Interview de M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale à CNews le 20 mars 2018, sur les fermetures de classes et la démographie rurale.

Prononcé le

Média : CNews

Texte intégral


JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est la fête de la langue française et des mots, soyez le très bienvenu avec nous, Jean-Michel BLANQUER, bonjour.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bonjour, merci.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quels mots, vous utilisez ce matin pour chômeur égal sanctions, contrôles, radiation ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Formation parce que je pense que c'est très important pour les chômeurs, c'est évidemment d'avoir des solutions à leur situation et ça passe notamment par la formation. Alors qu'il y ait quelques chômeurs qui fraudent, on sait très bien que ça existe et donc c'est normal qu'il y ait des contrôles, c'est d'une certaine façon, une façon de respecter tous ceux qui sont réellement chômeurs.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc vous dites chômeur, pas de travail, surveillé, c'est en même temps une double peine ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, non, si on n'a pas de travail et qu'on en cherche, on n'a aucun problème à avoir un contrôle, donc le sujet concerne une petite minorité. Tout le monde sait que cette minorité existe, donc c'est tout à fait normal que l'Etat soit rigoureux. Vous savez, c'est l'argent de tout le monde, qu'il s'agit de bien utiliser, donc il est normal en saine gestion de contrôler l'usage normal de l'argent fait pour aider les chômeurs.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et ce que veut dire chômeur, quelquefois fraudeur ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Parfois, enfin vous savez, quelques soient les catégories de la population que l'on regarde, il y a toujours une petite minorité qui peut poser problème, donc il faut savoir éviter les problèmes, il ne faut pas être naïf sur ces questions-là.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et c'est chez qui, chez les cadres qu'on trouve ces quelques fraudeurs ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ce n'est pas ma spécialité de savoir cela, c'est Muriel PENICAUD qui mène ce dossier, comme vous le savez.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc formation ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, formation bien sûr.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Peut-être emploi et puis il y a peut-être une équation que vous pourrez résoudre avec Cédric VILLANI, c'est-à-dire gouvernement, plus entreprises, plus croissance égaleraient emploi et moins de chômeurs.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Evidemment, bien sûr, la clé, elle est dans la nouvelle croissance qui se fait jour d'ailleurs, aujourd'hui vous avez de très nombreuses entreprises qui sont en train de redémarrer très fortement, d'ailleurs elles cherchent des personnes à employer, souvent elles ne les trouvent pas, parce qu'il n'y a pas des personnes qualifiées comme il le faudrait. C'est mon métier, ainsi que celui de Muriel PENICAUD que de réussir à ce que les personnes soient bien formées pour des emplois qui existent.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et pour la première fois, il y a la possibilité pour les chômeurs de se former et éventuellement ensuite de trouver…
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, bien sûr. Je vous donnerais un exemple parce que c'est parlant, j'étais en Charente-Maritime, il y a quelques jours dans un lycée qui se consacre aux métiers de la mer, il y a beaucoup d'embauches en ce moment, par exemple sur la maintenance des moteurs ou sur la fabrication nautique. C'est un métier, c'est un domaine dans lequel la France est forte. Eh bien vous aviez quelques chômeurs qui étaient là pour trois mois, dans un lycée professionnel, avec donc des jeunes, mais eux-mêmes en formation continue et grâce à ça, ils vont avoir un emploi dans trois mois.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quels mots vous diriez, Jean-Michel BLANQUER, aux Républicains, à la France insoumise, au Front national qui vous accusent vous aussi d'être un ministre de la Ville ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, c'est tout le contraire, je veux dire ma priorité, c'est justement le territoire et donc de réussir à ce qu'il y ait une véritable égalité sur cette question. Depuis que je suis arrivé, j'ai justement une concentration assez forte sur le sujet du rural.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous fermez des écoles et des classes.