Texte intégral
R. Sicard C'est aujourd'hui un jour important pour l'euro puisque pour la première fois, les Français peuvent s'en procurer. Vous avez toujours été contre l'euro. Vous faites-vous une raison aujourd'hui ?
- "Non, pas du tout. D'ailleurs, j'ai saisi hier soir le Conseil d'Etat, par une procédure qui existe depuis janvier 2001, mais qui n'a pas encore été utilisée, qui est celle du référé. Je demande donc, premièrement, la suspension de la distribution des pièces en euro et, deuxièmement, l'arrêt de la destruction des billets de banque en franc, dès lors qu'ils rentrent à la Banque de France. Tout ceci pour une raison simple : c'est que, juridiquement, l'euro n'existe pas."
C'est-à-dire ?
- "Ce qui a été décidé par les Français lors du référendum du Traité de Maastricht - comme par les autres européens d'ailleurs - c'est bien la création d'une monnaie unique. Mais le nom de cette monnaie unique, c'était l'écu. On a changé l'écu en euro, et l'organisme qui a procédé ce changement n'en avait pas la compétence."
Croyez-vous franchement que vous allez réussir à bloquer la distribution de l'euro dans toute l'Europe ?
- "En tous les cas, ce que je souhaite, c'est que ce problème soit tranché. C'est un problème de droit, un point de droit suffisamment important - je ne suis pas le seul à le soulever, un certain nombre de professeurs de droit l'ont fait. Mais il faut maintenant que ce soit tranché. C'est le rôle du Conseil d'Etat. Il est saisi et il doit se prononcer en urgence."
Mais sur le fond, quel que soit le nom, l'euro va se faire. Alors, est-ce que, maintenant, vous admettez que l'euro va exister ?
- "Je considère que, premièrement, l'euro est inutile - il n'apporte rien du tout -; deuxièmement, le retrait du franc consiste à enlever aux Français une part de leur souveraineté. Ce n'est pas quelque chose de théorique, c'est quelque chose de réel. Je veux dire que désormais, dès lors qu'il y a une banque centrale et une monnaie unique, les Français, sur le plan des décisions en matière budgétaire, n'ont plus de pouvoir."
Il y a aujourd'hui une actualité européenne chargée, puisqu'il y a un sommet européen à Laeken. Pensez-vous qu'on peut ou qu'on doit accepter ou pas les pays qui frappent à la porte de l'Europe ?
- "La question est simple : est-ce que les pays qui constituent à l'heure actuelle l'Union européenne vont continuer à faire preuve d'égoïsme et d'aveuglement ? Je crois qu'il faut que l'Europe accepte les pays qui souhaitent rejoindre l'Union européenne. Je le souhaite d'autant plus que ces pays qui souhaitent rejoindre l'Union européenne n'ont aucune envie de perdre leur souveraineté et leur indépendance. Ce qui veut dire que leur entrée transformera l'Union européenne en une confédération, ce que je souhaite. On nous objectera qu'on n'a pas suffisamment de moyens financiers pour faire face aux difficultés que cela représenterait. Je dis que ces moyens financiers, il faut les dégager."
L'Europe, aujourd'hui à quinze, fonctionne déjà difficilement. A vingt ou trente, qu'est-ce que ce sera ?
- "C'est à ceux qui ont la responsabilité de la conduite de l'Europe de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que cela fonctionne. Il suffirait de peu de choses. On n'a peut-être pas le temps ce matin, on aura l'occasion de le faire ultérieurement. Il suffirait de peu de choses pour que l'Europe fonctionne. Simplement, il faudrait d'abord que l'on sache ce qui doit continuer à relever de la responsabilité des Etats et des nations et ce qu'elles ne peuvent pas régler elles-mêmes. Et ensuite, il faudra mettre un peu d'ordre dans la mécanique européenne, qui est grippée, parce qu'on n'a jamais arbitré entre les trois formes possibles de développement et d'organisation de l'Europe : la confédération, c'est-à-dire les Etats-nations, la fédération, c'est-à-dire la disparition des Etats-nations et la zone de libre-échange. Alors, on a un peu de ces trois formes, et c'est la raison pour laquelle cela ne marche pas."
Parlons un petit peu de l'élection présidentielle. Vous avez été un des premiers à annoncer votre candidature et vous ne décollez pas dans les sondages. Vous êtes autour de 3 à 5 %...
