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INTERVENANTE
Place à la politique française à présent avec votre invité Guillaume NAUDIN, vous recevez Jean-Baptiste LEMOYNE secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères.
GUILLAUME NAUDIN
Vous appartenez donc à un Gouvernement qui n'a plus de ministre de l'Environnement ou de la Transition écologique selon son nom actuel, est-ce que c'est un coup dur ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
J'appartiens à un Gouvernement qui a une ambition intacte, parce que nous avons tous rejoint ce collectif autour d'Emmanuel MACRON, du Premier ministre Edouard PHILIPPE pour mettre en oeuvre un programme présidentiel qu'Emmanuel MACRON a porté tout au long de l'année 2017 et cette ambition elle est intacte, ça veut dire être à la pointe dans un certain nombre de dossiers environnementaux - tout ce qui est pesticides, perturbateurs endocriniens, être à la pointe dans la recherche pour faire en sorte que cette transition écologique se fasse - et je peux vous dire que dans quelques jours nous serons le 26 septembre à New York et le Président animera une deuxième édition du One Planet Summit. Donc, vous le voyez... voilà le collectif il est en action, en marche et on n'abandonne rien de notre ambition environnementale.
GUILLAUME NAUDIN
Manifestement Nicolas HULOT jugeait que tout ça c'était un petit peu de l'affichage, que l'écologie et les dossiers qui s'y rapportent n'étaient pas jugés prioritaires, une priorité dans le discours mais pas dans les faits, c'est ce qu'il semble reprocher, c'est ce qu'il a dit hier ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Oui. J'ai eu l'occasion de travailler avec Nicolas HULOT sur les dossiers de politique commerciale, de commerce international, et avec lui ce que je constate c'est qu'on a pu progresser et faire prendre conscience à un certain nombre de nos partenaires de l'importance de la transition environnementale, parce que regardez beaucoup des accords de libre-échange ne prenaient pas en compte cette dimension environnementale et désormais au niveau européen on fait des progrès. Par exemple, regardez, on avait pris tout un plan d'actions pour accompagner l'entrée en vigueur de l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada et, ça, ça a été rendu possible grâce à un travail qu'on a fait avec Nicolas HULOT, avec ses services, avec le Parlement et donc, moi, je considère que voilà on a un bilan déjà qui est assez remarquable pour un Gouvernement qui a seulement un an ; Regardez les décisions qui ont été prises, Notre-Dame-des-Landes depuis des décennies les différents Gouvernements ergotaient, n'avaient pas pris de décision, on a tranché, ça c'est une décision courageuse.
GUILLAUME NAUDIN
Un mot sur la forme de l'annonce, Nicolas HULOT a pris tout le monde par surprise, y compris le Président de la République et le Premier ministre, qu'en pensez-vous ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Il est vrai que c'est peu ordinaire. Maintenant on connaît le style très libre de Nicolas HULOT, c'est cette liberté - d'ailleurs que le Président de la République a évoqué hier en disant que ça avait été l'un des critères dans son choix voilà, ça lui appartient, maintenant je peux vous dire que ce qui compte c'est qu'on reste tous mobilisés les uns les autres pour faire réussir la France et l'environnement parce qu'il s'agit de la planète et si on n'y prend pas garde l'homme il va être rattrapé par la nature.
GUILLAUME NAUDIN
C'est un manque de respect, un manque de courtoisie pour vous ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Ecoutez, voilà, ça c'est fait comme ça, c'est vrai que moi j'animais un petit-déjeuner avec les ambassadeurs quand j'ai appris cette nouvelle... bon, écoutez, on fait avec.
GUILLAUME NAUDIN
Alain JUPPE, que vous avez soutenu lors de la primaire de la droite avant la Présidentielle de 2017, car vous venez du parti Les Républicains, salue la hauteur de vue de Nicolas HULOT, c'est votre cas aussi ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
En tous les cas, on l'a vu dans sa prise de parole, il a voulu attirer l'attention sur l'urgence des chantiers, mais d'ailleurs au niveau planétaire, parce que d'ailleurs ne nous payons pas de mots regardons tout ce qui s'est passé depuis plusieurs mois dans le monde, un certain nombre d'aléas climatiques, de catastrophes naturelles, et donc effectivement c'est pour cela qu'on ne peut pas faire comme si rien ne se passait et c'est pour cela que le Président de la République souvenez-vous lorsque les Etats-Unis sortent des Accords de Paris fait une prise de parole très forte en français, en anglais, pour attirer l'attention du monde entier sur l'urgence à maintenir ces Accords de Paris et agir.
GUILLAUME NAUDIN
« Make our planet great again » c'est comme ça qu'il avait conclu cette intervention, est-ce que justement le départ de Nicolas HULOT ne met pas un terme à cette ambition, ne l'affaiblit pas ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Encore une fois Nicolas HULOT il a rejoint Emmanuel MACRON, il a rejoint un collectif, il a rejoint un programme qui était lui-même ambitieux, donc tout ça va continuer, maintenant il fait le choix d'agir différemment - c'est respectable - ce que je veux dire c'est qu'encore une fois nous ne renonçons pas et naturellement tout cela va continuer.