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non justement il y a, alors depuis des décennies, vous avez un problème démographique français, c'est l'exode rurale, c'est bien connu, ça ne remonte pas à hier et la rentrée qui vient, est une des rentrées où il y aura eu le moins de fermetures de classes en milieu rural. Simplement il y a une campagne qui a eu lieu pour essayer de déguiser la vérité d'une certaine façon, pour essayer de faire croire que nous nous consacrons aux villes, je tiens à dire que notre taux d'encadrement est beaucoup plus favorable en milieu rural qu'en milieu urbain.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce que vous avez créé des classes dans le milieu rural ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Vous savez quand on parle des fermetures de classes, il y a aussi des ouvertures, donc par exemple nous ouvrons des classes en milieu rural, quand il y a plus d'élèves ou même parfois pour prendre des mesures spécifiques. Il faut aussi distinguer fermetures de classes et fermetures d'école, lorsqu'il y a le risque d'une fermeture d'écoles, nous sommes extrêmement attentifs. Nous maintenons des écoles avec des petits effectifs dans des endroits isolés, parfois quand c'est fermé, c'est parce que la population et le maire le demandent pour réussir à avoir des masses critiques dans le village voisin. Donc c'est un sujet qui réclament du cousu main, c'est exactement ce que nous faisons en lien avec les maires, évidemment. Maintenant que l'on s'inquiète de la démographie en milieu rural, ça je le comprends très bien, c'est un sujet que l'on doit regarder d'en face.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
D'autant plus qu'on est en train de supprimer des commerces, l'hôpital, le tribunal, le train et si maintenant on ferme les écoles, comment revitaliser les campagnes ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Par l'école justement et c'est ce que nous sommes en train de faire, j'ai justement une stratégie de revitalisation des milieux ruraux, nous faisons ce qu'on appelle des contrats départementaux ruraux avec les départements pour nous entendre sur une vision pluriannuelle de ce qui se passe en matière d'école dans un département rural. Nous créons des postes à l'appui de ces contrats et puis nous devons avoir une vision complète de ce qui se passe sur un territoire. Bien sûr qu'il faut être extrêmement attentif au milieu rural, c'est exactement ce que je fais. On va par exemple dans quelques jours annoncer avec Jacques MEZARD, notre plan internat qui sera un plan pour justement revitaliser les internats en milieu rural, de façon à donner de la vie dans ces, dans les villages concernés, c'est vraiment quelque chose que j'ai chevillé au corps, donc ces accusations-là m'agace un peu, je le reconnais parce qu'elles tapent à côté.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous dites bien ce matin…
JEAN-MICHEL BLANQUER
Elles ne correspondent pas à la réalité, nous avons créé des postes, pour mener cette politique.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous dites bien ce matin, je ne favorise pas les banlieues ou les quartiers populaires au détriment du milieu rural, un. Et deuxièmement est-ce que le dédoublement des classes de 12 écoliers n'a pas eu des conséquences justement sur la fermeture de certaines classes ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, c'est faux, nous avons créé ces classes avec des moyens spécifiques et cela ne nous a pas empêché de créer d'autres postes pour justement nous préoccuper du sujet rural. Par ailleurs je tiens à signaler que ces classes de 12 que nous créons, elles sont parfois dans les petites villes, voire dans des grands villages.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ca touchera combien d'écoliers dans…
JEAN-MICHEL BLANQUER
Quand la mesure sera complète, c'est-à-dire dans un an, elle touchera 320.000 enfants par an, c'est-à-dire 60.000 d'une cohorte puisque c'est CP et CE1, c'est environ 15 à 20 % d'une génération. C'est une mesure fondamentale pour le futur de la société française parce qu'elle s'adresse aux élèves les plus en difficulté sur le plan social, ça signifie que dans les dans les temps à venir nous aurons mieux réussi l'entrée dans la lecture, l'écriture, le calcul de la part des enfants.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc votre mot sur ces accusations, c'est quoi, mensonge, erreur ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Mon mot, c'est qu'il y a un vrai problème et un faux problème. Le vrai problème, c'est la démographie rurale.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On l'a dit.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il faut le regarder en face et le regarder de manière sereine et de bonne foi, et avoir des stratégies pour rebondir. Et puis il y a un faux problème, on le voit bien, il y a des gens qui essayent de monter les gens les uns contre les autres en opposant le rural et l'urbain alors que bien entendu, nous devons être tous solidaires de la renaissance du milieu rural.