Texte intégral
J'ai beaucoup de plaisir à vous accueillir pour la première réunion - pour moi
- du comité de concertation avec le secteur privé depuis la formation du
gouvernement. J'ai déjà eu l'occasion de vous rencontrer, séparément, les uns
ou les autres, mais je considère que cette échéance est importante parce
qu'elle manifeste la continuité de la relation du monde des entreprises avec
les pouvoirs publics impliqués dans les politiques de coopération au
développement.
J'ai d'ailleurs tenu à ce que la date, fixée par mon prédécesseur, soit
respectée autant que faire se peut, afin de vous rencontrer au plus tôt et de
vous confirmer la place du secteur privé dans les politiques de développement
que nous entendons mener.
Au cours de cette brève introduction à nos débats, je voudrais aborder trois
sujets de réflexion :
- pourquoi la période rend-elle à nouveau intéressant le développement de
l'investissement privé chez nos partenaires ?
- comment traduire dans les politiques de coopération le lien entre réussite
des entreprises et développement ?
- quel rôle pour les entreprises françaises dans ces politiques ?
1 - Première question, pourquoi investir à nouveau dans les pays africains ?
A la base, un constat : l'Afrique, notamment francophone, va mieux et se
présente pour les années à venir comme une zone de croissance forte. Sur la
trentaine de pays d'Afrique sub-saharienne, 19 ont une perspective de
croissance à moyen terme supérieure à 4 %, et 10 une perspective supérieure à 5
%. Bien sûr, des disparités importantes subsistent, bien sûr, la sécurité
politique n'est pas garantie partout - nous le regrettons et faisons ce qui est
en notre pouvoir pour faire évoluer ces situations - mais le constat est là.
Du côté du secteur public, beaucoup de chemin a été parcouru et explique pour
partie cette évolution. Les remises et rééchelonnements de dettes, dans le
cadre des dispositifs successifs de Dakar ou La Baule, d'une part, les
résultats positifs de la dévaluation du franc CFA d'autre part, et les
évolutions du rôle et des modalités d'intervention des Etats dans le secteur
productif ont permis aux Etats une restauration progressive de leurs grands
équilibres. Cela se traduit par de nouvelles capacités à développer des projets
de développement, le plus souvent en partenariat avec des partenaires publics
extérieurs. C'est la voie dans laquelle nous nous engageons dès le budget 98.
Du côté du secteur privé, il est clair que les entreprises africaines n'ont
pas, à ce jour, de réelles possibilités propres d'investir massivement pour
profiter de l'évolution de la conjoncture. Et je ne crois pas que c'est aux
bailleurs de fonds, encore moins aux Etats du Nord, qu'il revient de
s'impliquer dans les entreprises du Sud mais à vous et à vos homologues des
pays développés. C'est le sens des réflexions que nous menons avec nos
partenaires et c'est ce dont je voudrais vous convaincre.
Avec la Banque mondiale, le FMI, ou les organismes de l'Union européenne, nous
poussons les Etats du Sud à se désengager des secteurs dans lesquels
l'initiative privée sera plus efficace. Et nous sommes là au coeur du sujet
technique de notre matinée, les privatisations, dans lesquelles les entreprises
françaises doivent trouver une place. Mais nous y reviendrons tout à l'heure.
Je crois que les entreprises françaises n'ont pas suffisamment conscience de
leurs avantages comparatifs dans cette zone et que, de ce fait, elles ne sont
pas suffisamment incitées à y réinvestir leurs bénéfices, pour celles qui y
sont déjà - nous en avons déjà parlé avec le président Prouteau - ou à s'y
engager, pour celles qui n'y sont pas aujourd'hui.
Pourtant, à perspectives de croissance équivalentes, il est bon de s'interroger
sur les risques comparés d'un investissement en Afrique et dans l'un des
dragons asiatiques.
2 - Deuxième sujet de réflexion : comment traduire dans nos politiques de
Coopération l'importance du secteur privé dans le développement économique ?
Dans la présentation des priorités du ministère, j'ai classé au premier rang
l'affirmation de l'Etat de droit et, immédiatement après, ce que j'ai appelé la
conquête de la souveraineté économique, c'est-à-dire l'affirmation de capacités
de production nationales et la disparition des dépendances économiques.
Assainir le cadre financier, juridique et institutionnel de l'investissement,
favoriser le développement de l'épargne domestique, substituer on mettre en
concurrence l'Etat hors de ses domaines de souveraineté, appuyer l'émergence
des structures professionnelles, voilà ce que mes services vont faire ou vont
aider à faire.
