Déclaration de M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie des finances et de l'industrie, sur l'approche européenne de l'économie du développement et la nécessité de coordonner les aides européennes au développement pour accroitre leur efficacité, Paris, le 23 juin 1999.

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Circonstance : Conférence européenne de la Banque mondiale sur l'économie du développement, à Paris, le 23 juin 1999

Texte intégral

Mesdames et messieurs,
Pendant trois jours, des esprits éminents et sages se sont exprimés sur la cause du développement. Je suis profondément honoré que ces débats touchant aux questions les plus essentielles aient pris place ici, à Bercy. Pour cinq raisons :
1. Parce qu'il nous reste beaucoup à apprendre et à comprendre. Jim Wolfensohn s'interrogeait devant vous lundi, à haute voix, sur les ressorts du développement. Trois jours après, les questions restent tout aussi obsédantes. Qu'est-ce qui fait qu'un pays décolle ? Quelle est l'alchimie mystérieuse, le cocktail de bonne gouvernance, d'engagement réformateur, d'initiative privée, de priorité à l'éducation et à la santé, qui fait qu'au bout d'un moment le miracle se produit ? Mais une chose est claire : c'est en combinant recherches innovantes et réflexions sur les enjeux de la politique économique les plus actuels que nous pourrons continuer à progresser.
2. Parce que les thèmes de vos débats témoignent de ce que l'économie du développement est sortie du ghetto. Vous avez parlé des institutions nécessaires au bon fonctionnement des marchés, des liens entre croissance et innovation, de l'équilibre entre protection sociale et incitation, de l'intégration régionale : autant de questions brûlantes dans les pays industriels, autant de thèmes de réflexion communs. Et le temps est fini où les pays riches pouvaient se borner à inviter leurs partenaires en développement à les copier. En observant les réformes mises en uvre dans beaucoup de pays émergents ou de pays en transition, je me suis dit plus d'une fois que nous devrions en tirer des leçons pour nous-mêmes.
3. Parce que la crise que nous venons de traverser nous a violemment rappelé la fragilité de l'économie mondiale, l'intensité de nos interdépendances, et la nécessité de rendre le système financier international plus stable et plus robuste. Vous y avez consacré une part importante de vos réflexions, à juste titre. Car le coût d'une crise comme celle que nous venons de subir est trop élevé pour que sa répétition soit tolérée. Depuis 1997, la perte de production cumulée se chiffre à plus du quart du PIB pour la Corée et la Malaisie, plus de la moitié pour la Thaïlande et l'Indonésie, et à quatre points pour l'économie mondiale (deux points de croissance en 1998 et encore deux en 1999) ; c'est à dire, pour fixer les idées, une perte de production de plus de 1000 milliards d'euros. Michel Camdessus disait lundi que les gouvernements avaient résisté aux tentations de repli sur soi, et il avait raison. Il reste que le risque est toujours présent.
4. Parce que la tenue de ce colloque à Paris est l'occasion de vivifier l'approche européenne du développement. Il y a une manière européenne d'aborder le développement, qui se nourrit de notre expérience, de l'intensité de nos liens avec l'Afrique et le Proche-Orient, de l'importance que nous attachons aux institutions publiques. Je ne veux ni la glorifier - la pauvreté et les guerres en Afrique nous obligent à la réserve - ni même l'opposer à d'autres. Mais je ne veux pas non plus qu'elle soit ignorée. Elle ne l'a pas été au cours de ces trois jours : l'importance que vous avez donnée aux thèmes de la dette de l'aide publique, ou de la réforme de l'architecture financière, dont vous savez à quel point ils nous tiennent à cur, et plus profondément la tonalité de vos débats, montrent qu'elle est vivante.
5. Enfin parce que j'ai le sentiment que dans la libre confrontation des idées et des expériences, le courant de pensée auquel j'appartiens voit son apport reconnu. Vos discussions sur la transition, sur les ressorts de la croissance, sur la répartition du revenu ou sur les biens publics globaux ont bien montré que le fondamentalisme de libre marché qui avait cours voici quelques années encore a perdu son hégémonie. Ici encore, je veux être modeste. Il ne s'agit pas de faire des proclamations, mais simplement de reconnaître que dans la recherche patiente des voies du développement, socialistes et sociaux-démocrates sont loin d'être hors-jeu.
