Interview de Mme Michelle Demessine, secrétaire d'État au tourisme, dans "L'Humanité" du 27 août 1998, à propos de l'organisation des états généraux du tourisme social.

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Média : L'Humanité

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L'humanité : Vous envisagez la tenue d'états généraux du tourisme social début 1999. A qui s'adresseront-ils ? Quel en sera l'objectif ?

Michelle Demessine : Il s'agira de mener un grand débat avec l'ensemble des acteurs du tourisme social et associatif, avec tous ceux qui ont œuvré pour la conquête du droit aux vacances - comités d'entreprise, associations, collectivités locales et territoriales... - afin de redéfinir ensemble ce que sera le tourisme pour tous dans le futur. Compte tenu bien évidemment des évolutions du tourisme social aujourd'hui, qui avait été abandonné ces dernières années par les pouvoirs publics, qui a aussi beaucoup souffert de la disparition des entreprises.
A partir des années quatre-vingt, la crise économique provoqua un désengagement des pouvoirs publics et des organismes sociaux. Le départ en vacances ne fut plus regardé forcément comme une priorité, d'autres nécessités plus criantes prenant le pas. Les sources de financement se sont du coup fortement réduites. Parallèlement, les forces sociales, concentrées, polarisées même sur les graves questions du chômage, de la précarité, n'ont pu apporter toute l'attention et la mobilisation nécessaires au droit aux vacances pour tous.
Devant cette situation, les acteurs du tourisme social ont été poussés à une profonde mutation, qui a généré notamment, c'est indéniable, des effets positifs. Je pense en particulier aux avancées du point de vue de la professionnalisation, de la formation des cadres et des personnels, de la modernisation des outils de gestion et des équipements.

L'humanité : A bien vous comprendre, il conviendrait donc de le relancer ?

Michelle Demessine : Il reste important de rappeler ce qui constitue les valeurs fondamentales du tourisme social, qui est au cœur du dispositif de mon ministère et de mes propres préoccupations et de mon action pour faire du droit aux vacances pour tous un objectif concret de la politique sociale du Gouvernement. Le tourisme social a toujours eu pour ambition de permettre au plus grand nombre de personnes d'accéder au droit fondamental aux vacances et aux loisirs. Il a contribué, également, au travers de l'action du monde militant et associatif, à faciliter l'insertion des plus défavorisés en leur permettant de vivre les vacances, devenant en ce sens un instrument essentiel de la solidarité nationale.
Enfin, le tourisme social remplit un rôle économique majeur et a contribué, en de nombreux lieux, à l'aménagement du territoire. L'ensemble du tourisme à vocation sociale, associations, établissements des collectivités locales et territoriales, constitue une force que les chiffres situent bien: plus de 800 000 lits, c'est-à-dire sensiblement le quart des disponibilités du pays, 66 000 salariés - dont tout de même 55 000 saisonniers - et plus de huit millions d'usagers accueillis en 1997.
Pour ma part, je considère que le tourisme social a encore un bel avenir et qu'il peut être un des moteurs de la créativité et du développement du tourisme au sens large, au sens complet du mot. Je proposerai à l'ensemble de ses acteurs de lui construire une nouvelle identité, fondée sur le partenariat, afin qu'il puisse à nouveau développer tout son potentiel d'innovation.