Texte intégral
L'énergie est le fondement pour un Etat de sa stratégie d'indépendance. Elle est à la base de sa stratégie industrielle. Or les questions énergétiques sont revenues au cur de l'actualité.
La Commission européenne a lancé la création du marché intérieur de l'énergie. L'Union européenne et la Russie ont entamé un dialogue énergétique et prévoient un doublement des importations de gaz naturel russe par l'Europe. La mise en application du protocole de Kyoto pour réduire les émissions de gaz à effet de serre occupe une place centrale dans les négociations internationales. Les Etats-Unis connaissent une crise énergétique profonde qui a frappé cette année la Californie. Ce secteur est aujourd'hui en tête des priorités du nouveau gouvernement américain. Les actes terroristes du 11 septembre et leur répercussion en Afghanistan redonnent à la notion d'indépendance énergétique toute son acuité. Dans ce contexte, quelles doivent être les grandes lignes d'une politique énergétique pour la France ?
Partant de la réussite de sa politique énergétique depuis trente ans, la France doit faire de l'énergie la base stratégique de son développement intérieur et de son ouverture renforcée vers l'extérieur. Le mouvement de libération et d'ouverture des secteurs électriques et gaziers entrepris par la Commission européenne est une formidable opportunité à saisir. Les objectifs sont clairs : garantie de la sécurité d'approvisionnement ; diversification du bilan énergétique ; compétitivité de nos choix, même dans un contexte de prix peu élevés des énergies fossiles ; protection de l'environnement.
La consommation totale d'énergie est passée en France de 170 millions de tonnes équivalent pétrole à 215 millions en vingt ans (1980-2000). Pendant cette période, les consommations industrielle (58 millions de tonnes) et agricole (3,5 millions de tonnes) sont restées stables. L'augmentation est due aux consommations liées à l'habitat (de 71 millions de tonnes à 97 millions) et aux transports (de 37 millions de tonnes à 54 millions).
C'est dans ces deux secteurs que de nouvelles réponses énergétiques doivent être trouvées. Si le nucléaire reste la bonne réponse pour la consommation industrielle, il ne l'est pas toujours pour les besoins très divers de l'habitat et des transports. Le nucléaire est utile, le tout nucléaire serait absurde.
Nous devons faire un effort d'innovation pour imaginer des réponses décentralisées ou délocalisées. Dans le domaine des transports, tout doit être fait pour développer un véhicule à l'énergie propre (véhicules électriques, hybrides, piles à combustible, biocarburants...). Nous engagerons ainsi la politique qui nous mènera vers le non pétrole. Dans l'habitat, les solutions résident dans une diversification poussée (piles à combustible pour alimenter des groupes d'immeubles, énergies renouvelables...) mais aussi dans une maîtrise renforcée de la consommation.
Pour cela, notre politique de recherche doit être restructurée et redéfinie. Le dispositif français de recherche est éparpillé dans plus d'une cinquantaine d'organismes. Restructurons la recherche autour de 3 axes dont l'importance est majeure aujourd'hui : sciences du vivant, nouvelles technologies de l'information et de la communication, sciences de l'environnement. Une agence de programmes consacrée aux sciences de l'environnement pourrait ainsi fixer nos priorités stratégiques de développement d'un véhicule propre et l'appel à des énergies décentralisées et délocalisées pour le résidentiel.
Reste la consommation industrielle où la meilleure réponse est le nucléaire. Ses atouts sont connus. Ses coûts sont bas, résultat de la standardisation du parc existant et des effets d'échelle induits. Il n'émet pas de gaz à effet de serre. Il répond à nos objectifs d'indépendance énergétique. Sa faiblesse concerne le problème des déchets, non résolu à ce jour. Il nécessite un effort accru de recherche. Il interdit une politique d'abandons successifs (Superphénix hier, La Hague demain) qui nous priverait de solutions pour l'avenir. Dans ce cadre, tout débat sur le rôle du nucléaire devra répondre aux exigences de sécurité et de transparence.
