Texte intégral
ROMAIN DESARBDRES
Le service sanitaire, une sorte de service militaire pour les étudiants futurs médecins ou futurs infirmiers. Ils vont faire de la prévention pendant leur période de formation. On en parle tout de suite avec Agnès BUZYN, ministre de la Santé et invitée de Jean-Pierre ELKABBACH sur Cnews.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Soyez la bienvenue, Agnès BUZYN. Bonjour.
AGNES BUZYN
Bonjour.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Merci d'être là. L'hiver, c'est l'hiver.
AGNES BUZYN
Oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais nous vivons la nuit et le jour le plus froid de tout l'hiver 2018. Le Grand plan ou le Plan grand froid est appliqué sur tout le territoire. Qu'est-ce qu'il donne comme résultat ?
AGNES BUZYN
Je dirais c'est toujours insuffisant puisque nous savons qu'il y a encore des gens dans la rue mais nous avons ouvert récemment six mille places supplémentaires dans l'ensemble du territoire. C'est plus de deux mille places récemment ouvertes à Paris, mille places supplémentaires encore ouvertes ce week-end à Paris.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est-à-dire qu'à l'échelle nationale, ça fait ?
AGNES BUZYN
Aujourd'hui au total, il y a cent cinquante mille places d'hébergement d'urgence auxquelles il faut rajouter six mille places d'hiver. Aujourd'hui, rien que pour ce week-end, mille places supplémentaires dans Paris de façon à accueillir les personnes qui resteraient encore à la rue. Moi si je peux demander un service aux Français, c'est d'appeler le 115 quand ils voient une personne à la rue parce qu'elle-même n'a pas forcément le réflexe d'appeler le 115. Et comme il y a maintenant des gymnases réquisitionnés, des nouveaux sites réquisitionnés par beaucoup de maires, il faut appeler le 115 car le 115 envoie des maraudes qui proposent à ces personnes à la rue
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et qui peuvent les sauver.
AGNES BUZYN
Absolument.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le problème, c'est de sauver des vies même si c'est insuffisant, et caetera.
AGNES BUZYN
Le problème c'est de sauver des vies.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et ça touche soixante-huit départements aujourd'hui.
AGNES BUZYN
Aujourd'hui effectivement c'est intolérable de voir dormir des gens dans la rue. Beaucoup de réquisitions ont été faites pour cette semaine, supplémentaires par rapport à tout ce que nous avions déjà fait et il faut impérativement orienter ces personnes via le 115.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Après ce grand froid va venir assez vite le printemps. Il faudra éviter aussi, je pense, la présence de sans-abri et aussi de migrants qui souffrent et qui resteraient dans les rues et qui occuperaient les rues, que ce soit au printemps ou à d'autres moments, d'autres saisons. C'est saisonnier, il y a l'hiver mais il paraît qu'ils sont beaucoup plus touchés encore pendant toutes les saisons.
AGNES BUZYN
Il y a cent cinquante mille places d'hébergement d'urgence, vous le savez, qui ont été mises en place avec un budget d'hébergement qui a augmenté par rapport à l'année dernière. Ça fait quinze mille places d'hébergement d'urgence supplémentaires par rapport à l'année dernière mais c'est sûr que face aujourd'hui au nombre de migrants, il est compliqué d'assurer à tout le monde une place. C'est la raison pour laquelle il y a aujourd'hui une loi sur l'immigration qui est prévue, qui vise à accélérer les procédures, à la fois accélérer les procédures pour les personnes qui demandent le droit d'asile et qui vont avoir des papiers chez nous parce qu'elles souffrent de discrimination ou qu'elles fuient un pays en guerre.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais qu'on mettra dehors beaucoup plus vite ceux qui n'auront pas les papiers.
AGNES BUZYN
Ceux qui sont là pour une immigration économique, nous ne pouvons pas recevoir tout le monde. L'idée, c'est d'accélérer les deux procédures.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Romain en a parlé il y a quelques instants : à Angers, vous avez lancé hier c'est dommage, personne n'en parle le service sanitaire pour près de cinquante mille étudiants de santé. D'abord, ce ne sont pas des volontaires, c'est obligatoire.
