Interview de M. Jean-Louis Debré, président du groupe parlementaire RPR à l'Assemblée nationale, à La Chaîne Info le 6 février 2002, sur le climat politique de la pré-campagne pour l'élection présidentielle.

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Média : La Chaîne Info - Télévision

Texte intégral

A. Hausser
S. Schuller a passé sa première nuit en prison. Hier, vous avez parlé de "torrent de boue" à propos de ses déclarations, mais hier soir, après vos déclarations, son avocat s'est efforcé de dédramatiser. Alors, après les menaces, que se passe-t-il ?
- "Je n'ai pas dramatisé. Si monsieur Schuller a commis des faits répréhensibles, il doit en répondre devant la justice. La seule question que je me pose, est de savoir si tout cela a été programmé ou est-ce une coïncidence ? Je prends quelques exemples : monsieur Schuller est en fuite..."
Depuis 1994, 1995...
- "En octobre 1997, il est localisé aux Bahamas, le ministère de l'Intérieur le sait, alors qu'il est l'objet d'un mandat d'arrêt, il ne sa passe rien."
Vous ne saviez pas où il était ?
- "Il est localisé, donc on sait où il est. Il s'en va à Saint-Domingue, et quelques jours après son arrivée à Saint-Domingue, les autorités françaises le localisent à nouveau. L'ambassade de France est au courant, le ministère de l'Intérieur est au courant, et on n'essaye pas de faire exécuter le mandat d'arrêt international."
Il n'y avait pas de convention à l'époque ?
- "Mais on peut essayer : vous avez bien vu qu'il est rentré sans mettre en jeu la convention qui a été depuis signée. Donc, on pouvait essayer de prendre contact avec lui, comme on l'a fait aujourd'hui. Bien. Donc, on sait où il est, on le laisse faire, des journalistes vont l'interpeller, et puis l'élection présidentielle se profile à l'horizon, on va cherche son fils qui se trouve dans une secte, on fait faire à son fils des déclarations qui sont pitoyables, on négocie avec lui son retour, alors que pendant cinq ans, on n'a pas cherché à faire exécuter le mandat d'arrêt. Et finalement, on le fait revenir. Tout ça, est-ce que vous pensez une seconde qu'il s'agit d'une coïncidence ? Je pense qu'il y a une programmation politique, parce qu'aujourd'hui, le Gouvernement de monsieur Jospin, qui est en campagne électorale, ne peut pas faire valoir son bilan politique - c'est un dépôt de bilan : dans le domaine de la sécurité, du chômage, huitième mois consécutif de hausse du chômage, et notamment du chômage des jeunes, l'insécurité explose -, il n'a pas la possibilité d'avoir un programme commun avec les autres formations de la majorité plurielle... Alors, comme il ne sait plus sur quel axe ..."
Vous pensez que le Gouvernement en est déjà là aujourd'hui ?
- "... ordonner sa campagne électorale, il rentre dans la calomnie et il essaye de faire des amalgames. Vous avez aujourd'hui l'affaire Schuller et vous aurez demain l'affaire Halphen, où vous aurez ce juge, dont on a dit qu'il avait démissionné et qui n'a pas démissionné, qui s'est mis en disponibilité, et qui va sortir un livre qui va être, encore une fois, un torrent de boue. Calomnier, calomnier, il en reste toujours quelque chose, même si après les faits..."
Vous dites qu'il n'y a pas de bilan, que le résultat du Gouvernement est catastrophique... Pourtant les sondages ne sont pas mauvais pour le Gouvernement, et ils sont même tellement bons qu'aujourd'hui, les sondages de pré-campagne, une bonne partie maintenant, donnent L. Jospin gagnant au deuxième tour.
- "Il y en a un qui le donne gagnant. Attendez..."
Il y en a un deuxième qui va arriver...
- "Attendez, il y a des sondages et d'autre part, le bilan. Or, le bilan de monsieur Jospin est mauvais, et tout le monde le reconnaît ! Vous avez le huitième mois consécutif où le chômage a augmenté, le nombre des demandeurs d'emploi a progressé considérablement, dans le domaine du chômage des jeunes, on a une progression, et dans l'insécurité, on le voit tous les jours. Par conséquent, il y a le bilan qui est mauvais. Or, comme il ne peut plus faire valoir son bilan, alors il utilise un certain nombre d'affaires, il les fait médiatiser. En réalité, il s'agit d'atteindre J. Chirac, de le décrédibiliser, pour pouvoir gagner."
D'une certaine manière, J. Chirac est atteint, puisqu'on le dit d'abord dans vos rangs, il y a une véritable inquiétude ; d'autre part, on dit que son entrée en campagne va tout de même s'accélérer ?
- "Naturellement, il est atteint, parce que, je viens de vous le dire, à force de déverser des insultes, des insinuations, de la boue, on finit toujours par semer le doute. Et c'est tout ce que cherchent les socialistes et monsieur Jospin. C'est une méthode qui est bien connue des trotskistes. Il s'agit de déstabiliser. Alors, il y a un autre problème qui est l'entrée en campagne de J. Chirac. D'abord, je voudrais vous faire remarquer que Giscard d'Estaing, le général De Gaulle et F. Mitterrand, qui ont tous les trois demandé le renouvellement de leur mandat présidentiel, ont déclaré leur campagne cinq semaines avant le premier tour. Par conséquent, rien ne presse. Ce qui est vrai, c'est qu'il y a, d'une part, la déclaration officielle d'entrée en campagne, d'autre part, le travail de ceux qui soutiennent J. Chirac. Je pense qu'il est ..."
Cela marche bien ?
- "... temps que nous rentrions tous en campagne. Laissons à J. Chirac le moment, l'opportunité de décider quand il va rentrer en campagne électorale. Il est le président de la République, le Président de tous les Français, et je pense qu'il doit rester le Président de tous les Français le plus longtemps possible, parce qu'il y a des échéances internationales, il y a des conférences internationales. Et l'image de la France est plus importante qu'une campagne électorale."
Vous dites : "Nous devons entrer en campagne" le plus rapidement possible, cela voudrait dire que ses troupes ne sont pas en pré-campagne. Vont-elles faire campagne sur le non-bilan du Gouvernement ou sur votre projet, qui n'existe pas encore ?
- "Nous allons faire campagne sur le non-bilan du Gouvernement, le bilan de J. Chirac. Et le moment venu..."
Les socialistes disent qu'il n'y en a pas...
- "Je peux vous donner quelque exemples : entre 1995 et 19997, l'insécurité a baissé en France et aujourd'hui, elle augmente, premier exemple. Deuxième exemple : J. Chirac a divisé par deux les déficits publics. Troisièmement, et je pourrais ajouter indéfiniment, il a baissé les taux d'intérêt, permettant les investissements et la consommation des ménages. Je pourrais multiplier les exemples, montrant ainsi que, J. Chirac et le gouvernement d'A. Juppé ont eu un bilan et un bilan positif. Alors, les socialistes essayent de calomnier, essayent de dire qu'il n'y a pas de bilan. Nous, nous ne rentrerons pas sur cette voie, je ne calomnierai pas monsieur Jospin, cela ne m'intéresse pas. Eux, n'ont pas de bilan, ils n'ont pas de projet, ils n'ont pas de propositions. Nous, nous avons un projet, des propositions, et un candidat qui rassemble les Français."
(Source :Premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 6 février 2002)