Pour mener cette politique énergétique, EDF et GDF sont un atout majeur. Tout doit être fait pour assurer leur développement. Le mouvement de libéralisation et d'ouverture du secteur électrique et gazier entrepris par la Commission européenne fixe maintenant le cadre de leur évolution.
Le projet européen vise à interdire le monopole, à éclater l'industrie énergétique et à limiter les parts des marchés des entreprises dominantes dans leurs pays d'origine pour stimuler la concurrence. Le marché européen de l'énergie devra ainsi permettre de diminuer les prix de consommation finale, particulier ou entreprise. Les directives européennes incitent les opérateurs à trouver hors de leurs frontières les parts de marché qu'ils sont amenés à perdre dans leur propre camp. Ainsi EDF a pour objectif de doubler la part de ses revenus à l'étranger d'ici à 2005. GDF s'efforce de se positionner dans l'amont gazier (production).
Pour cela, il importe de trouver des partenaires et des capitaux. Les réactions européennes (Espagne, Italie) face à une série d'acquisitions d'actifs à l'étranger par EDF sans réciprocité ont montré l'impasse actuelle. Il faut permettre à nos entreprises de s'insérer dans le nouveau marché énergétique européen en gestation. Les décisions européennes l'imposent. Leurs stratégies industrielles le réclament. Pour ce faire, l'ouverture du capital est indispensable. Elle facilitera la réalisation de projets industriels, la formation de partenariats et l'apport de capitaux que l'Etat actionnaire unique n'est pas en mesure de fournir. Faut-il aller jusqu'à la privatisation ? Même si le débat est ouvert, je suis convaincu que l'énergie reste une industrie " stratégique ". Le parc nucléaire est là pour le confirmer. La politique énergétique nécessite que l'Etat garde une influence prépondérante par le biais du capital.
Pour la décennie qui vient, l'enjeu énergétique pour la France est majeur. Sachons l'aborder avec sérénité, sans a priori ni dogmatisme. En partant de ce qui est la plus belle réussite française de ces 30 dernières années, nous saurons ainsi répondre à l'enjeu environnemental du XXIe siècle.
(source http://www.rpr.org, le 17 décembre 2001)
La Commission européenne a lancé la création du marché intérieur de l'énergie. L'Union européenne et la Russie ont entamé un dialogue énergétique et prévoient un doublement des importations de gaz naturel russe par l'Europe. La mise en application du protocole de Kyoto pour réduire les émissions de gaz à effet de serre occupe une place centrale dans les négociations internationales. Les Etats-Unis connaissent une crise énergétique profonde qui a frappé cette année la Californie. Ce secteur est aujourd'hui en tête des priorités du nouveau gouvernement américain. Les actes terroristes du 11 septembre et leur répercussion en Afghanistan redonnent à la notion d'indépendance énergétique toute son acuité. Dans ce contexte, quelles doivent être les grandes lignes d'une politique énergétique pour la France ?
Partant de la réussite de sa politique énergétique depuis trente ans, la France doit faire de l'énergie la base stratégique de son développement intérieur et de son ouverture renforcée vers l'extérieur. Le mouvement de libération et d'ouverture des secteurs électriques et gaziers entrepris par la Commission européenne est une formidable opportunité à saisir. Les objectifs sont clairs : garantie de la sécurité d'approvisionnement ; diversification du bilan énergétique ; compétitivité de nos choix, même dans un contexte de prix peu élevés des énergies fossiles ; protection de l'environnement.
La consommation totale d'énergie est passée en France de 170 millions de tonnes équivalent pétrole à 215 millions en vingt ans (1980-2000). Pendant cette période, les consommations industrielle (58 millions de tonnes) et agricole (3,5 millions de tonnes) sont restées stables. L'augmentation est due aux consommations liées à l'habitat (de 71 millions de tonnes à 97 millions) et aux transports (de 37 millions de tonnes à 54 millions).
C'est dans ces deux secteurs que de nouvelles réponses énergétiques doivent être trouvées. Si le nucléaire reste la bonne réponse pour la consommation industrielle, il ne l'est pas toujours pour les besoins très divers de l'habitat et des transports. Le nucléaire est utile, le tout nucléaire serait absurde.
