés de formaliser cette évaluation à la fin du premier trimestre, mais la consigne générale si vous voulez c'est cette attention particulière aux élèves pour lesquels on constate des premiers retards qui commencent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les premiers retards, l'apprentissage de la lecture, vous prônez la méthode syllabique vous l'avez dit, pourquoi cette méthode syllabique, aujourd'hui il y a la méthode mixte pour l'apprentissage de la lecture bien souvent ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, oui. Là aussi vous me donnez l'occasion de développer puisque...
JEAN-JACQUES BOURDIN
De développer, oui.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Parce qu'il y a des choses parfois un peu manichéennes qui se disent, ce que je dis tout simplement c'est que d'abord il y avait la vieille querelle méthode syllabique, méthode globale, elle a été tranchée, donc entre guillemets n'en parlons plus puisqu'elle a été tranchée...
JEAN-JACQUES BOURDIN
N'en parlons plus.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Autrement dit elle a été tranchée en faveur de la méthode syllabique...
JEAN-JACQUES BOURDIN
La méthode syllabique, c'est le B.A BA ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est le B.A BA et les sciences cognitives ont montré que c'était cela qui marchait. Quand on a dit ça on a dit quelque chose d'important, mais on n'a pas tout dit, il n'y a pas que le B.A BA bien entendu, il y a la question de la compréhension – c'est d'ailleurs ce que je disais un peu précédemment – c'est-à-dire un élève doit à la fois déchiffrer mais en même temps comprendre le mot qu'il dit, si vous déchiffrez le mot pyjama il faut savoir ce que c'est, donc, plus vous avez un lexique large dans la tête quand vous arrivez au CP, plus vous réussissez. Donc, on ne doit jamais opposer le code et le sens. Ce qui est sûr c'est qu'il ne faut pas apprendre un mot par coeur globalement, il faut le déchiffrer et que ce soit associer à un sens, tous les pédagogues savent cela, donc il n'y a pas lieu de faire de polémique autour de cela, il y a lieu tout simplement d'avoir des outils pédagogiques, une formation initiale et une formation continue qui soient à la pointe de ce que l'on sait qu'il y a de meilleur en matière pédagogique, à l'échelle française comme à l‘échelle internationale, parce que ce que je dis ce sont des choses démontrées dans des études françaises et autres.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Jean-Michel BLANQUER, là on parlait de la lecture, parlons du calcul, des maths, vous dites : « prenons l'exemple de Singapour » mais que se passe-t-il à Singapour à propos des maths ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est un exemple, on pourrait en prendre d'autres, mais Singapour a eu la démarche que je souhaite avoir, c'est-à-dire une démarche scientifique, c'est-à-dire une démarche où on fait de la comparaison internationale, on regarde là où marche le mieux, on fait des tests, des expérimentations, et, en fonction de ça, on voit ce qui marche mieux, et Singapour débouche – pour dire vite – sur une pédagogie explicite, progressive et qui se voit dans leur méthode mathématique et cette méthode mathématique fait qu'aujourd'hui c'est que s'ils sont premiers...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quelle est cette méthode ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Vous le voulez bien quand vous regardez le manuel, c'est très long à expliquer là, mais si vous voulez en gros vous devez dire au début quel est le théorème que vous appliquez et puis ensuite vous faites progressivement des exercices qui vous font aller progressivement vers plus de complexité - après il faudrait rentrer dans bien des détails - mais j'ai donné l'exemple de Singapour, on pourrait en prendre d'autres, mon idée n'est pas d'importer stricto sensu ce que font les autres, il y a un génie français des maths comme il y a un génie français sur d'autres sujets, c'est sur cela que l'on doit s'appuyer, mais en s'enrichissant de ce qui marche partout. C'est cette démarche ouverte, cette démarche rationnelle aussi que je préconise, qui vaut pour l'enseignement des mathématiques comme le reste, bien entendu nous avons aujourd'hui... nos professeurs savent ce que je suis en train de dire, nos professeurs sont au fait de cela, ils ont besoin simplement d'entendre de ma part que l'institution va les soutenir dans leur capacité à mener ces pédagogies qui sont efficaces.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Vous me rectifiez si je dis des bêtises, le collège vous allez rétablir petit à petit les classes bilangues, le latin et le grec aussi, c'était une bêtise franchement, soyons francs ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je n‘utiliserais pas ce terme, mais c'était une erreur en tout cas, c'était une erreur avec un argumentaire faux puisque l‘argumentaire était de dire que ça créait de l'élitisme – je prépare exactement le contraire – c'est-à-dire que c'est précisément parce qu'on requalifie des établissements notamment en zones défavorisées, avec comme première idée la justice sociale, que c‘est en faisant cela dans les établissements que l'on crée de l'attractivité et que l'on tire tout le monde vers le haut et, donc, on a rétabli non pas progressivement mais totalement les classes bilangues en France aujourd'hui et on est en train de rétablir progressivement un plus grand enseignement du latin et du grec, c'est pour moi un sujet important.