Texte intégral
R. Dumas : Je vois surtout dans ces accords la possibilité d'un déblocage dans toute la région du Proche-Orient. Mon expérience m'a montré que aucun pays arabe n'était en mesure de traiter avec Israël aussi longtemps que le problème palestinien ne recevait pas de solution. Aujourd'hui, un début de solution est en vue. Cela va débloquer la situation. Je pense en particulier aux relations que l'État d'Israël va maintenant pouvoir établir avec certains pays arabes. Il n'est pas interdit de penser qu’un accord pourrait intervenir assez rapidement sur le Golan avec la Syrie. Je le vois assez bien pour la fin de l'année. Ajoutez à cela que ce début de règlement permet d'envisager aussi des perspectives de développement économique, par conséquent toute la région en bénéficiera. C'est le pari que la France avait fait depuis très longtemps. Je suis heureux de pouvoir souligner, une fois encore, le rôle qui a été joué par mon pays et moi-même, lorsque je n'ai cessé de répéter qu'il fallait traiter avec Y. Arafat. Aujourd'hui, les faits nous donnent raison.
France Inter : Cela veut-il dire que le processus est engagé depuis longtemps et que vous étiez au courant des contacts qui pouvaient être établis entre Israël et l'OLP ?
R. Dumas : Non seulement j'ai été mis au courant, mais j'ai pu participer à ces contacts utiles. À plusieurs reprises, à l'occasion de son passage à Paris, mon ami S. Pérès m'avait indiqué quelles étaient ses intentions et son orientation d'esprit. Il m'avait demandé d'intervenir là où cela pouvait être utile. À la même époque, J. Baker m'avait demandé à plusieurs reprises d'intervenir auprès d'Arafat lui-même, notamment lors de l'ouverture de la conférence de Madrid. Sa dernière demande en ce sens avait eu lieu lors d'une rencontre internationale à Londres. Ce que je fis volontiers. La France a participé, dans la mesure de ses moyens, à ce règlement de paix. Je suis heureux d'avoir encouragé au rapprochement avec le président de l'OLP, qui a fait preuve à la fois de beaucoup de ténacité, de sens diplomatique et qui voit ses efforts récompensés.
10 septembre 1993
Europe 1
R. Dumas : Il y a toujours eu, de mon temps, des contacts directs. Nous fêtons un anniversaire aujourd'hui : ce 10 septembre, jour pour jour, l'année dernière, S. Pérès était à Paris, il effectuait sa première sortie officielle après le retour des travaillistes au pouvoir et il était venu demander l'aide de la France.
J.-P. Elkabbach : Il y avait toujours un médiateur ou il y a eu des contacts directs ?
R. Dumas : Il y a eu des contacts directs avec les deux parties. C'est à l'occasion de ce voyage que S. PÉRÈS avait désigné son homme de confiance, celui qui a signé précisément à Paris. Nous avions établi, pour plus de discrétion, un contact à Genève, et par personne interposée nous avions un lien direct et nous l'informions de la position des Palestiniens, avec l'accord de ceux-ci. Du côté palestinien, ils recherchaient ce contact direct avec les Israéliens, ça a toujours été dans l'idée d'Arafat. Mais les esprits n'étaient pas mûrs.