Je ne peux évidemment aller beaucoup plus avant dans la synthèse de travaux aussi riches et sur un champ aussi vaste. Je voudrais donc vous parler plus spécifiquement de deux thèmes qui m'importent et auxquels vous avez consacré une partie de vos réflexions. Le premier est l'aide au développement, le second est la réforme de l'architecture financière.
Le rôle de l'Europe pour une aide au développement plus efficace
Je suis un combattant du développement. De tout mon être, en tant que socialiste convaincu que le progrès est possible, que la solidarité est un devoir ; en tant qu'Européen conscient de ma chance d'être né ici et de nos responsabilités vis-à-vis des pays du Sud.
Apporter des ressources publiques efficaces.
Croire aux politiques de développement n'est peut-être plus à la mode. Les cyniques qui n'étaient préoccupés que par des considérations " stratégiques " du temps de la guerre froide, les protectionnistes qui ne demandent qu'à se réveiller dans chaque pays riche, les égoïstes qui vivent dans l'illusion que les malheurs du reste du monde ne peuvent les atteindre, ont uni leurs efforts ces dernières années pour expliquer qu'avec la nouvelle économie globale, les flux financiers privés suffiraient bien à financer la croissance des pays en développement. Menez de bonnes politiques et la prospérité viendra sur les ailes du marché ! Je n'ai jamais cru que ce raisonnement simpliste pouvait s'appliquer à l'ensemble des pays en développement. Après les crises financières internationales exceptionnellement violentes que nous avons subi depuis l'été 1997, qui peut encore croire cela ?
Comprenez-moi bien : je considère comme vous que la mondialisation peut être une chance pour le développement. Favoriser une insertion réussie dans l'économie globale est le meilleur service que nous puissions rendre aux pays en développement, et il faut les y aider en créant les conditions de l'expansion des échanges dans un cadre multilatéral - je pense aux négociations qui vont bientôt commencer - via des accords commerciaux préférentiels - je pense à la Convention de Lomé - ou via la convertibilité externe assurée à la devise - je pense à la zone franc dont la monnaie est maintenant liée à l'euro, par exemple.
Je sais bien sûr que la contribution financière de l'aide publique est aujourd'hui limitée. En 1990 les pays en développement ont reçu 100 Md USD : 44 Md de flux privés, 56 Md de ressources publiques. En 1998, ils ont reçu 275 Md USD, dont 227 Md USD de flux privés et seulement 48 Md de ressources publiques. Associer le secteur privé à nos politiques de développement est donc crucial.
Mais que l'on considère ceci : même lors des années fastes du financement privé des économies émergentes - 1996, 1997 - combien de pays ont effectivement bénéficié fortement de ces flux ? Une douzaine, qui ont capté les trois-quarts des investissements directs. La Chine, le Mexique, le Brésil... Je m'en réjouis pour ces économies bien sûr. Combien a reçu l'Afrique sub-saharienne ? 2 %. Ce n'est pas que le Burkina ou le Mali, par exemple, ne mènent pas des politiques courageuses. A ce stade, du fait de leur position géographique, de leur état de développement, ils n'attirent pas, en tout cas pas assez, les investisseurs privés. C'est un fait. Je le regrette. Il faut le regarder en face.
Dans ces conditions, le financement du développement dans les pays les plus pauvres, notre priorité à tous, ne peut reposer, largement, que sur les ressources publiques. Ce sont elles qui vont investir dans ce dont ces pays ont besoin : l'éducation, la santé, l'état de droit. Le socle de la croissance viendra de là. Ensuite, lorsque le mouvement sera amorcé, alors les capitaux privés afflueront pour accélérer le rythme de croissance et nous pourrons nous désengager, mais pas avant.
Jim Wolfensohn nous a rappelé lundi que la pauvreté dans le monde s'accroît. Contrairement à nos rêves, le progrès social n'est pas acquis dans l'économie globale. Nous découvrons même qu'il est réversible. D'où l'insistance constante de la France à reconstituer les fonds concessionnels multilatéraux. De ce point de vue, je suis fier que les Européens contribuent pour 57% du total de l'aide publique au développement. Je suis fier que mon pays soit le plus généreux du G7. C'est un choix politique que je confirme devant vous aujourd'hui.