- "Je ne décolle pas pour les sondages."
Comment vous expliquez cela ?
- "J'explique cela d'une manière très simple : pour le moment, dans l'esprit des gens, je ne suis pas candidat. D'ailleurs, je ne suis pas en campagne."
Vous avez déclaré votre candidature, il y a longtemps...
- "Je l'ai déclaré, mais aux yeux des gens, je ne l'ai pas déclaré. Tant que je ne le ferai pas d'une manière formelle, je ne serai pas considéré comme candidat. Je les rassure : je le ferai au mois de janvier. Ce sera bien suffisant."
On a quand même l'impression que c'est J.-P. Chevènement qui capte les voix souverainistes ?
- "Parce que pour le moment, il est le seul sur ce créneau. Mais j'ajouterai qu'on ne peut pas oublier non plus que Chevènement donne un peu dans l'illusion ou dans l'abus de confiance."
C'est-à-dire ?
- "Evidemment, on ne peut pas oublier qu'il a été pendant quinze ans membre des gouvernements socialistes. Alors, découvrir tout d'un coup la souveraineté nationale, c'est bien, mais..."
Il était contre Maastricht...
- "Oui, mais il était pour Amsterdam. J'étais contre. La souveraineté nationale ne peut pas se découper en tranches."
On parlait de vos scores faibles dans les sondages. Est-ce que le fait que vous ayez été mis en examen dans l'affaire Elf peut expliquer ce score selon vous ?
- "Non, pas du tout. Je crois que cela n'a pas beaucoup d'importance. Est-ce que le fait que J. Chirac ait été suspecté dans certaines affaires l'empêche d'avoir un score convenable ? Non. Je crois que les choses sont différentes. Premièrement, nous verrons bien ce qu'il restera de toutes ces accusations, car la Chambre d'accusation pourra examiner les dossiers. Pour ce qui me concerne, il n'y a strictement rien."
Vous parlez de J. Chirac : au deuxième tour de l'élection présidentielle, vous voteriez plutôt Chirac ou plutôt Jospin ?
- "Nous ne sommes pas encore au deuxième tour. Deuxièmement, personne n'est propriétaire de ses voix, les électeurs ne sont pas une sorte de bétail qu'on peut céder à tel ou tel. Ce sont les électeurs qui se déterminent. Soi-même, on peut toujours prendre la position que l'on souhaite, mais cela n'engage que soi, cela n'engage personne."
Vous, vous ne donnerez pas de consignes de vote ?
- "Non, non. Je crois que les électeurs sont assez grands pour se déterminer."
Autre actualité ce week-end : le RPR fête ses 25 ans. C'est un parti que vous avez contribué à constituer. Beaucoup pensent qu'aujourd'hui, il faudrait qu'il se fonde dans un grand parti de l'opposition. Votre avis ?
- "Je crois que serait une erreur. Cela fait encore partie des fausses bonnes idées. Je crois que dès lors qu'on créerait un parti unique de l'opposition, naturellement, il s'en créerait quelques autres à côté. Non. Je n'ai pas de conseil à donner au RPR - je n'y appartiens plus -, j'ai de la sympathie pour les militants que je connais bien, j'en ai beaucoup moins pour les dirigeants qui ont abandonné les principes sur lesquels ils avaient été élus."
C'est-à-dire ?
- "Ils ont été élus, justement, pour défendre la souveraineté nationale."
Et ils ne le font pas, d'après vous ?
- "C'est le moins qu'on puisse dire."
Un mot de la sécurité, souci numéro 1 des Français. L. Jospin est confronté tous les jours à ce problème. Est-ce que vous pensez qu'il prend les choses par le bon bout de ce point de vue ?
- "Non. On ne peut pas, on ne va pas régler les problèmes de la sécurité par un coup de baguette magique. Pendant cinq ans, les gouvernements socialistes n'ont rien fait. Ils n'ont pas procédé aux recrutements nécessaires. Et surtout..."
Là, ils l'ont fait...
- "Mais ils ne peuvent pas le faire ! Ce n'est pas parce qu'on dit aujourd'hui qu'on va recruter du monde qu'on aura le personnel ! Il faut deux ans pour former un policier ! Donc, à l'heure actuelle, ce que fait Jospin, ce sont des promesses électorales. Mais dans la réalité, il n'a rien fait. Il faudra qu'il s'en explique."
