Texte intégral
ELIZABETH MARTICHOUX
Bonjour Frédérique VIDAL. Et merci d'être ce matin sur RTL.
FREDERIQUE VIDAL
Bonjour.
ELIZABETH MARTICHOUX
Je le disais à l'instant, une loi porte votre nom, elle réforme l'accès à l'université et elle est controversée, on va y venir, sur le fond, mais d'abord, les conséquences, ce matin, trois universités, Madame VIDAL, sont totalement bloquées, une université à Montpellier, Toulouse, Paris 8 et combien d'autres sites occupés, affectés ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, en plus de ces trois universités, il y a à peu près huit sites qui sont perturbés.
ELIZABETH MARTICHOUX
Huit seulement, je dis seulement, parce que, selon certains syndicats, comme l'UNEF, par exemple, il y aurait plus d'une vingtaine de sites occupés.
FREDERIQUE VIDAL
Eh bien, moi, c'est les informations que j'ai, qui remontent des présidents d'université.
ELIZABETH MARTICHOUX
Qu'est-ce que vous faites pour les débloquer ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, c'est localement que les choses se passent, les présidents d'université et leurs équipes sont au travail, vont discuter avec les étudiants, expliquent la loi Orientation & Réussite des étudiants, puisque certains d'entre eux ont des craintes, et donc il faut évidemment beaucoup de pédagogie pour expliquer l'objectif de cette loi, mieux orienter, et ça, c'est ce qui a été fait avec les professeurs principaux pendant le lycée
ELIZABETH MARTICHOUX
On va y venir, mais qu'est-ce que vous
pardon Madame VIDAL, mais vous, la ministre, vous n'avez aucun moyen direct d'intervenir ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, moi, je suis en contact avec les présidents d'université, une fois de plus, je reçois les organisations syndicales et les représentants des personnels, je vous rappelle que cette loi, elle est issue de trois mois de concertations et qu'elle a été adoptée par la majorité des représentants des personnels et des organisations syndicales étudiantes, notamment la première d'entre elles, qui est la FAGE.
ELIZABETH MARTICHOUX
Qui est la FAGE est qui vous soutient d'ailleurs. Est-ce qu'il y a des présidents d'université qui vous ont demandé des moyens d'évacuer les sites bloqués ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, ce sont les présidents d'université qui ont cette responsabilité, donc évidemment, on échange avec eux
ELIZABETH MARTICHOUX
Ils peuvent le faire directement
FREDERIQUE VIDAL
Mais c'est eux qui sont en charge d'assurer l'ordre public sur les campus.
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce qu'à votre connaissance, certains ont l'intention de faire débloquer par la force les sites qui sont occupés depuis plusieurs jours ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, l'objectif, c'est évidemment toujours d'éviter la violence au sein des établissements et au sein des universités, donc, tant qu'il s'agit de débats, tant qu'il s'agit d'assemblées générales, tant qu'il n'y a pas de dégradations, il n'y a pas de raison de faire intervenir les forces de l'ordre, quand il y a violences et dégradations, là, c'est normal qu'on protège les personnels, et puis les autres étudiants qui, eux, continuent à étudier évidemment.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc, tant que c'est de l'occupation pacifique, les présidents d'université laisseront faire. La présidence de l'université de Grenoble justement on l'a appris dans la nuit de mardi à mercredi, a été dégradée, occupée, volée, le président de l'université veut porter plainte aujourd'hui, ce sont des étudiants de cette université qui sont intervenus, là ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors c'est très difficile en fait de le savoir, puisque, à Grenoble comme à Nantes ou comme à Montpellier auparavant, ce sont les individus qui sont cagoulés, donc c'est évidemment très compliqué
ELIZABETH MARTICHOUX
Ils étaient aussi cagoulés
FREDERIQUE VIDAL
De savoir si ce sont des étudiants ou si ce sont des personnes extérieures à l'université qui sont là. C'est pour ça que les présidents portent plainte.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais il est vraisemblable que ce soit des étudiants cagoulés qui s'en soient pris, alors, à Montpellier, on le sait, à d'autres étudiants, à Grenoble, à la présidence elle-même
FREDERIQUE VIDAL
Et je ne peux pas vous répondre sur ce sujet
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous n'êtes pas en situation de le savoir maintenant
FREDERIQUE VIDAL
Puisque les enquêtes sont en cours.
ELIZABETH MARTICHOUX
Madame la ministre, question pratique, est-ce que les examens partiels sont menacés ?
FREDERIQUE VIDAL
Non, les examens ne sont pas menacés, les présidents d'université, là aussi, me confirment que la très grande majorité des étudiants sont en cours, auront leurs examens, donc il y aura peut-être des aménagements qui seront faits sur certains sites, lorsque les étudiants ont été empêchés pour aller étudier, mais l'ensemble des examens sera maintenu pour la très grande majorité des étudiants, c'est un million et demi d'étudiants dans les universités, je pense notamment aux étudiants de licence qui commencent à préparer leur candidature pour les masters, et c'est très important évidemment que la qualité des diplômes soit maintenue.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais si les sites sont toujours bloqués, est-ce que vous envisageriez de délocaliser les examens par exemple ? Est-ce que vous pourriez réquisitionner des lieux pour organiser les examens ailleurs pour que tout se passe bien ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, il faut bien comprendre que les universités sont assez rarement mono-sites, donc même lorsque des sites sont bloqués, les cours peuvent avoir lieu dans d'autres bâtiments de l'université qui sont situés sur d'autres campus, et les examens peuvent aussi être organisés sur d'autres campus...
