Interview de Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail à France Bleu Champagne le 30 novembre 2018, sur le mouvement des gilets jaunes et la situation sociale.

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Média : France Bleu

Texte intégral

ROBIN GRIMALDI
Notre invitée ce matin, c'est Muriel PENICAUD, la ministre du Travail qui sera en visite dans la Marne cet après-midi sur le thème de la formation professionnelle. Bonjour Madame la ministre, merci d'avoir accepté notre invitation.
MURIEL PENICAUD
Bonjour !
ROBIN GRIMALDI
Alors, avant de parler de votre visite au CFA de Châlons-en-Champagne quel est votre sentiment concernant le mouvement des Gilets jaunes qui a démarré il y a 15 jours et qui est soutenu par une grande partie des Français ?
MURIEL PENICAUD
Moi, j'entends la colère, la souffrance, l'inquiétude, de ceux qui ont du mal à joindre les deux bouts à la fin de ce mois ou qui ne voient …le progrès ou la croissance qui arrive et puis, ils ont l'impression que ce n'est pas pour eux. C'est pour ça que dans la concertation qui va avoir lieu un peu partout sur le territoire, c'est important qu'il y ait des représentants des Gilets jaunes parce que le droit de manifester, c'est bien, ça permet de dire des choses mais il y a un moment donné il faut qu'on construise des solutions ensemble et ça c'est, je pense que maintenant c'est l'étape qui arrive.
ROBIN GRIMALDI
Effectivement, les Gilets jaunes qui disent se sentir abandonnés par les élites, sans perspective d'emploi stable. Alors vous en tant que ministre du Travail, comment vous pensez pouvoir répondre à ces problématiques ?
MURIEL PENICAUD
Alors, il y a une problématique de fond, c'est qu'on a un taux de chômage très élevé en France depuis 30 ans et c'est pourquoi, c'est nos grandes priorités, c'est évidemment ma priorité. Alors on ne peut pas tout faire en un jour, c'est ça qui est difficile et je pense qu'il y a une impatience légitime que je comprends mais on a déjà progressé, le chômage a déjà baissé l'année dernière. On a créé 211 000 emplois en France et puis c'est aussi pour ça que moi je mets le paquet sur l'avenir des demandeurs d'emploi et des jeune et je serai aujourd'hui à Châlons-en-Champagne et à Reims sur ce sujet notamment de l'avenir des jeunes. On a un taux de chômage qui est insupportable en France, c'est 20% des jeunes au chômage est donc c'est très important qu'on permette aux demandeurs d'emploi, aux jeunes d'avoir un avenir.
ROBIN GRIMALDI
Pour rester une dernière fois sur les Gilets jaunes, on parle beaucoup aussi ces derniers jours des conséquences économiques des blocages des Gilets jaunes avec des fortes baisses de chiffre d'affaires pour certains magasins. Nous, c'est le cas par exemple sur la zone commerciale de Tilloy. Quelles mesures sont possibles et à l'étude au gouvernement pour aider les entreprises qui sont pénalisées par le mouvement ?
MURIEL PENICAUD
Alors, d'abord, je voudrais dire qu'il faut aussi, c'est aussi les choix, les cibles mais aujourd'hui il y a des artisans, il y a des commerçants, il y a des agriculteurs, les chantiers du bâtiment, les commerces à quelques semaines des fêtes qui souffrent effectivement. Il y a eu dans les commerces moins 15% de celui d'affaires samedi dernier, ça c'est aussi l'appel à la responsabilité de tout le monde si les clients ne peuvent plus se déplacer, si les chantiers du bâtiment n'ont plus leurs équipements, si les agriculteurs, les éleveurs n'ont plus ou de la nourriture pour leurs élevages, et là c'est une catastrophe pour tout le monde. Alors en attendant évidemment, il y a des mesures, il y a des mesures d'aides aux entreprises concernées et en ce qui concerne mon ministère donc nous finançons le chômage partiel. J'en profite pour dire à toutes les entreprises qui sont touchées, on examine les demandes et on les autorise très vite, c'est-à-dire que l'Etat prend en part une partie du salaire pour éviter la mise au chômage des salariés concernés. Mais je crois qu'il faut que tout le monde soit responsable là-dessus. Si on bloque l'économie, on bloque l'emploi et on met en danger aussi les salariés.