Nous devons cependant dissiper les doutes sur l'efficacité de l'aide. Je crois que beaucoup de progrès peuvent encore être faits dans une utilisation optimale de notre aide : en la concentrant mieux sur les pays les plus pauvres, en la gérant mieux, au plus près du terrain et des bénéficiaires directs, en coopérant mieux avec les ONG. C'est vrai pour l'aide apportée par la Banque Mondiale - Jim en est conscient, il a déjà engagé de profondes réformes - c'est vrai aussi de l'aide européenne. Je crois qu'une plus grande coordination des actions des agences d'aide est absolument nécessaire, le cas échéant en déléguant à l'une d'entre elle (cela peut être l'Agence française de développement dans certains pays d'Afrique qu'elle connaît particulièrement bien, à d'autres agences bilatérales ou à l'AID ailleurs) la responsabilité de gérer de manière unifiée cette aide.
Nous sommes là pour servir la cause du développement, et non pour planter des drapeaux ou servir nos intérêts commerciaux. Les pays bénéficiaires ne doivent pas perdre des ressources précieuses à essayer de coordonner les bailleurs de fonds. Allons vers des représentations unifiées, reconnaissant le savoir-faire de chacun.
Le Premier ministre Lionel Jospin a appelé lundi à " construire une Europe du développement " , à ce que nos pays parlent de plus en plus d'une seule voix au FMI et à la Banque Mondiale. Je forme le voeu suivant : qu'un jour, tous ces pays européens, qui incarnent le développement et la générosité en direction des pays du Sud, regroupent leurs forces, leurs talents, leurs visions.
Je dis cela pour préserver l'avenir de la cause du développement. Parce que je crois que l'Europe a sa spécificité qu'elle doit mieux exprimer sur la scène internationale. Parce que je crois que c'est l'intérêt collectif que celui qui paie le plus voit son influence reconnue. C'est un principe de saine gestion. Si celui qui décide n'a pas à assumer les conséquences de ses décisions c'est la porte ouverte à la démagogie. Si celui qui paie n'a pas le sentiment d'influer assez sur les décisions, la frustration le conduira au désengagement.
Je dis aux Européens : regroupons nos forces ! Et je dis aux institutions financières internationales : c'est votre intérêt, c'est l'intérêt de la cause du développement que cette force s'exprime mieux.
Apporter des ressources nouvelles. Mais veiller aussi à ce que le poids de la dette n'étouffe pas les pays que nous voulons aider.
Quand le service de la dette dépasse le budget de l'éducation, je dis que quelque chose ne va pas. La France, à qui la Communauté des Nations a bien voulu faire confiance en lui demandant d'organiser les remises de dette publique - c'est le " Club de Paris " - a toujours été à la pointe de ce combat. Au fil des ans, la communauté internationale a progressivement pris conscience de cette réalité. Nous avons su casser les idoles et briser les tabous. La dette multilatérale était intouchable. Elle ne l'est plus, grâce notamment aux efforts de Jim Wolfensohn et Michel Camdessus avec le lancement de l'initiative HIPC. Dans un tout autre registre, on nous disait qu'associer le secteur privé à la résolution des crises dans les pays émergents allait le faire fuir ; depuis quelques mois, nous progressons sur la voie de solutions pragmatiques.
Aujourd'hui, une chance existe d'aller plus loin encore que tout ce qui a déjà été fait en direction des pays les plus pauvres. Annuler 62 Mds d'euros de dette ! Le chiffre donne le vertige. Cologne ouvre une nouvelle page. C'est trois fois plus que le mouvement décidé en 1996 par nos prédécesseurs. Donner plus vite à 41 pays une chance supplémentaire de concentrer leurs ressources sur les priorités essentielles : santé, éducation.... Le rêve est-il fou ? Oui, il l'est. Et je veux en faire partie, et j'espère que le G7, et plus largement les Nations riches sauront se montrer à la hauteur de ce pari fantastique.