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'unité du territoire. La langue, la langue française, il y a un hommage qui lui est rendu aujourd'hui, on devrait lui rendre l'hommage là aussi tous les jours, elle le mérite, elle est à la fois le lien et la séparation, elle est le reflet, elle est le miroir, elle est une énergie mais est-ce qu'elle est en danger ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il ne faut pas être sur la défensive, il faut être à l'offensive, la langue française est un trésor, magnifique, elle fait ce que nous sommes. Vous pensez ce que vous pensez, je pense ce que je pense, nous sommes une communauté parce que nous avons cette langue qui est absolument magnifique. Nous devons en être fier, c'est une des langues les plus importantes du monde, donc il ne faut pas se sentir sur la défensive, mais par contre il faut être actif, il faut être actif pour la faire vivre, parce que...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous dites qu'elle se porte bien, elle est la cinquième langue parlée du monde et avec Emmanuel MACRON, le président de la République, vous dites, il faut qu'elle arrive au troisième rang, mais elle a du boulot, alors ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, mais ça dépend, elle est le reflet de notre vitalité à nous les Français et à nous les francophones, donc nous devons être actifs sur le sujet de la langue, cela suppose de l'être dans l'un de l'éducation, dans le domaine culturel, dans le domaine du numérique et c'est exactement ce que nous sommes en train de commencer à faire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Alors l'horizon c est, elle est beaucoup parlé au Liban, au Proche-Orient, au Maghreb, en Afrique, quel est l'horizon nouveau ? Là aussi la Chine, l'Asie peut-être ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
D'abord les pays que vous venez de citer sont extrêmement importants et ils sont en plus très importants sur le plan démographique au cours des prochaines décennies, ils vont porter la langue française, ils la portent magnifiquement. Je rappelle d'ailleurs que la déléguée à la Francophonie nommée par le président, c'est Leila SLIMANI qui est d'origine marocaine, mais qui est française aussi et qui porte la francophonie, qui écrit d'une très belle plume. Nous avons de très nombreux écrivains francophones de par le monde.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc ça veut dire que vous développerez des lycées français, vous leur donnerez des moyens, est-ce que vous ne fermerez plus, ou fermerez moins les alliances françaises ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
L'objectif, c'est effectivement la vitalité de notre réseau d'alliances et de notre réseau de lycée, ça c'est un point très important, c'est aussi un trésor français, c'est aussi des nouvelles manières de faire pour nous étendre dans le monde, pour étendre l'influence de la France par sa langue dans le monde et ça, ça fait partie des sujets de travail actuellement.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais le Français quelquefois a rivalisé avec son concurrent qui est arrogant, qui est planétaire, l'Anglais.
JEAN-MICHEL BLANQUER
L'Anglais a un statut spécial, c'est un peu lingua Franca de notre temps, tout le monde la parle plus ou moins bien, elle est aussi parfois un peu abîmée malheureusement, parce que c'est une très belle langue à l'origine.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Parce qu'elle se parle dans les instances internationales, par les plus hauts personnages de l'Etat.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Telle qu'elle est parlée, ce qu'on appelle parfois le globish n'est pas très beau et si notre Français était transformé de la sorte, nous ne serions peut-être pas très heureux. Nous, nous avons une langue qui a sa force, qui a son histoire, mais surtout qui a un très grand avenir parce qu'elle dit, elle permet de dire des choses d'une manière bien particulière. Vous savez si notre pays, quelle que soit sa place en terme de nombre d'habitants dans le monde, réussit à avoir quand même le rang qui est le sien et qui est important, c'est évidemment d'abord et avant tout grâce à notre langue. Pourquoi nous avons des bons mathématiciens ? C'est parce que nous sommes structurés d'une certaine façon par notre langue, donc notre langue est absolument fondamentale et c'est pour ça d'ailleurs que la richesse de la langue et c'est pour ça que je tiens tant par exemple à la richesse du vocabulaire, à la qualité de la grammaire chez les petits, parce que c'est cela qui donne des atouts pour la vie dans nos manières de raisonner.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
D'où la dictée ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