AGNES BUZYN
Ça sera dans le cadre de la formation de tous les étudiants en santé. Aujourd'hui, ça concerne médecins, infirmiers, chirurgiens-dentistes, pharmaciens, masseurs kinésithérapeutes et sages-femmes, donc six professions de santé et on va l'ouvrir à l'ensemble des professions d'ici 2019.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Alors dès la rentrée prochaine, ils vont intervenir dans les lycées et dans les collèges, j'ai vu, sur tout le territoire. Ce sont les messagers de la prévention d'Agnès BUZYN.
AGNES BUZYN
Ce seront les ambassadeurs.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ils ne sont pas en uniforme mais ils ont en blouse blanche.
AGNES BUZYN
Non, même pas. Surtout pas. Ils viennent justement pour parler à des jeunes et, via des jeux, faire de la prévention, une pédagogie ludique, des interventions qui correspondent aux attentes des jeunes dans les lycées. Ce ne sont pas des adultes ou des médecins ou des pharmaciens qui parlent à des jeunes, ce sont des jeunes qui parlent à des jeunes. Et les expériences que nous avons vues à Angers sont extraordinaires.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et vous leur avez donné quatre thèmes d'action, si j'ai bien vu : le tabac, l'alcool, la drogue, la vie sexuelle et la contraception. C'est-à-dire des activités qui coûtent cher à la collectivité.
AGNES BUZYN
Ce ne sont pas exactement ces quatre thèmes-là. C'est les addictions en général tabac, alcool et stupéfiants , la vie sexuelle et affective, l'alimentation et l'activité physique. Donc ce sont les quatre grands thèmes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Pour lutter contre l'obésité. Quatre grands thèmes, c'est à peu près ce que nous avons dit, et qui coûtent cher.
AGNES BUZYN
Qui coûtent extrêmement cher.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
J'ai vu que vous avez donné pour chacune de ces activités, le coût au total ça fait plus de soixante milliards.
AGNES BUZYN
Mais ce n'est pas seulement le coût. C'est qu'aujourd'hui mon objectif, c'est que les Français vivent longtemps en bonne santé. Aujourd'hui les Français vivent longtemps par rapport à d'autres pays mais pas du tout en bonne santé.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Durée du service sanitaire ?
AGNES BUZYN
Trois mois mais on peut imaginer trois mois à mi-temps ou six semaines à temps plein ou des semaines séparées dans le cursus. Ça sera intégré aux formations de tous les étudiants en santé.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'opération coûtera combien ?
AGNES BUZYN
Aujourd'hui, nous mettons sept millions d'euros, autour de sept millions d'euros pour les aider dans leurs déplacements, pour les accompagner. Il est hors de question que ça coûte de l'argent évidemment aux étudiants.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est-à-dire qu'ils ne sont pas rémunérés.
AGNES BUZYN
Alors quand ça fait partie de leur cursus au moment de stage rémunéré, ça sera rémunéré comme n'importe quel stage. Si ça intervient à un moment de stage non rémunéré, ça ne sera pas rémunéré. Ça fait partie des stages.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et ils sont suffisamment formés pour les missions que vous leur donnez ?
AGNES BUZYN
Dans les trois mois dédiés aux services sanitaires, il y a un temps de formation, un temps où ils montent un projet. On leur demande de travailler ensemble, donc ce sera pluridisciplinaire. Ce sera des infirmiers, des pharmaciens, des médecins ensemble qui iront monter un projet de prévention dans un lieu un lycée, un EHPAD, une entreprise - qui travailleront les outils pédagogiques avec des enseignants. Une fois qu'ils seront formés, ils iront faire de l'éducation à la santé et ils reviendront avec une évaluation de leur projet.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc ils iront un jour dans les maisons de retraite, les maisons de santé et les entreprises.
AGNES BUZYN
Oui. Ça peut être une demande d'une entreprise.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
En complément des professionnels.