Je pense bien sûr aux projets qui visent d'abord à assurer la sécurité des
investissements, l'harmonisation du droit des affaires, la modernisation des
appareils judiciaires, notamment les tribunaux de commerce. Mais, je pense
aussi aux actions de renforcement des organisations professionnelles favorisant
le développement de l'économie, chambres de commerce ou des métiers,
organisations syndicales, organisations professionnelles des juristes ou des
comptables...
Mettre à la disposition des entreprises des instruments financiers spécialisés,
adaptés à des conditions d'exécution des projets en évolution, voilà ce que les
bailleurs de fonds internationaux et les institutions financières, en
particulier 1a CFD, font - M. Buchaillard pourra vous le confirmer - en
l'absence ou eu égard au mauvais état des systèmes bancaires et financiers
nationaux. J'ajoute qu'eux et nous travaillons dans le même temps à la remise
en état des systèmes bancaires et financiers de nos partenaires.
Mais, au-delà, c'est dans notre discours et dans le martèlement du sujet avec
nos interlocuteurs que je pense apporter un plus dans l'affirmation de cette
priorité.
Ainsi, je vous propose de réaffirmer le principe de la tenue d'une commission
mixte "secteur privé" en parallèle avec les commissions mixtes "Coopération" et
je vous donne un premier rendez-vous à Libreville, à la fin du mois de janvier.
De même, je ferai joindre au compte rendu de cette réunion un calendrier
prévisionnel des commissions mixtes programmées pour 1998, afin que nous en
tirions un bénéfice maximal.
3 - Troisième question enfin, quel rôle pour les entreprises françaises dans
les politiques de coopération ?
Je sais que vous êtes présents et actifs dans les pays avec lesquels nous avons
des partenariats. Je sais que vos organisations professionnelles y nouent des
contacts susceptibles de favoriser les opérations de leurs membres. C'est
d'ailleurs ce que fait M. Roussin aujourd'hui même en Angola, à la tête d'une
délégation patronale. Nous avons aussi ce comité auquel, je crois, vous êtes
attachés. Je vous proposerai d'ailleurs en fin de réunion de m'indiquer si sa
composition ou son mode de fonctionnement mérite d'être revu pour en faire un
outil plus efficace. Je considère toutefois que ce n'est pas assez.
Je vais vous faire un aveu : j'ai regretté la grande discrétion dont vous avez
fait preuve au cours des Assises de la solidarité internationale qui se sont
tenues à la Sorbonne fin octobre, à l'initiative de M. Pelletier. Je vous
rappelle que ces assises réunissaient l'ensemble des partenaires de la
Coopération "hors l'Etat" pour confronter leurs expériences et faire ressortir
leurs principales difficultés.
Pour Jacques Pelletier, comme pour moi, les politiques de coopération au
service du développement reposent nécessairement sur trois piliers, les
pouvoirs publics (Etat et collectivités territoriales), les entreprises, et les
organisations non gouvernementales. C'est dans la complémentarité des approches
et problématiques de ces trois groupes que se trouvent réunies les conditions
de la réussite de nos actions au profit des pays du Sud.
Nous avons le projet de réformer l'appareil français de Coopération. Je ne vous
en dirai pas grand chose aujourd'hui, dans la mesure où la concertation n'est
pas terminée et fera l'objet d'une communication prochaine.
Toutefois, je me sens autorisé à divulguer la création du "Haut Conseil de la
Coopération", qui aura vocation à organiser la concertation, éclairer les choix
politiques et en évaluer les conséquences. J'espère que vous voudrez y prendre
votre place, pour apporter votre analyse, ainsi que les questions et les
réponses de vos mandants, acteurs du développement dans nos pays partenaires.
*
* *
Je vais conclure en espérant vous avoir apporté des éléments de réponses aux
questions que tout acteur de l'économie peut se poser après un changement de
gouvernement : le développement économique par la réussite de l'entreprise
constitue l'une des bases de notre politique et vous êtes appelés à nous aider
à lui donner un contenu pratique, adapté aux exigences de l'actualité.
Je vous proposerai en fin de réunion un premier exercice pratique. Mme
Brisepierre, sénateur des Français à l'étranger, bien connue pour son intérêt
au monde de l'entreprise, rentre d'une mission au Congo-Brazzaville. Je lui ai
proposé de venir nous rendre compte de cette mission à l'heure. Je suis
persuadé que vous êtes avides de connaître mieux la situation et les
perspectives de la reconstruction et du redémarrage de l'activité économique.
Je vous propose qu'ensemble, nous examinions ensuite les conditions dans
lesquelles les entreprises françaises pourront participer au mieux à cette
étape du retour à la normale, dans un pays auquel nous tenons particulièrement
et auquel nous lient d'importants pans de nos histoires respectives.
Je vous remercie./.