D'où la dictée, d'où la grammaire de phrase, vous savez quand vous faites, sujet, verbe, complément, eh bien vous structurer quelque chose dans votre esprit. Quand vous apprenez des exceptions, vous comprenez quelque chose de la vie et donc cette… derrière la grammaire, il y a une leçon de vie et c'est là ce qu'il y a aussi de façon un peu implicite derrière les leçons de langues.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et la récitation, la lecture dans les classes, etc…
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais à l'ère, j'ai envie de dire, comment on dit les SMS, à l'ère des tweets, vous dites qu'il y a une chance pour donner le goût des mots et l'envie du mot ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui bien sûr parce qu'il y a d'abord, tous les formats sont possibles si vous voulez, par exemple j'incite beaucoup à ce que les enfants aient des lectures prolongées avec des livres et d'ailleurs nous faisons même de la distribution de livres et nous avons avec Françoise NYSSEN, une politique de bibliothèque. Donc il y a cette dimension-là.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ouverte plus longtemps, de plus en plus, plus tard.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Nous voulons aussi plus riche, plus ouverte…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ceux qui n'ont pas de livres, les enfants qui n'ont jamais même vu de livre chez eux parce que les parents ne lisent pas ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Eh bien justement, nous devons avoir des bibliothèques d'école de plus en plus riches, permettant l'emprunt, ce qui se passe souvent aujourd'hui mais doit se passer systématiquement. Nous devons aussi avoir parfois des distributions de livres à la fin de l'année, au mois de juin, nous distribuons de nouveau Les fables de La FONTAINE à tous les élèves de CM2 de France pour qu'ils puissent les lire à la maison. Donc c'est cette incitation à la lecture. Mais même le tweet, vous savez, ça incite à la concision, ça incite à écrire de manière synthétique, c'est un exercice intéressant. Vous pouvez par exemple faire ce qu'on appelle parfois une « tweetée », c'est-à-dire une dictée composée en tweet, ce qui oblige l'enfant à avoir une vision du format de sa phrase, ça peut être intéressant.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est-à-dire que c'est une bataille, une lutte quotidienne.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Qui doit prendre en compte la révolution numérique aussi puisqu'il y a évidemment toute une série d'enjeux derrière la révolution numérique en matière de langues.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le président de la République et vous serez probablement avec lui à l'Académie devant 300 jeunes lycéens etc, va proposer un grand plan pour le plurilinguisme, la francophonie, mais quelle francophonie ? L'ex francophonie coloniale, ringarde, j'ai envie de dire ou une plus ouverte, une plus vibrante et qui accueille tout ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
La francophonie, elle est par définition vibrante, elle est par définition vivante. Elle épouse le monde. Vous avez des pays qui n'appartiennent pas à l'histoire de France et qui pourtant font partie de la francophonie, parce qu'ils adhèrent à la Francophonie, parce qu'ils ont des minorités francophones, parce qu'ils voient l'intérêt d'appartenir à ce club de pays, qui sentent dans le français, une langue de vitalité.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il y a un moment formidable parce que la langue française peut dépasser et traverser les drames de notre histoire, en pleine guerre d'Algérie, je me souviens que le grand écrivain algérien Kateb YACINE, qui dénonçait sans arrêt la torture et le colonialisme, répétait la langue française, c'est mon butin de guerre. C'est mon butin de guerre et la langue française, elle est à moi.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Voilà, c'est un bien commun.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le Premier ministre a présenté, hier, vous étiez, je crois, aussi avec lui, un plan de 3 ans de lutte contre le racisme et l'antisémitisme, avec une priorité : Internet qui déverse en continu des tsunamis de haines. Il vous a demandé de diriger une équipe, vous voilà sélectionneur, une équipe nationale pour intervenir rapidement quand il y a des conflits. Il y en a à l'université, est-ce que vous pouvez confirmer ce matin qu'il y a de plus en plus de facultés en Ile-de-France et dans le Midi qui vivent sous l'emprise du communautarisme ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Alors là, vous faites référence aux universités qui ne sont pas dans mon champ de compétence, j'ai d'ailleurs déjà fort à faire avec les collèges et les lycées sur ces questions-là.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais vous pouvez le confirmez ou l'infirmez.