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc vous l'envisagez autrement dit ?
FREDERIQUE VIDAL
Absolument
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous envisagez d'organiser ça ?
FREDERIQUE VIDAL
Voilà, les présidents d'université et les recteurs, nous sommes en contact avec eux pour que, effectivement, les examens soient programmés comme prévu.
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors dans ce contexte, il y a certains étudiants aussi qui réclament qu'une note de 10 sur 20 minimum soit attribuée, c'est assez logique, ils disent : ça été occupé, on n'a pas pu suivre tous les cours, donc, donnez-nous finalement, les examens d'office. Une note de 10 sur 20 minimum
FREDERIQUE VIDAL
Alors, ça, ce sont en général les étudiants qui occupent qui demandent ça va, il faut bien comprendre qu'on ne va pas à l'université pour avoir des notes, on va à l'université pour apprendre des choses, et un diplôme, ça correspond
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, mais là, c'est un outil, c'est un outil pour passer l'année suivante, la note
FREDERIQUE VIDAL
Oui, mais un diplôme, ça correspond à une somme de connaissances qui a été acquise, si les connaissances ne sont pas acquises, ça n'a pas de sens de donner une note.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc, ils n'auront pas de note s'ils n'ont pas pu aller en cours, si je vous suis ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, c'est pour ça que je vous dis que les choses sont en train de s'organiser, on peut diffuser les cours par Internet en partie, on peut décider que les examens auront lieu sur les quatre cinquièmes du programme et prévoir que le reste du programme soit repris l'année suivante, il y a de multiples façons d'assurer que les diplômes conservent leur valeur, c'est très important.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc l'université tiendra compte dans sa notation de ces difficultés sur certains sites. C'est ce que vous nous dites
FREDERIQUE VIDAL
Une fois de plus, voilà, ce sera la décision des présidents, des conseils d'administration.
ELIZABETH MARTICHOUX
Madame VIDAL, France Insoumise, vous l'avez lu comme nous, revendique franchement de perturber les facs, de mettre de l'huile sur le feu pour enrôler les étudiants dans une dynamique plus large d'ailleurs de contestation à toutes les réformes Macron. C'est Eric COQUEREL le député de France insoumise, qui le disait très explicitement hier chez nous ou dans les colonnes du Parisien, ça vous choque ?
FREDERIQUE VIDAL
Oui, ça me choque, parce que, pour moi, c'est un tout petit peu comme ce qui se passe lorsqu'il y a des défilés syndicaux, je pense que dans les universités, il y a des syndicats étudiants, il y a des représentants étudiants, on est dans une période d'ailleurs où les élections étudiantes se déroulent dans les établissements. Et ce sont les étudiants élus, représentants de leurs pairs, qui doivent parler dans les universités aux autres étudiants et qui doivent défendre les étudiants
ELIZABETH MARTICHOUX
Les partis politiques ont quelque chose à dire sur l'organisation
FREDERIQUE VIDAL
Les partis politiques ont quelque chose à dire probablement, mais peut-être pas dans les amphis des universités.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc vous contestez le droit à France Insoumise de s'adresser directement aux étudiants et de dire bloquer les facs ?
FREDERIQUE VIDAL
Chacun a le droit de s'adresser à qui il veut
ELIZABETH MARTICHOUX
Ce n'est pas responsable ?
FREDERIQUE VIDAL
Mais, effectivement, je pense que, attiser les braises, puisque c'est l'expression je crois, qui était employée
ELIZABETH MARTICHOUX
Par Eric COQUEREL
FREDERIQUE VIDAL
Ce n'est vraiment pas, ce n'est vraiment pas une solution. La solution, c'est vraiment de comprendre quel est l'objectif de ce projet de loi, c'est la possibilité d'avoir des parcours qui soient plus personnalisés, la possibilité d'avoir des licences qui soient plus professionnalisantes, la possibilité d'avoir, à la demande de l'UNEF, par exemple, c'était une des demandes de ce syndicat étudiant, d'avoir des licences qui soient pluridisciplinaires et qui permettent de se spécialiser progressivement.
ELIZABETH MARTICHOUX
Encore un tout petit mot, parce que Jimmy LOSFELD, je crois, j'espère que je n'écorche pas son nom, dans le journal de 7h30 tout à l'heure, qui est le président de la FAGE, disait : il y a des étudiants qu'on empêche d'étudier, il y a des étudiants qu'on empêche même de débattre, il y a une forme
cette instrumentalisation politique, elle passe par la violence, vous avez des retours aussi de cette nature ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, c'est ce que je vous disais, actuellement, nous sommes dans de très nombreuses universités en période d'élections des représentants étudiants, et donc la FAGE est devenue le premier syndicat étudiant, et les élections sont en train de se dérouler, c'est normal qu'il y ait un débat mené par les syndicats étudiants sur : qu'est-ce que les étudiants souhaitent
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous condamnez ceux qui empêchent le débat ?