Nous devons faire un effort d'innovation pour imaginer des réponses décentralisées ou délocalisées. Dans le domaine des transports, tout doit être fait pour développer un véhicule à l'énergie propre (véhicules électriques, hybrides, piles à combustible, biocarburants...). Nous engagerons ainsi la politique qui nous mènera vers le non pétrole. Dans l'habitat, les solutions résident dans une diversification poussée (piles à combustible pour alimenter des groupes d'immeubles, énergies renouvelables...) mais aussi dans une maîtrise renforcée de la consommation.
Pour cela, notre politique de recherche doit être restructurée et redéfinie. Le dispositif français de recherche est éparpillé dans plus d'une cinquantaine d'organismes. Restructurons la recherche autour de 3 axes dont l'importance est majeure aujourd'hui : sciences du vivant, nouvelles technologies de l'information et de la communication, sciences de l'environnement. Une agence de programmes consacrée aux sciences de l'environnement pourrait ainsi fixer nos priorités stratégiques de développement d'un véhicule propre et l'appel à des énergies décentralisées et délocalisées pour le résidentiel.
Reste la consommation industrielle où la meilleure réponse est le nucléaire. Ses atouts sont connus. Ses coûts sont bas, résultat de la standardisation du parc existant et des effets d'échelle induits. Il n'émet pas de gaz à effet de serre. Il répond à nos objectifs d'indépendance énergétique. Sa faiblesse concerne le problème des déchets, non résolu à ce jour. Il nécessite un effort accru de recherche. Il interdit une politique d'abandons successifs (Superphénix hier, La Hague demain) qui nous priverait de solutions pour l'avenir. Dans ce cadre, tout débat sur le rôle du nucléaire devra répondre aux exigences de sécurité et de transparence.
Pour mener cette politique énergétique, EDF et GDF sont un atout majeur. Tout doit être fait pour assurer leur développement. Le mouvement de libéralisation et d'ouverture du secteur électrique et gazier entrepris par la Commission européenne fixe maintenant le cadre de leur évolution.
Le projet européen vise à interdire le monopole, à éclater l'industrie énergétique et à limiter les parts des marchés des entreprises dominantes dans leurs pays d'origine pour stimuler la concurrence. Le marché européen de l'énergie devra ainsi permettre de diminuer les prix de consommation finale, particulier ou entreprise. Les directives européennes incitent les opérateurs à trouver hors de leurs frontières les parts de marché qu'ils sont amenés à perdre dans leur propre camp. Ainsi EDF a pour objectif de doubler la part de ses revenus à l'étranger d'ici à 2005. GDF s'efforce de se positionner dans l'amont gazier (production).
Pour cela, il importe de trouver des partenaires et des capitaux. Les réactions européennes (Espagne, Italie) face à une série d'acquisitions d'actifs à l'étranger par EDF sans réciprocité ont montré l'impasse actuelle. Il faut permettre à nos entreprises de s'insérer dans le nouveau marché énergétique européen en gestation. Les décisions européennes l'imposent. Leurs stratégies industrielles le réclament. Pour ce faire, l'ouverture du capital est indispensable. Elle facilitera la réalisation de projets industriels, la formation de partenariats et l'apport de capitaux que l'Etat actionnaire unique n'est pas en mesure de fournir. Faut-il aller jusqu'à la privatisation ? Même si le débat est ouvert, je suis convaincu que l'énergie reste une industrie " stratégique ". Le parc nucléaire est là pour le confirmer. La politique énergétique nécessite que l'Etat garde une influence prépondérante par le biais du capital.
Pour la décennie qui vient, l'enjeu énergétique pour la France est majeur. Sachons l'aborder avec sérénité, sans a priori ni dogmatisme. En partant de ce qui est la plus belle réussite française de ces 30 dernières années, nous saurons ainsi répondre à l'enjeu environnemental du XXIe siècle.
(source http://www.rpr.org, le 17 décembre 2001)