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le rythme scolaire, les rythmes scolaires, 4 jours ou 4,5 jours, les communes sont libres de choisir, c'est en quelque sorte l'école à la carte, les aides de l'Etat seront maintenues en 2018 ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Pour ceux qui sont à 4,5 jours oui...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, au même niveau ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Au même niveau, c'est-à-dire que le fait d'être à... la création de ce fonds de soutien avait été élaboré il y a quatre ans pour les communes qui passaient à 4,5 jours, donc l'existence de ce fonds de soutien est fondé sur ce principe, donc on continue pour tout simplement accompagner les communes, mais la raison d'être de cette politique c'est la même que l'ensemble des autres points que nous pouvons évoquer, c'est que ce que nous voulons c'est donner de la liberté, de la responsabilité au système, on ne peut pas donner des règles uniformes sur un sujet comme celui-là pour une grande ville et pour un petit village isolé ; et je le sais parce que je parle avec les professeurs, parce que je parle avec les maires, et je sais d'ailleurs à quel point cette mesure a reçu un grand assentiment - même si on entend souvent sur les ondes des gens dire le contraire - là cette mesure reçoit un grand assentiment parce que c'est une mesure de bon sens, c'est le bon sens qui est derrière cela, ce que nous voulons c'est l'intérêt de l'élève et l'intérêt de l'élève se conjugue différemment selon les contextes. Nous sortons d'une situation où ce qu'on a pu constater c'est parfois des activités périscolaires très réussies parce que c'était faisable, dans d'autres très ratées si je puis dire, et donc il est tout à fait normal d'essayer de viser une plus grande qualité de ces activités périscolaires et donc d'avoir du bon sens dans notre manière de gérer ce sujet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour équilibrer l'année scolaire de l'enfant, est-ce que vous allez revoir le calendrier scolaire ou est-ce que vous n'y toucherez pas ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
A court terme certainement pas mais à moyen terme c'est un sujet qu'on doit ouvrir dans sa globalité...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez ouvrir ce sujet ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ouvrir, oui, oui, une concertation très large.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ouvrir ce dossier ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je souhaite d'avoir une concertation très large sur...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous voulez ouvrir ce dossier ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
J'ouvre un dossier plus large que j'appelle l'espace et le temps de l'enfant au XXIème siècle. Nous avons des sujets de société aujourd'hui qui sont très importants, c'est les écrans, ce sont e temps de sommeil, ce sont ces sujets très concrets que les personnes qui nous écoutent connaissent très bien, ceci renvoie donc à un sujet que j'appellerais systémique, c'est-à-dire que tous ces sujets sont interdépendants les uns des autres et donc on ne peut pas parler du rythme hebdomadaire par exemple sans parler du rythme quotidien et du rythme annuel...
JEAN-JACQUES BOURDIN
On est d'accord.
JEAN-MICHEL BLANQUER
On ne peut pas parler de la question des rythmes sans parler de....
JEAN-JACQUES BOURDIN
Globalement...
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est une vision globale, et on doit le faire de façon...
JEAN-JACQUES BOURDIN
On ne peut pas parler de diminuer par exemple les vacances scolaires d'été sans parler des vacances intermédiaires ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Voilà, exactement, bien entendu.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui sont d'ailleurs les plus longues d'Europe, en France ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Exactement, sauf quand les additionne...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Trop longues, trop longues ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Quand on additionne tout c'est trop long sans doute oui bien sûr, mais si vous regardez...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais comment faire pour revenir sur...
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ça se discute, ça se discute, je ne prétends pas...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes prêt discuter de ça ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bien sûr, écoutez pourquoi, on est en démocratie, c'est normal de discuter.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, mais d'accord, non, non, je veux dire par là...