GUILLAUME NAUDIN
Quel va être le coup politique de ce départ, Nicolas HULOT comptait quand même, il était ministre d'Etat avec une grande popularité, les sondages qui sont faits depuis hier nous disent que la plupart des personnes interrogées regrettent ce départ, il va être difficile à remplacer, qui pour le remplacer ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Je vais vous dire moi je ne suis pas dans la question de personne vous avez vu, ce que je mets en avant c'est le collectif, parce que ce Gouvernement il a une grande différence par rapport à ce qu'on a connu depuis 20 ou 30 ans, pour la première fois autour de la table du conseil des ministres c'est 50 50, 50 % de gens qui viennent de la société civile -dont était Nicolas HULOT - mais il y en a bien d'autres qui sont autour de la table, je pense à Agnès BUZYN remarquable sur justement la santé, les sujets sociaux, je pense à Elisabeth BORNE qui s'occupe des transports, et bien d'autres... Frédérique VIDAL sur les universités, et, donc, ça donne une dynamique qui est très différente de ce qu'on a connue par le passé, on n'est pas dans les petits jeux politiciens, on n'est pas dans les rapports de force entre telle sensibilité, etc., on est vraiment tous... Je vais vous dire j'ai été maire d'une petite commune rurale dans l'Yonne, je trouve la même dynamique, c'est-à-dire des gens qui viennent d'horizons différents mais ils arrivent à se mettre d'accord sur l'essentiel pour prendre des décisions tout simplement de bon sens, on a besoin de ce gros bon sens paysan ou populaire en tous les cas qui fait qu'on tranche et on prend des décisions.
GUILLAUME NAUDIN
Donc ça ne vous intéresse pas si le poste est libre, vous le refuserez ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Eh bien, écoutez, je crois que ce n'est pas le sujet. Nos petites individualités ne comptent pas, ce qui compte vraiment... Attendez ! Parce que les Français s'ils ont choisi Emmanuel MACRON, souvenons-nous attendez de cette élection présidentielle, de ce second tour face à Marine LE PEN, c'est qu'ils ont aussi eu envie à un moment de mettre à la retraite un certain nombre d'hommes et de femmes politiques qui pour beaucoup pensaient avant tout un peu à eux-mêmes et je crois que ce qui prévaut c'est aujourd'hui une sorte de sursaut dont on a besoin en France et en Europe, parce que les sujets européens nous attendent, il y a des échéances très importantes - et on le voit face à l'urgence d'un certain nombre de défis - on parlait du défi climatique, mais il y a également le défi du développement, le défi de l'Afrique, le défi naturellement de la formation pour les uns les autres, donc bref il y a énormément de sujets et on ne peut pas continuer à agir au niveau national tout seul, on a besoin de cette Europe puissance vraiment qui va affirmer une souveraineté et protéger ses citoyens.
GUILLAUME NAUDIN
Le remaniement qui ne devait pas avoir lieu va donc finalement avoir lieu, de quelle ampleur doit-il être, est-ce que c'est l'occasion de réajuster cette équipe de manière un peu plus large que le seul ministère de la Transition écologique ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Ecoutez, il me revient de vous livrer quelle est la Constitution 1958 qui prévoit que ce n'est pas au secrétaire d'Etat auprès du ministre d'Europe et des Affaires étrangères d'évoquer cela mais c'est bien le Premier ministre et le Président de la République qui vont échanger sur ces sujets-là, c'est bien normal.
GUILLAUME NAUDIN
Dans cette affaire, comme dans l'affaire Benalla au début de l'été, Emmanuel MACRON semble subir un petit peu les événements, il n'a pas choisi tout ça, comment est-ce qu'il peut reprendre l'initiative ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Mais il est tout le temps en initiative, encore une fois je parle des sujets sur lesquels je suis en responsabilité avec Jean-Yves LE DRIAN
GUILLAUME NAUDIN
Non, mais il y a une réforme constitutionnelle sur le bord de la route, il y a la démission de Nicolas HULOT, la croissance qui plafonne, le chômage qui ne baisse pas, il subit quand même le Président de la République ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Ecoutez, moi je peux vous dire que dans le domaine diplomatique qui est le mien, il réunissait les ambassadeurs lundi, la France elle est à l'offensive, la France elle est une puissance médiatrice, la France elle ne subit pas et justement c'est parce qu'elle ne veut pas subir et parce que nous ne voulons pas que l'Europe subisse, que nous voulons peser, qu'on veut construire cette Europe forte et ce n'est pas justement les alliances de circonstance entre un Matteo SALVINI et un Viktor ORBAN bras dessus bras dessous - on l'a vu hier -qui doivent empêcher le sursaut européen. Donc je peux vous dire qu'on le voit, il a mis par exemple sur les sujets européens énormément d'initiatives sur la table, nos amis Allemands sont en train de converger on l'a vu, Angela MERKEL à Meseberg lors de la réunion entre nos deux chefs respectifs s'est engagée dans un chemin audacieux aussi au niveau européen, donc voilà la France est-elle à l'offensive, elle est à l'initiative, c'est valable à l'international comme la politique intérieure.
GUILLAUME NAUDIN
Et c'est pour cela qu'Emmanuel MACRON se concentre sur ces dossiers, comme la réforme de l'Europe, il est en tournée au Danemark et en Finlande aujourd'hui, c'est la priorité de cette année ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
On voit bien qu'aujourd'hui le monde est secoué de crises et ces crises elles peuvent mettre à bât des construction qui ont pris des décennies, la construction européenne elle peut aller de soi pour nos générations mais on se rend bien compte qu'il y en a un certain nombre qui veulent la détricoter, ce sont des marchands de sable, parce qu'on voit bien que le repli national est une illusion - regardez combien le Brexit aujourd'hui est regretté par les Anglais et, donc, on a une responsabilité historique et c'est pour ça que je - pardonnez-moi - mais que je m'abstrais un petit peu de ces considérations très quotidiennes sur la vie politique parce que les enjeux sont tels au niveau planétaire, au niveau européen qu'on doit se concentrer sur l'essentiel : faire en sorte que cette Europe soit plus efficace, fonctionne, apporte des vraies réponses, c'est notre travail au quotidien.
GUILLAUME NAUDIN
Merci Jean-Baptiste LEMOYNE.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 13 septembre 2018