AGNES BUZYN
Bien sûr. Ça ne remplace pas la médecine du travail ni les associations qui oeuvrent.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Si on peut rassurer. C'est votre priorité, la prévention. La prévention. Jeudi, c'est-à-dire après-demain, s'applique votre décision : le tabac va augmenter. Le paquet de cigarettes va augmenter d'un euro. Qu'est-ce que vous en attendez ?
AGNES BUZYN
Une prise conscience de ceux qui fument. Que ça représente un budget non négligeable et qu'à une période où tout le monde a envie d'augmenter son pouvoir d'achat, peut-être que cette somme-là peut être mise
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le paquet de cigarettes à huit euros ou huit euros dix.
AGNES BUZYN
Huit euros, je pense que ça commence à impacter considérablement un pouvoir d'achat. Il est important de savoir qu'à la fin de l'année, c'est plusieurs milliers d'euros qui sont mis dans des cigarettes et que peut-être qu'on peut faire mieux avec. Et puis, ça a un coût sociétal immense, vous le savez, soixante-dix-neuf mille morts par an, soixante-treize mille morts par an, un coût pour la Sécurité sociale de vingt milliards.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et puis le cancer ça va vite, le cancer du poumon lié au tabac.
AGNES BUZYN
Les cancers liés au tabac sont des cancers très violents, très graves, pour lesquels les progrès thérapeutiques n'ont pas été immenses. C'est vingt milliards d'euros de coûts pour la Sécurité sociale chaque année.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et des vies.
AGNES BUZYN
Et des vies et des familles brisées et donc
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Alors les prochaines hausses, parce qu'il y en aura d'autres pour le tabac ?
AGNES BUZYN
Chaque année, un euro de plus.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est-à-dire en 2020, dix euros.
AGNES BUZYN
Oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et vous ne pourriez pas faire un peu plus ?
AGNES BUZYN
Encore plus ? Vous savez, la ville de New York a passé le paquet de dix dollars à treize dollars. En un jour l'année dernière, ils ont décidé d'augmenter drastiquement.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous y allez par étape.
AGNES BUZYN
On a été un peu plus prudents.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Les taxes sur le tabac, j'ai compté, rapportent à l'Etat quatorze.
AGNES BUZYN
Oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est-à-dire la somme exacte qui est donnée à la SNCF chaque année.
AGNES BUZYN
Oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Eh bien voilà.
AGNES BUZYN
Je voudrais rajouter que tout l'argent qui va être issu de cette augmentation du prix du tabac ira à la prévention, dans un fonds de prévention. Il n'y a pas un euro de plus qui ira dans la poche de l'Etat aujourd'hui, c'est-à-dire que ça sera vraiment dédié à des actions sur le terrain.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
La prévention s'applique aussi à votre politique de santé et hôpitaux. Ils n'en peuvent plus, ils sont en grave déficit. Les patients eux-mêmes ont la double peine et les personnels craquent. Il est temps d'appliquer ce que vous voulez : votre système de rémunération que vous proposez basé sur la qualité. Système basé sur la qualité, plus sur les activités, les actes. Quand ? Quand vous le mettez en place ?
AGNES BUZYN
Alors, on gardera une tarification de l'hôpital en partie à l'activité. Cinquante pour cent de l'activité et cinquante pour cent sur d'autres critères, sur le service canon que rend l'hôpital.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est déjà je ne dis pas révolutionnaire, mais c'est déjà une réforme.
AGNES BUZYN
C'est une réforme de très grande importance. Aujourd'hui, je mets en place une mission au sein du ministère pour m'aider à pratiquement organiser cela pour que dès 2019, les hôpitaux commencent à avoir une tarification qui est issue d'autres critères que simplement l'activité. Le service rendu à la population, on pourrait imaginer le temps d'attente aux urgences par exemple, ça pourrait devenir un critère de rétribution.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc il faut les évaluer.
AGNES BUZYN
Il faut les évaluer sur la qualité du service rendu. Des hôpitaux travaillent extrêmement bien et ne sont pas rémunérés ou valorisés pour le service qu'ils rendent.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc les hôpitaux seront rémunérés en fonction de la qualité ou des critères de qualité.