La contribution européenne à la réforme de l'architecture internationale
Ouvrir nos marchés.
Apporter des ressources. Alléger le fardeau de la dette. C'est important, mais notre ambition ne doit pas s'arrêter là. Il faut surtout aider ces économies à intégrer l'économie mondiale, à devenir nos partenaires.
Que doit être la mondialisation ? Une chance de rattrapage accéléré, et non un facteur d'accroissement des inégalités. Pour cela, il faut ouvrir nos marchés. Ce n'est pas un discours facile à tenir. La tentation protectionniste revient toujours, y compris dans l'économie la plus riche du monde. Pas facile d'expliquer que nous aidons la Corée à se remettre du choc qui l'a dévastée. Nos chantiers navals ne vont-ils pas être les premières victimes du rétablissement coréen ? Il n'est pas facile d'expliquer que nous avons une responsabilité vis-à-vis du Maroc au salarié dont l'usine vient de fermer pour délocaliser sa production pour des raisons de coût de la main-d'uvre. Parce que sa réalité, c'est que l'usine est partie, et que de son vivant elle ne reviendra probablement pas. Nous n'avons pas toujours été capables de lui offrir de nouvelles perspectives pour qu'il puisse retrouver ailleurs du travail. Je vous parle de ma responsabilité de membre du gouvernement. Je vous parle de mon expérience d'élu local. Les mots sont parfois difficiles à trouver.
Et pourtant ! Je suis convaincu qu'il le faut. Que la solidarité d'aujourd'hui est notre prospérité de demain. Que la Corée rétablie achètera nos trains à grande vitesse, que le Maroc au niveau de vie plus élevé contribuera à la paix et à la stabilité de l'ensemble méditerranéen. Notre intérêt bien compris, en termes économiques, en termes de flux migratoires, en termes d'avenir de nos enfants, c'est la cause du développement.
L'expérience européenne au service de la coopération régionale.
L'expérience de l'Europe peut être doublement utile dans d'autres régions du Monde. Par notre ouverture commerciale : contrairement à ce qu'on avait prétendu il y a quelques années, l'intégration régionale n'est en rien contradictoire avec l'ouverture multilatérale : il n'y a pas de forteresse Europe, loin de là. Mais aussi parce que l'Europe symbolise une intégration qui ne se réduit aux seuls échanges de biens, de services et de capitaux. Elle s'est faite dans un double mouvement de démantèlement des obstacles aux échanges et de construction de coopérations entre les autorités publiques. L'Europe sans intégration des marchés n'aurait été qu'une superstructure fragile. L'Europe sans la construction d'un droit, d'une législation et des institutions de la coopération n'aurait été qu'un sas vers le marché mondial. Nos pays ont autant appris de leur concurrence que de leur coopération, et pour les gouvernants, il va sans dire que l'apprentissage des règles communes, de la pression des pairs et de la coordination a été essentiel. Et je crois que pour beaucoup de pays qui cherchent à construire avec leurs voisins des relations de gouvernements qui veulent jouer le jeu de l'ouverture mais ne veulent pas renoncer à la maîtrise de leur destin, la construction européenne est une expérience féconde.
L'Europe, force de propositions pour une meilleure régulation internationale.
Nous devons enfin bâtir un système financier international plus stable et plus robuste. Non pour empêcher les crises : il y en a eu, il y en aura d'autres. Mais pour en diminuer la fréquence et la violence. Depuis un an, la France et ses partenaires européens ont fait de multiples propositions de réformes, dont certaines sont déjà entrées dans les faits.
Le FMI avait besoin de moyens d'action accrus, il les a grâce à l'augmentation des quotes-parts. Le FMI avait aussi besoin d'un outil moderne, adapté au marché financier mondialisé, et tourné vers la prévention. Il l'a grâce à la mise en place de la ligne de crédit contingente. Quand je proposais au printemps 1998 que les hedge funds soient réglementés, Bob Rubin et Alan Greenspan ont haussé les épaules, répondant qu'il fallait bien être un socialiste français pour avoir ce genre d'idées ! Aujourd'hui, le Forum de Stabilité Financière existe, il fera des recommandations concrètes en septembre. On se demande si les hedge funds seront régulés en leur imposant des contraintes directes - sur leurs fonds propres - ou indirectes - déclaration de leur exposition sur les banques - mais régulation il y aura.