ROBIN GRIMALDI
Alors, Muriel PENICAUD, parlons également de la formation et de l'accès à l'emploi, c'est pour ça que vous êtes en déplacement dans la Marne cet après-midi. Votre loi à ce sujet a été promulguée en septembre par Emmanuel MACRON et l'ambition du gouvernement, c'est former un million de jeunes et autant de demandeurs d'emploi, des formations pour quel métier Muriel PENICAUD ?
MURIEL PENICAUD
Alors oui pourquoi cette ambition ? Parce qu'aujourd'hui, il y a tous les jours, il y a des centaines de milliers d'emplois dans les entreprises qui ne sont pas pourvus parce que les demandeurs d'emploi ou les jeunes n'ont pas les compétences. Donc on a des entreprises qui n'arrivent pas à avancer et des jeunes et demandeurs d'emploi qui cherchent un emploi qui n'en trouvent pas, d'où les opérations d'ailleurs de « job skilll » comme vous l'avez cité juste avant et aujourd'hui, il y en a une d'ailleurs à Châlons-en-Champagne sur les métiers d'agent de logistique ou de sécurité aéroportuaire et donc les métiers où on cherche – on cherche dans la construction, on cherche dans l'agriculture, on cherche dans les aides aux personnes – ont …en fait, quand on regarde l'industrie, quasiment dans tous les secteurs, on cherche aujourd'hui des compétences donc mais souvent il manque l'information. C'est pour ça qu'on investit massivement dans la formation et puis aussi dans l'apprentissage et cet après-midi, je serai à Châlons dans un centre de formation d'apprentis qui, en même temps, est une école de la deuxième chance, c'est-à-dire qui permet à des jeunes qui ont un peu raté la marche de l'école et qui croient qu'ils ne sont pas capables alors que tout le monde a un potentiel, de leur redonner une deuxième chance et d'ailleurs, plusieurs d'entre eux vont derrière vers l'apprentissage qui est franchement la voie royale vers l'emploi parce que les résultats sont excellents à la sortie de l'apprentissage, donc c'est l'apprentissage qu'il faut faire grandir, les formations d'ailleurs, dans quelques jours avec le président de la région Grand Est, je signerai un accord pour les quatre ans qui viennent pour augmenter les formations massivement des demandeurs d'emploi et des jeunes dans la région.
ROBIN GRIMALDI
Alors oui on entend le message, il faut développer l'accès à la formation, s'adapter aux nouveaux métiers qui apparaissent mais pour quel salaire, Muriel PENICAUD ? On voit bien aujourd'hui que même ceux qui travaillent ont parfois du mal à terminer le mois sans être à découvert.
MURIEL PENICAUD
Alors, il y a toutes sortes … Les salaires, ça dépend des métiers. Donc il n'y a pas de réponse générale. Ce que je peux dire, c'est qu'il y a des métiers qui aujourd'hui recrutent en CDI et avec des salaires qui sont au-dessus du SMIC largement et qui ne trouvent pas non plus preneurs. Donc après, le sujet du pouvoir d'achat, c'est tout le monde évidemment, c'est toujours un sujet, qui n'est pas lié simplement aux salaires mais nous, on met le paquet sur augmenter les salaires. On a avec les réformes qu'on a faites cette année au niveau du SMIC, il est, avant la revalorisation du 1er janvier prochain, il est à 1 188 euros net par mois, c'est 35 euros par mois de plus qu'il y a un an. Donc ça c'est 1. La suppression des cotisations d'assurance chômage et maladie qui permet d'augmenter le pouvoir d'achat des salariés. Il y a la prime d'activité qui augmente. L'année prochaine, les exonérations de charges sur les heures supplémentaires et puis dans la loi PACTE, on va aussi on aider les entreprises à partager la valeur, c'est-à-dire à faire de l'intéressement et de la participation y compris dans les petites entreprises parce que c'est très fréquent dans les grandes mais dans les petites non et ça contribue aussi au pouvoir d'achat des salariés. Notre objectif, c'est vraiment que le travail paye mieux et paye plus.