AGNES BUZYN
De la pertinence de ce qu'ils font, de l'intelligence du service qu'ils rendent à la population. Je crois que c'est cela qu'attendent nos concitoyens.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et est-ce que vous allez accorder aux hôpitaux plus d'autonomie, de financement, de management ? Est-ce que vous allez libérer l'hôpital français ?
AGNES BUZYN
On va beaucoup travailler sur les ressources humaines. Nous avons des ressources humaines extraordinaires à l'hôpital, des gens extrêmement engagés
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qui ont besoin de sens.
AGNES BUZYN
Qui pour certains ont perdu l'espoir pour certains hôpitaux. Pas partout, il ne faut pas non plus faire une généralisation complète. Il y a des hôpitaux qui fonctionnent bien. Mais quand même, globalement, une certaine souffrance au travail des professionnels alors qu'on a un hôpital aujourd'hui extrêmement engagé vis-à-vis des malades, des gens qui adorent leur métier et il faut qu'on leur redonne l'espoir de bien faire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quel est le déficit aujourd'hui des hôpitaux ?
AGNES BUZYN
Juste pour terminer. Nous ouvrons une concertation aujourd'hui sur le management hospitalier, sur l'attractivité des carrières hospitalières. C'est une concertation qui s'ouvrira pour trois mois de façon à aller vers une feuille de route.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc vous allez vers cette réforme, vous la ferez.
AGNES BUZYN
Je suis venue pour ça, monsieur ELKABBACH.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Très bien. Le déficit de tous les hôpitaux publics, vous avez une idée du chiffre ?
AGNES BUZYN
Ça sera probablement autour d'un milliard, peut-être un peu plus qu'un milliard cette année de déficit. C'est la raison pour laquelle c'est une urgence que de réformer la tarification des hôpitaux.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Je peux prendre deux exemples ?
AGNES BUZYN
Allez-y.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'Assistance publique des hôpitaux de Marseille, vous l'avez constaté vous-mêmes puisque vous avez reçu tous les élus et les parlementaires à Paris, a six cent cinquante millions de déficit cumulé cette année, un milliard de dette. Est-ce que ça peut continuer comme ça ?
AGNES BUZYN
Alors l'hôpital de Marseille va être accompagné, c'est ce que j'ai dit aux élus. Aujourd'hui, il est prévu un grand plan d'investissement pour accompagner l'hôpital de Marseille pour se moderniser. C'est compliqué, ça va nécessiter également des restructurations, et c'est ce qui est en train d'être négocié avec les élus, mais l'Etat va investir et énormément d'argent pour la reconstruction.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le contribuable.
AGNES BUZYN
C'est pour bien soigner les gens.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'Assistance publique des Hôpitaux de Paris, l'AP-HP, est en déficit cette année. On dit autour au moins de deux cents millions cette année. Est-ce que ça peut continuer ?
AGNES BUZYN
Là aussi, je pense que l'Assistance Publique des Hôpitaux de Paris doit se restructurer. C'est un hôpital immense qui a de très nombreux sites.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'AP-HP, c'est douze groupes hospitaliers, c'est trente-neuf hôpitaux et j'ai compté, en regardant bien, une administration pléthorique. Deux cent cinquante directeurs dans le siège, huit mille cinq cents personnels administratifs et douze mille cinq cents médecins qui ne sont pas à plein temps. C'est-à-dire qu'il y a plus de personnel administratif que de médecins. Est-ce qu'on ne peut pas supprimer l'AP-HP ?
AGNES BUZYN
Certainement pas. D'abord, c'est un fleuron national, c'est connu à travers le monde. C'est une marque.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui, mais vous avez l'Agence régionale de la santé qui peut faire ce job. Coordonner, mutualiser, économiser et rendre efficace.
AGNES BUZYN
Alors d'abord, il faut peut-être relativiser un peu ce déficit, il est très important. Deux cents millions d'euros, c'est la première fois que l'AP-HP a un tel déficit mais c'est un budget habituel annuel de sept milliards d'euros, donc deux cents millions d'euros par rapport à un budget de sept milliards. Ça permet de relativiser.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
D'accord. Mais ils peuvent continuer Non, ils ne peuvent pas continuer à faire du déficit.
