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Un plaisir chasse l’autre. Le Mondial s’est terminé dans la joie de la victoire, l’allégresse d’une communauté française qui veut se retrouver et la rénovation de l’image de la France à l’étranger. Alors sans attendre les torpeurs du mois d’août et le rituel Conseil des ministres de la mi-septembre, Dominique Strauss-Kahn révèle les grands traits de sa Loi de finances 1999.
Sous le signe revendiqué des trois E (équité, emploi, environnement) auxquels doit s’ajouter celui implicite de l’euro, il s’agirait donc, selon Christian Sautter, d’un "budget de gauche" et selon Jean-Claude Gayssot, simplement d’un budget qui n’est pas de droite. De gauche ou pas, peu nous chaut. C’est avec l’œil des salariés à l’aune des préoccupations des personnels d’encadrement et, plus largement, de celles des professionnels qui assurent le développement de notre pays, que nous analysons les mesures fiscales avancées et que nous tenterons d’infléchir celles qui nous apparaissent dangereuses.
Car, disons-le d’entrée, si des signes forts sont envoyés en direction des entreprises (allègement de la taxe professionnelle) et des entrepreneurs (donation, transmission), si quelques mesures marginales concernant la TVA (taux réduit sur l’abonnement EDF). Sont censées aller en direction des ménages, rien n’est fait pour ceux qui ne peuvent aller vivre sous des ciels helvète, monégasque ou exotique, pour ceux qui ne peuvent "délocaliser leurs actifs", pour reprendre l’expression (ou la menace ?) favorite de nos PDG.
Rien n’est fait en faveur de ceux qui n’ont pour vivre que leurs compétences, leur motivation, leur capacité de travail et la volonté de progresser, ceux qui bien sûr n’emmènent pas leurs maigres économies surtaxées à la semelle de leurs soutiers. Au contraire, des risques nouveaux s’avèrent pour eux à travers la remise en cause des avantages de l’assurance-vie et de la réforme de la taxe d’habitation.
Même si, pour débuter, la suppression de l’exonération des droits de succession peut nous paraître fixée à des niveaux élevés, attention à la suite et notamment aux capitaux-décès liés à nos régimes collectifs de prévoyance. Y toucher, alors qu’il s’agit d’une protection familiale en cas de malheur, est un vrai casus belli.
Quant à la taxe d’habitation, si le Gouvernement semble renoncer à suivre ce bon M. Hervé dans sa proposition de la transformer en deuxième impôt sur le revenu, "la réforme massive" des valeurs cadastrales peut conduire exactement au même résultat.
Le Gouvernement fait preuve aussi d’incohérence quand il pare de toutes les vertus la réforme consistant à supprimer la part salariale de la taxe professionnelle, dans le même temps où il laisse traîner en longueur la réforme des cotisations sociales et que certains rapporteurs missionnés par lui envisagent d’étendre les exonérations sur les bas salaires et d’alourdir les prélèvements sur ceux des personnels qualifiés.
Oui, nous sommes bien les oubliés de Dominique Strauss-Kahn, comme malheureusement de tant d’autres avant lui.
L’été sera donc pour nous combatif. Et si l’on ajoute aux questions de fiscalité, de financement de la protection sociale, de retraite d’assurance-maladie, les négociations sur les 35 heures, la réforme de la formation professionnelle et nos Assises de la modernité, nul doute que la rentrée sera, pour sa part, non moins active et mobilisatrice. En attendant, de très bonnes vacances à toutes et à tous.