Texte intégral
Mesdames et messieurs les journalistes,
« La lecture du journal est la prière matinale de l'homme moderne ».
- Cette parole prophétique du philosophe Hegel, nous la connaissons tous.
- Pour autant, elle m'apparaît, en ce début d'année 2018, quelque peu dépassée.
Notre monde, ce n'est pas celui du manque d'informations, mais bien plutôt du trop-plein, ce monde où l'opinion concurrence la réflexion.
A force d'instantané, de faits invérifiés, voire invérifiables, les Français, plus que jamais, demandent, attendent votre travail de fond, gage de sérieux et de qualité.
Nous avons besoin de journalistes qui déchiffrent un monde sans cesse commenté, qui éclaircissent un monde de plus en plus complexe.
Surtout, vos recherches et vos analyses sont essentielles dès lors qu'elles traitent des préoccupations qui sont au coeur de la vie des Français : la santé et la solidarité.
1. C'est pourquoi je souhaite, tout d'abord, évoquer l'enjeu brûlant « des fausses informations ».
1.1. Le président de la République l'a rappelé lors de ses voeux : à l'heure où il est aussi facile de se prétendre journaliste, la bataille contre les fake news est essentielle.
D'aucuns adoptent une posture de défiance à l'égard des paroles expertes : qu'elles soient scientifiques, médicales ou politiques, elles sont malheureusement des proies faciles.
J'ai, bien entendu, en tête les polémiques et les fausses informations qui entourent l'extension vaccinale.
Votre parole, comme la mienne, ont été mises en doute sur les réseaux sociaux : les informations y circulent facilement, pour la bonne raison qu'elles ne souffrent d'aucune contradiction, voire aucune vérification.
Ces comportements sont d'autant plus regrettables, d'autant plus dangereux, qu'il en va de la santé de nos concitoyens, des plus fragiles, et de nos enfants.
1.2. Hélas, nous le savons, les théories du complot prospèrent dans notre pays, comme le montrent plusieurs études récentes.
Le succès des thèses complotistes s'accompagne d'une forte défiance vis-à-vis des médias, ainsi que des structures démocratiques.
Or, la santé publique est un terrain propice au développement de thèses encourageant une méfiance de nos concitoyens méfiance aussi forte, et le plus souvent infondée.
Le résultat, nous le connaissons : plus de la moitié des Français ont des doutes sur l'impartialité du ministère des solidarités et de la santé.
Nous le savons, les théories du complot ont besoin d'obscurité pour exister, pour briller. Aussi, plus que jamais, nos concitoyens ont besoin de vous, pour accéder :
- non seulement à la vérité des faits, à un discours rationnel,
- mais aussi pour se forger un jugement critique, qui fasse suite à un doute méthodique.
Ce que le journalisme apporte, ce sont non seulement des faits, mais aussi des connaissances, une information vérifiée et vérifiable.
Nous devons nous détacher de la pression de l'immédiat pour faire le choix de la recherche et de l'approfondissement.
Or, le temps est nécessaire à ce dur labeur : « le temps est père de la vérité » disait si justement François Rabelais.
C'est pourquoi la lutte contre la désinformation est un combat quotidien.
2. Sur ces mots, je vous présente mes meilleurs voeux pour 2018.
J'espère que cette nouvelle année répondra à vos aspirations.
L'année 2017 a été riche et intense pour le ministère des solidarités et de la santé. D'une façon générale, la lutte contre les inégalités, de toutes sortes, est au centre de notre action.
(i) Le plan d'accès aux soins propose de penser autrement nos territoires, en mettant en oeuvre des politiques pragmatiques et adaptées aux particularités locales.
(ii) Il y a eu aussi, bien sûr, la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS), votée à une large majorité.
(iii) En matière de prévention :
- La protection accrue de nos enfants, avec l'extension à 11 vaccins, a été une étape importante,
- tout comme l'augmentation du prix du paquet de cigarettes, progressivement amené à 10, qui s'accompagne d'une lutte accrue contre la contrebande et la traçabilité.
Nos politiques nationales de prévention, pour autant, ne se bornent pas à l'action de notre ministère.
Bien au contraire, elle a une portée interministérielle, et irrigue l'action gouvernementale pour une population en meilleure santé, que ce soit en matière :
- d'éducation,
- de travail,
- d'alimentation,
- ou d'environnement.
C'est pourquoi 2018 sera l'année d'un grand plan de santé publique, pour coordonner la cinquantaine de plans déjà existants.
(iv) Surtout, le dernier semestre aura été marqué par une volonté de transformation profonde de notre système de santé.
La stratégie nationale de santé (SNS) articule 4 priorités, forte des contributions des différents acteurs de notre système de santé.
Il revient maintenant aux régions de décliner cette stratégie, de donner de la lisibilité à nos plans de santé publique.
A cet égard, j'engagerai prochainement une réforme structurelle du financement de notre système de santé, afin de mieux garantir le financement de la prévention.
(v) 2017 aura aussi vu la mise en oeuvre d'une large concertation, pour élaborer le plan de lutte contre la pauvreté des jeunes et des enfants.
Nous aboutirons à un plan au plus près des besoins, qui sera présenté au 2ème trimestre 2018.
2017 aura vu également l'installation du Haut-Commissaire à la réforme des retraites,
- avec lequel je mènerai des travaux préparatoires à l'adoption d'un nouveau régime universel, de répartition, et équitable de retraite.
Mesdames et messieurs les journalistes,
J'ai pleinement confiance dans l'avenir de notre système de santé, ainsi que de notre modèle social, qui ont montré, et qui montreront, leurs formidables capacités d'adaptation aux nouvelles réalités de notre société.
J'aborde l'année 2018 avec un optimisme gardé :
- certes, je mesure le travail accompli, et je suis résolue à poursuivre les réformes.
- Pour autant, j'ai conscience des enjeux, des défis qui m'attendent, qui nous attendent.
Tous ces sujets, que je viens d'évoquer, m'engagent sur des travaux que je sais techniquement complexes, qui vont demander du temps, et de la pugnacité.
Pour mener à bien ces missions, j'ai toute confiance dans l'ensemble des acteurs de terrain : je saurai faire preuve d'écoute, de dialogue, mais aussi de décision.
Certaines de ces réformes ne seront pas tout de suite suivies d'effet. Ce n'est pas ma personne qui compte à mes yeux, mais l'exercice de mon ministère, le long-terme des réformes.
Je ne cherche pas, à tout prix, la popularité, ni la notoriété : mon seul voeu est de faire aboutir des réformes de fond, et pour certaines complexes.
C'est pourquoi les Français comptent sur vous,
- sur votre travail de pédagogie,
- pour donner du sens aux actions que j'engage, aux objectifs que je poursuis.
Je vous remercie.
Source http://solidarites-sante.gouv.fr, le 21 mars 2018