(source http://www,diplomatie,gouv,fr, le 24 septembre 2001)
- du comité de concertation avec le secteur privé depuis la formation du
gouvernement. J'ai déjà eu l'occasion de vous rencontrer, séparément, les uns
ou les autres, mais je considère que cette échéance est importante parce
qu'elle manifeste la continuité de la relation du monde des entreprises avec
les pouvoirs publics impliqués dans les politiques de coopération au
développement.
J'ai d'ailleurs tenu à ce que la date, fixée par mon prédécesseur, soit
respectée autant que faire se peut, afin de vous rencontrer au plus tôt et de
vous confirmer la place du secteur privé dans les politiques de développement
que nous entendons mener.
Au cours de cette brève introduction à nos débats, je voudrais aborder trois
sujets de réflexion :
- pourquoi la période rend-elle à nouveau intéressant le développement de
l'investissement privé chez nos partenaires ?
- comment traduire dans les politiques de coopération le lien entre réussite
des entreprises et développement ?
- quel rôle pour les entreprises françaises dans ces politiques ?
1 - Première question, pourquoi investir à nouveau dans les pays africains ?
A la base, un constat : l'Afrique, notamment francophone, va mieux et se
présente pour les années à venir comme une zone de croissance forte. Sur la
trentaine de pays d'Afrique sub-saharienne, 19 ont une perspective de
croissance à moyen terme supérieure à 4 %, et 10 une perspective supérieure à 5
%. Bien sûr, des disparités importantes subsistent, bien sûr, la sécurité
politique n'est pas garantie partout - nous le regrettons et faisons ce qui est
en notre pouvoir pour faire évoluer ces situations - mais le constat est là.
Du côté du secteur public, beaucoup de chemin a été parcouru et explique pour
partie cette évolution. Les remises et rééchelonnements de dettes, dans le
cadre des dispositifs successifs de Dakar ou La Baule, d'une part, les
résultats positifs de la dévaluation du franc CFA d'autre part, et les
évolutions du rôle et des modalités d'intervention des Etats dans le secteur
productif ont permis aux Etats une restauration progressive de leurs grands
équilibres. Cela se traduit par de nouvelles capacités à développer des projets
de développement, le plus souvent en partenariat avec des partenaires publics
extérieurs. C'est la voie dans laquelle nous nous engageons dès le budget 98.
Du côté du secteur privé, il est clair que les entreprises africaines n'ont
pas, à ce jour, de réelles possibilités propres d'investir massivement pour
profiter de l'évolution de la conjoncture. Et je ne crois pas que c'est aux
bailleurs de fonds, encore moins aux Etats du Nord, qu'il revient de
s'impliquer dans les entreprises du Sud mais à vous et à vos homologues des
pays développés. C'est le sens des réflexions que nous menons avec nos
partenaires et c'est ce dont je voudrais vous convaincre.
Avec la Banque mondiale, le FMI, ou les organismes de l'Union européenne, nous
poussons les Etats du Sud à se désengager des secteurs dans lesquels
l'initiative privée sera plus efficace. Et nous sommes là au coeur du sujet
technique de notre matinée, les privatisations, dans lesquelles les entreprises
françaises doivent trouver une place. Mais nous y reviendrons tout à l'heure.
Je crois que les entreprises françaises n'ont pas suffisamment conscience de
leurs avantages comparatifs dans cette zone et que, de ce fait, elles ne sont
pas suffisamment incitées à y réinvestir leurs bénéfices, pour celles qui y
sont déjà - nous en avons déjà parlé avec le président Prouteau - ou à s'y
engager, pour celles qui n'y sont pas aujourd'hui.
Pourtant, à perspectives de croissance équivalentes, il est bon de s'interroger
sur les risques comparés d'un investissement en Afrique et dans l'un des
dragons asiatiques.
2 - Deuxième sujet de réflexion : comment traduire dans nos politiques de
Coopération l'importance du secteur privé dans le développement économique ?
Dans la présentation des priorités du ministère, j'ai classé au premier rang
l'affirmation de l'Etat de droit et, immédiatement après, ce que j'ai appelé la
conquête de la souveraineté économique, c'est-à-dire l'affirmation de capacités
de production nationales et la disparition des dépendances économiques.
Assainir le cadre financier, juridique et institutionnel de l'investissement,
favoriser le développement de l'épargne domestique, substituer on mettre en
concurrence l'Etat hors de ses domaines de souveraineté, appuyer l'émergence
des structures professionnelles, voilà ce que mes services vont faire ou vont
aider à faire.