FREDERIQUE VIDAL
Ah oui, bien sûr, toujours, je crois, que le débat, c'est vraiment quelque chose qui est essentiel, et les universités sont traditionnellement des lieux de débats
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc il faut qu'il y ait des débats contradictoires dans les amphis, ce qui ne semble pas être le cas en permanence. Ce qui ne passe pas dans votre réforme, Madame VIDAL, c'est la question lancinante de la sélection, vous n'avez pas convaincu que le nouveau système d'affectation ne sélectionne pas, alors, vous avez mis en place, à l'entrée de l'université, un système d'attendus, qui est une combinaison de connaissances et de compétences qui sont indiquées par les futurs étudiants, au moment de Parcoursup. Ça sélectionne, ça permet aux professeurs, aux universités de prendre les meilleurs par exemple s'ils le souhaitent ?
FREDERIQUE VIDAL
Non, ce n'est absolument pas l'objet, je rappelle que la loi rappelle que le baccalauréat est le premier diplôme d'accès à l'enseignement supérieur, donc en fait, rien n'a changé, les attendus, ils permettent de donner des informations aux lycéens, et c'est sur la base de ces attendus que les professeurs principaux, que je remercie d'ailleurs, ont travaillé avec les lycéens, pour qu'ils définissent les filières dans lesquelles ils souhaitent entrer, et ensuite, en fonction de la capacité des lycéens d'avoir déjà acquis ou pas ces attendus, la mise en place de parcours qui vont les aider à mieux réussir. Donc, en aucun cas, une université ne peut répondre non à une demande, dans tous les cas, la réponse est oui, et parfois, la réponse, c'est : oui, si, ce qui signifie qu'un parcours personnalisé peut être offert dans cette université à un étudiant.
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce que les
parce que, pour en finir avec le tirage au sort, vous avez mis en place effectivement un traitement qui semblerait être plus que la loterie, mais là encore, la sélection remplacerait le tirage au sort quand il n'y a pas de place
FREDERIQUE VIDAL
Alors, c'est très important que, on voit la globalité de la réforme, c'est-à-dire que nous venons de rajouter 19.000 places supplémentaires sur les filières les plus demandées dans les universités, hauteur de 13 millions d'euros, nous venons aussi
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais malgré tout, il y aura plus d'étudiants que de places
FREDERIQUE VIDAL
Alors, non, l'objectif, c'est vraiment que nous soyons en capacité d'avoir autant de places que d'étudiants
ELIZABETH MARTICHOUX
Dans certaines filières
FREDERIQUE VIDAL
Mais nous avons augmenté de 19.000 places dans les filières en tension, c'est la première fois qu'un gouvernement rajoute des places spécifiquement là où on en a besoin.
ELIZABETH MARTICHOUX
Dernière chose, dernière question, il y a des professeurs, des chercheurs enseignants qui disent : on ne veut pas faire ce tri, entre guillemets, on ne lira pas les attendus, on ne lira pas les dossiers et on acceptera tout le monde, parce qu'on fait une forme de grève du zèle. Qu'est-ce que vous leur dites pour conclure ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, ce que je leur dis, c'est que de toutes les façons, il faut répondre oui à tous les étudiants, donc ce qu'ils se proposent de faire, cest juste ce qui est prévu par la loi, ce que je souhaite rappeler aussi, c'est que, on mis dans les université huit millions deuros spécifiquement pour faire de l'indemnitaire, pour accompagner cette lecture des dossiers et cet accompagnement de l'accès des étudiants. Huit millions d'euros d'indemnitaires, huit millions d'euros pour mettre en place des parcours personnalisés, dès la rentrée 2018.
ELIZABETH MARTICHOUX
Manifestement, tous les enseignants n'ont pas compris cela, huit millions donc pour permettre aux enseignants d'avoir plus de moyen, de recruter éventuellement pour traiter les dossiers à l'entrée des facultés
FREDERIQUE VIDAL
C'est 35 millions d'euros en tout
ELIZABETH MARTICHOUX
Et huit millions pour cette question spécifique
FREDERIQUE VIDAL
Et huit millions spécifiquement pour le traitement des dossiers
ELIZABETH MARTICHOUX
Merci d'avoir été avec nous ce matin, Frédérique VIDAL, sur RTL
FREDERIQUE VIDAL
Merci à vous.
YVES CALVI
Frédérique VIDAL qui modère le nombre d'universités effectivement perturbées, et affirme qu'examens et partiels auront bien lieu. La ministre réfute par ailleurs la notation de sélection à l'entrée de l'université, et confirme l'ouverture de 19.000 places supplémentaires pour les filières plu demandées.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 avril 2018