(Source http://Sig.premier-ministre.gouv.fr, le 14 décembre 2001)
- "Non, pas du tout. D'ailleurs, j'ai saisi hier soir le Conseil d'Etat, par une procédure qui existe depuis janvier 2001, mais qui n'a pas encore été utilisée, qui est celle du référé. Je demande donc, premièrement, la suspension de la distribution des pièces en euro et, deuxièmement, l'arrêt de la destruction des billets de banque en franc, dès lors qu'ils rentrent à la Banque de France. Tout ceci pour une raison simple : c'est que, juridiquement, l'euro n'existe pas."
C'est-à-dire ?
- "Ce qui a été décidé par les Français lors du référendum du Traité de Maastricht - comme par les autres européens d'ailleurs - c'est bien la création d'une monnaie unique. Mais le nom de cette monnaie unique, c'était l'écu. On a changé l'écu en euro, et l'organisme qui a procédé ce changement n'en avait pas la compétence."
Croyez-vous franchement que vous allez réussir à bloquer la distribution de l'euro dans toute l'Europe ?
- "En tous les cas, ce que je souhaite, c'est que ce problème soit tranché. C'est un problème de droit, un point de droit suffisamment important - je ne suis pas le seul à le soulever, un certain nombre de professeurs de droit l'ont fait. Mais il faut maintenant que ce soit tranché. C'est le rôle du Conseil d'Etat. Il est saisi et il doit se prononcer en urgence."
Mais sur le fond, quel que soit le nom, l'euro va se faire. Alors, est-ce que, maintenant, vous admettez que l'euro va exister ?
- "Je considère que, premièrement, l'euro est inutile - il n'apporte rien du tout -; deuxièmement, le retrait du franc consiste à enlever aux Français une part de leur souveraineté. Ce n'est pas quelque chose de théorique, c'est quelque chose de réel. Je veux dire que désormais, dès lors qu'il y a une banque centrale et une monnaie unique, les Français, sur le plan des décisions en matière budgétaire, n'ont plus de pouvoir."
Il y a aujourd'hui une actualité européenne chargée, puisqu'il y a un sommet européen à Laeken. Pensez-vous qu'on peut ou qu'on doit accepter ou pas les pays qui frappent à la porte de l'Europe ?
- "La question est simple : est-ce que les pays qui constituent à l'heure actuelle l'Union européenne vont continuer à faire preuve d'égoïsme et d'aveuglement ? Je crois qu'il faut que l'Europe accepte les pays qui souhaitent rejoindre l'Union européenne. Je le souhaite d'autant plus que ces pays qui souhaitent rejoindre l'Union européenne n'ont aucune envie de perdre leur souveraineté et leur indépendance. Ce qui veut dire que leur entrée transformera l'Union européenne en une confédération, ce que je souhaite. On nous objectera qu'on n'a pas suffisamment de moyens financiers pour faire face aux difficultés que cela représenterait. Je dis que ces moyens financiers, il faut les dégager."
L'Europe, aujourd'hui à quinze, fonctionne déjà difficilement. A vingt ou trente, qu'est-ce que ce sera ?
- "C'est à ceux qui ont la responsabilité de la conduite de l'Europe de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que cela fonctionne. Il suffirait de peu de choses. On n'a peut-être pas le temps ce matin, on aura l'occasion de le faire ultérieurement. Il suffirait de peu de choses pour que l'Europe fonctionne. Simplement, il faudrait d'abord que l'on sache ce qui doit continuer à relever de la responsabilité des Etats et des nations et ce qu'elles ne peuvent pas régler elles-mêmes. Et ensuite, il faudra mettre un peu d'ordre dans la mécanique européenne, qui est grippée, parce qu'on n'a jamais arbitré entre les trois formes possibles de développement et d'organisation de l'Europe : la confédération, c'est-à-dire les Etats-nations, la fédération, c'est-à-dire la disparition des Etats-nations et la zone de libre-échange. Alors, on a un peu de ces trois formes, et c'est la raison pour laquelle cela ne marche pas."
Parlons un petit peu de l'élection présidentielle. Vous avez été un des premiers à annoncer votre candidature et vous ne décollez pas dans les sondages. Vous êtes autour de 3 à 5 %...
- "Je ne décolle pas pour les sondages."
Comment vous expliquez cela ?
