Texte intégral
RTL : Est-ce que vous vous attendiez à cette baisse du revenu agricole en France Quelle est votre réaction ?
C. Jacob : La réaction, c'est qu'on voit une baisse très importante sur les oléagineux, une baisse de 40 %. En revanche, c'est vrai que pour les céréales on signale une augmentation de 20 %, encore faut-il décortiquer les chiffres. Mais la différence fondamentale qu'il y a entre ces deux productions, c'est que dans le secteur des oléagineux, la réforme de la PAC est en place depuis un an. En revanche, elle ne l'est pas sur les céréales. Et même s'il y a eu beaucoup de disparités dans la récolte céréalière, globalement en volume sur la France, cette récolte a augmenté l'année dernière.
RTL : Mais quand les chiffres sont bons comme en 89 et 90, vous contestez les chiffres, alors cette fois ?
C. Jacob : Non je crois qu'on les conteste toujours sur la méthode de calcul. C'est-à-dire qu'on ne prend pas suffisamment en compte tout ce qui ressort de la décapitalisation. Et encore, on parle de pourcentage mais il faut parler de chiffres réels. Le revenu moyen des agriculteurs est d'environ 100 000 francs. Mais ce n'est pas un revenu directement disponible. Lorsqu'on parle de revenu moyen de 100 000 francs, c'est une partie de ce revenu pour vivre et pour faire vivre sa famille, mais aussi toute une partie qui est consacrée à investir et à réinvestir. Donc, comme pour nos auditeurs qui sont salariés aujourd'hui, ce n'est pas 100 000 francs qui tombent directement dans la poche des agriculteurs, l'autre élément très important qui ressort de cette analyse c'est la baisse énorme des consommations intermédiaires. Elles représentent 154 000 milliards de francs par an, c'est-à-dire l'équivalent de 300 000 emplois, autant que l'armement ou l'automobile. On s'aperçoit que dans ce secteur-là, il y a une véritable décapitalisation, ou un arrêt de l'investissement. L'agriculture c'est quand même un emploi sur cinq, et tous ces emplois sont des emplois menacés par une baisse de revenu sur le secteur agricole.
RTL : Les oléagineux, les exploitants et producteurs en avaient peut-être un peu profité dans les années précédentes ?
C. Jacob : Non, je crois que quand on a un revenu moyen autour de 100 000 francs, et une partie consacrée au réinvestissement, on ne peut pas parler de profit. Je crois même que ce serait une insulte aux agriculteurs de parler en termes de profit pour des chiffres comme cela.
RTL : Et la viticulture n'était pas un peu trop montée, n'y avait-il pas eu un dérapage ?
C. Jacob : Non, sur le secteur viticole, on peut les prendre les uns après les autres. Il faut à chaque fois replacer en termes de montant. Et le terme de montant, c'est une moyenne qui oscille entre 100 000 et 120 000 francs par agriculteurs et par an. Alors avec des disparités énormes. C'est vrai parce que certaines productions sont sujettes à des fluctuations de marché importantes. C'est le cas de la viticulture, c'est le cas des productions légumières ou d'un certain nombre d'autres productions. Mais on a quand même une situation globale de désinvestissement très lourd et de décapitalisation et en fait un revenu agricole qui est au même niveau, qui est même en dessous de ce qu'il était en 1973. Est-ce qu'il y a une autre catégorie socio-professionnelle qui a un pouvoir d'achat qui est en dessous de 1973 ?