Interviews de M. Yves Galland, président du Parti radical, à France 2 le 11 février 1993 et à TF1 le 25, sur la plate-forme de l'UPF et l'adhésion de Bernard Tapie au MRG.

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Média : France 2 - Site web TF1 - Le Monde - Télévision - TF1

Texte intégral

(Invité de G. Leclerc – France 2)

Q : N'y a-t-il pas dans ce programme un manque de clarté et d'ambition ?

Y. Galland- « C'est, en ce qui concerne ces deux points, inexact. L'ambition est clairement marquée : la lutte contre le chômage. Essayer de créer des emplois en relançant l'économie, en allégeant, les charges des entreprises, en étant imaginatifs. Il y a la clarté parce qu'il y a un certain nombre de propositions. La gauche dit qu'elle a présenté son programme depuis des mois. De deux choses l'une : ou leurs propositions sont une illusion irréalisable, alors je comprends. Ou alors, c'est une provocation irresponsable. Cela fait des mois que les socialistes ont un programme de gouvernement et ils le réservent pour les élections, ils ne l'ont pas appliqué dans l'action gouvernementale ! Franchement, il faut qu'on soit sérieux et je trouve que c'est inadmissible ! ».

Q : Se contenter des baisses de charges et des petits boulots, ce n'est pas un peu court ?

- « Ce n'est pas que cela. Ce ne sont pas des petits boulots. Des travaux de service, tout le monde en parle et nous allons essayer de le réaliser. La baisse des charges est indispensable. C'est une autre politique. La politique actuelle n'a pas donné de résultats. Nous allons faire en sorte que les entreprises soient compétitives, qu'on restaure la confiance dans ce pays. C'est par là qu'on pourra relancer l'économie, la croissance et l'emploi. Tout est lié. »

Q : Moins d'impôts, moins de déficit, plus de dépenses : une nouvelle version du « demain, on rase gratis » ?

- « Non ! Une partie de nos charges et des charges formidables sur la Sécurité sociale viennent des chômeurs. Si vous baissez le nombre de chômeurs, vous aurez moins de charges. Le programme a cette obsession, cette ambition, se concentre sur ce problème avec une autre politique. J'espère qu'elle donnera des résultats. Quand vous avez une autre politique, si jamais la croissance augmente, ce sont des recettes pour l'Etat. C'est comme ça qu'on réduit les déficits et le Premier ministre est bien placé pour le savoir. Les Français vont choisir. »

Q : Qu'y a-t-il de radical dans cette plate-forme ?

- « La dimension solidaire du libéralisme. Vous avez une partie sur l'éducation, l'égalité des chances, qui la montre clairement. Le libéralisme moderne est mis en oeuvre, il a une volonté de faire en sorte que les plus défavorisés soient dans la société, non pas exclus, mais réintégrés et réinsérés. Ca fait partie des convictions radicales. »

Q : Après la venue de Tapie, les adhésions affluent au MRG. N'auriez-vous pas besoin aussi d'un Tapie ?

- « On a toujours besoin de gens qui soient des locomotives, mais pas du tout de B. Tapie. Le Parti radical, c'est d'abord le refus des extrêmes. En 1971, j'ai fait mon choix : le Parti radical a éclaté, je refusais l'alliance avec les communistes et le programme commun. B. Tapie a été incapable de se présenter dans une circonscription de Marseille où G. Hermier était candidat du PC parce qu'il y a une alliance socialiste-communiste. C'est de l'humanisme, le Parti radical, de la tolérance, le sens de l'Etat, le refus de l'affairisme. Tout cela, B. Tapie ne l'a pas du tout. Le MRG est en train de •changer de sigle : ce sera le MPG, un mouvement populiste de gauche. Parfait ! Nous avons, nous, une autre ambition au Parti radical. Et je crois que nous aurons des gens de qualité et connus qui vont nous rejoindre et qui ont cette volonté de faire que le Parti radical soit un grand parti qui manque à ce pays. Parce que ces vertus, c'est quelque chose qui manque à ce pays. »

Q : Le RPR ne vous fait pas de cadeaux, huit radicaux vont affronter le RPR en primaires, dont vous ?

- « Il faut prendre tout cela avec philosophie. Notre parti a toujours oeuvré pour l'union dans, l'opposition. Il se trouve que le RPR a considéré qu'il y avait un certain nombre de primaires et il faut le prendre tel quel et de façon constructive. Dans ma primaire, ça m'a libéré l'esprit, d'aller au contact et de dire à nos concitoyens : je ne parle que du fond, des projets. Ce qui nous menace, c'est une alternance par défaut, le fait que l'on vote contre les autres et pas pour nous. Je fais des réunions chez l'habitant, c'est formidable. Je vais sur les marchés et j'explique. Quelles sont nos propositions, qu'il n'y a pas de déterminisme du chômage, qu'on peut en sortir, qu'il y a une autre politique. Je crois que c'est ce langage qu'attendent nos concitoyens. »

Q : Faut-il intégrer les écologistes ?

- « Je souhaite que oui, mais il faut qu'ils évoluent. On ne peut faire l'alliance du Nord-Pas-de-Calais. Il faut des écologistes pragmatiques. L'environnement, oui. Mais il y a aussi l'économie. »

Q : Qui au poste de Premier ministre ?