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ce que je veux c'est sortir du manichéisme. Regardez le sujet précédemment, on a le chic en France pour créer des clans autour de sujets artificiels, par exemple on est pour 4 jours ou pour 4,5 jours, on fait ça avec... alors que le sujet est beaucoup plus complexe, avec des relations avec d'autres facteurs, et il n'y a aucune raison de s'étriper sur ces questions alors même qu'elles sont des questions d'intérêt général sur lesquelles on doit trouver la meilleure solution de bon sens et, comme c'est complexe, ça nécessite du temps, de la discussion, donc il faut discuter, mais si vous prenez par exemple le cas des vacances de la Toussaint qui depuis quelques années durent deux semaines, personnellement ça m'a toujours semblé un peu long, d'autant plus que j'ai constaté que c'était un facteur de décrochage pour certains élèves au cours du premier trimestre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et après janvier les vacances de février, entre la rentrée de Noël et les vacances de février il n'y a parfois que cinq semaines de classe, Jean-Michel BLANQUER.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Parfois, autrefois. Donc, vous voyez que je ne vais pas arriver, du haut de mon chapeau : « c'est comme ceci c'est comme cela » ce sont des sujets...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous ouvrirez la concertation, vous ouvrirez le dossier.
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est un dossier encore une fois que j'ouvrirai de manière plus large...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quand est-ce que vous allez l'ouvrir ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je vais le faire au cours des prochains temps.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et c'est quoi les prochains temps, vous avez une notion du temps quand même ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, oui, dans les deux mois qui viennent ce sera fait.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dans les deux mois qui viennent vous ouvrez ce dossier ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui bien sûr, oui bien sûr, mais ouvrir ce n'est pas fermer, ouvrir c'est ouvrir.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, non, mais on est bien d'accord, vous ouvrez le débat autour de la durée des vacances.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Autour du temps et de l'espace de l'enfant au XXIème siècle.
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'accord. Revalorisation du traitement des enseignants ou pas ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
La revalorisation est évidemment un grand sujet très important, nous devons... la société française doit valoriser ses professeurs, nous sommes en période de prérentrée, mon message à la société française c'est : « respectons les professeurs et considérons la fonction du professeur comme la plus noble de la République et ayons ce respect », parmi ces éléments de respect il y a évidemment la question de la rémunération, il y a donc une revalorisation – qui est d'ailleurs en cours et qui doit donc se poursuivre - c'est un sujet de long terme puisque nous avons...
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est un sujet de long terme, d'autant plus qu'avec l'augmentation de la CSG – ça ne vous a pas échappé Jean-Michel BLANQUER – les enseignants vont perdre du pouvoir d'achat ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ils peuvent en gagner par d'autres aspects de ce qui va se passer, par exemple lorsque nous prenons la mesure devoirs faits qui va contribuer à aider les élèves à faire leurs devoirs dans les établissements nous payons des heures supplémentaires, donc je suis évidemment attentif à cette question du pouvoir d'achat. Mais je sais...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez compenser cette hausse de la CSG ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ce n'est certainement pas une annonce que je vais vous faire aujourd'hui, mais ce qui est certain c'est que...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais vous allez compenser ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, je n'ai pas dit que j'allais compenser.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas vous...
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, pas moi, mais ce que vous dites c'est un sujet...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais enfin le gouvernement.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Vous êtes en train d'aborder un sujet fonction publique-là beaucoup plus général...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui d'accord, mais enfin quand même ça concerne vos enseignants, Jean-Michel BLANQUER.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ce que je peux vous donner, comme sur le sujet précédemment, vous voyez bien qu'il y a des questions de long terme, des questions structurelles auxquelles on ne répond certainement pas d'un claquement de doigt, mais ce que je peux vous dire c'est un état d'esprit qui est évidemment une attention à la question du pouvoir d'achat des professeurs et donc c'est dans cette direction que j'agis et que je réfléchis.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les emplois aidés, les emplois aidés qui sont très utiles bien souvent dans les écoles, je crois que dans l'Éducation nationale il y a 23.000 emplois aidés de moins que l'année dernière, c'est ça ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, c'est beaucoup plus complexe que ça aussi. L'Education nationale a été définie comme une priorité dans la politique des contrats aidés et de nouveau...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, c'est ce que disait le Premier ministre jeudi.