AGNES BUZYN
Après, il est demandé à l'AP-HP de penser les restructurations, y compris des suppressions de postes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il faut l'assouplir et la renouveler. Si on ne peut pas la supprimer, on peut l'assouplir et la renouveler.
AGNES BUZYN
Mais il faut la moderniser parce que c'est un hôpital extraordinaire qui est réputé à travers le monde, qui fait une médecine de pointe, où se font beaucoup de progrès médicaux et je crois qu'on en a besoin.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Nous appliquons ce que le président de la République appelle les Pactes de vérité, on se dit tout. Même ça, quand c'est désagréable. Prévention encore, santé droits des femmes. La lutte est engagée contre l'endométriose. J'ai découvert que c'est une maladie chronique - on en a parlé ici avec Julie GAYET - longtemps confidentielle mais qui concerne entre quinze et vingt pour cent de femmes en âge de procréer et qui coûte cher à la Sécurité sociale, neuf milliards. Qu'est-ce que vous en pensez ?
AGNES BUZYN
Aujourd'hui, les chiffres reconnus c'est plutôt une femme sur dix qui en souffre. Il y a aujourd'hui un plan d'accompagnement pour rendre mieux connue l'endométriose. Nous avons fait faire à la Haute autorité de santé l'année dernière - il se trouve que j'étais présidente de la Haute autorité de santé - une recommandation pour un diagnostic précoce et une prise en charge de l'endométriose qui a été publiée à la fin de l'année. Il y a des expérimentations en cours sur le territoire pour essayer d'améliorer les prises en charge, et si ces expérimentations dont on attend le rapport en mars montrent une efficacité, on le déploiera sur le territoire. Mon ministère a signé un accord, une convention avec l'association qui aide les femmes à mieux connaître l'endométriose de façon à les aider à
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Créée en 2015 et animée par Julie GAYET et la gynécologue Chrysoula ZACHAROPOULOS. A partir de lundi justement, il y a toute une semaine européenne sur l'endométriose pour la faire connaître et lutter contre l'ignorance.
AGNES BUZYN
Absolument.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce que vous avez reçu cette association ? Vous allez la recevoir ?
AGNES BUZYN
Pas encore mais j'ai beaucoup de demandes et je recevrai évidemment l'association. Je n'ai pas vu de demande récemment mais je les recevrai. Ce qui compte quand même, excusez-moi monsieur ELKABBACH, je vais bien recevoir les associations et, évidemment, c'est très important. Ce qui compte, c'est quand même l'action. Derrière, moi j'ai un partenariat avec cette association, j'ai vérifié où il en était, et notamment un partenariat pour réaliser une campagne d'information et nous le ferons.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous êtes d'accord ?
AGNES BUZYN
Oui, bien sûr.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc pour que dans les hôpitaux et cætera, comme Jean-Michel BLANQUER l'a accepté pour les écoles.
AGNES BUZYN
Il y a trois partenariats avec cette association : le ministère du Droit des femmes, le ministère de l'Education nationale pour éduquer les jeunes filles et le ministère de la Santé bien sûr qui organise tout ça.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous avez tellement de dossiers, je suis obligé d'aller vite. Le 15 mars, il y a une grève annoncée dans les EHPAD. Qu'est-ce que vous faites pour les personnes âgées et, en même temps, celles d'un grand âge ?
AGNES BUZYN
Alors aujourd'hui, vous avez raison, il y a deux sujets. Il y a un sujet aigu qui est celui des EHPAD sur lequel il y a une réforme de tarification qui fait grincer des dents, certains EHPAD, et sur lequel nous avons mis un médiateur pour mieux accompagner les EHPAD en difficulté et améliorer la qualité de vie des personnels. Nous souhaitons créer des postes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Des personnels et ceux qui sont là.