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il est exact qu'il y a des coups de boutoir du communautarisme dans les établissements d'enseignement scolaires ou universitaires.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Des coups de butoir.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Qu'il y a des gens qui testent les choses. Vous avez, il ne faut pas être naïf, il y a des groupes qui cherchent à voir si la République est solide sur ses principes. C'est pour ça que j'ai monté le conseil des sages sur la laïcité à l'Education nationale, que nous avons maintenant des unités laïcité dans chaque rectorat pour intervenir chaque fois qu'il y a des atteintes à la laïcité.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et il y en a.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il y en a bien entendu.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ça se manifeste comment ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est des gens qui testent par exemple des tenues vestimentaires qui permettent d'afficher totalement sa religion, de façon à créer une sorte de pression, c'est le fait de refuser de serrer la main à une femme, c'est le fait de nier ce que dit le professeur de sciences de la vie et de la terre et ainsi de suite, donc si vous voulez, c'est toute une série de petits phénomènes…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il y a un salafisme militantique qui est en train de gagner peu à peu dans les universités ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je ne dis pas, là je vous parle même d'établissements scolaires, mais dans un lycée, ça peut arriver bien sûr et donc nous sommes en train justement d'arrêter cela et de poser les règles de manière extrêmement claire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est Gilles KEPEL qui dit ce matin dans Le Figaro, la promotion d'un corps de doctrine mêle le salafisme et les Frères musulmans parmi les étudiants et même certains enseignants.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Vous savez, j'ai beaucoup de respect pour Gilles KEPEL…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est assez grave.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bien sûr, mais vous savez, sur ces questions-là, il ne faut ni minimiser, ni exagérer, il faut dire les choses telles qu'elles sont, Gilles KEPEL…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous nommez les choses, donc vous le nommez…
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je nomme, j'ai une grande confiance dans le jugement de Gilles KEPEL, s'il dit ça c'est que c'est vrai. Maintenant, à nous de voir ce que nous faisons, il y a d'abord un : Nommer les problèmes, ne pas faire semblant qu'ils n'existent pas et c'est ce que je fais depuis que je suis arrivé, nous les nommons et nous arrivons maintenant à les circonscrire. Et puis ensuite nous agissions et donc c'est l'envoi de ces équipes qui, dans les établissements rétablissent la règle, quand c'est nécessaire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et même dans les associations sportives ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je sais que ça peut arriver mais là encore, ce n'est pas dans mon champ de compétences, mais on sait bien…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc vigilance.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bien sûr, il faut être… mais vous savez, je vous dirais la même chose que tout à l'heure, il ne faut pas être sur la défensive, il faut être à l'offensive, c'est-à-dire nous devons avoir une République sereine, qui affiche sa force sereine, capable d'afficher des principes très simples, qui sont les principes de la laïcité…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais c'est une bataille là aussi ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bien sûr c'est une bataille que nous allons gagner et c'est une bataille où nous avons des principes simples auxquels tout le monde peut adhérer, quelle que soit sa religion, qu'on en ait ou qu'on n'en ait pas parce que c'est simplement les principes qui permettent de vivre ensemble, de se respecter, de ne pas être soumis à un quelconque prosélytisme et d'avoir la France telle que nous l'aimons, c'est-à-dire cette France républicaine avec liberté, égalité, fraternité.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est important ce que vous dites ce matin avec nous sur CNEWS. Après-demain, jeudi, Jean-Michel BLANQUER, sont prévues des manifestations, des grèves des fonctionnaires aussi, est-ce qu'il y aura des écoles fermées ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il y aura probablement des écoles fermées puisque, quand il y a grève, il y a forcément certains endroits où cela touche toute l'école, parfois ce sera simplement des classes mais vous savez, nous nous sommes organisés pour qu'il puisse y avoir quand même un accueil des élèves, en lien avec les mairies.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