Je pense bien sûr aux projets qui visent d'abord à assurer la sécurité des
investissements, l'harmonisation du droit des affaires, la modernisation des
appareils judiciaires, notamment les tribunaux de commerce. Mais, je pense
aussi aux actions de renforcement des organisations professionnelles favorisant
le développement de l'économie, chambres de commerce ou des métiers,
organisations syndicales, organisations professionnelles des juristes ou des
comptables...
Mettre à la disposition des entreprises des instruments financiers spécialisés,
adaptés à des conditions d'exécution des projets en évolution, voilà ce que les
bailleurs de fonds internationaux et les institutions financières, en
particulier 1a CFD, font - M. Buchaillard pourra vous le confirmer - en
l'absence ou eu égard au mauvais état des systèmes bancaires et financiers
nationaux. J'ajoute qu'eux et nous travaillons dans le même temps à la remise
en état des systèmes bancaires et financiers de nos partenaires.
Mais, au-delà, c'est dans notre discours et dans le martèlement du sujet avec
nos interlocuteurs que je pense apporter un plus dans l'affirmation de cette
priorité.
Ainsi, je vous propose de réaffirmer le principe de la tenue d'une commission
mixte "secteur privé" en parallèle avec les commissions mixtes "Coopération" et
je vous donne un premier rendez-vous à Libreville, à la fin du mois de janvier.
De même, je ferai joindre au compte rendu de cette réunion un calendrier
prévisionnel des commissions mixtes programmées pour 1998, afin que nous en
tirions un bénéfice maximal.
3 - Troisième question enfin, quel rôle pour les entreprises françaises dans
les politiques de coopération ?
Je sais que vous êtes présents et actifs dans les pays avec lesquels nous avons
des partenariats. Je sais que vos organisations professionnelles y nouent des
contacts susceptibles de favoriser les opérations de leurs membres. C'est
d'ailleurs ce que fait M. Roussin aujourd'hui même en Angola, à la tête d'une
délégation patronale. Nous avons aussi ce comité auquel, je crois, vous êtes
attachés. Je vous proposerai d'ailleurs en fin de réunion de m'indiquer si sa
composition ou son mode de fonctionnement mérite d'être revu pour en faire un
outil plus efficace. Je considère toutefois que ce n'est pas assez.
Je vais vous faire un aveu : j'ai regretté la grande discrétion dont vous avez
fait preuve au cours des Assises de la solidarité internationale qui se sont
tenues à la Sorbonne fin octobre, à l'initiative de M. Pelletier. Je vous
rappelle que ces assises réunissaient l'ensemble des partenaires de la
Coopération "hors l'Etat" pour confronter leurs expériences et faire ressortir
leurs principales difficultés.
Pour Jacques Pelletier, comme pour moi, les politiques de coopération au
service du développement reposent nécessairement sur trois piliers, les
pouvoirs publics (Etat et collectivités territoriales), les entreprises, et les
organisations non gouvernementales. C'est dans la complémentarité des approches
et problématiques de ces trois groupes que se trouvent réunies les conditions
de la réussite de nos actions au profit des pays du Sud.
Nous avons le projet de réformer l'appareil français de Coopération. Je ne vous
en dirai pas grand chose aujourd'hui, dans la mesure où la concertation n'est
pas terminée et fera l'objet d'une communication prochaine.
Toutefois, je me sens autorisé à divulguer la création du "Haut Conseil de la
Coopération", qui aura vocation à organiser la concertation, éclairer les choix
politiques et en évaluer les conséquences. J'espère que vous voudrez y prendre
votre place, pour apporter votre analyse, ainsi que les questions et les
réponses de vos mandants, acteurs du développement dans nos pays partenaires.
*
* *
Je vais conclure en espérant vous avoir apporté des éléments de réponses aux
questions que tout acteur de l'économie peut se poser après un changement de
gouvernement : le développement économique par la réussite de l'entreprise
constitue l'une des bases de notre politique et vous êtes appelés à nous aider
à lui donner un contenu pratique, adapté aux exigences de l'actualité.
Je vous proposerai en fin de réunion un premier exercice pratique. Mme
Brisepierre, sénateur des Français à l'étranger, bien connue pour son intérêt
au monde de l'entreprise, rentre d'une mission au Congo-Brazzaville. Je lui ai
proposé de venir nous rendre compte de cette mission à l'heure. Je suis
persuadé que vous êtes avides de connaître mieux la situation et les
perspectives de la reconstruction et du redémarrage de l'activité économique.
Je vous propose qu'ensemble, nous examinions ensuite les conditions dans
lesquelles les entreprises françaises pourront participer au mieux à cette
étape du retour à la normale, dans un pays auquel nous tenons particulièrement
et auquel nous lient d'importants pans de nos histoires respectives.
Je vous remercie./.
(source http://www,diplomatie,gouv,fr, le 24 septembre 2001)