AGNES BUZYN
Nous créons énormément de postes aujourd'hui, notamment d'infirmières et d'aides-soignantes avec cent soixante millions d'euros qui sont dégagés pour créer des postes cette année. Et par ailleurs, il y a un sujet grand âge. Un million cinq cent mille personnes aujourd'hui de plus de quatre-vingt-cinq ans, cinq millions de personnes de plus de quatre-vingt-cinq ans en 2050 et donc j'ouvre aujourd'hui un grand
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Aujourd'hui ?
AGNES BUZYN
Aujourd'hui. Je commence à recevoir toutes les personnes, toutes les parties prenantes qui ont affaire aux personnes âgées pour réfléchir à la prise en charge de la dépendance, qui va être un sujet d'avenir. Je reçois ce soir les gériatres, je recevrai les associations évidemment. Et donc, tout un cycle de consultations s'ouvre à partir d'aujourd'hui. L'objectif, c'est qu'on arrive avec une feuille de route : comment allons-nous prendre en charge dans dix, quinze ou vingt ans les cinq millions de personnes de plus de quatre-vingt-cinq ans qu'il y aura sur le territoire ?
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'anticipation commence aujourd'hui.
AGNES BUZYN
Aujourd'hui parce qu'il faut nous préparer. Ça sera un sujet de société.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et il faut aller vite. J'ai noté que la révolution numérique galope. Un exemple, le dernier : AMAZON le géant, le monstre de la distribution, s'attaque aussi à la santé, heureusement aux Etats-Unis pour le moment. AMAZON commence à vendre du matériel médical pour les hôpitaux et des médicaments sans ordonnance ou des médicaments avec ordonnance. Comment échapper à ce rouleau compresseur ? Parce que quand ça commence aux Etats-Unis, ça arrive même avec son concurrent chinois ALIBABA. En France, on a vu tout ce qu'ils ont détruit dans l'e-commerce, dans la grande distribution.
AGNES BUZYN
Alors, il faut regarder secteur par secteur. Ça peut avoir un intérêt si ça entraîne une baisse des coûts d'un certain nombre de dispositifs ou de médicaments. Parce que ça sera autant de gagné pour les patients français qui peuvent avoir sur certains produits des reste-à-charge, donc ça peut être intéressant éventuellement d'avoir une concurrence. Après, il ne faut pas que la concurrence soit déloyale. Il ne faut pas déstructurer des filières donc il faudra regarder.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Bien sûr, mais il faut savoir qu'il y a cette menace.
AGNES BUZYN
Exactement.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Dernière remarque. Est-ce que vous allez réorganiser ou, j'ai envie de dire, réformer la géographie des hôpitaux ? Est-ce que vous allez faire en sorte qu'ils se regroupent pour être plus efficaces et meilleurs pour la santé publique ?
AGNES BUZYN
Aujourd'hui, ils sont déjà regroupés en groupement hospitalier de territoire. Il est hors de question de fermer les hôpitaux de proximité. Les Français en ont besoin, ils souffrent des déserts médicaux, il est hors de question de rajouter dans un désert médical la fermeture d'un accès de proximité. Mais par contre, on peut imaginer qu'ils s'organisent mieux entre eux. Pour organiser des filières de soins, un hôpital de proximité peut être un premier recours pour des maladies courantes et peut s'organiser pour adresser un certain nombre de pathologies plus graves dans un centre plus expérimenté et c'est cette organisation que je veux mettre en place.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Objectif : se regrouper.
AGNES BUZYN
Pas se regrouper géographiquement mais se coordonner. Aujourd'hui, les hôpitaux se font concurrence alors que nous avons besoin de tout le monde, nous avons besoin qu'ils s'organisent entre eux pour améliorer les filières de prise en charge maladie par maladie.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et le numérique facilitera les choses. Merci d'être venue.
AGNES BUZYN
Merci.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
J'espère que vous reviendrez.
AGNES BUZYN
Bien sûr.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il y a beaucoup de questions à vous poser. Demain, mon invité sera Guillaume PEPY, le patron de la SNCF.
Source : Service d'information du Gouvernement , le 1er mars 2018