- "J'explique cela d'une manière très simple : pour le moment, dans l'esprit des gens, je ne suis pas candidat. D'ailleurs, je ne suis pas en campagne."
Vous avez déclaré votre candidature, il y a longtemps...
- "Je l'ai déclaré, mais aux yeux des gens, je ne l'ai pas déclaré. Tant que je ne le ferai pas d'une manière formelle, je ne serai pas considéré comme candidat. Je les rassure : je le ferai au mois de janvier. Ce sera bien suffisant."
On a quand même l'impression que c'est J.-P. Chevènement qui capte les voix souverainistes ?
- "Parce que pour le moment, il est le seul sur ce créneau. Mais j'ajouterai qu'on ne peut pas oublier non plus que Chevènement donne un peu dans l'illusion ou dans l'abus de confiance."
C'est-à-dire ?
- "Evidemment, on ne peut pas oublier qu'il a été pendant quinze ans membre des gouvernements socialistes. Alors, découvrir tout d'un coup la souveraineté nationale, c'est bien, mais..."
Il était contre Maastricht...
- "Oui, mais il était pour Amsterdam. J'étais contre. La souveraineté nationale ne peut pas se découper en tranches."
On parlait de vos scores faibles dans les sondages. Est-ce que le fait que vous ayez été mis en examen dans l'affaire Elf peut expliquer ce score selon vous ?
- "Non, pas du tout. Je crois que cela n'a pas beaucoup d'importance. Est-ce que le fait que J. Chirac ait été suspecté dans certaines affaires l'empêche d'avoir un score convenable ? Non. Je crois que les choses sont différentes. Premièrement, nous verrons bien ce qu'il restera de toutes ces accusations, car la Chambre d'accusation pourra examiner les dossiers. Pour ce qui me concerne, il n'y a strictement rien."
Vous parlez de J. Chirac : au deuxième tour de l'élection présidentielle, vous voteriez plutôt Chirac ou plutôt Jospin ?
- "Nous ne sommes pas encore au deuxième tour. Deuxièmement, personne n'est propriétaire de ses voix, les électeurs ne sont pas une sorte de bétail qu'on peut céder à tel ou tel. Ce sont les électeurs qui se déterminent. Soi-même, on peut toujours prendre la position que l'on souhaite, mais cela n'engage que soi, cela n'engage personne."
Vous, vous ne donnerez pas de consignes de vote ?
- "Non, non. Je crois que les électeurs sont assez grands pour se déterminer."
Autre actualité ce week-end : le RPR fête ses 25 ans. C'est un parti que vous avez contribué à constituer. Beaucoup pensent qu'aujourd'hui, il faudrait qu'il se fonde dans un grand parti de l'opposition. Votre avis ?
- "Je crois que serait une erreur. Cela fait encore partie des fausses bonnes idées. Je crois que dès lors qu'on créerait un parti unique de l'opposition, naturellement, il s'en créerait quelques autres à côté. Non. Je n'ai pas de conseil à donner au RPR - je n'y appartiens plus -, j'ai de la sympathie pour les militants que je connais bien, j'en ai beaucoup moins pour les dirigeants qui ont abandonné les principes sur lesquels ils avaient été élus."
C'est-à-dire ?
- "Ils ont été élus, justement, pour défendre la souveraineté nationale."
Et ils ne le font pas, d'après vous ?
- "C'est le moins qu'on puisse dire."
Un mot de la sécurité, souci numéro 1 des Français. L. Jospin est confronté tous les jours à ce problème. Est-ce que vous pensez qu'il prend les choses par le bon bout de ce point de vue ?
- "Non. On ne peut pas, on ne va pas régler les problèmes de la sécurité par un coup de baguette magique. Pendant cinq ans, les gouvernements socialistes n'ont rien fait. Ils n'ont pas procédé aux recrutements nécessaires. Et surtout..."
Là, ils l'ont fait...
- "Mais ils ne peuvent pas le faire ! Ce n'est pas parce qu'on dit aujourd'hui qu'on va recruter du monde qu'on aura le personnel ! Il faut deux ans pour former un policier ! Donc, à l'heure actuelle, ce que fait Jospin, ce sont des promesses électorales. Mais dans la réalité, il n'a rien fait. Il faudra qu'il s'en explique."
(Source http://Sig.premier-ministre.gouv.fr, le 14 décembre 2001)