Nous avons de même relancé la réflexion sur la lutte contre les centres off-shore, ces territoires laxistes, véritables trous noirs de la régulation internationale, lieu de tous les blanchiments. Peut-être faudra-t-il aller jusqu'à bannir les transactions financières avec ces territoires, et demander à nos banques de ne plus avoir de contacts avec, tout en cherchant à convaincre ces pays qu'ils font fausse route dans leur stratégie de développement. J'ai écrit, avec mes collègues de la Justice et de l'Intérieur, à mes homologues du G7 pour qu'une meilleure coordination des actions judiciaires, policières et financières, permettent de mieux lutter contre ces territoires. Car la seule manière de progresser sera d'une part de procéder à une meilleure concertation entre tous les acteurs concernés par la délinquance financière internationale ; et d'autre part d'agir dans le cadre multilatéral (GAFI, ONU, G7, Forum de Stabilité Financière...) afin que les règles décidées par tous soient appliquées par tous.
Alors, soyons clairs. Qui visons-nous ? La France estime que certains territoires sont aujourd'hui défaillants dans leur contrôle bancaire : Antigua et Barbuda, les îles Cayman, les îles Marshall...par exemple. Il y en a d'autres. Établissons au plus vite cette liste de territoires et disons-leur clairement : mettez-vous en règle avec le droit international, cessez de croire que votre prospérité peut se bâtir sur les plaies ouvertes du reste du Monde.
Face à la délinquance internationale, il faut une police économique internationale. La France a toujours plaidé pour que les Institutions de Bretton-Woods demeurent au centre du dispositif international, parce que ces Institutions sont l'expression organisée de la solidarité internationale. Ces Institutions doivent fonctionner mieux bien sûr - elles doivent devenir plus transparentes, et corriger les faiblesses qui sont apparues dans la gestion des crises, telle que la supervision du secteur financier - mais elles sont pour nous irremplaçables. C'est pourquoi nous souhaitons que leur gouvernance politique soit renforcée. Le G7 a enfin suggéré à Cologne que le Comité intérimaire du FMI cesse d'être " intérimaire " . Il faut surtout qu'il devienne un vrai lieu de décision, où les Ministres des pays industrialisés comme des pays en développement trancheraient les questions les plus sensibles liées à la gestion collective du système financier international. Ce point n'est pas encore gagné.
Je crois que l'Europe a beaucoup à dire sur les questions de développement. Parce qu'elle a un modèle de société, fondé sur l'économie de marché mais pas sur la société de marché, où la protection sociale, la solidarité sont des valeurs essentielles. Ce qui conduit les Européens à être plus sensibles que d'autres au fait que les droits sociaux ne progressent guère dans notre économie globale.
L'Europe a beaucoup à dire sur son expérience d'intégration régionale, d'ouverture sur le monde. L'Europe a beaucoup à dire parce qu'elle est le premier donateur à la cause du développement.
Un mot pour conclure d'application pratique de ce que je viens de dire : le Kosovo. L'aide à la reconstruction des Balkans doit prendre place dans un cadre multilatéral. Et il faut donner une perspective européenne aux pays de la Région. Beaucoup de bailleurs de fonds ont vocation à intervenir : Banque Mondiale, BERD, BEI, UE...Il faut entre eux une coordination efficace. Et la perspective européenne que nous voulons donner doit favoriser la coopération régionale entre ces pays. Il me paraît donc souhaitable que l'Union européenne conclue avec les pays des Balkans un ou des accords de partenariat spécifiques, combinant reconstruction, ouverture commerciale, coopération économique. Je ferai tout pour que le Kosovo soit cité en exemple, où les réflexions sur les principes des politiques de développement à promouvoir se trouvent mises en application.
Je vous propose de nous revoir dans un an, peut-être dans ces mêmes lieux si la Banque Mondiale en est d'accord, pour vérifier que nos riches discussions des trois derniers jours ont contribué à notre cause commune.
© Ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, 24/06/99
(Source http://www.finances.gouv.fr, le 28 juin 1999)