S'il n'y a pas les transports, comment on fait ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il va y avoir évidemment des difficultés certainement pour les familles, c'est pour ça que je ne suis pas, je n'encourage pas du tout, à ce qu'il y ait grève évidemment.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Après vont venir les 36 jours de grève étalés sur trois mois, organisés par les cheminots pour la réforme de la SNCF, les écoles seront sûrement perturbées, qu'est-ce que vous allez faire, que vous avez prévu déjà ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je pense que les écoles seront moins touchées que les transports, il n'y a pas de réforme scolaire contre laquelle, il y ait une grève actuellement.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il y a aura un absentéisme de profs.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il peut y avoir certains professeurs qui font grève parce que c'est un mouvement national sur ces sujets. Nous verrons bien quelle en est l'ampleur mais pour ce qui concerne les écoles, il y a ce qui se passe jeudi et puis je ne pense pas qu'il y ait d'autres perturbations par la suite.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui à la veille de la journée de la langue française, vous avez eu un séminaire du gouvernement, avec le professeur Edouard PHILIPPE, est-ce que vous avez changé par exemple vos lectures respectives ? Vous vous êtes demandé ce qu'il faut faire pour les trois mois, tient vous avez dit je lis ceci, j'ai vu tel film, ou non…
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il nous arrive d'échanger sur nos lectures ou ce que nous voyons, mais pour tout vous dire dans votre vie de ministre, on n'a pas beaucoup de loisirs.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous, vous ne lisez pas ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je lis le matin très tôt pour tout vous dire, voilà je me lève extrêmement tôt…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et donc en ce moment ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Le prix Goncourt « l'ordre du jour ».
JEAN-PIERRE ELKABBACH
« L'ordre du jour » qui est de ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Là, vous voyez, c'est une colle…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Parce que c'est du Goncourt.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, tout à fait.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais il y a les classiques, par exemple la sortie des Misérables chez …
JEAN-MICHEL BLANQUER
Les Misérables, je serais prêt à le relire quand j'aurai le temps.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Lire les 1.700 pages dans la pléiade. Un mot sur, qu'est-ce que je peux dire, la réforme du bac ou Parcoursup, la nouvelle méthode d'accès à l'université. Il y a de près de 900.000 inscrits, toutes les inquiétudes ne sont pas apaisées, est-ce que vous pouvez dire aux parents, même si c'est le travail aussi Madame VIDAL, que cette fois-ci il n'y aura pas la cacophonie, il y a des mots que je ne veux pas employer, la cacophonie de l'été dernier ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Si nous avons fait tout ça, si Frédérique VIDAL s'est engagée dans Parcoursup et avec toute mon aide, c'est évidemment parce qu'il y avait eu l'année dernière un véritable scandale. Vous le savez, ça reposait sur le tirage au sort, nous étions arrivés finalement au bout d'un système. Parcoursup est une réussite à ce stade puisque nous avons réussi sur un plan technique à créer cette nouvelle plateforme, nous avons réussi sur le plan organisationnel à faire l'information des élèves, à avoir quelque chose de plus humain pour les accompagner. Par exemple, j'ai nommé un deuxième professeur principal dans chaque lycée de France, dans chaque classe de Terminale de France pour accompagner les élèves dans leur choix. La semaine dernière les choses se sont finalement bien passées, tous les élèves sont inscrits aujourd'hui et maintenant nous arrivons dans une nouvelle phase d'attente des réponses.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc ce matin vous rassurez plutôt à la fois les écoliers, les étudiants et leurs familles. Et le Goncourt, c'est Eric VUILLARD.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Eric VUILLARD, c'est ça.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et je me souviens que c'est l'Anschluss, l'Autriche au moment de l'arrivée d'Adolf HITLER et puis de cette histoire qui n'en a pas terminé en tout cas pour l'Autriche et l'Europe centrale. Merci d'être venu avec nous pour cette journée.
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'était un plaisir.
Source ! Service d'information du Gouvernement, le 21 mars 2018