- « Je n'ai pas de favori. Nous allons attendre le résultat des élections pour savoir quelle est la formation de l'opposition qui aura le plus de députés. C'est la seule liberté de choix que  doit avoir le président de la République, et ensuite nous devons avoir une cohabitation qui ne ressemble en aucun cas à celle de 1986. »


(Invité de B. Cortès TF1 - 07H00)

Q : Le big bang effleure la droite. V. Giscard d'Estaing prône un renouveau. Pensez-vous qu'une recomposition de la droite est nécessaire ?

Y. Galland - « Je pense qu'il faut une réorganisation de la droite, et je souhaite qu'après les législatives, il y ait des états généraux de réorganisation de l'opposition. Deux problèmes : comment assurer l'union pour les présidentielles et la rénovation du pays pour l'an 2000 ? Cette réflexion à long terme est nécessaire. »

Q : Les radicaux pourraient se sentir visés par l'appel de M. Rocard ?

- « Ca ne nous tente pas d'aller ravauder un PS qui est déconsidéré par toutes les promesses qui ont été faites, il n'y avait qu'à entendre le président de la République et voir la réalité d'aujourd'hui. C'est une espèce de ratatouille politicienne sur lequel on voit Lalonde qui avait dit non et hésite, Waechter qui dit non. On retrouve un système politicien alors qu'il y avait une apparence un peu pure. Ce qui nous intéresse, c'est de trouver non des « combinazione » politiques, mais un autre système politique dans notre pays. Nous sommes opposés au manichéisme politique. Il va falloir trouver une unité nationale sur les grandes réformes du pays. Ce qui n'empêchera pas la clarté des choix. Nous ne voulons pas la même société politique, économique, le même projet social que les socialistes. »

Q : Le MRG vient de voir arriver B. Tapie. Craignez-vous cette concurrence ?

- « Non. Il y a maintenant un mouvement populiste de gauche avec l'arrivée de B. Tapie qui n'incarne pas du tout les vertus radicales. C'est l'humanisme, la tolérance, le sens de l'Etat, le refus de l'affairisme. Je ne crois pas que l'on puisse retrouver où que ce soit B. Tapie et le radicalisme. Je n'ai jamais été partisan de la confusion des genres. Nous sommes clairement dans l'opposition, nous sommes pour une dimension solidaire du libéralisme, pour réduire les inégalités grâce aux richesses que l'on peut créer par un libéralisme rénové, non par une société d'économie mixte ou une alliance avec des crypto-communistes. Il faut que les gens sachent qui fait quoi et dans quelle alliance nous sommes. Nous avons toujours été dans l'opposition. Les recompositions politiques ne se font qu'au travers des présidentielles dans ce pays. »

Q : Dans votre circonscription, il y a un candidat RPR face à vous. L'union est toujours un combat ?

- « Oui, mais c'est aussi une finalité et un but. J'ai une primaire : il faut le prendre avec beaucoup de philosophie et de détermination. La conclusion que j'en tire, c'est que l'enjeu n'est pas de savoir si on aura 400 ou 450 députés, mais d'essayer de convaincre les électeurs que ce n'est pas une alternance par défaut. Il faut qu'ils votent pour l'opposition, qu'ils soient convaincus que nous pourrons inverser la courbe du chômage, recréer des emplois, une nouvelle société, qu'ils soient fiers de ce pays et confiants dans le projet que nous leur présentons. Si nous n'avons pas une alternance d'espérance, ce sera difficile de gouverner et d'inverser les facteurs. Le combat est là. »

Q : Pensez-vous que le choc de l'alternance sera suffisant pour donner confiance aux investisseurs ?

- « Certainement que le choc n'est pas suffisant : il faut une politique derrière. On voit que la récession se confirme en janvier, c'est dû aux difficultés de nos exportations, de nos investissements. Trois éléments : la conjoncture internationale, nous n'allons pas la changer ; une autre politique intérieure de relance et de confiance, nous pouvons la faire. Le projet de l'opposition a indiqué une tendance en termes de voix, et ceci conditionne un état psychologique du pays. Nous sommes dans un état de sinistrose qu'il faut inverser. Il faut retrouver la confiance et avec une nouvelle politique, ce sont dès éléments qui peuvent nous permettre de relancer l'économie. »

Q : Pensez-vous que l'Europe soit une mauvaise chose pour la pêche ?

- « Je pense que l'Europe, qui est très impopulaire aujourd'hui, est indispensable. Nous devons lutter contre les critiques excessives qui sont faites. S'il n'y avait pas l'Europe, la situation des Français serait pire. Pour la pêche, nous sommes pris entre deux considérations : il faut défendre les intérêts français, je le ferai à Bruxelles et à Strasbourg, faire en sorte que nos pêcheurs ne soient pas sinistrés, que nous n'ayons pas une concurrence sauvage de la Russie. Mais il faut aussi savoir que le commerce international, ça existe. C'est entre ces deux considérations qu'il faut trouver une juste voie et que la Commission doit prendre un certain nombre de mesures. »