Texte intégral
A. Krauss : On a l'impression qu'on en revient finalement et tout bêtement à ce qu'était le Bac, autrefois, avec les trois options ?
F. Bayrou : Rien n'est nouveau sous le soleil. Surtout, ce qui est très intéressant, c'est que désormais, on s'y repérera beaucoup mieux. Il y avait une multitude de séries : 27 ou 29 baccalauréats différents je crois. Là, on va avoir trois grandes séries : une série scientifique, c'est très important, parce que nous avons besoin de scientifiques de très haut niveau. La France vient encore de remporter deux médailles File, l'équivalent du Prix Nobel pour les Maths. Il y aura un baccalauréat scientifique qu'on appellera le baccalauréat S. Et puis, il y aura un baccalauréat littéraire, le baccalauréat L, et puis il y aura un baccalauréat économique et social, le baccalauréat ES. Les élèves sont très familiers de cela, parce qu'ils sont déjà, en Première, engagés dans ce genre de choix. Ces baccalauréats seront équilibrés, ce qui est important et intéressant.
A. Krauss : Il y aura les autres séries, technologiques. Elles restent ce qu'elles étaient ?
F. Bayrou : Absolument.
A. Krauss : Est-ce qu'on ne va pas recréer une filière scientifique qui aura le même poids que l'actuelle série C ?
F. Bayrou : Mon objectif n'était pas du tout de supprimer ce qu'était l'ancienne filière C. Encore une fois, nous avons besoin de scientifiques de très haut niveau. Mon objectif était seulement d'équilibrer ces bacs de manière qu'un élève qui est bon en lettres, n'aille pas faire une Terminale scientifique simplement parce qu'il considérait que c'est le meilleur baccalauréat possible et que c'est la voie royale qui va désormais ouvrir toutes les portes. Parce qu'ainsi, nous gâcherions chaque année, des dizaines de milliers de jeunes qui ne faisaient un bac scientifique que parce qu'ils considéraient que c'était mieux, alors que leur principale vocation était de faire Lettres ou Économique et Social. Donc, c'est parfaitement clair : nous gardons un baccalauréat scientifique de très haut niveau. Pour les élèves qui ont la vocation de faire des maths, il est très bien qu'ils en fassent et ils prendront baccalauréat scientifique option maths. Pour les autres, ils auront désormais l'assurance d'avoir des baccalauréats qui équilibreront par le nombre de portes qu'ils ouvrent, l'ancien baccalauréat C, puisqu'on pourra désormais faire médecine à partir des études littéraires, par exemple, ou bien préparer des grandes écoles à partir du bac Économique et social.
A. Krauss : Avez-vous la certitude qu'un lauréat de bac littéraire pourra vraiment frapper à la porte avec les mêmes chances que les autres séries, à une Fac de médecine ?
F. Bayrou : Il aura les mêmes chances, puisque nous avons fait en sorte que le concours à la fin de la première année de médecine ait augmenté considérablement des coefficients de sciences humaines. Des coefficients qui tiennent à la culture générale, aux français et aux sciences humaines. Il aura les mêmes chances, des chances très renforcées à partir du moment où il aura fait un bac L. Naturellement, les scientifiques pourront évidemment continuer à entreprendre des études médicales.
A. Krauss : Les candidats à l'épreuve de français auront désormais le choix entre deux types d'épreuves ?
F. Bayrou : Ils auront, comme aujourd'hui, le choix entre trois types d'épreuves, mais une de ces épreuves est précisée, moins aléatoire. Ce que nous avons voulu, c'est sortir de cette impression que les jeunes lycéens ont souvent, selon laquelle les épreuves littéraires sont une loterie. Nous avons voulu les rendre plus sûres, et par exemple, les jeunes qui auraient le sentiment d'avoir manqué leur épreuve de français à la fin de la Première, pourront la repasser au début de l'année de Terminale. Ça sera le cas, dès cette année. Les élèves qui, en juin, auront eu une mauvaise note ou une note qui ne les satisfait pas à leur épreuve de français, pourront repasser cette épreuve de français, dans le courant du premier trimestre. C'est une nouveauté très importante. Ça aussi, ça va dans le sens d'une sécurité plus grande. Il fallait que le baccalauréat soit mieux équilibré et plus sûr. C'est la définition des épreuves que nous avons mise en place.
A. Krauss : Ne va-t-on pas vers un alourdissement de l'organisation du bac, puisqu'il y aura beaucoup plus d'épreuves écrites ?
F. Bayrou : Il n'y aura pas beaucoup plus, mais un peu plus d'épreuves, pour que le bac soit moins aléatoire, soit plus sûr. Chaque année, les familles, les parents d'élèves ou les élèves expriment eux-mêmes le sentiment que le baccalauréat, c'est trop souvent les notes auxquelles on ne pouvait pas s'attendre qu'on obtient. Ce que nous avons cherché à faire, c'est à mettre en place un baccalauréat plus sûr, dans lequel les élèves puissent faire la preuve des qualités qui sont les leurs, et du niveau qui est le leur.