JEAN-MICHEL BLANQUER
De nouveau nous sommes dans une situation où nous sommes devant un gouvernement courageux qui s'est faire des choix, je crois que c'est très important, plutôt que d'avoir raboté ou de mettre les choses sous le tapis, ce gouvernement décide des choses et décident des priorités.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On a raboté les APL !
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, non, ce n'est pas ça, le gouvernement décide de faire une nouvelle politique du logement, et une nouvelle politique de l'emploi, ce n'est pas raboter.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il fallait commencer par-là, franchement.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il y a plusieurs choses dans votre question. Premièrement, le gouvernement a eu à faire face à des urgences, et, il faut dire les choses comme elles sont, à cause du gouvernement précédent, par exemple parce qu'il y avait de la surconsommation de crédits au moment où nous sommes arrivés, donc il a dû faire courageusement des économies, et forcément ceci crée un peu d'impopularité. Il a fait des choix, c'est-à-dire il dit ce que la Cour des comptes dit depuis 10 ans, 20 ans, que vous-même vous relayez devant les hommes politiques quand vous les recevez, vous leur dites « pourquoi vous ne le faites pas ? », aujourd'hui ce gouvernement le fait, et quand il le fait, évidemment, maintenant on le critique. Mais il dit : « on a eu une politique de l'emploi jusqu'à récemment, qui était coûteuse et inefficace, et une politique de logement coûteuse et inefficace. Il faut avoir une véritable lutte contre les inégalités, une lutte pour la justice sociale, et ça passe par de nouvelles politiques. » On est dans une période de transition, et forcément il y a des choses difficiles, mais sur les contrats aidés, pour vous répondre, sur les contrats aidés, une priorité a été définie, l'Éducation nationale en l'occurrence en fait partie, et au sein de l'Éducation nationale les contrats aidés les plus importants c'était pour l'accueil des élèves en situation de handicap. Et donc, nous ne diminuons pas le nombre de contrats aidés pour les élèves en situation de handicap, il reste le même, 50.000, mais non seulement nous faisons ça, mais nous ajoutons 8000 emplois supplémentaires, qu'on appelle les AESH, c'est-à-dire des contrats à durée déterminée, qui s'ajoutent à 22.000 contrats de ce type qui existaient déjà, donc ça fait 30.000, ces 30.000 s'ajoutent aux 50.000 contrats aidés, ça fait donc 80.000 personnes qui vont pouvoir contribuer à accueillir les élèves en situation de handicap. Donc, une priorité a été définie, les contrats aidés n'ont pas diminué pour cette priorité, et nous avons fait ce que nous disons que nous allons faire, c'est-à-dire avoir des contrats plus robustes que des contrats aidés, c'est-à-dire des CDD, pour cela. Et donc, la situation est en progrès sur ce sujet, et je pense que c'est à souligner aussi, parce qu'il y a peu de voix qui soulignent les progrès dans notre monde.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est à vous de souligner les progrès Jean-Michel BLANQUER, vous le faites, c'est votre rôle. Pourquoi cette baisse de popularité d'Emmanuel MACRON selon vous ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Peut-être un peu pour les raisons que je viens d'indiquer, c'est-à-dire je pense que le courage, à court terme, n'a pas comme récompense une popularité immédiate, par contre à moyen et long terme on comprendra. Et puis moi je parle quand même avec beaucoup de gens, au-delà des sondages je sens bien que les Français ont envie que ce gouvernement réussisse, les Français comprennent qu'il y a du courage derrière les décisions qui sont prises, les Français comprennent que notre pays est regardé par le monde entier comme ayant indiqué un nouvel espoir, je rappelle qu'il y a un classement qui montre qu'on est passé autour de la 30e place en termes d'influence, à la première place dans un classement indépendant britannique, tout simplement parce que le monde entier sent qu'il se passe quelque chose de particulier en France. Et nous, Français, nous gâcherions cela parce que telle ou telle mesure nous semble ne pas correspondre à ce qu'il faudrait faire alors même que c'est ce qui était préconisé par tous ceux qui réfléchissent à ces sujets depuis longtemps ? Je pense que les problèmes sont pris à bras-le-corps, avec une équation politique nouvelle, avec beaucoup de bon sens, de pragmatisme, et aussi, vertu que je considère comme première, le courage.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Jean-Michel BLANQUER d'être venu nous voir ce matin.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 septembre 2017