ROBIN GRIMALDI
Muriel PENICAUD, vous parliez justement de l'augmentation du SMIC, c'est d'ailleurs une revendication des Gilets jaunes, ils parlent d'avoir un SMIC à 1 300 euros net. Est-ce que vous ça vous paraît réaliste ?
MURIEL PENICAUD
Alors, il faut bien comprendre que le SMIC, ce n'est pas quelqu'un qui décide comme ça tout seul, c'est un processus où on va consulter les partenaires sociaux. Il y a une étude d'abord, il y a une règle en France depuis des années qui est qu'on compense l'inflation, c'est-à-dire si les prix ont augmenté, donc là on dans quelques semaines, le 13 décembre, on aura le chiffre de l'inflation sur un an et en plus, on rajoute la moitié de l'augmentation du pouvoir d'achat des ouvriers et employés. Donc ce que je peux vous dire maintenant, que avant la fin du mois et même avant le 20 décembre, la revalorisation du SMIC au 1er janvier, nous pourrons alors lancer et qu'elle fera substantielle, oui elle sera significative cette année puisqu'il y a eu une augmentation des prix que tout le monde peut constater. Il y a une inflation. Donc du SMIC en tient compte. Le SMIC, c'est un million 600 000 personnes qui sont touchées, 11 millions indirectement puisque ça avec les classifications collective, ça a un impact sur d'autres formes …Donc, c'est un sujet important. Après, il faut bien dire que si on a déjà le SMIC le plus élevé d'Europe, si tout d'un coup quelqu'un disait « voilà, il faut changer complètement le SMIC, oui c'est autant d'emplois on voit un parce qu'il y a un moment donné, il faut aussi, il faut que pour que ça puisse marcher, l'emploi, il faut aussi que les entreprises ne mettent pas la clé sous la porte et un artisan, un commerçant, eh bien, il faut aussi qu'il puisse vendre et vivre et c'est pour ça qu'on a à la fois besoin de revaloriser le SMIC chaque année, ce qu'on fait, ce qui est important puisqu'il faut que le pouvoir d'achat suive puis en même temps avoir une vision plus large. Et c'est pour ça que ce n'est pas que le SMIC ; c'est aussi les négociations sur les salaires et une mesure par exemple qu'on vient de prendre qui va être très importante dans la loi Avenir pro, c'est, on met en place un rattrapage salarial pour toutes les femmes qui aujourd'hui sont payées en moyenne 9% de moins sur le même salaire. Ca va augmenter, je peux vous dire les moyens des ménages et des femmes et leur autonomie. Donc ça fait partie des mesures pour le pouvoir d'achat pour les salariés.
ROBIN GRIMALDI
Effectivement il y a beaucoup de points auxquels les Gilets jaunes s'intéressent et j'espère qu'ils ont également écouté votre message. Merci beaucoup Muriel PENICAUD d'avoir été avec nous ce matin sur France Bleu.
MURIEL PENICAUD
Merci beaucoup ! Bonne journée à tous !
ROBIN GRIMALDI
Merci beaucoup. Je rappelle que vous serez de cet après-midi en visite à Châlons au centre de formation des apprentis et puis à Bétheny, ce soir, pour inaugurer une extension du pôle de formation Pasteur.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 3 décembre 2018